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I hit it
feat. Giulia M. Scorsese & Andréa L. Grimaldi
Sur le trajet de son loft jusqu'à l'hôtel de ville, il n'y avait le plus souvent qu'un pan de route sur lequel la circulation était fluide. L'Italienne en profitait toujours pour foncer, sentir le vent lutter contre la carrosserie et voir comme tout autour devenait flou avec la vitesse. Cependant, alors que son pied appuyait sur l'accélérateur, un fracas lui rappela que sa sacoche et ses essais sur toile reposaient sans être attachés sur la banquette arrière. Elle tâcha de conduire raisonnablement pour ne pas tout renverser, et pris un tournant débouchant sur une entrée peu fréquentée de Boston. La présence du soleil était la bienvenue en cet après-midi de mars. Peut-être pourrait-elle même faire tomber son manteau de fourrure pour une veste plus légère, si au-dehors la température était acceptable. Avait-elle emmenée sa veste à carreaux ? À dix mètres d'un feu rouge, elle se retourna et laissa ses pieds freiner, leur confiant l'estimation de la distance, tandis qu'elle vérifiait que sa veste était encore sur la plage arrière.
La voiture sursauta et instantanément, une plainte stridente retentit. Giulia se retourna brusquement, plaquant ses deux mains sur le volant, bouche et yeux grands ouverts. Elle se redressa du mieux qu'elle pu sur son siège, mais sa petite taille l'obligea à sortir en hâte, espérant avoir imaginé le jappement qu'elle avait cru entendre. La voiture avait été arrêtée à peine un mètre avant le feu. Entre les deux gros pneus, gémissant et à la fourrure blanche tâchée de rouge, Giulia découvrit l'obstacle canin. La panique l'envahit ; elle perdit un instant le contrôle de sa respiration, des larmes de surprise jaillirent de ses yeux et un courant d'air glacé et crispant lui sembla fendre son cœur. Vite, elle regarda autour. Il y avait des voitures plus loin, mais aucune derrière, ni vraisemblablement de piétons témoins. Pour quelques instants pétrifiée, elle fixa la bête souffrante à ses pieds, le sang qui infiltrait doucement le bitume. Elle s'approcha enfin et la saisit, aplatit d'une main sa veste sur le siège arrière et y allongea la bête le plus vite qu'elle pu, par soucis de lui faire mal. Un véhicule arrivait par derrière ; le premier instinct de l'étudiante fut de sauter dans sa voiture et de se remettre à conduire. Étrangement, elle avait très peur. Elle ne voulait pas recevoir d'aide, devoir expliquer la situation à qui que ce soit.
Elle conduit une minute, bouillonnante, pour finalement se garer brusquement à la première place libre. La panique lui amena de brutaux sanglots, tandis qu'elle tirait son téléphone de sa poche. Elle se mordit la lèvre avec puissance, gémit en cœur avec la pauvre bête accidentée, et se frappa le front de sa paume. Le chien avait besoin d'aide ! Elle aurait dû attendre que l'autre conducteur s'arrête. Mais non, elle s'était enfuie. Elle perdait du temps et l'animal faiblissait. Elle se rendit compte que la rue lui était légèrement familière et l'identifia vite comme celle d'Andy. Il s'y connaissait bien en animaux. Sans réfléchir plus, elle l'appela, sanglots et respiration saccadée se mêlant dans sa voix. «Salut, j'ai percuté un chien. Je suis dans ta rue, au numéro...» Elle tendit le cou pour lire : «2460». Elle se tourna vers l'animal. Il ne faisait plus de bruit, mais son ventre se soulevait encore. Il avait un collier autour du cou. «Putain… Je suis désolée, je sais pas quoi faire. J'ai besoin... de ton aide». Un collier autour du cou. Gi' se glissa à l'arrière, poussa son matériel de peinture pour s'asseoir à côté de l'animal. Il était domestiqué, du coup. Elle passa sa main dans le poil angora et laissa sa respiration se rééquilibrer peu à peu, le regard flottant dans le vide. ~
@Andréa L. Grimaldi
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