ROXANNE KINGSLEY ► holland roden

« Roxanne va prendre tes cours de danse, Roxanne va faire ses devoirs, Roxanne va mettre sa jolie robe rose, Roxanne va être la meilleure de sa classe, Roxanne épate la galerie au piano, Roxanne doit impressionner les invités de ses parents, Roxanne ne doit pas faire de bêtises, Roxanne va se marier à quelqu'un de bien, Roxanne a le nez dans ses livres. Roxanne ne sait pas s'amuser. T'en as pas marre? » Avachie sur un lit, Anna, jolie blonde, regarde sa meilleure amie, la dénommée Roxanne. Qui est devenue rouge pivoine. Elle s'assoit sur son bureau et tripote ses cheveux pour se donner une contenance. Elle hausse la épaules avec une désinvolture surjouée. « Je suis habituée, Anna. C'est comme ça depuis toujours et puis moi, ça me dérange pas. » « Hm. Oui. Tu me rappelles comment on est devenue amies toi et moi? Là tout de suite je vois pas bien ce qui nous rapproche... » Roxanne prend la première chose qui lui tombe sous la main – un paquet de clopes en l'occurrence – et le jette au visage de sa meilleure amie en tirant la langue. Comportement purement enfantin. « Non sérieux Roxy, t'as été en boîte combien de fois? Et puis merde, tu vois pas que t'attires tous les mecs? J'me sens minable à côté de toi. » La belle rousse éclate de rire. Le fait que ce soit Anna qui dise ça est vraiment un paradoxe impressionnant. C'est le genre de personne qui aura toujours le monde à ses pieds, quoi qu'elle fasse. Roxanne ne s'est jamais sentie spécialement attirante, et ne cherche pas à l'être pour autant. « T'es bête, Ann. On bouge? »

Les Kingsley sont connus à Cambridge comme à Londres. Famille influente, bourgeoise, apparenté à la couronne, ils sont on ne peut plus respectables et font plus attention à leur image que personne. Ils ont toujours poussé Roxanne à faire de même, à être une enfant, puis une adolescente modèle. C'est son existence toute entière, les bonnes notes, les photos en famille dans les magasines et les galas. Elle a toujours vécu ainsi. Comme tous les enfants, Roxanne voulait impressionner ses parents, être géniale pour qu'ils l'aiment encore plus. Et si sa mère lui a toujours montré une tendre affection, son père la considère plus comme un trophée dont on est fier. Un trophée que l'on veut exposer au monde entier. Elle n'en souffre pas, c'est comme ça depuis toujours, avoir un père aimant et présent, elle ne sait pas ce que c'est. Elle s'est toujours contentée de sa maman et de ses oncles, ainsi que d'un voisin qui a peu à peu pris la place du frère qu'elle n'a jamais eu. Mais un papa, définitivement, elle ne connaît pas.

« Tu nous joues un petit air de piano, ma chérie? » Roxanne fait un sourire aux adultes, qui boivent des coupes d'un champagne millésimé, et s'installe au piano. « Oui, papa. » Elle s'échauffe, avant de laisser ses doigts courir sur le clavier. Elle fredonne, elle joue du classique, des morceaux de sa composition, des chansons actuelles, elle peut tout faire. Elle passe d'un genre à l'autre sans ciller. L'instant est parfait. Ses parents et le couple d'amis qui est avec eux applaudissent. Il ne restera de cet instant qu'une photographie d'une petite fille ayant garder sa blondeur d'enfance, habillée d'une robe bleue. Les émotions ont disparues, l'enfant est belle mais il manque les sentiments qui flottaient à travers la pièce à ce moment là. Ce n'est qu'une photo sans âme de plus dans un album photo, retouchée, en très haute qualité, parce que les Kingsley sont importants. Les Kingsley n'ont pas le droit à l'erreur.

Roxanne a toujours eu un côté attirant sans jamais s'en rendre compte. Elle est l'innocence et la pureté même. Mais ses longs cheveux d'un roux presque blond qui tombent en cascade dans son dos, son corps parfaitement mis en valeur par ses vêtements, son rire cristallin sont des armes redoutables. Elle est amoureuse de l'idée d'aimer. On lui court après, certains se damneraient pour une nuit avec elle, mais personne n'a encore eu cette chance. Pas même son fiancé. On lui a trop seriné durant son enfance qu'il fallait se réserver à la bonne personne, et ne pas jouer les débauchées. Elle a été en couple plusieurs fois avant, mais certaines morales restent imprimées au fer rouge dans l'esprit. Hugo, son futur mari, est d'ailleurs très fier de sa Roxanne.

Roxanne c'est la fermeté en douceur, l'ambition de la réussite mélangé à la modestie. C'est la volonté d'aimer sans perdre sa lucidité. C'est tout et son contraire. On l'aime ou on la déteste mais il n'y a pas de juste milieu. Elle est entière, elle a une personnalité, des valeurs. Une famille tenace. Mais elle n'est pas le genre à se laisser manipuler. Roxanne, elle est différente.