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[i]Je ne suis plus la même depuis que Cole n'est plus là, je me perds dans des travers que jamais je n'aurais pu imaginer. Je suis vide de l'intérieur, sans vie, assise dans mon canapé dans le plus grand des silences. Plus rien ne me donne envie, plus aucune sensation ni aucun plaisir. Je sursaute, le bruit de mon portable qui vient faire vibrer la table basse, je me redresse et.. Son image. Je fronce les sourcils, ma bouche s'assèche et je reste immobile devant mon cellulaire. Incapable de bouger d'abord, puis finalement je me reprends et réponds rapidement. - Allo ?.. Petite voix, coeur qui s'emballe. Dit moi que c'est toi, que c'est vraiment toi Cole. Dit moi que c'est pas une blague, que c'est ta voix que je vais entendre à l'autre bout du fil.
On aurait pu mourir. On aurait pu y laisser notre vie. Cette fois c'était décidé, plus jamais l'avion. Alors forcément, quand on nous avait proposé l'option rapatriement d'urgence direction Boston on avait refusé. Aussi bien Ayma que moi, traumatisés qu’on était par ce qu’on venait de vivre. Alors c’était donc sur place qu’on recevrait nos premiers soins et j’avais déjà commencé à donner mes instructions : d’abord, faire réparer mon téléphone, ensuite nous trouver un ferry pour qu’on puisse rentrer. Et quand j’avais eu mon portable de nouveau opérationnel entre les mains, l’appareil n’avait cessé de sonner. Des messages de mon meilleur ami, des messages, de Dim, des messages d’Agathe, et ma messagerie vocale aussi… Message d’Hippolyte, message de Nina, les sœurs Dunford. Mes paupières se fermèrent quelques instants en entendant leurs mots, leur voix, leur émotion… Difficile de rester de marbre. C’est d’abord la blondinette que je rappelais. Son allo résonna dans mon oreille et je souris instantanément : « Tu vois, t’avais raison, jamais je ne t’aurais abandonnée… » que je lançai alors, en reprenant ainsi les mots de son premier message.
Encore deux minutes en arrière je tentais tant bien que mal de me souvenir du son de sa voix, de son visage que je n'ai plus vu depuis longtemps, de me souvenir de ses mains sur mon corps. De ses yeux jouant avec les miens comme il sait si bien le faire. Je refusais encore l'idée de le perdre, de l'avoir déjà perdu, je refusais le fait de devoir vivre sans lui, plongeant dans un dénie sans fin dans lequel je me réconfortais. Mon portable sonne, tout bascule en un fragment de seconde et j'ai juste l'impression de vivre encore un de ses rêves où je le retrouve. Je réalise pas tout de suite, par peur de me réveiller, de me rendre bêtement compte que ça n'était que le fruit de mon imagination.. Et finalement j'entends sa voix, mes ongles s'enfoncent dans la housse du coussin nerveusement. "Tu vois, t'avais raison, jamais je ne t'aurais abandonnée.." Mon coeur rate un battement, puis deux, puis trois, et il est à la limite de s'arrêter en fait. Je déglutis, cligne plusieurs fois des yeux alors que les larmes coulent sans savoir pourquoi, sans pouvoir les retenir. - C'est vraiment toi.. ? Que je demande comme pour me rassurer. Bien évidement que c'était lui, je reconnaissais sa voix, je la reconnaîtrais entre mille. - Cole où tu es ?.. Qu'est ce que t'as foutu pendant tout ces jours ? Pourquoi tu ne m'a jamais appelé ? Pourquoi je n'ai plus eu de tes nouvelles ? Tu m'as oublié ? Donne-moi une bonne raison, j'en peux plus. Je suis à bout.
