You got it bad • Clého

PLEASE FORGIVE ME

Elle avait saisit ma main, ne relevant pas mes paroles. Sa façon de me tenir n'était ni douce, ni désirée, elle semblait plutôt forcée. On bousculait des gens, trop de gens pour m'excuser auprès de tous. Arrivés devant la porte de la Mather House, à l'extérieur, elle lâchait ma main comme si c'était la main du diable. Peut-être que finalement, ce n'était pas si faux que ça. J'avais été le pire des enfoirés avec elle, mais à l'heure d'aujourd'hui, je voulais vraiment rattraper tout ça, tout les dommages causés par mon infidélité. Putain de Roméo et Juliette. L'air se voulait frais, mon corps lui brûlait de l'intérieur. Le simple fait de la voir me réchauffait, mais cela ne semblait pas être le cas pour elle. "T'as rien dit, sur ma dernière tirade... J'veux savoir ce que tu penses, de tout ça..." Je la regardais fixement, mais sans une seule expression sur le visage. Mes yeux étaient désormais secs, je n'avais aucun sourire, contrairement à mes habitudes. J'avais envie de la serrer dans mes bras, mais je savais qu'elle allait me repousser, que j'étais bien loin d'être la personne qu'elle voulait prendre dans les siens, la dernière personne qu'elle s'attendait à voir ce soir, ou un autre soir. Elle me détestait, cela se lisait dans ses yeux, mais moi j'étais là, à attendre la moindre attention de sa part. Une gifle, qu'elle me prenne la main, qu'elle m'éclate la gueule, qu'elle m'embrasse. N'importe quoi, du moment que j'avais quelque chose d'elle. Je me sentais mal à l'aise, je sortais alors mon paquet de cigarettes de mon caleçon. "Tu veux fumer ?" dis-je, tel un automate.

PLEASE FORGIVE ME

Tu vois qu'elle a froid, mais tu n'as rien sur toi pour la réchauffer mis à part tes bras qu'elle refusera. Elle est presque nue, avec des talons aiguilles assez hauts, tu ne l'avais jamais vue ainsi. Les temps ont bien changés depuis ton départ de Cambridge. Puis elle te claque toute la vérité en pleine gueule, et t'es là, baissant les yeux comme un pauvre con qui ne sait pas vraiment quoi faire pour lui prouver que tu as vraiment changé, que t'es plus le même qu'avant, que tu veux tout faire pour la reconquérir. Tu essayes tant bien que mal de garder ta fierté, de ne pas pleurer à nouveau, tu soupires simplement, avant de reprendre la parole pour lui répondre. "Si c'était pas pendant cette soirée, ça aurait été à une autre, ou un autre jour, mais tôt ou tard tu m'aurais croisé au détour d'un couloir de la fac. Je suis revenu, définitivement, pour toi. Et si je suis parti, c'était pour fuir mes erreurs, ma souffrance, mais rien n'est jamais parti, même à l'autre bout du pays je pensais à toi, à la connerie que j'ai faite. Et tu sais très bien pourquoi j'ai accepté le divorce, parce que toi, tu le voulais. Moi je voulais vraiment recoller les morceaux et les pots cassés, ton coeur brisé en mille morceaux par ma faute. Frappe moi, fais moi bien mal, je le mérite. Mais je voudrais vraiment qu'on puisse tirer un trait sur le passé et tout recommencer." Je lui tendais alors le paquet de cigarettes et le briquet pour qu'elle allume sa clope, avant de faire de même et ranger le paquet là où il se trouvait. Je cherchais un endroit où m'asseoir, ne trouvant que les marches de la Mather House. Je me frottais le visage avant de baisser la tête, comme un enfant perdu.

