(PEROL) no issue

J'en peux plus sérieux, je coupe la conversation avec le paternel assez rapidement. Le spring break était censé être un moment de détente, pour une fois je m'octroyais le droit de ne pas penser au reste, c'est encore raté. Je viens d'apprendre l'énorme connerie qu'ils viennent de faire et j'ai les nerfs. Comment Marin a-t-il pu laissé faire ça ? Et comme toujours ça retombe sur moi, je dois les surveiller, c'est à moi de leur dire qu'ils ne s'en sortiront pas si facilement...
Je ne lâche pas mon portable des mains et envoie un message à Marin, Louve et Fauve dans la foulée, et ils ont plutôt intérêt à répondre et se ramener rapidement. J'envoie le numéro de ma chambre, une suite d'ailleurs bien trop grande pour une seule personne, mais quand on est habitué au confort, difficile de faire autrement. La soirée est déjà bien entamée, j'étais sur le point de sortir et j'me retrouvais encore à changer mes plans pour eux, à cause d'eux. Qu'est-ce que je fais ? Je les tue dès leur arrivée ou j'attends un peu d'avoir le plaisir de les écouter, raconter leur récit, dont ils seront fiers à tous les coups. Est-ce que j'ai la patience pour ça ? Peut-être pas, mais je ne peux pas les laisser sur cette "réussite". J'attends leur retour, trépignant dans ma chambre les bras croisés, j'ai chaud, mais c'est pas grâce à la Jamaïque.

‘Pas de blague foireuse’ qu’il m’a dit. Je ris en relisant son message, je sens la tension qui s’en dégage. Il a sûrement dû finalement être mis au courant de notre petite boulette, à Marin et moi, à l’aéroport. Notre plan, aussi foireux soit-il, je l’ai adoré. J’ai adoré le mettre en place et le jouer. A nous deux, on pourrait sûrement faire un remake de very bad trip. Qu’importe. Si Colin est au courant, soit une fouine lui a soufflé nos idioties, soit le paternel est au courant. Dans ce cas, c’est fessée déculottée assurée. A moins d’atténuer les choses en faisant mine d’être désolé. Ca, c’est faisable. Et dans mes habitudes. Il le sait sûrement à force, mais je jouerai la comédie s’il le faut pour ne pas entendre son ton moralisateur durant des heures. Ca me saoulerait. J’enfile mes baskets et je sillonne les couloirs de l’hôtel à la recherche du numéro qu’il m’a indiqué :  1015. Ok. J’attrape au passage dans le couloir un pot de fleurs et les extirpe de là pour les offrir à Colichou. Colin ou François IIème du nom. Un second père, un second moralisateur. Je souffle un bon coup, adopte ma mine la plus mignonne et tape frénétiquement à la porte de la chambre. « Colinou ? Mon amouuuur de frère, tu m’ouvres ? » Je prépare déjà mes yeux de biche pour tenter de l’attendrir, sait-on jamais. Et puis, si ça se trouve, il nous réclame pour une raison autre ? C’est beau de rêver.

Ce message de Colin était vraiment plus que curieux. Mais qu'est-ce que Marin et Louve avaient encore bien pus trafiqués ?? Décidément, ces deux là n'en finiraient jamais avec leurs conneries. Loin de là l'idée de les juger !! Fauve adorait ses frères et ses soeurs sans exceptions et elle avait notamment toujours été très proche de Louve. Cependant, elle ne pouvait nier qu'ils avaient un certain don pour la décevoir par moment. Si tôt la réponse au SMS de son frère envoyé, elle enfila sa veste de cuir pour se rendre à l'adresse de lui avait envoyé Colin. Décidément, ce Spring Break prenait des allures assez inquiétantes. Si tôt rendue à l'hôtel, Fauve ne tarde pas à trouver le numéro de chambre. En même temps, assez difficile de le louper puisque Louve se tenait déjà devant la porte, attendant que leur aîné daigne leur ouvrir. La rejoignant rapidement, la petite brune croisa ses bras contre sa poitrine. « Qu'est-ce que vous avez fait ?? » lui chuchota-t-elle en venant passer son bras autour de ses épaules. Puis, elle toqua légèrement à son tour. « Colin ?? Ouvres ;a porte s'il te plaît. »

