Journal d'une vie de débauche ♣ Gee

Cher journal,

Welcome back, Harvard. Cette année, je vais mieux, je n'ai plus besoin de ce putain de traitement qui m'a faite vriller. J'ai mes périodes, certes, comme tout le monde. Mais si j'écris aujourd'hui, c'est surement pour faire le point sur ma vie. Amour, sexe, trahison, drogue, alcool, psychiatrie, le décès de ma mère, le fait d'apprendre que récemment que j'avais une soeur jumelle que je ne connais pas, dont je ne sais rien. M'a t-on menti toute ma vie ? Dois-je en vouloir à ma mère d'être partie sans rien me dire ? Dois-je en vouloir à ma soeur de ne pas s'être manifestée avant, alors que je ne connais pas son prénom ? Est-ce cette fille qui me ressemble en tout points physiques et dont je ressens toutes les émotions rien qu'en la regardant ? Pourquoi Katarina m'attire tant ? Pourquoi lorsque j'ai rencontré Miki tout allait mieux ? Je suis perdue, je ne sais plus. Maman, aide moi à connaître toutes les réponses... Tu me manques, sale droguée de merde, je te hais d'être partie. T'aurais pu m'aider, merde ! Tu m'as jamais vraiment aidée quand t'étais là, alors aide moi maintenant, il parait que tu me surveilles de là où t'es ! Prouve le, bordel... Putain, j'ai taché ma page parce que je chiale maintenant. J'vais sortir ma vodka et arrêter d'écrire pour le moment.  

Cher journal,
J'ai enfin rencontré ma soeur, elle s'appelle Dylan, elle est exactement pareille que moi. J'ai retrouvé ma personne, celle qui me complète, celle qui pourra me relever quand j'irai mal, celle qui saura tout de moi. J'ai un peu peur, tu sais ? Peur de ne pas être une soeur géniale, compréhensive, une soeur bien comme il faut. J'sais pas comment on peut être une soeur parfaite pour sa moitié, sa bonne moitié. Je sais pas comment on agit dans ce genre de situation. J'sais rien de tout ça, j'suis perdue, j'ai l'impression de vivre ce rêve récurent que je fais depuis quelques mois, depuis ce jour où j'ai regardé mon dossier médical. J'étais pas folle, non, j'étais tout à fait normale, on m'a menti durant plus de vingt ans de ma chienne de vie, sur toute la ligne. J'pensais que j'allais galérer question argent, j'me retrouve pétée de thunes. J'ai pensé que j'étais fille unique, j'ai une soeur jumelle dont j'ai été séparée à la naissance. J'pensais que j'étais folle, c'était qu'une illusion donnée pour que j'ferme ma gueule. Dans un an j'vais apprendre que mon père est à Cambridge aussi ? Cet inconnu dont je ne sais ni le visage, ni le nom de famille, ni le prénom, ni rien du tout ? Si on m'apprend ça, je crois que oui, je deviendrais folle, et je n'irais pas à sa rencontre. Il peut crever dans un caniveau celui là ! Manquerait plus que ça, retrouver mon père au bout de vingt deux ans, et que j'lui cours dans les bras en plus. J'suis très bien orpheline, maintenant que j'ai ma moitié. Qu'ils aillent tous s'faire foutre.

Cher journal,
Voilà bien longtemps que je ne t'avais pas ouvert, puisque je n'avais rien à te dire. Mais maintenant, j'ai réellement besoin de me vider l'esprit. Il y a à peine quelques semaines, une bombe a explosé à Harvard. J'ai été l'une de ses victimes, perdant l'usage provisoire, selon les médecins, de mes jambes. Tout ca pour quoi ? Parce qu'un mec a craqué et qu'il voulait être écouté. Il a arraché des vies, traumatisé les survivants, et parfois, blessé à vie de pauvres innocents. Se trouver dans le parking à ce moment là a surement été l'une de mes pires erreurs. J'ai réellement eu peur, avant de sombrer dans un malaise. Je me trouvais au téléphone avec celle qui fait battre mon coeur pour la première fois. Eireen. Puis j'ai tout perdu. Mon téléphone, ma voiture, ma liberté de bouger où je veux sans ce putain de fauteuil. J'ai pu racheter tout ce qui était matériel, mais je ne peux pas conduire sans mes jambes. Je n'ai plus gout à rien, je broie du noir, seule, dans ma chambre à la Mather House. J'essaye de revivre, mais revoir ces moments traverser mon esprit me mine un peu plus chaque fois. Voir un psy ? Pour faire quoi ? Pleurer ? Ca va me rendre mes jambes ? Ca va me rendre mon enfance, ma mère, la vie que je n'ai jamais eu ? Non, ca va rien me rendre. Je hais ce type, qui qu'il soit, ou était. Il a ruiné ma vie, du moins, ce que j'avais pu construire.

