Eliot ∞ I never thought we'd meet that way

Aujourd'hui, c'était journée de détente. Je n'ai pas grand chose en tête et je n'ai pas envie de visiter quoique ce soir. Je vais donc me mater une petite série. Je commence par le dernier épisode de "Fear The Walking Dead", poursuivant par le dernier de "Game Of Thrones". Ouais, sauf que là, mon ventre s'est mis à crier famine. Bon, j'ai toujours faim, mais là, je n'ai rien mangé depuis ce matin. En plus de ça, c'est bientôt l'heure du goûter donc pas d'excuse. Sortant de ma chambre, je décide l'aller jusqu'au Vientiane Center Lao à pied. C'est un centre commercial où on peut y trouver à manger, mais aussi pleins de boutiques en tout genre. Une bonne marche avant de manger, c'est pas mal. Le retour, je ne garantis pas que je le fasse aussi à pied par contre. Entrant dans le centre commercial, je fais quelques magasins mais je ne trouve rien de bien intéressant. Je marche donc jusqu'à un petit café, un genre de Starbuck pour pouvoir manger et boire un petit coup au passage. Faisant la queue, je regarde sur les tableaux fixés aux mûrs ce qu'il y a de bon. Bordel tout me donne faim, beaucoup trop faim, tellement que je vais finir par devenir énorme. Mon tour étant enfin arrivé, je commande un petit thé avec un muffin double chocolat. Enfin, de ce que je vois ça ressemble à du chocolat. Je paye, prend ma commande puis observe la salle, essayant de repérer une place de libre. Au fond, près de la baie vitrée, je vois qu'une table n'a pas l'air d'être prise. Je m'y dirige, passant juste à côté d'un jeune homme. Fronçant les sourcils, je vois qu'il écrit sur...du papier...woah. Je détourne mon regard histoire de ne pas être mal poli, puis dépose mon plateau sur ma table.

Une énième lettre de Piper. Eliot ne les comptait plus, au vue du nombre d'années qui avaient défilés depuis leur première lettre manuscrite. Depuis, c'était devenue une habitude, un rituel. Une lettre tous les mois. De l'un et de l'autre. Dix ans durant. Voilà où pouvait mener une simple correspondance scolaire datant de leur primaire. Ils ne s'étaient jamais vus, ne s'étaient jamais rencontré et ne connaissaient simplement que leur prénom, mais étaient tout aussi proches que deux amis qui se fréquentaient chaque jour. C'était ça qu'il appréciait dans cette amitié hors du commun, Eliot. A chaque lettre, ils se tenaient informés de leur vie, de leur avancé, sans réellement jamais dévoiler de détails sur les lieux, les personnes fréquentées autour d'eux, sur leur physique. Rien ne laissait vraiment envisager qu'ils continueraient leurs lettres encore aujourd'hui, à l'ère des sms et e-mails. Mais pourtant, Eliot venait de recevoir sa lettre du mois et c'était avec un plaisir hors du commun qu'il s'était installé à un café du centre commercial du coin pour lui répondre. Café devant lui, stylo en main, feuille blanche étalée sur la table, il venait à peine de commencer le "Chère Piper" qu'une demoiselle passa devant lui, le regarda fixement, les sourcils froncés avant de détourner le regard. Eliot l'avait remarqué, ce qui l'avait fait froncé les sourcils à son tour. « Hum, salut ? Un problème ? » l'interpella-t-il, sans une once de méchanceté, juste intrigué, mettant en pause sa réponse manuscrite.

Dans ce petit café du centre commercial, je m'achète de quoi prendre mon goûter. Oui, à 23 ans, je suis encore une gamine folle de son quatre heure. M'avançant vers une table libre, je remarque un jeune homme qui... Semble écrire une lettre. Woah, de nos jours, je pensais qu'Eliot et moi, étions les seuls à encore en écrire. Je suis intriguée par ce qu'il fait, ce qu'il écrit et visiblement, vu ses mots, je ne suis pas très discrète. "Hmm non, pardon, je suis surprise de vous voir écrire...une lettre...", dis-je en souriant légèrement, m'asseyant en évitant de regarder le jeune homme. Ouais, mais je suis trop curieuse et parfois trop intrusive. Je remarque qu'il y a plusieurs feuilles sur sa table, dont une qui semble ne pas venir du jeune homme. Enfin, vu qu'elle est sur le côté, c'est juste mon impression. Est-ce qu'il écrit une lettre d'amour ? Mon dieu, je veux lire ça. "Qu'est-ce que vous écrivez ?", je lui demande en attrapant la lettre sur le côté. Mes yeux se posant sur la lettre, je bug. C'est...c'est ma lettre, celle que j'ai écrite à Eliot. Mon visage se décompose, mes yeux sont deux fois plus froncés, j'arrache littéralement la feuille sur laquelle le jeune homme est entrain d'écrire. "Chère....Piper", dis-je à voix haute, avec hésitation. Oh mon dieu, non, ça ne peut pas être possible. En deux seconde, mes fesses se retrouvent de nouveau sur mon siège, bouche-bée. "T-t-tu es Eliot ?", je demande, une nouvelle fois avec hésitation. Si ce n'est pas mon Eliot, c'est vraiment coïncidence de dingue. Parce que bon, je ne pense pas qu'il y ait 15 Eliot et 15 Piper qui s'écrivent dans ce monde.