PLEASE FORGIVE ME

Tu cherches son regard mais elle le fuit comme la peste, elle préfère regarder autour d'elle plutôt que de te regarder. Tu la comprends malgré tout, tu es cet homme qui a brisé son coeur, sa vie peut-être, mais c'est plus fort que toi, tu veux la récupérer, rien que pour toi. Sa façon de te dire définitivement te glace le sang, elle ne veut plus te voir. Tu commences à avoir froid. Quelle connerie d'être venu en boxer chez les mathers. "Ouais, définitivement." Tu es blasé, blasé qu'elle réagisse de cette façon, toi qui était si heureux de la revoir. Tu lui as ouvert ton coeur et elle te jette comme une genre de bombe à l'intérieur, tu sens que tu vas exploser. "Regarde moi dans les yeux et redis moi ça, sinon je ne te croirais pas. Regarde moi et dis moi que je te manque pas, que t'es bien mieux sans moi mais avec tous les mecs avec qui tu baises depuis que j'suis plus là. Dis moi tout ça." Tu es au bord de la crise de nerfs, tu frottes tes mains l'une contre l'autre pour ne pas t'énerver plus, ou même pleurer. Tu es entre la colère et la tristesse, tu ne sais pas lequel des deux prendra le dessus, et au fond de toi tu espères que ça sera la tristesse, tu ne veux pas qu'elle te voit énervé. Le coup de vent te fait frissonner, les poils de tes bras se dressent et tu fermes les yeux, tu sens la tristesse gravir les échelons de ton être. "J'ai pas envie de t'oublier, j'ai pas envie d'oublier ce qu'on a vécu et les projets qu'on avait. J'veux toujours être le père de tes enfants, rentrer chez nous le soir et te serrer fort dans mes bras. C'est tout ce que je veux, être avec toi, parce que je ne partirais pas, je ferais plus les mêmes erreurs..." Tu réouvres les yeux, tes yeux pourtant si beaux et clairs d'habitudes qui sont humides et rouges. Tu lui prends doucement la main et la regarde droit dans les yeux. "Je t'aime, Clého. Depuis le jour où je t'ai vue dans cette salle de cours, j'étais fou de toi, et rien n'a changé. Je veux que tu reviennes..."

PLEASE FORGIVE ME

Tu ne lui manques visiblement pas, sa voix reste neutre alors qu'elle te dit cela. Cette simple phrase fait l'effet d'une bombe dans ton coeur que tu pensais déjà meurtri, ton coeur que tu ne sens presque plus battre désormais. Le souffle coupé, tu ne sais pas quoi ajouter, tu n'as même plus la force d'ouvrir la bouche pour demander une explication. Tu en veux une pourtant, tu veux savoir comment elle a pu t'oublier aussi vite alors que toi tu te morfonds dans des poèmes aussi sombres que la nuit d'un orage avant une tempête. Tu n'as pas touché une fille depuis votre divorce, tu ne veux personne d'autre et tu ne te sens pas capable de refaire ta vie, pas tant que les choses seront claires entre vous, ou bien qu'elle revienne. Même si d'autres hommes l'ont touchée après toi, tu t'en fous, tu veux son odeur, ses lèvres, ses bras, son corps à elle, en entier. Tu essayes encore de rester digne, et tu te décides à finalement briser le silence après la bombe qu'elle t'a lancé en pleine gueule. "Alors pour toi c'était qu'une histoire de jeunesse qu'une aventure passagère a brisé, tout en brisant nos vies ? C'était juste une histoire comme ça, impossible à recoller ?" Tu baisses les yeux et garde la bouche entre-ouverte, comme si tu avais autre chose à dire, mais rien ne voulait sortir. Tu préférais te murer dans le silence pour la première fois de ta vie, toi qui a toujours quelque chose à dire pour toucher l'endroit où ça fait mal. Tu sens sa main se retirer rapidement de la tienne, une nouvelle fois, tu as l'impression qu'elle cache bien plus de choses qu'elle n'en dit. Et si finalement elle cherchait à te blesser pour te montrer ce qu'elle a ressenti au moment où elle t'a trouvé au lit avec cette fille ? Si c'était réellement ça, tu le comprenais très bien désormais, bien plus qu'avant. Pourquoi tu viens bousculer son petit équilibre de fausse fille facile ? "Parce que je peux pas t'oublier ! Parce que j'veux que tu comprennes que t'es la seule femme qui a su me faire vivre l'amour, que t'es la femme de ma vie et que je veux te retrouver, je veux retrouver la Clého que j'ai toujours connu..." Tu pleures comme un con, t'as l'impression d'être dans un film dramatique dont tu es l'acteur principal. Tu la vois se tourner et essuyer son visage d'un revers de la main, tu lui fais du mal à être là et tu le sais. Mais tu ne partiras pas, pas sans elle, pas sans retrouver son coeur et son amour, ainsi que sa confiance.

