Jeffrey & Lisbeth - Le binôme inséparable est de retour

Lisbeth avait hâte que Jeff lui explique ce qu’il avait derrière la tête. Visiblement, ça le travaillait depuis quelques temps, surtout quand elle observa son attitude et son regard. Quand les clichés tombèrent entre eux, elle se pencha pour les observer et reconnut Cassiopée avec sa forme typique. Possédant une mémoire photographique, jamais elle n’aurait pu oublier ces cieux magnifiques observés dans des circonstances tristes. D’ailleurs, ses prunelles se voilèrent alors que les paroles de son ami l’atteignaient de plein fouet. Elle ignorait pourquoi mais elles la touchèrent et les larmes lui montèrent aux yeux. Il avait raison : l’histoire de Cassiopée avait fait pétiller son regard et avait attisé sa curiosité. D’ailleurs, elle lui avait demandé de lui parler un peu plus des étoiles. Mais que son expression et ses émotions aient à ce point percuté Jeffrey la chamboula. Posant sa main sur les photos, elle les ramena à elle pour les contempler de plus près. Son idée, elle l’adorait. Si tout le monde pouvait ressentir ce qu’elle avait ressenti ce soir-là, ce bien-être, ses soucis qui s’envolaient un à un, elle en serait plus qu’heureuse. Relevant enfin la tête, elle plongea son regard dans le sien. Pour le coup, ils avaient tous deux l’air perdus et anxieux (pour Jeffrey).

« Mais où vas-tu chercher toutes ces idées, Jeff ? Que je sois occupée ou non, je veux faire partie de ton projet. »

Elle imaginait déjà les interminables lignes de codes, les algorithmes, défilant sur son écran et qui feront bouger les constellations virtuelles. La réalité virtuelle lui semblait bien plus appropriée pour une telle expérience. Lisbeth ferma les yeux, visualisant les étoiles se mouvoir tout autour d’elle, comme si elle flottait dans l’espace abyssal. Un petit frisson la fit tressaillir et elle passa une main sur son bras pour le frotter.

« Tu vas me prendre pour une folle mais j’imagine déjà le programme que je vais créer. Cependant, il va me falloir les coordonnées des constellations que tu veux illustrer. Si tu veux mon avis, la réalité virtuelle est le meilleur moyen pour cette expérience. Après, la vidéo peut très bien aller pour ceux qui n’y ont pas accès. »

La jeune femme savait qu’elle allait y penser jusqu’à ce que ce projet se concrétise. Elle libéra enfin les clichés après avoir jeté un dernier regard à Cassiopée, sa constellation préférée dans laquelle elle avait repéré l’étoiler qu’elle assimilait à Loïs.

Effectivement, le cerveau de Lisbeth était en plein ébullition. Elle voyait déjà les interminables lignes de codes assez compliqués défiler devant elle. Consciente du travail colossal qu’engendrerait ce projet, elle ne voulait en aucun cas en être évincée. Peu importe le temps qu’elle y consacrerait et comment elle concilierait son travail et sa vie privée, elle était prête à se lancer dans l’aventure. Et puis entre les compétences et le savoir de Jeffrey associés aux siens, il ne pouvait qu’en ressortir du positif. A son humble avis, la réalité virtuelle était plus adaptée à ce projet mais son ami souligna un point important : le financement. Ils allaient devoir se contenter du simple format vidéo dans un premier temps, ce qui leur permettrait de savoir si leur projet plait ou pas du tout. Un petit soupir lui échappa alors qu’elle se laissait aller contre le dossier de sa chaise.

« Tu as raison… Je pourrais quand même essayer de voir avec le MIT si un groupe d’étudiants travaillent déjà sur la réalité virtuelle. Ils pourraient peut-être nous aider à créer une vidéo, histoire de voir comment ça donnerait. »

Elle était certaine qu’un tel groupe de travail existait déjà mais il restait à voir s’ils pouvaient les aider ou pas. Si tel n’était pas le cas, ils attendraient les dons. Reprenant son verre en main, Lisbeth but une nouvelle gorgée de son cocktail et offrit ensuite son visage au soleil. Les rayons chauds caressèrent son visage un peu pâle dans l’espoir de lui redonner quelques couleurs.

« Tu voudrais commencer quand ? A la rentrée ? »

Puisqu’elle allait bientôt partir pour Stockholm, elle pourrait bien prendre quelques clichés et vidéos du ciel étoilé. Si toutefois elle en trouvait le temps. La jeune femme sourit, vraiment contente que Jeffrey ait pensé à elle pour son immense projet.