Eliot avait senti son regard assez fixe, de cette jeune brune et il s'en sentait épié, regardé comme une foire de bêtes. Durant quelques secondes, il s'interrogea sur le visage de la jeune femme, se demandant s'ils étaient familiers et qu'il l'aurait, sans faire exprès effacé de sa mémoire mais très vite, elle répondit lui-même à sa question en expliquant que le sujet de sa curiosité fut.. sa lettre. « Je.. quoi ? .. Ma .. lettre ? » C'était la surprise, il s'était attendu à tout sauf à ça honnêtement. Peut-être une salade coincée entre les dents, un cheveu blanc qui pointait le bout de son nez ou même une verrue immonde sur littéralement son nez. Des explications toutes aussi plausibles les unes que les autres pour expliquer son regard intrigué, mais non, c'était sa lettre. Du coup Eliot mit quelques secondes à comprendre, quelques secondes suffisantes pour la jeune femme pour apercevoir la lettre de plus proche et la lire. Mais ? « Hé, l'espace privée dites-moi, vous connai.. » Et même pas eu le temps de finir sa protestation qu'il fit la jeune femme blêmir, écarquiller les yeux, sous les yeux inquiets d'Eliot. Mais encore une fois, il mit trop de temps à réagir parce que d'un coup, sa feuille lui fut arraché, devant ses yeux. Mais bordel, où est-ce qu'il était sérieusement, la politesse, on connaissait dans la région ? Il s'était d'ailleurs paré à réprimander, mécontent, la petite brune avant qu'elle ne sorte quelque chose qui le laissa coi également, tandis qu'elle lisait à voix haute le début de sa lettre. « T-t-tu es Eliot ? » Ooook, what the fuck ? C'était à son tour d'écarquiller les yeux maintenant, comment est-ce qu'elle le connaissait ? En se basant sur sa lettre ? Sur un simple "chère Piper" ? A moins que.. « Oui, je.. Comment tu.. Attends, attends.. Tu-tu-tu.. » Trop de mots lui venaient en tête, trop de réactions, trop de confusion, de choc. « Piper ? » Il finit enfin par réussir à demander, aussi figé qu'une statut de glace, ne lâchant pas des yeux la jeune femme. Si elle l'avait reconnu grâce à leur correspondance, ça ne pouvait être qu'elle.

Ouais, j'insiste un peu trop mon regard sur cet inconnu, mais curieuse comme je suis, j'ai vraiment envie de savoir ce qu'il fait. Enfin, ce qu'il écrit. Écrit-il une lettre d'amour ? Un poème ? Ou bien un truc beaucoup moins romantique du genre, un cv ou une lettre de motivation. "Oui, votre lettre", je lui réponds en riant, alors qu'il semble complètement à l'ouest. Bah quoi, je le perturbe tant que ça ? En même temps, on va dire que j'envahis légèrement son espace et surtout, son intimité. Voilà que je lui arrache presque la lettre, pour lire ce qu'il écrit. Sauf que là, je ne m'attendais vraiment pas à ça, à lire mon prénom sur sa nouvelle lettre, mais aussi le sien, enfin...Eliot. "Pardon, je sais m'enfin....". Pour le coup, je merde complètement, je bégaye. Est-ce que, non, ça ne peut quand même pas être mon Eliot. Visiblement, il semble lui aussi perturbé par la situation. C'est alors qu'il le dit, mon prénom et ça me fait automatiquement sourire. "Je...hum...oui", je réponds timidement tout à coup, sortant sa dernière lettre de mon sac. Oui, je garde toujours sa dernière lettre avec moi. Bizarrement, avec cette lettre, c'est comme s'il était avec moi sauf que là, il est réel en face de moi. "Je...oh mon dieu...C'EST TOI", je finis par presque hurler dans le petit café, lui sautant littéralement au cou. "Pardon, pardon, je ne devrais pas enfin...c'est tellement bizarre". Cette situation est étrange, je connais ce jeune homme, on s'est tellement dit de chose et pourtant, je n'ose même pas être moi-même avec lui. Enfin, j'ai honte de lui avoir sauté au cou quoi.