La voix de ma meilleure amie, ce simple allo dans mon oreille, et en quelques secondes un sourire se dessinait sur mes lèvres. Je reprenais ses mots à elle, comme une arme contre l’émotion du moment, comme une arme contre le trouble que les messages vocaux qu’elle m’avait laissé avaient provoqué en moi, comme une carapace aussi qui m’empêcherait de penser à ces derniers jours, éprouvants, à ce crash traumatisant… Je savais qu’il allait falloir que j’en parle, que je lui en parle, qu’au final à Hippo je ne pouvais rien cacher. Mais j’avais juste envie d’entamer cette discussion sur une note joyeuse en annonçant qu’elle avait vu juste, qu’elle avait raison sur ce point : jamais je ne l’abandonnerais. « Tu ne reconnais plus ma voix ? » taquinai-je alors qu’elle mettait en doute mon identité. « Oui c’est vraiment moi… C’est une longue histoire. » soufflai-je quand elle commença logiquement à me questionner. « On a eu un accident, avec mon jet, Ayma et moi. Mais on va bien… » Relativement bien sûr. « On s’en est sortis tous les deux. Ils viennent de nous retrouvés et on est dans un centre de soin là… » expliquai-je alors brièvement. « Et toi, comment tu vas ? »
Plus je l'écoutait parler et plus j'avais l'impression d'être folle, d'être en plein rêve. Je réalisais toujours pas vraiment je crois bien, j'avais toujours cette boule au ventre d'appréhension de ne jamais le retrouver. Pourtant, c'était bien lui au bout du fil, l'appel était bien réelle et je me sens toujours aussi mal ! Plus qu'avant même, pourquoi ? Le contre coup ? Je venais d'enfin comprendre et d'assumer le fait que j'étais à deux doigts de le perdre ? Qu'il n'était pas en vacance comme j'ai pu le dire un nombre incalculable de fois où j'ai voulu me rassurer. "Tu ne reconnais plus ma vois ?" Qu'il dit avec humour. Aucun sourire ne parvient à se décrocher sur mes lèvres, rien. Je fermais juste longuement les yeux, mordant ma lèvre pour éviter d'exploser. "Oui c'est vraiment moi.. C'est une longue histoire." Une descente aux enfers pour moi. Une longue descente douloureuse que tu m'as fait subir pendant des jours. "On a eu un accident, avec mon jet, Ayma et moi. Mais on va bien…" Un accident ? Je secoue la tête légèrement. Fronçant les sourcils, j'étais complètement paumé dans toute cette histoire. "On s’en est sortis tous les deux. Ils viennent de nous retrouvés et on est dans un centre de soin là… " Ils vont bien. Ça me faisait un bien fou de l'entendre, d'en être enfin sûre. Puis vient la question de "tu vas bien ?"[/b]. Je souris nerveusement, comment pouvait-il me demander ça ? - À ton avis Cole, comment je vais ? Mal, terriblement mal. - J'ai cru t'avoir perdu pendant tout ce temps, je n'avais aucune nouvelle de toi, rien.. Rien à quoi me retenir ! Comment tu veux que j'aille dit moi ?! Que je m'emportait. Tu m'as laissé mourir à petit feu de ton absence.