le soleil se lève, les oiseaux chantent et la nuit avait été rude. Je me réveil une fois de plus complètement dans le coltard on n’ayant aucune idée de l'heure qu'il pouvait être. M'étirant, j'attrapais rapidement le portable sur la table de chevet en tchekant les nouvelles du jour. Peut être que finalement Denleigh était enfin arrivé ou bien que la jolie verte que j'avais en vue me rappelait. J'aimais croire en les causes perdues. C'est mon fort. Malheureusement seulement une notification, un message de mon frère me donnant la chair de poule. oh oh. Qu'est-ce que c'est que ça ? Vu le ton du message je me doutais qu'il n'allait pas nous accueillir à bras ouvert, avec un petit déjeuner, nous embrassant sur le front pour nous dire bonjour. Je décide finalement à me lever, m'habillant légèrement à cause du temps et marchant avec mes claquettes jusqu'à sa chambre. J'ai la gueule de bois, mais la petite douche prise avant n'avait pas été de refus. Voyant mes deux soeurs, Fauve et Louve, je commençais à comprendre que c'était carrément une réunion de famille. Attend, peut être que j'ai encore le temps de m'enfuir ? De me barrer ? Mais je me ravisais à cause de la flemme de partir en courant, soignant mon départ de la scène qu'était ma vie. « hola les gonzs, bon qu'est-ce qu'on branle ici ? J'ai du sommeil à rattraper. » répondis-je au moment même où un baillement incontrôlable s'échappait de mes lèvres. je veux dormir, ayez pitié de moi.

Ils savaient tous très bien qu'il fallait qu'ils rappliquent rapidement, c'était pas la première fois qu'on faisait ce genre de petite réunion. Comme d'habitude, c'était les mêmes qu'il fallait sermonner... ça s'arrêtera un jour ? Est-ce qu'ils comprendront par eux-mêmes que leurs actes ont des conséquences ? Je sais que je leur pourrie la vie avec mes remarques, le fait d'être toujours sur leur dos, mais si seulement ils étaient un minimum responsables. Nos parents étaient toujours derrière à ramasser leurs miettes et j'avais beau leur dire d'arrêter, rien à faire. Il était hors de question que cela fasse de la mauvaise pub à la famille. Et c'est la que j'entends frapper à la porte. Je craque ma nuque machinalement, comme pour me préparer au combat.
J'ouvre la porte et inspecte mes trois gamins devant moi. La première affiche un large et faux sourire, des fleurs à la main et la voix mielleuse, pas avec moi Louve. Fauve est là, telle un petit rayon de soleil, absolument pas au courant de la chose. Et le dernier, qui arrive tout mollasson, prêt à denier toutes responsabilités et à me retourner le cerveau. Les faits sont là.  « Rentrez les filles » je me décale pour les laisser entrer, puis mon petit frère passe, ma main donne un léger coup derrière la tête de Marin « merci de nous honorer de ta présence » mon sourire est forcé, ils entrent tous les trois et mon regard finit par ce poser sur la plus petite. « j'aurai préféré vous voir dans d'autres circonstances, mais comme d'habitude j'suis obligé de vous fliquer... » et comme pour la mettre au pied du mur, inspectant ses faits et gestes et surtout pour savoir si elle me dirait la vérité, j'interroge Louve en premier.  « Peux-tu s'il te plait, expliquer à notre chère sœur, pourquoi nous sommes ici aujourd'hui et surtout raconter l'épisode de l'aéroport, oui surtout l'aéroport. » je fixe Louve, attendant sagement sa réponse. La pauvre Fauve était là et n'avait sûrement aucune idée de ce qu'il se passait, elle avait bien le droit à certaines réponses. Je m'attarderais plus tard sur la réaction de Marin, bien sûr.

 