La situation était irréelle. Est-ce que c'était bien Piper ? Sa Piper ? No fucking way. Sur toutes les jeunes femmes un tantinet trop curieuses dans un café, au Laos, qui plus est, il a fallu que ce soit la fille avec qui il correspondait depuis des années, sans l'avoir jamais rencontré avant ? Ok, est-ce qu'il devait commencer à jouer au loto ? C'était à méditer. Parce que les chances étaient tellement fines, mais pourtant, la brune venait de confirmer que c'était bien elle. « Tu.. C'est vraiment toi ? » Il n'en croyait pas, la fixait du regard, incrédule, les yeux écarquillés, un sourire naissant sur les lèvres, tandis qu'elle partit tête droit dans son sac, à la recherche d'on-ne-sait quoi. Eliot sourcilla légèrement, amusée par la vivacité de la jeune femme avant qu'elle ne sorte de son sac une lettre. Sa lettre. Tout ce qui était nécessaire pour confirmer son identité. « C'est.. vraiment toi, j'y crois pas ! » Qu'il répliqua, le regard brillant mais figé, incapable de bouger avec sa lettre en main. Il ne savait pas comment agir bordel. Mais elle, savait, apparemment. Vu son cri d'excitation et Eliot qui fut d'un coup assailli par un câlin surprise quand elle se jeta à son cou, ce qui le fit rire. En temps normal, n'étant pas une personne très tactile, il l'aurait sans doute rejeté, mais là, c'était Piper, et il était comme qui dirait bien heureux de la rencontrer en chair et en os qu'il se laissa faire et haussa les épaules lorsqu'elle s'excusa, gênée. « T'as pas à t'excuser, c'était adorable, même dans une situation aussi.. bizarre, comme tu dis. » Répondit-il, toujours plus souriant. Vraiment vraiment bizarre, étrange. Il l'observa de la tête aux pieds, attentif. « C'est bizarre de dire aussi que je ne t'imaginais pas du tout comme ça ? »

Avec Eliot, ça a commencé il y a quoi ? Des années de ça, alors que nous étions beaucoup, mais alors beaucoup plus jeunes. Nous étions deux gamins qui correspondaient l'un avec l'autre, mais qui n'ont jamais cherché à s'envoyer une photo ou quoi. Non, peut-être que nous aimions ce côté mystérieux. Ou alors, on avait trop peur que l'autre soit une personne âgée de 50 ans. Là, on en aurait pris pleins les dents. Dans ce petit café, je m'attendais à tout, sauf à le croiser. Lui, ce garçon dont je suis à la fois très proche, mais aussi, qui est un inconnu. Alors, oui, ma curiosité prend le dessus et attrape cette lettre, me dévoilant l'identité de cet inconnu. Je reste sur le cul, je me demande si ce n'est un rêve. Bon en même temps, pourquoi est-ce que je rêverais d'Eliot ? Peut-être parce qu'après tout ce temps, j'aurais enfin envie de le rencontrer. "Oui...Oui, c'est moi Piper", dis-je avec excitation, je me retiens même de sautiller sur place, mais visiblement, mon corps est plus rapide puisque je me jette littéralement dans ses bras. Oops, il faudrait que j'apprenne à me contrôler. "Oui c'est bizarre, enfin, avec tout le monde qu'il y a ici, je n'ai pas pensé une seule seconde au fait que je puisse te rencontrer", je réponds en lui souriant, finissant par m'asseoir sur ma chaise. "Vraiment ? Tu m'imaginais comment ?", je lui demande tout en riant, prenant une petite gorgée de mon thé. C'est vrai qu'en soit, je ne pensais pas qu'il ressemblerait à ça. Non, allez savoir pourquoi, je l'imaginais plutôt en mode Geek.

Oui, oui, c'était bien elle. Il n'y avait plus aucun doute. Depuis toutes ces années, ils s'étaient échangés des lettres, se connaissaient, sans réellement se connaître au final justement parce qu'ils ne s'étaient jamais vus. Depuis toutes ces années, ils n'avaient pas cherché à se voir, à rompre le mystère dirons-nous mais faut croire qu'ils avaient même pas besoin de chercher pour tomber l'un sur l'autre. Il ne le répétera sans doute pas assez pour l'instant mais la situation était irréelle. Et Piper ne pouvait qu'être d'accord. « C'est clair, pareil ! Quelles sont les chances qu'on puisse se rencontrer ici, au Laos, à des milliers de kilomètres de Boston, au Summer Camp et pendant que je te répondais ? Tu crois qu'on devrait commencer à jouer au loto, avec notre chance ? » Non, franchement, c'était une idée qui germait petit à petit dans son esprit parce que.. wow. Une seconde il écrivait à une amie correspondante qu'il s'était juste physiquement imaginé, l'autre d'après, cette même amie était assise en face de lui. Très différente de ce qu'il avait imaginé, soyons honnête. « Hm.. Je t'avais imaginé moins.. » Moins - il ne savait pas en fait - moins.. jolie, enjouée ? Est-ce que ça passait bien ça ? « Brune ? » Qu'il finissait par dire avec un petit rire. « Et le prends pas mal, mais dans ma tête, t'étais moins.. jolie. Je t'ai toujours imaginé comme la sœur, garçon manqué que je n'ai jamais eu. » Qu'il enchaîna finalement avec une légère grimace et un sourire crispé. En somme, c'était un compliment. Parce que Piper paraissait tout sauf être un garçon manqué, et elle était souriante, enjouée, radieuse. « Mais j'suis sûr que tu ne m'imaginais pas non plus comme ça, non ? » Il était curieux maintenant sur sa propre vision à elle.