Lisbeth finit par offrir son visage au soleil de l’après-midi, heureuse de ce moment de détente au sein de ce tête-à-tête professionnel. Jamais elle n’aurait pensé refaire équipe avec Jeff sur un projet d’une aussi grande envergure. Heureuse qu’il ait pensé à elle, elle se donnerait à fond pour que son projet voit le jour et plaise au plus grand nombre. Nul doute possible : leurs noms allaient, d’une façon ou d’une autre, être connus du grand public. Non qu’elle fût égocentrique et friande de ce genre d’attention mais ça lui ferait du bien que son travail soit enfin reconnu. Car mise à part quelques professeurs qui avaient remarqué son talent à Harvard, elle n’avait suscité que de la jalousie de la part de ses acolytes, à quelques exceptions près. Et Jeffrey en faisait partie. Mais à la rentrée académique, elle entrerait dans un mode totalement nouveau où ses compétences compteraient et seraient utilisées à bon escient. Elle demanderait l’avis de ses collègues concernant cette histoire de réalité virtuelle, certaine d’obtenir l’aide nécessaire. Mais c’était encore de la musique d’avenir car son ami lui avoua qu’il se concentrerait plus sur ses études que sur son projet, ce qui était compréhensible.

« Tu ne voudrais pas intégrer ton projet à tes études ? Par exemple, en faire ton sujet de travail de fin d’études… Enfin, c’est une idée comme ça. De toute façon, je te suivrai dans tous les cas. »

Elle lui sourit, se disant qu’il leur restait un travail de titan avant que les ébauches de leur projet ne voient le jour. Et, de son côté, Lisbeth commencerait ses recherches, ce qui allait également lui prendre pas mal de temps. Ayant visité les laboratoires du MIT un mois plus tôt, elle avait tout de suite été captivée par l’ambiance qui régnait dans les lieux et surtout par toute cette technologie réunie à un seul endroit.

« Quoi qu’il en soit, je vais encore réfléchir de mon côté sur tout l’aspect code et tout ça. Et puis, je vais partir quelques temps à Stockholm d’ici quelques jours… »

Son sourire vacilla légèrement à cette dernière phrase : seuls Clay et elle étaient au courant de la véritable raison de son départ, à savoir qu’elle comptait découvrir la responsable de toutes ces tentatives d’assassinat contre sa personne. Mais inutile d’inquiéter son ami, non ?

Lisbeth était ravie de faire partie de ce projet et surtout d’avoir été choisie par Jeffrey pour assurer la partie un peu plus technique. Si on lui en avait parlé des mois plus tôt, elle aurait bien ri et n’y aurait pas cru une seule seconde. Elle qui était si solitaire, si réservée et pas du tout sociable avait bien évolué en très peu de temps. Quoi qu’il en soit, elle était prête à abattre le travail nécessaire pour que ce projet voit le jour et qu’il soit un véritable succès. Une autre idée lui était venue : pourquoi ne pas en faire un travail de fin d’études ? Mais Jeff avait une toute autre manière de voir les choses : il voulait que ça reste du domaine de la passion et non de l’obligation. La jeune femme le comprenait parfaitement et ne fut aucunement offusquée par sa réponse. Après tout, c’était l’idée de Jeffrey et elle respecterait son choix. De plus, ça lui était un peu égal qu’ils prennent des années à le fignoler.

« Pas de problème ! De toute façon, je te suis quoi qu’il arrive. »

Il faudrait qu’elle soit six pieds sous terre pour ne pas assurer sa part de travail. Elle lui rendit son sourire et rebondit sur un tout autre sujet : celui des vacances. Elle tenait quand même à l’avertir qu’elle s’envolerait pour la Suède d’ici quelques jours. Les raisons étaient personnelles mais elle ne voulait pas inquiéter le jeune homme outre mesure. Alors elle hocha la tête quand il lui conseilla de lever la tête au ciel et de prendre le temps de l’observer.

« C’est promis et tu auras même droit à une photo si t’es sage. »

Saisissant volontiers la main qu’il lui tendait, elle la serra pour conclure le partenariat qui venait s’instaurer entre eux.

« On va cartonner, tu vas voir ! J’ai déjà hâte de commencer. »

Jeffrey et Lisbeth terminèrent la journée à palabrer au sujet de leur projet pour finir par parler de tout et de rien. Décidément, l’après-midi se termina mieux qu’elle n’avait commencé.