Cher journal,
Il s'en est passé des choses depuis fin janvier. Et si j'ressens le besoin de t'ouvrir à nouveau aujourd'hui, c'est pour libérer mon esprit de toutes ces peurs et de tout ce que je veux évacuer. Je vais commencer par le commencement. Mon histoire avec Ocyllie. Le Spring Break et tout ce que j'ai pu y faire, et j'en ai fait des choses, en Thaïlande. Ca a commencé sur la plage, quand je l'ai vue. Elle m'a tout de suite attirée, par la grâce dans ses pas de danse. C'était comme Lou. La nouvelle Lou, ma nouvelle vie. La même, sans pour autant être comme l'ancienne. Pourquoi elle m'attirait ainsi et pourquoi elle m'obsédait depuis ce jour là, alors que je pensais juste que j'allais coucher avec et ne plus jamais la revoir ? Et pourtant. Je la revoyais, on était proches, on avait des gestes tendres l'une envers l'autre. Puis le bal est arrivé, c'était le début d'une histoire assez bizarre. J'avais des sentiments, oui, c'était sur. Mais le Summer Camp a tout chamboulé. D'abord avec Dixie, lors de la première journée en équipe. Puis Lou est revenue dans ma vie, comme ca, sans crier gare. Et j'me suis faite prendre à mon propre jeu. J'me suis faite surprendre dans mes draps avec elle, par la meilleure amie d'Ocyllie, ce qui a tout fait basculer. J'l'ai blessée, cette fille là. Et j'pensais pas que ca partirait aussi loin dans ma tête, jusqu'à que je vois sa putain de lettre. Le masque que je portais depuis des années s'est fissuré, me faisant à nouveau basculer dans la déchéance la plus totale. La drogue pour seule échappatoire, j'en ai abusé, j'ai sombré une semaine dans un hôpital trop blanc, trop seule. J'avais arrêté la drogue, putain. J'ai sombré à nouveau, comme une conne que je suis.

Puis Lou. Putain, Lou. Pourquoi elle est revenue, aussi ? Sans elle, j'serai pas redevenue comme ca, c'était l'élément perturbateur dans l'histoire. Le fil conducteur de ma propre perte. Et pourtant, malgré toutes ces années, ces sept putain d'années où mon regard à croisé le sien et où nos lèvres se sont touchées pour la première fois, elle est toujours là, folle de moi. Et en sept ans, j'ai eu peur de perdre sa fidélité pour moi qu'une fois. La seule fois où elle l'a brisée. Parce que Lou, avant d'être mon ex, c'est mon assurance, ma sécurité sentimentale. Quoi que j'fasse, elle est toujours là, à attendre après moi comme un chien de garde, un animal fidèle. Comme une pauvre conne aveuglée par son amour inconditionnel pour moi, malgré toutes les souffrances que j'peux lui infliger. Et j'lui en ai déjà infligé beaucoup, des souffrances. Et j'pense pas que ca soit terminé. J'pense qu'elle va encore beaucoup souffrir pour mes beaux yeux et pour mes lèvres, pour lesquelles elle se damnerait sans problèmes. Je sais qu'elle donnerait son âme pour moi et comme un monstre, je la regarde faire.

Puis il y a Willow. J'ai vraiment eu peur pour elle. Pourquoi ne m'a t-elle rien dit, sur sa maladie, avant ce jour où j'ai faillit la perdre ? Pourquoi j'perds tout ceux que j'aime ? Non, j'l'ai pas encore perdue, du moins, pas encore. Mais si ca s'trouve, j'vais la perdre, et ca m'fait peur. Si j'm'attache à elle ? Oui, bien sur. Elle est attachante, elle est douce, elle a un beau sourire. Malgré qu'elle soit Eliot. On ne peut pas être parfait tout le temps, après tout. Mais Willow, c'est surement celle qui me changera vraiment, qui me donnera envie d'être vraiment moi-même. Qui me fera enlever le masque de la fille sans coeur que j'me colle depuis cinq ans sur la tronche. Mais j'ai déjà fais l'effort de le casser un peu, ce masque d'invincible. De commencer à me montrer comme je suis vraiment. La fille qui a peur, qui se sent incertaine. Et putain, ca libère vraiment, de se montrer telle que je suis au fond.

Enfin, il y a Grace. Grace qui m'abandonne pour vivre sa relation trop passionnelle avec Konrad. Grace qui est malade, qui vomit du sang et qui a des migraines. Grace qui elle aussi est malade. Grace qui elle aussi a une tumeur au cerveau, certainement. Putain, j'veux pas perdre mon amie et ma copine dans la même année, comment j'vais faire moi, sans elles ? Comment j'vais m'en sortir, alors que j'ai besoin d'elles ? J'pense pas qu'à moi dans cette histoire. Comment leurs proches pourraient vivre ca, alors que d'habitude j'suis celle sur qui on s'appuie quand ca va pas et qui remonte le moral ? Comment on ferait tous, si on a plus Grace et Willow ? Putain, pourquoi j'pense au pire ? Elles vont s'en sortir, toutes les deux. Et merde, je pleure, là en pensant au pire. Nique sa mère la maladie, nique sa mère la tumeur, allez vous faire enfler au Pakistan. J'sais pas ce qu'il m'a pris de gratter autant le papier, mais j'en avais certainement vraiment besoin. Et puis, j'me suis réconciliée avec ma mère aussi. Preuve que j'ai grandis dans ma tête, que j'suis plus autant la gosse que tout le monde pensait. Mais après tout ce que j'ai vécu ces derniers mois, c'est normal que j'commence à prendre de la maturité. J'vais pas garder dix ans d'âge mental toute ma vie. Du moins, c'est ce que j'espère. Atteindre au moins vingt ou trente ans d'âge mental. Enfin bref, j'vais m'arrêter là, ca vaut mieux pour tout le monde. Peace xxx