JAIMIE L. CAMILIERI ► alysha nett

   
   Milano, Italia,1998
« Buonasera Signora, polizia di Milano, abbiamo tentato di fermare tuttavia vostro marito, Fabio Camilieri, questo ultimo essendo mostrato si aggressivo verso i nostri colleghi, un incidente ha avuto luogo e vostro sposo è deceduto. Le nostre condoglianze. »
C'est ainsi que ma mère, Lauren, a appris qu'elle seule allait pouvoir me sauver. Elle était rassurée de savoir que désormais, personne ne pourrait m'embarquer dans la violence de la mafia milanaise. Cependant, ma grand-mère, elle, était dévastée. Elle savait que son fils était une ordure de mafieux, mais il restait son bébé, son unique fils. Et moi, j'allais apprendre à exister, sans père. J'avais cinq ans, et pourtant, je savais que dans mes veines, coulait le sang d'un truand rusé. Je ne savais pas pourquoi, mais un sourire s'était dessiné sur mon visage ce soir là, une fois que les carabiniers avaient quitté le pas de la porte. J'allais serrer Nonna dans mes petits bras d'enfant, et lui disais. « Sai Nonna, papà ha fatto tutto per salvarci, tu, mamma ed io. Si sarà mai nel bisogno, perché ha sempre saputo ciò che faceva. Allora non occorre che pianga. » Ma grand-mère arrêtait de pleurer, puis me souriait à nouveau. Elle savait que j'avais raison. Ma mère, quant à elle, éclatait de rire. « Cet enflure a tout calculé, même sa mort. Il était pas si stupide que ça. Jaimie, va dans ta chambre s'il te plait, je dois parler à Nonna. »
Je n'ai jamais su ce qu'il s'est dit après. Je me souviens de l'enterrement de papa, du curé qui disait du bien de lui, de ses amis biens fringués, du discours de chaque personne présentes, et de l'aéroport, pour quitter ma terre natale, pour rejoindre celle de ma mère.

Providence, Rhode Island, 2008
C'était l'anniversaire des dix ans de la mort de mon paternel. Dix ans que je redorais les lettres du nom des Camilieri, selon Nonna. Tous les étés, depuis dix ans, je vais la voir en Italie, où elle me fait ses bons plats et ses bonnes pizzas. Mais les meilleures pizzas du monde, c'étaient celle de ma tante Valentina. Et quand elles le pouvaient, elles venaient toutes les deux aux USA. Ma mère a placé tout l'argent possible de côté, pour mes études et pour mon avenir. Elle dit que « Depuis l'âge de tes cinq ans et jusqu'à ton entrée à la fac, tu vas avoir tellement d'intérêts que tu seras multimillionnaire ». A cette époque là, je m'en fiche un peu. J'ai un secret que je n'ose pas trop révéler : mon homosexualité. Je sais que dans la famille de ma mère, ils sont tous très croyants et assez peu ouverts sur le sujet. « Pas de sexe avant le mariage, les gays sont le reflet de Satan, les enfants à l'église dès le plus jeune âge...» Que des trucs que je ne ferais jamais. Ma mère leur fait croire que j'étais à l'église tout le temps, et pourtant, je connais pas un seul mot de la bible. Si je fais l'honneur d'une famille, je fais pas la joie de la seconde. Et comme je ne veux pas que ma mère soit reniée, je n'ai toujours rien dit. J'ai pourtant une copine. On est au même lycée, elle est plutôt canon, gentille, et en plus, ça fait quelques mois qu'on se fréquente. Je fais souvent croire à la mama que ce n'est qu'une amie, pour ne pas me griller, mais un soir, alors qu'elle dormait à la maison, on s'est fait gauler. Je ne savais plus où me mettre. Pourtant, dans toute sa douceur, ma mère nous a demandé de ne pas nous cacher. « Ma puce, je suis ta mère, et jamais je pourrais te juger sur ce que tu es. Et Dieu sait que j'ai pas toujours fait de bonnes choses dans ma vie, comme me marier avec ton mafieux de père. Mais la meilleure chose que j'ai faite, c'est toi. Alors je suis ravie de connaître ta copine, et elle sera toujours la bienvenue ici. » Ces mots m'ont tellement marquée, que je m'en souviendrais toujours. « T'es la meilleure mère au monde, mama. Pardon de ne pas avoir eu le courage de te le dire. »

Boston, Massachusetts, 2011 - 2017
Après plus de deux ans de relation amoureuse avec la même fille, nos chemins se sont séparés, mais pas trop. A l'heure actuelle, elle est toujours ma meilleure amie, et il nous arrive parfois de remettre le couvert de temps en temps, quand on a pas d'autres filles à se mettre sous la dent. Mes études à Harvard suivent leur cours depuis six ans maintenant. Six ans de fêtes à ne plus me souvenir de mon prénom, ni du prénom d'une fille qui se réveille dans mon lit. Six ans de tatouages sur le corps, de drogues essayées, d'amitiés liées, déliées, de relations charnelles, de sourires, de joies, de peines, d'angoisses. Puis la mort de Nonna. Le pire déchirement que j'ai pu avoir à ce jour. Cette femme était ce qu'il me restait de mes racines italiennes, et à l'heure actuelle, je suis encore attristée de cette perte. Mais je me bats toujours. Pour lui, pour elle, pour tous ceux qui pensaient que j'étais incapable de ne pas m'en sortir indemne. La boxe m'aide à combattre mes angoisses et mes crises de violence, et pour le reste, je prends la vie telle qu'elle vient. A l'écoute de chacun.



Traduction :
* Bonsoir Madame, police de Milan, nous avons tenté d'arrêter votre mari, Fabio Camilieri, cependant, ce dernier s'étant montré agressif envers nos collègues, un incident a eu lieu et votre époux est décédé. Nos condoléances. *
* Tu sais Nonna, papa a tout fait pour nous sauver, toi, maman et moi. On sera jamais dans le besoin, parce qu'il a toujours su ce qu'il faisait. Alors il faut pas que tu pleures. *