J’essayais d’expliquer, avec détachement, parce que reconnaître que j’avais flippé, que l’on s’était vus et crus mourir, Ayma et moi, qu’on avait ensuite galéré pendant des jours, paumés qu’on était là bas, pensant à tous nos proches en s’imaginant qu’on allait y rester… avouer tout ça, ça serait laisser entrevoir que ça n’allait pas si bien, alors je préférais me faire rassurant. Surtout qu’au peu de mots que nous venions d’échanger, je sentais à la voix de ma meilleure amie qu’elle était sur le fil du rasoir. Ma question comme détonateur sembla tout faire exploser. Sèchement, elle répondit en me retournant la question, avant de finalement lâcher qu’elle avait cru m’avoir perdu, sans nouvelle, répétant à nouveau sa question. « Hippo… » Je fermais les paupières un instant. Bordel, je le savais bien quel enfer ça avait du être pour elle. Moi, lorsqu’elle était partie fâchée l’été dernier à cause de l’histoire avec Kyla, ou lorsqu’elle s’était réfugiée à Paris plus récemment, suite aux soucis de santé de sa mère, j’avais à chaque fois pété un plomb, et encore ce n’était pas comparable puisqu’alors nous avions quelques contacts par téléphone. « Je suis désolé. Je vais me faire implanté une puce gps sous la peau, pour que tu puisses me retrouver n’importe quand, n’importe où… » suggérai-je sans sérieux avant de proposer une autre solution, qui sonnait davantage comme une promesse : « Ou alors plus simple : on ne se lâche plus ? » Jamais de Cole sans Hippolyte. Jamais d’Hippolyte sans Cole. Sauf qu’il y avait un sujet que je devais aborder et qui allait peut être compromettre notre amitié. « Y’a un truc que je dois te dire… J’ai vu l’article sur Agathe tout à l’heure sur CS et… j’ai un peu sur réagi. Je sais pas si tu as vu, mais je l’ai larguée. » Sur l’instagram de la langue de vipère du campus. Classe. « T’es fâchée ? » Et puis avant qu’elle ne s’énerve, je pris les devants : « Tu sais, t’avais raison. Depuis le départ en fait. On aurait rien du tenter elle et moi, clairement pas mon type de nana en fait. Trop gnangnan. » Hippo avait pas vraiment approuvé le rapprochement initial entre nous, elle voyait plus sa BFF avec Aisling. Finalement elle avait raison. J’avais pris Agathe pour quelqu’un qu’elle n’était pas. Juste parce qu’elle avait osé me braver j’y avais cru. Faut arrêter de croire, on finit toujours déçu. « La prochaine, c’est toi qui la choisis. » En fait c’était Hippo la mieux placée pour me trouver THE good one. Qui me connaissait mieux qu’elle ?
Des jours sans lui, et voilà que tout ce que j'avais réussi à construire, ou me reconstruire s'effondre. Il ne savait pas les réelles dégâts que sa disparition avait engendré, il ne savait pas à quel point j'en avais souffert, à quel point les séquelles me resteront même après cet appel. J'ai ce penchant pour la boisson dont je n'arrive pas à me défaire, j'ai Ezio dans l'ombre sur qui je n'ai pas envie de me détacher, pas maintenant. J'ai mon coeur encore en lambeau par la nouvelle, coeur que j'ai du mal à réparer malgré le soulagement. Il cite mon nom, et moi je tremble un peu plus. Il rebondit de nouveau sur l'humour, je m'efforce de sourire malgré moi parce que je n'ai pas envie que tu vois comme tu m'as eu Cole, comme tu m'as détruite malgré toi. Je respire un bon coup, ravale la boule qui grandit au fond de ma gorge au fil de la discussion, essuie les larmes qui commençaient à couler du dos de ma main. - C'est ce que tu dis à chaque fois.. C'est ce que tu ne fait jamais. Je ne t'ai jamais lâché, peu importe quand, où, même quand j'étais loin, ton image ne cessé de me hanter, les souvenirs ne cessés d'envahir mon esprit. T'as toujours était avec moi Cole, que ce soit à Boston où à Paris, tu étais là, en moi. Je t'ai dans la peau et personne me l'enlèvera, même pas toi. - Je préfère encore l'option de la puce.. C'est plus sure.. Dis-je en utilisant le même ton ironique que lui. Et puis vient le moment où tu me parle de tes peines de coeur, comme d'habitude, même dans ce genre de moment, même quand je t'ai cru mort pendant des jours, où j'ai dû inonder ta boîte vocale, au premier appel tu penses à me parler de ta vie amoureuse. Je serre les dents, écoute tes histoires futiles qui n'ont aucune importance pour moi à l'heure actuelle. Je m'en balance, pire que ça. - J'ai vu, tu attends quoi de moi ? Que je te fasse un scandal parce que tu as quitté Agathe ? Je fronce les sourcils, incompréhensive. - Loin de là, vous êtes assez grands tous les deux pour gérer vos problèmes seuls. Comme avant que tu partes, comme quand tu étais avec elle et où j'existais à peine. Où plus du tout. Je ferme les yeux, écoute ses paroles qui ne valent presque plus rien, c'est ce qu'il me disait pour Kyla.. Et puis il y a eu Lucky, et au final Agathe. - Agathe gniangnian ? J'ai du mal à le croire.. Vraiment. Je connaissais ma meilleure amie, et je savais que la niaiserie c'était pas vraiment son truc. - Celle que je veux ? Que je demande. Même si soyons honnêtes, je peux chercher pendant des jours, des années, des siècles, je les trouverais jamais assez bien pour toi. J'aurais toujours ce mal à te partager, à te laisser à une autre que moi.
