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— Nan.
— …
— Ouais mais j’suis en vacances.
— …
— Depuis la première fois depuis toujours.
— …
— ‘Tends, j’te file l’adresse d’une meuf de Tel-Aviv.
Et A.B. put enfin raccrocher.
Voilà.
Il était en vacances. C’était une drôle de sensation. Il avait économisé toute l’année pour ça et, franchement, c’était moins compliqué qu’il ne l’avait cru. Les traductions marchaient bien et le nom d’Harvard sur son CV, plus la bourse de l’ONG, avait un petit effet magique qui ouvrait bien des portes. Il avait hésité cinq fois avant de cliquer sur la réservation d’un hôtel qu’il aurait cru ordinairement bien au-dessus de ses moyens. Et là, dans sa grande chambre luxueuse, il se sentait… Un peu nerveux. Mais satisfait.
Il était prêt à se reposer.
D’accord, concrètement, il ne savait pas ce qu’on faisait, quand on se reposait, c’était une expérience inédite et sans doute une sorte d’épreuve. Ce matin-là, il s’était décidé pour la piscine, même s’il était prêt à parier que l’ennui le gagnerait bientôt. Qu’à cela ne tienne, il avait lu dans des bouquins les bienfaits de la relaxation et du soleil, quelque chose comme ça, et au moins, il pourrait s’occuper en regardant passer les jolis garçons.
Armé de sa serviette de plage et d’un gros bouquin tout à fait estival sur l’économie de la sidérurgie soviétique dans les années 1960, en russe dans le texte, il avait gagné la vaste piscine où se réunissaient bon nombre de vacanciers de l’hôtel, quand ils n’exploraient pas la capitale. Vêtu d’un short de bain noir tout à fait sobre, il se sentait finalement assez à son aise. Plus jeune, il avait eu du mal à accepter sa musculature trop discrète, de coureur de fond plutôt que de rugbymen, et puis il s’était rendu compte que ça plaisait à certains garçons et depuis, il vivait en paix avec son physique.
Son regard bleu parcourut les alentours et il repéra quelques figures vaguement familières, des gens qu’il avait aperçus déjà à Harvard mais qu’il ne connaissait pas plus que cela. Son regard s’arrêta sur une silhouette féminine, quelque part sur l’un des transats blancs où l’on s’étendait pour profiter du soleil. Il se fraya un chemin sur la demoiselle et se posta à côté de son transat pour lui décocher un sourire radieux.
— Hey, Bambi, salut ! Je savais pas que tu…
Il avait commencé sa phrase en italien, avec un accent un peu hésitant, et il s’interrompit pour réfléchir à la suite. Il avait essayé d’apprendre un peu, comme ça, depuis qu’il connaissait Bambi, mais ses études avaient pris le pas sur ce petit loisir linguistique, alors finalement, il jugea plus sage de repasser en anglais :
— … que tu étais du voyage.
Il y avait pas mal de monde et A.B. n’était pas encore sûr de qui logeait où, pourquoi et comment. L’un des transats à côté de la demoiselle était libre, un petit miracle si l’on considérait les dragueurs qui rôdaient déjà en quête de chair fraiche. Sans autre forme de procès, A.B. y étendit sa serviette avant de s’allonger lui aussi. Il baissa les lunettes de soleil tout juste achetées sur son nez et entreprit de se livrer à cette curieuse activité qu’était la bronzette.
— T’étais à la soirée, hier, au fait ? C’était, genre, un peu chiant, quand même.
Il n’y allait jamais par quatre chemins.
— J’veux dire, la moitié des gens était déjà complètement déchirée en arrivant, donc paie l’intérêt des conversations, quoi. J’dis ça, j’dis rien, chacun s’amuse comme i’ veut, mais bon.
— …
— Ouais mais j’suis en vacances.
— …
— Depuis la première fois depuis toujours.
— …
— ‘Tends, j’te file l’adresse d’une meuf de Tel-Aviv.
Et A.B. put enfin raccrocher.
Voilà.
Il était en vacances. C’était une drôle de sensation. Il avait économisé toute l’année pour ça et, franchement, c’était moins compliqué qu’il ne l’avait cru. Les traductions marchaient bien et le nom d’Harvard sur son CV, plus la bourse de l’ONG, avait un petit effet magique qui ouvrait bien des portes. Il avait hésité cinq fois avant de cliquer sur la réservation d’un hôtel qu’il aurait cru ordinairement bien au-dessus de ses moyens. Et là, dans sa grande chambre luxueuse, il se sentait… Un peu nerveux. Mais satisfait.
Il était prêt à se reposer.
D’accord, concrètement, il ne savait pas ce qu’on faisait, quand on se reposait, c’était une expérience inédite et sans doute une sorte d’épreuve. Ce matin-là, il s’était décidé pour la piscine, même s’il était prêt à parier que l’ennui le gagnerait bientôt. Qu’à cela ne tienne, il avait lu dans des bouquins les bienfaits de la relaxation et du soleil, quelque chose comme ça, et au moins, il pourrait s’occuper en regardant passer les jolis garçons.
Armé de sa serviette de plage et d’un gros bouquin tout à fait estival sur l’économie de la sidérurgie soviétique dans les années 1960, en russe dans le texte, il avait gagné la vaste piscine où se réunissaient bon nombre de vacanciers de l’hôtel, quand ils n’exploraient pas la capitale. Vêtu d’un short de bain noir tout à fait sobre, il se sentait finalement assez à son aise. Plus jeune, il avait eu du mal à accepter sa musculature trop discrète, de coureur de fond plutôt que de rugbymen, et puis il s’était rendu compte que ça plaisait à certains garçons et depuis, il vivait en paix avec son physique.
Son regard bleu parcourut les alentours et il repéra quelques figures vaguement familières, des gens qu’il avait aperçus déjà à Harvard mais qu’il ne connaissait pas plus que cela. Son regard s’arrêta sur une silhouette féminine, quelque part sur l’un des transats blancs où l’on s’étendait pour profiter du soleil. Il se fraya un chemin sur la demoiselle et se posta à côté de son transat pour lui décocher un sourire radieux.
— Hey, Bambi, salut ! Je savais pas que tu…
Il avait commencé sa phrase en italien, avec un accent un peu hésitant, et il s’interrompit pour réfléchir à la suite. Il avait essayé d’apprendre un peu, comme ça, depuis qu’il connaissait Bambi, mais ses études avaient pris le pas sur ce petit loisir linguistique, alors finalement, il jugea plus sage de repasser en anglais :
— … que tu étais du voyage.
Il y avait pas mal de monde et A.B. n’était pas encore sûr de qui logeait où, pourquoi et comment. L’un des transats à côté de la demoiselle était libre, un petit miracle si l’on considérait les dragueurs qui rôdaient déjà en quête de chair fraiche. Sans autre forme de procès, A.B. y étendit sa serviette avant de s’allonger lui aussi. Il baissa les lunettes de soleil tout juste achetées sur son nez et entreprit de se livrer à cette curieuse activité qu’était la bronzette.
— T’étais à la soirée, hier, au fait ? C’était, genre, un peu chiant, quand même.
Il n’y allait jamais par quatre chemins.
— J’veux dire, la moitié des gens était déjà complètement déchirée en arrivant, donc paie l’intérêt des conversations, quoi. J’dis ça, j’dis rien, chacun s’amuse comme i’ veut, mais bon.
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