Bien sur que non, t’as envie de lui crier. Il le sait bien que non. Il a pas juste été une passade, sinon, pourquoi avec chaque homme avec qui tu es, tu le compares à ce beau brun –maintenant devenu blond- ? Cet homme, assis à tes cotés à juste été l’homme de ta vie, ton seul vrai amour, celui qui fait, même après t’avoir trahi, battre ton cœur à cent à l’heure. Mais tu te gardes de lui dire qu’il n’a pas été juste une passade, rien que pour le laisser penser le contraire, que ça lui fasse mal. T’es pas fière de ce que tu fais, mais qui t’en blâmerais, sérieusement ? « Je le comprends Jäyan, c’est bon, maintenant que je l’ai compris, qu’est-ce que tu fais encore là ? » Tu mens. Tu te mens, tu lui mens. Tu comprends vraiment ce qu’il te dit ? Oui, mais est-ce que tu le crois, ça c’est une autre histoire. Ses larmes commencent à te faire penser qu’il dit vrai. Mais t’as peur, t’es terrifiée, qu’une fois encore, il te brise le cœur. C’est la seule personne qui en est capable, réellement et totalement capable. Les autres peuvent te le fêler, lui, il peut le briser, le détruire, te détruire. Il est le seul à avoir autant de pouvoir sur toi. « La Clého que t’as toujours connu, elle est partie, elle est plus là, et ce depuis que je t’ai trouvé au lit, avec une de mes amies. » C’était bas, mesquin, mais vrai ; depuis ce moment-là, t’es plus la même. Mais n’est-ce pas normal ? Depuis ce moment-là, tu ne veux plus le voir, ne plus croiser son regard océan. Et pourtant, tu y es accro ; en ce moment-même, tu as du mal à ne pas le regarder, à ne pas te fondre dans tes bras, à ne pas le toucher, lui sourire, pire, l’embrasser. Une part de toi en meurt d’envie, une autre, en est totalement rebutée. Tu sais que si tu l’embrasses, c’est fini pour toi, tu ne pourras plus l’envoyer sur les roses, tu retourneras avec lui, tu seras à nouveau heureuse, mais avec cette peur ancrée dans ton cœur, quand te poignardera-il derrière ton dos ? Une autre larme roule le long de ta joue, et tu la sèches sans aucune discrétion. « Tu as pas trouvé une nouvelle copine ? Je suis étonnée je dois avouer. » Tu reposes tes yeux verts sur lui, et secoues la tête. « Désolée, j’ai pas le droit de te dire ça… » Sans t’en rendre compte, tu cherches sa main de la tienne, et poses ta tête contre son épaule, fermant les yeux quelques secondes.

A cet instant même, t'as envie de redevenir brun, comme avant, lui prouver que tu es toujours ce garçon qu'elle a connu. Ce malheureux garçon qui l'a changée sans vraiment le vouloir. Une erreur, la plus grosse de ta vie, tu le sais. Tu as perdu la seule femme qui pouvait te rendre heureux, et tu t'en mordra les doigts toute ta putain de vie, même si t'arrives à la récupérer, parce que tu sais qu'elle n'aura plus autant confiance en toi, même si tu as changé. A ses mots, tu baisses la tête et tu passes ta main dans tes cheveux, tu soupires. “Tu sais très bien que je partirais pas, pas maintenant. Pas sans toi.” Tu sèches tes larmes que tu ne peux contrôler tant tu les as retenues. Tu ne veux plus la faire souffrir, ne plus lui mentir. Tu veux seulement retrouver celle que tu as tuée intérieurement par tes manquements. Une fois encore, ses mots t'achèvent un peu plus. Tu sens ton coeur ralentir une fois la bombe lancée. Tu ne peux pas admettre l'avoir perdue à jamais, elle, qui représente toute ta vie. “Je sais, je t'ai brisée, et les excuses ne feront rien à cela, mais je veux te prouver que j'suis plus ce mec là, j'veux que tu me laisses une nouvelle chance, une chance de te prouver que c'est vrai...” Tu la regardes à nouveau, même si elle fuit ton regard encore et toujours, tu ne peux t'empêcher de chercher son regard d'un vert qui t'a transcendé. Personne n'a le même regard qu'elle, même si tu n'as fréquenté personne depuis votre divorce. Tu sais qu'elle lutte pour ne pas te regarder, mais tu n'essayes pas de la forcer, tu ne veux pas avoir recours à la force pour qu'elle te regarde à nouveau, elle le fera d'elle même si elle le souhaite. Mais tu la connais. Elle t'envoie un nouveau pique, tu gardes tes yeux rivés sur elle. “Non...” Tu la vois te regarder et secouer la tête en s'excusant. Tu esquisses un sourire, très léger. Tu sens sa main venir vers la tienne, tu l'attrapes doucement, alors que sa tête rejoint ton épaule. De ta main libre, tu caresses son visage, posant ton front contre sa tête, fermant les yeux et tu lui murmures “Je t'aime, mon amour...”