Fauve débarque alors que je me tiens devant la porte de la chambre de Colin avec un bouquet ramassé dans le coin. Et à peine arrivée, elle me demande ce qu’on a foutu. J’hausse les épaules et lui dépose un baiser sur la joue en guise de réponse, jouant des cils pour faire mine de ne rien savoir. « Je sais pas, demande à Marin, je suis sûre qu’il a encore fait une connerie ce vilain garçon ! » Et puis, à peine répondu que voilà le coupable. Je le regarde de haut en bas, ça se voit qu’il a baisé toute la nuit. Ou qu’il a en tout cas beaucoup bu et peu dormi. « T’aurais pu te laver, Colin va faire un AVC à cause de toi, tu devrais avoir honte ! Et puis, qu’est-ce que t’as encore fait, hein ? » Je le regarde avec mon plus beau sourire. Un sourire vicieux, parce que je suis certaine de savoir ce qu’ON a fait. Mais bon. C’est fait, c’est fait, fallait nous remonter les bretelles beaucoup plus tôt ! D’ailleurs, Papa Pérol n°2 se décide enfin à ouvrir la porte. Je reprends de suite mon plus beau sourire, ma plus belle posture et la voix la plus mielleuse que je peux. « Colinou ! Tu m’as manqué, t’étais passé où ? » Je m’éternise pas plus parce que je vais avoir droit à un pied au cul sinon, je file rapidement dans la chambre et j’y dépose les fleurs. Enfin, je les jette à moitié sur le bord d’un meuble. A la Louve, quoi. Et là, j’entends la voix de Colin. J’écoute ce qu’il me dit. Ce qu’il me demande surtout. Et merde. Va falloir jouer la comédie, une fois de plus. « Moi aussi j’aimerais savoir ce qu’on fait ici… ça va être dur de lui expliquer, peut-être que Marin a une explication ? Alors, Marin ? On fait quoi, ici ? C’est quelle gentille fille que t’as mis enceinte cette fois ? » Je fais mine de ne pas comprendre, je joue l’étonnée, je dépose mon index sur mon menton en faisant mine de réfléchir. « L’aéroport ? Il s’est passé quelque chose ? Attends… » Je tends ma main comme pour marquer une pause, lui demander de me laisser trois secondes pour m’installer dans un fauteuil. « Donc, l’aéroport… Ah, oui ! Figure-toi qu’il m’est arrivé de drôles de choses ! Tu sais, quand on a quitté notre beau pays d’adoption, j’ai donné ma valise au bon endroit. J’ai suivi les autres. Et puis, comme par hasard, comme par magie, en arrivant ici, rien ! Mais rien de rien ! Du coup, j’ai crié à l’aide, je savais plus quoi faire, j’étais désemparée… Oh, Colin, si tu savais comme j’ai été déçue ! Triste ! Dévastée par cette perte ! Toute ma vie se trouvait dans cette valise, et… » Je me force à remplir mes yeux de fausses larmes, comme pour obtenir la compassion non seulement de Colin, mais aussi de Fauve. Qui sait, ça pourrait me sauver la mise. « Et j’ai tout perdu. A cause d’incapables. Je sais pas ce qu’ils ont fait ! On doit vouloir ma peau ! Je suis sûre qu’ils nous aiment pas, nous, les Pérol ! On dérange, ici, Colin, tu le sais, non ? Tu le sais ! » Pour clore mon monologue, je laisse une larme couler le long de ma joue. Quelle bonne comédienne, dites-donc. Bon, sûrement que mon jeu d’actrice ne vaudra rien pour Colin mais au moins j’aurai essayé.

Je suis quand même content de croiser mes soeurs. L'autre crétine que j'affectionne particulièrement et la douce Fauve. Malheureusement pour moi, Louve ne voulait pas me laisser en paix et mes oreilles furent attaquées aussi vite qu'un soutien-gorge qu'on dégrafe. Elle me gueule dessus. Gniagnia ci et gnagna ca et je vois son sourire. Hein ? Toujours dans ma bulle, je vois enfin Colin sortir sa tête pour nous accueillir, on retrouver Louve mielleuse et une bonne vieille frappe des famille quand je passais à mon tour la porte. « Aïeeeeeeeuh. Putain Colin. » Dis-je en me frottant le haut de la tête, je sais pas ce qui se passe, mais c'est pas moi, okay ? Je suis pas venue pour souffrir moi. Juste pour un "ouais on s'aime" et puis basta, on se revoit l'année prochaine quand ma gueule se sera remise du bordel d'hier. Colin commence son interrogatoire, mais cette fois c'est Louve qui ouvre le bal. Je m’assoies sur une chaise, et les écoutes en esquissant un sourire. Mais quel est con. Mettre enceinte une nana ? J'ai déjà pas mal de soucis comme ça. Et puis le sujet arrive, progressivement. L’aéroport. Ah putain, merde c'est vrai. J'avais presque oublié ce moment de franche rigolade. Je me tais, laissant Louve faire sa comédie que je connais déjà. Elle chiale un bon coup, sa valise est perdu, c'est la fin du monde. « Ouais elle a raison. » J'hôche la tête espérant nous en sortir facilement avec ça.