Je la sentais sur un fil, toute son émotion transparaissait dans sa voix, même si elle tâchait de ne pas le montrer. Ils étaient tous dupes. Ils l’appelaient la reine des garces, la reine de glace. Ils la croyaient tous forte, insensibles, inatteignable. Mais à moi, on me la faisait pas. Hippo c’était mon âme sœur, ma meilleure amie, on était bâti de la même façon, on fonctionnait de la même manière. Alors en une phrase, un mot, à sa façon de le prononcer, à l’inflexion de sa voix, j’étais capable de vous décrire précisément les sentiments qui l’habitaient. Je crois que même sans parler, on était aptes à se comprendre elle et moi. Et là clairement, je la sentais bouleversée. Et moi même, si j’avais eu à endurer le silence radio et l’épreuve de la croire disparue à jamais, j’aurais été dans un état au moins similaire si ce n’est pire. Alors je soufflais plusieurs possibilités, celle de ne plus se lâcher, qu’elle me reprochait d’être une promesse déjà prononcée et jamais tenu… « Mais je pouvais pas deviner que le jet allait se crasher… » que je me justifiais alors, avec cette voix de gosse pris en faute. Ouais enfin filer à l’autre bout du monde sur un coup de tête et feindre qu’on allait se marier tout ça parce que sa petite amie vous avait contrarié, ça yes, ok, je plaidais coupable, c’était ma faute. Impulsif, compulsif. On ne me changerait pas. L’option puce, note d’humour dans cette discussion trop sérieuse et trop chargée en émotion sembla ramener un peu de légèreté et d’ironie entre nous. « Je savais que ça te plairait. Par contre évite de me mettre une laisse hein. » me marrai-je, parce que oui ceux qu’on puçait habituellement c’était les toutous. Et si par téléphone, dans ses messages, miss Dunford en sanglot assurait qu’elle me pardonnait tout, je craignais que ça n’inclue pas ma dernière colerie en date. Alors autant mettre le sujet délicat sur le tapis de suite : ma rupture avec Agathe en direct des réseaux sociaux. Impulsif compulsif again. Bref, rien de respectueux, rien d’humain, rien de sympathique. Un largage humiliant dans les règles de l’art si bien que je craignais de voir entacher mon amitié avec Hippo, BFF d’Agathe. Et j’étais plutôt heureux d’entendre qu’elle ne comptait pas s’en mêler. Pas de parti pris. Elle nous laissait gérer ça seul. Je retrouvais le sourire un peu. Soulagé. Parce que si je pouvais facilement me remettre d’une énième rupture, perdre Hippo, perdre son amitié ça… Ca j’étais nettement moins capable d’encaisser. Puis je lui avouais qu’elle, elle avait eu raison, que j’aurais du l’écouter. Parce qu’elle n’y avait pas cru, qu’elle avait tenté de me dissuader et maintenant voilà, à posteriori, je réalisais qu’encore une fois elle avait vu juste. Alors cadeau pour mon come back, je lui offrais le choix de ma prochaine victime. Ou de mon prochain bourreau au choix. A oui, quand on s’appelait Cole Wildingham, les relations sentimentales étaient une torture et il fallait choisir sa place. « Une pas trop moche quand même… » précisai-je avec un petit rire. « Mais oui, celle que tu veux. » T’as le pouvoir Hippo.