DEIRDRE M. WHEELAN ► Katie McGrath

caractèreJe suis solitaire, une femme qui ne laisse pas les autres indifférent. J'ai pris cette habitude m'encercler de glace. Je suis de ces femmes aux apparences impeccables, manières courtoises, verbiage adapté, et tailleur de rigueur. Vous ne me verrez que rarement autrement que perchée sur des talons. Je suis une manipulatrice, une stratège, une enfant sans doute trop sauvage qui a appris mieux que personne à porter le masque des hauteurs. Je me distancie, je dissimule. Lorsque je me donne toutefois, c'est entière, sans artifice. On dit ma loyauté sans faille et celle-ci s'élève bien au delà des règles morales. Je m'entoure de silence, de musique mais essentiellement classique, je me nourris de livres et adore créer des herbiers. Je suis mystérieuse, adepte de la danse au travers de laquelle j'épanche mes tourments, c'est par le corps que je suis plus douée. Je suis de ces sensibles incapables de s'épancher. Je suis une muette qui crie quelque part au fond. Vous pourrez entendre si vous prêter l'oreille, si vous osez attarder le regard sur l'acier qui m'entoure.

admission à harvardJe ne voulais que le meilleur naturellement. Mon géniteur m'ayant offert les internats les plus prestigieux, je me suis passionnée très vite pour les sciences et la botanique. J'ai donc développé ces facultés, et intégrer la plus prestigieuse des facultés. J'ai envoyé mon dossier dans les meilleures universités mais c'est Harvard que j'ai toujours voulu. J'ai passé tous les tests, je me suis défendue avec avidité pour intégrer la sphère de l'élite et j'en suis particulièrement fière aujour'd'hui.

story of my lifeDouleur. Voilà ce que signifie Deirdre, et jamais un prénom n'aurait été si annonciateur de la suite de l'histoire pour cette fillette aux cheveux noirs de jais et aux billes incandescentes. Le visage de l'enfant est particulier, attire autant qu'il n'effraie. Fascine souvent. Il demeure impossible à cacher. Pourtant le sang paternel aurait désiré que ce visage ne voit jamais le ciel cotonneux de l'Irlande ou même n'importe quel autre. Puisque Deirdre est née d'une passion adultérine ou bien d'une stratégie rondement menée par une femme en quête de pouvoir selon les versions. Les faits sont là. Une traductrice à la présence singulière et au charme certain a attiré dans ses filets le riche président d'une multinationale de renom, amour ou pouvoir, les deux sont sans doute savamment liés. Le résultat de cette union après tout banal s'incarne dans cette enfant dont il faut taire l'origine. Monsieur ne veut pas s'embarrasser d'une descendance supplémentaire, il a bien assez de l'officielle et besoin de l'appui de sa véritable épouse. Alors il repousse l'union interdite et achète le silence de la mère en lui imposant de cacher l'identité du père à l'enfant, et à tout autre d'ailleurs. Elles auront toutes deux une situation confortable, des moyens plus de raison, elles devraient s'estimer heureuses. Et on ne sut jamais si la véritable nature de la mère refit surface ou si quelque chose se brisa en elle. Le résultat fût le même pour Deirdre, une mère distante et aux phalanges absentes dans sa quête d'affection.

Alors l'enfant se fit une raison. Dans ses jeunes années, elle ne se posa pas vraiment de question. Les choses étaient ainsi et elle ne pouvait de toute manière rien y changer. Le calme apparent de la fillette avait toujours déstabiliser les adultes autour d'elle et souvent fait fuir les autres enfants. Si les émotions étaient absentes, la logique était prédominante. Factuelle, curieuse, la Demoiselle s'invente un nouveau royaume sur les côtes âpres et verdoyantes de l'Irlande. La Nature devient la seule compagne souhaitable, les fleurs et autres plantes n'ont bien plus de secret pour les billes curieuses de l'enfant solitaire qu'elle est. Seul le vent lui souffle ses mots à l'oreille, les couleurs dont elle se regorge sont celles de la flore natale, et ses mains n'ont pas d'autre coutume que de gratter la terre humide de l'île. Alors tout le monde se fait à cette enfant distante, les domestiques apprennent, s'attachent même parfois mais la plupart ne comprennent pas l'enfant. Elle n'a pas de passion de son âge, elle est bien trop sauvage. Rentrée dans la demeure familiale, elle n'a en tête que d'emplir les pages blanches de son herbier, de courir de nouveaux livres de botaniques. Secrète, elle ne partage que son amour avec les plantes qu'elle chérit de ses frêles mains aux jeunes années. Elle trouve dans la terre la force d'enterrer tous ces tourments qui l'inondent souvent, cette puissance qu'elle redoute et qu'elle apprend du moins à apprivoiser, solidement ancrée dans l'ancestrale terre des celtes.

