R. CALEB PECORELLA ► milo ventimiglia

Une histoire complexe qui laisse place à tellement de nuances, de suppositions. À une envie de foutre le mot coupable contre le front de tous les personnages.

Il est mort et tu t’en fous. Voilà. Personne ne sait pourquoi. Sauf… toi. Et t’oublies ces souvenirs si destructeurs que tu en viens même à oublier ce qui t’as rendu ainsi. Tellement … insensible, sociopathe. Tôt, tu as appris que le passé doit rester au passé. C’est peut-être la raison pourquoi tu cherches tant à fuire ce qui t’y ramène, que tu dissocies souvent en négatif ce que les autres ressentent envers toi, alors que ce n’est que du positif. Une sorte d’armure qui t’oblige à te refaire un nouveau cercle social régulièrement. Pourquoi s’accrocher alors qu’une collection d’infidèles se nouent répétitivement à tes bagages?

Tu te redresses sur ta chaise. Ce rayon de soleil te fait clairement chier parce qu'il t'impose d'être semi aveugle, mais pas autant que cette réalité énoncée.

Une figure de force, probablement la seule pendant toute ton enfance. Une femme aimée et connue de son coin, démolie par la perte de ses deux conjoints de vie, décédés dans de tristes circonstances. Ta rancune s’accroche à cette manipulation qu’elle a usé pendant de trop longues années. Ce n’est pas normal que tu te répétais. De faire les courses illégales de ta mère tout en lui procurant une mort à petit feu. Une situation perturbante pour un adolescent. Pourquoi aider si ce n’est que pour finir dans le grapin de la manipulation?

Tes lèvres osent un tic nerveux et tu regardes le sol. Aucune salive, tu tends ta main vers ton verre d’eau et t’engloutis juste suffisamment pour t’hydrater.


Ta blessure la plus récente. C’était facile pour toi de t’en sortir alors que vous vous battiez contre le même combat, relation naissante par la même occasion. Tout est possible lorsque l’amour s’invite à la partie. Et puis elle a abandonné, overdosé. T’as pété un câble, réaction normale. Elle s’est jointe à ta liste de deuils et t’as disjoncté quand t’as remis la main sur ta substance d’escapade. Pourquoi continuer de s’aider si personne ne s’en sort vraiment?

C’est trop récent. Tes mains se forment en poings et tu cherches le peu de patience que ton corps héberge.


Hanté par l’abandon que tu fuis mais que tu lui as offert. Un passé douteux, une relation instable et incomprise. Tu cherches même à nier le degré d’importance que tu lui accordes. Comme si elle ne faisait pas partie du problème central. Comme si elle n’était rien. Alors qu’elle est la raison de ton silence. Pourquoi s’aimer si ce n’est que pour se détruire?

Tu comprends même pas où tu veux en venir. Tes actes et façons de penser se contredisent constamment. Tu reprends un peu sur toi-même et ton attention s’installe sur ton interlocuteur. “Dr. Tanner” que tu lis sur son étiquette, c’est alors que tu t’exprimes pour la première fois. « J’aime votre honnêteté. Vous délivrez ce que je vous ai demandé. Même si ce n’est pas dans vos fonctions d’être tant personnel. » Tu parles drôlement droitement et tu renchéris. « Mais je m’attendais à un résumé plus positif de ces rencontres. Deux mois, c’était l’entente non? » Tes yeux essaient de déchiffrer les traits inébranlables de ton psychologue mais c’est un échec pitoyable jusqu’à ce qu’après un soupire, il s’exprime à son tour. « Oui, deux mois et je vous disais quel était réellement votre problème. » Il recommence à te vouvoyer, c’est presque étrange. « Vous êtes suffisamment intelligent pour savoir que vous n’avez pas réellement de problème. Cognitif ou autre, je veux dire. » Il prend une pause et tu commences à trouver les secondes interminables. « Vous vivez au passé Caleb. Vous me répétiez constamment que vous acceptez tout ce que vous avez vécu. Mais non, vous voyez votre famille et certaines personnes comme les coupables de votre existence. La raison de votre échec à rester sobre, de votre échec à être normal socialement. Vous êtes ainsi Caleb, c’est votre devoir de l’accepter. » Tu dévies à nouveau vers le sol, incapable d’accepter que tes deux mois de sobriété soient célébrés par un psychologue qui s’amuse à te faire la moral. Tu restes calme, tu t’étonnes toi-même. « Vous n’avez pas parlé de Mika. » Il esquisse un sourire. « Vous êtes trop peu patient Caleb. » Il se permet une taquinerie passagère pour détendre l’atmosphère et tu fais mines que tu es prêt à écouter la fin.

Mika donc… Tu te détestes de l’avoir détesté. Tu voudrais pouvoir tout changer. Son emprisonnement par ta faute et celle de ta mère, ton abandon face à lui, le fait d’aimer la femme qu’il aime. Et surtout qu’il ait été ton sauveur il y a quelques mois.

Ton visage s'affaisse et tu te souviens de t’être réveillé à l’hôpital, informé par l’infirmière que ton frère jumeau était arrivé à temps, alors que tu gisais sur le sol suivant une overdose. Depuis ce temps, il est un support pour toi. De retour en Italie depuis deux semaines, vous gardez toujours contact présentement. « Vous avez tellement raison que c’en est irritant. » Il te regarde sérieusement quelques secondes avant d’étouffer un rire complice. « Vous savez que je n’ai pas le droit de faire de rapport aussi détaillé. De m’exprimer autant sur ce que vous ressentez. Ce qui se dit ici, reste ici. » Tu le regardes d’un air rassureur. « Vous savez que je n’ai pas la moindre envie de dire que je consulte un psychologue, alors encore moins de dénoncer quoi que ce soit à votre sujet. » Tu jettes un coup d'oeil vers l'horloge, la séance se termine dans quelques minutes. « Prêt pour le retour à Harvard? » Tu étouffes un rire incertain et tu te permets de réfléchir afin de bien énoncé tes états d’âme. « Oui. Et non. Plusieurs pensent que j’ai été renvoyé en Italie et que je suis incarcéré ou un truc du genre. » Tu as préféré passer pour le vandale plutôt que pour le démuni moralement. Mais bon, tout le monde saura la vérité à un certain point puisqu’un criminel ne peut pas aller à Harvard. Bref, couverture de merde que tu t’es mis.

[....]

« 2 semaines exactement, soit le 9 mai. 16h15. Aurevoir. » Tu n’as pas le choix de conserver un suivi avec ce psychologue, une des demandes de la direction d’Harvard. Ta vie se doit de prendre un chemin beaucoup plus droit, et la seule question est ; réussiras-tu à garder les pieds vers l’avant?