Appel Sage vers Denys

Dans la salle de bain, assise près des toilettes dans lesquels j'avais dégueuler quelques minutes avant. Lucky m'avait apprit la nouvelle et, impossible de la digérer, de l'accepter. Je tirais la chasse en me relevant péniblement, le corps fragile, mes jambes qui sont à la limite de me lâcher d'une seconde à l'autre, mon portable en main avec la photo d'Ash' ouverte en grand. Je la regarde de longues minutes, les lèvres qui tremblent et les larmes qui ne cessent de couler. J'abandonne mon portable, allumant l'eau de la salle de bain pour rafraîchir mon visage à ébullition. Et je pense soudain à Denys, j'suppose qu'il est toujours pas au courant.. J'inspire, j'essaie mes larmes, et je tempère ma respiration. J'pouvais pas l'appeler dans cet état là, j'veux pas qu'il l'apprenne dans les cris et les pleurs. Je cherche son nom de contact et appel, les sonneries défilent tellement lentement et à chacune d'elle, j'ai le coeur qui s'alourdit. Il décroche, je lève les yeux vers la porte, me laissant une demie seconde de répit pour me remettre les idées en place. - Denys ?.. Je commence par dire, me mordant la lèvre tellement fort pour m'empêcher de déverser ma peine. - C'est Ash'.. Elle a pas survécue Denys.. Avouais-je doucement en secouant la tête de gauche à droite, mes doigts s'enroulant sur le lavabo et le serrant fort à m'en faire blanchir les phalanges.

Nuit au poste. J'étais trop con. J'avais  pas réfléchi la nuit dernière. Sage m'avait écrit.  Elle m'avait  appris qu'Ash avait eu un accident et j'avais foncé comme un crétin, hors du loft, direction l'hosto. Paniqué. Affolé. Terrifié. J'aurais du lui dire de pas y aller. Je l'avais vu le midi même.  Et après sa nuit, l'hospitalisation de son ami, elle n'avait pas dormi. Elle était crevée. C'était ma faute cet accident. C'était ma faute si elle était blessée. J'aurais du lui dire de pas y aller. Puis j'aurais pas du m'en aller comme ça de chez nous après les messages de Sage. Elle allait être folle Ashleigh. Quand elle saurait que j'avais fait ça.  Les problèmes que je m'étais attiré. Elle allait m'engueuler. Je l'imaginais avec son air contrarié, ses petits sourcils froncés, ses yeux qui lançaient des éclairs, j'entendais de là ce qu'elle me dirait, que j'étais inconscient, que j'étais trop impulsif, que je lui avais promis de faire gaffe avec mon bracelet électronique. Et puis je me voyais aussi déjà la faire taire d'un baiser. Oui ça m'aidait de penser à tout cela, c'est d'ailleurs ce que je fis quand on me laissa sortir et que je récupérais ma voiture. Puis encore cette scène que je me repassais en boucle dans ma tête en rejoignant le loft. J'avais même pas le temps d'arriver dans la cuisine pour me servir un truc à manger que mon téléphone portable vibrait dans ma poche. Sage. Le scénario s'efface un peu. Les images de ce baiser rêvé entre Ash et moi s'évaporent. D'un coup y a plus que ce nom sur mon écran et ma peur de décrocher. Je prends quand même l'appel. Là,  debout au milieu de l'appart. Je crois que je le sais dès la première seconde. À l'inflexion de sa voix. À sa façon de prononcer mon prénom. Ou juste aux sanglots ravalés que je devine. Elle s'en est pas sortie. Les meubles se dissipent. Les lieux se foutent. Plus rien n'existe. C'est un mauvais rêve, un abominable cauchemar, dites moi que je vais me réveiller. "Non." Voilà les seuls mots que mes cordes vocales m'autorisent à lâcher. "Non c'est possible." Je sais même pas comment j'arrive encore à respirer à cet instant précis. Ma gorge est tellement nouée. "Pas Ash." Pas elle. Pas Ashleigh Strauss. Elle, elle est immortelle.