Les années passent, la jeune fille scolairement excelle, socialement échoue. Mais peu importe, la Demoiselle n'a pas besoin des autres. C'est alors qu'elle atteint sa dixième année que sa mère entame sa dernière, et bientôt expire son dernier souffle. Une maladie fulgurante qui bien connue de tous, s'emploie métaphoriquement sous les pinces d'un crabe. Deirdre n'a jamais compris que ces petites bêtes souffrent de cette comparaison. Sa mère la quitte, mais elle ne regrette pas les bras aimants, ils étaient absents et seule la voix lui dictant la bonne conduite disparaît. C'est dans ce contexte qu'elle apprend l'existence et l'origine puissante de son père, mais elle ignore toujours son nom. La Solitaire poursuit sa scolarité dans un collège renommé de Dublin. Elle souffre plus que jamais du déracinement imposé par l'absence de sa mère. Elle a du quitter les côtes irlandaises en l'absence de tutelle et la colère nourrit ses tourments. D'apparence, la Sauvage se montre apprivoisée, et surtout imperturbable. Elle comprend bien vite que nourrir quelques relations est indispensable pour évoluer dans le monde humain. Elle s'attache peu mais en général bien et calcule le bénéfice des amitiés la plupart du temps. Mademoiselle a les moyens d'entretenir ses caprices et bientôt c'est l'Orgueil qui vient nourrir le piédestal qui s'érige entre Elle et les Autres. Elle n'abaisse son mépris que pour ses Semblables, l'élite pense-t-elle car autrement, quel besoin de fréquenter des personnes avec une langue et des mots aussi stupides que leurs visages. De ceux qu'elle considère comme ses amis, elle devient une véritable protectrice, les défendant de toutes ses griffes, Louve solitaire qu'elle est, elle parvient tout de même à assembler un semblant de meute pour accompagner ses années adolescentes. Elle se passionne toujours autant pour les fleurs et les plantes, s'instruit des remèdes pouvant être crée par la nature, aime à en fabriquer souvent que ce soit pour guérir ou nuire selon sa volonté et les intérêts qu'elle y met.

Deirdre devient aussi crainte que respectée. Elle n'agit que par intérêt, rarement pour autre chose. Elle sait pour autant s'entourer, et aime à se sentir flattée. Elle se gorge de voir jusqu'où les humains sont prêts à aller pour grignoter les lambeaux de pouvoir que son argent sème aux pieds des Affamés. Vient le temps des études supérieures. Elle ne choisit que le meilleur, le plus prestigieux, forcément l'Orpheline opte pour Harvard. Naturellement, elle de destine à la Biochimie et à la Botanique, deux domaines d'études qui lui permettent d'allier son intelligence et sa passion première. Désormais en sixième année, elle a pour projet de lancer sa propre firme pharmaceutique. La Demoiselle ne manque pas d'ambition puisqu'elle a compris depuis longtemps que c'est ce qui lui permettra d'assumer sa tranquillité. Pour la plupart, elle est cette fille froide et distante dont on retient pourtant aisément les traits sur le campus, cette fille étrange à l'abri des puissants. Pour Elle, elle est cette fille qui continue de s'émerveiller du vermeil d'un pistil, qui n'a pas d'autres bonheurs que celui d'évoluer librement en pleine nature, qui n'aime son corps qu'en mouvement, de ses déambulations et en pleine danse qu'elle pratique depuis nombreuses années avec rigueur. Deirdre n'entreprend rien à la légère et surtout pas les relations qu'elle entretient avec le monde. Pour Elle, elle demeure cette enfant sauvage et solitaire, qui n'a jamais trouvé le giron réconfortant qui saura accueillir la brutalité de son cœur hurlant en silence depuis toutes ces années.