LENYS + One more night.

T'es au milieu de cette piste de danse, pleine à craquer. Tu tournes, tu virevoltes, tombant dans les bras de l'un et de l'autre. Tu regardes à peine les visages, pas assez accrocheurs pour toi, pas vraiment intéressant. Non, t'as juste envie de te vider la tête, d'entamer comme il se doit cette nouvelle vie dans laquelle tu te lance encore une fois. Encore un nouveau départ en espérant que celui-ci sera le bon. Ce genre de soirée te rappelle amèrement la belle époque avec ton ex, quand l'amour venait de naître, quand vous étiez encore beaux a deux. Quand il te faisait découvrir les joies de la nuit. Ce soir, tu les découvrent de nouveau, seule, sans personne parce qu'à part Lennox tu connais pas grand monde par ici. Puis, toi t'es pas du genre très sociable, un peu trop sauvage, un peu trop volage on sait jamais sur quel pieds danser avec toi. Ce soir, tu te laisse aller au rythme de la musique qui vient faire saigner tes tympans, une jupe bien trop courte, des talons bien trop hauts et de l'alcool qui coule à flot dans tes veines et vient faire rougir tes yeux. Tes pupilles dilatés par la drogue que tu viens de prendre, ton nez dans la poudreuse et te voilà au top de ta forme. Tu danses comme si c'était la première fois, comme si c'était la dernière fois. Jusqu'à épuisement, jusqu'à en perdre ton souffle. Et puis t'as soif maintenant, t'as encore envie de boire parce que t'es jamais rassasié. Alors tu te dirige vers ce bar, te frayant un chemin dans la foule en délire, ta robe fichue par le liquide qui se déverse sur toi sur la route du bar. Tu t'en tape, c'est qu'une robe merdique, une robe qui te rappelle ta vie de princesse que t'as préféré quitter. Tu marches sans savoir où tu met les pieds, tu trébuches et te rattrape à quelqu'un avec le peu de conscience qu'il te reste. - Oops.. Désolé ! Que tu dis en pouffant un rire débile à souhait. Tes yeux se relèvent vers l'inconnu en question, tu restes une seconde à le regarder. À analyser les traits de son visage. Il est beau. Foutrement beau. - J'suis pas doué avec des talons je crois. Que tu lances en mimant une moue boudeuse sans réelle sincérité.

Je n’en pouvais plus de ressasser, de me passer et repasser ce rencard du week end, censé être salvateur mais qui n’avait fait que me renfoncer la tête sous l’eau. Y’avait pas d’issue, pas d’échappatoire et les tensions avec ma coloc prenaient des proportions de plus en plus importantes. Chaque discussion, chaque garçon qu’elle évoquait, chaque ami masculin avec qui elle passait du temps, me poussait à jouer les détectives, à la questionner, à me braquer chaque fois que je constatais son intérêt pour un autre. Ca devenait invivable pour moi, pour elle aussi car j’avais conscience d’être complètement lunatique, impossible à suivre et insupportable. Seulement la jalousie m’habitait et bordel, ça faisait un mal de chien de constater qu’elle pouvait se lier aussi facilement avec un autre. Alors oui, ce soir, j’avais convié Marin, la soirée tranquille s’était rapidement changé en beuverie, traquenard. Je le soupçonnais de vouloir m’enivrer pour me changer les idées, et je devais avouer que ça marchait plutôt bien, si bien même, que lorsqu’il me proposa de sortir, je le suivis sans rechigner malgré mon humeur massacrante un peu plus tôt dans la soirée. Rapidement, dans la boîte, je perdis mon pote de vue. Surement parti draguer, qu’importe, j’avais trouvé ma place : accoudé au comptoir, parfait. Enfin parfait, pas tant que ça parce que je sentis d’un coup des mains s’agrippant à ma chemise. Je fis alors volte face, me tournant vers la maladroite pour découvrir une ravissante blonde qui s’excusait promptement. « C’est pas grave… » répondis-je avec un sourire aimable. Elle cita ses talons comme excuses, et son manque d’aisance sur ces derniers. « Moi c’est pareil, j’suis pas très talon. » répliquai-je alors avec une certaine ironie,  mes pieds entreraient à peine dans des escarpins quand bien même je le voudrais. « Mais ça va ? Je veux dire tu ne t’es pas fait mal ? » demandai-je, en retrouvant mon sérieux, craignant qu’elle se soit tordue la cheville ou quelque chose du genre dans la manouvre. « Je m’appelle Denys au fait. » me présentai-je ensuite. Mes prunelles la détaillèrent ensuite quelques secondes avant d’arriver à cette conclusion : « Je ne t’ai jamais vue ici ? »  

Retour aux sources. Retour au commencement, au tout début de ton changement, avant le massacre, avec la douleur avant le drame. T'essaye de retrouver un peu de la Léo avec la joie de vivre, jamais froid aux yeux, celle qui ne ferme jamais sa gueule. Et tu le bouscule lui, tu remercieras tes talons pour la peine, c'est le seul qui parvient à susciter un petit peu ton intérêt. Le seul d'ici avec qui tu ne t'emmerde pas dès la première seconde où il ouvre la bouche. Ça te fait bizarre, en même temps ça te plait. Ça fait longtemps que tu ne t'es pas relancé dans un jeu de séduction, t'as peut être même perdu la main pour le coup.. Il a l'air doux, presque timide. Tout le contraire de toi ou encore ceux que t'as pu fréquenter avant, une touche de sensibilité que t'apprécierais presque. Ton regard se baisse par réflexe vers ses chaussures. Un sourire se dessine sur ton visage quand tu comprends l'ironie de sa phrase, ouais, avec l'alcool ça devient difficile de pas perdre le fil. - Ah bon ? Pourtant j'suis certaine que ça t'irait à ravir ! Tu ris, comme une teubé, tu ris parce que tu l'imagine avec tes talons, tu l'imagine aussi se fracasser la gueule de façon spectaculaire. - J'peux même te prêter les miens s'tu veux.. Que tu proposes naïvement en arquant un sourcil dans sa direction. Tu secoues la tête de gauche à droite, faisant un tour sur toi même avant de lever les mains vers le ciel. - Trop solide pour succomber à une chute de rien du tout ! Tu fais mine de montrer tes muscles inexistants de tes biceps secs. - Enchanté Denys, moi c'est Léo. Que tu dis avant de te tourner vers le barman et de commander deux shots de tequila. - Avoue que t'aurais aimé me rencontrer plus tôt hein ? C'est souvent l'effet que j'fais.. Tu lancés en prenant un ton suffisant à souhait. Un ton qui sonne beaucoup trop faux chez toi. - En fait, je viens d'arriver dans le coin ! Ça fait longtemps que t'es ici toi ? Tu t'approche du bar, vos verres arrivent rapidement, t'en glisse un devant lui avec un sourire en coin enfantin. - Tu m'suis ? Tu demandes en désignant le verre. Allez joue avec elle !

Installé au bar, j’essayais de me rappeler pourquoi je m’étais laissé entrainer ici : ha oui c’est vrai. Parce que ça allait bien de ruminer et d’être chonchon mais que cela ne me ressemblait pas vraiment. Fallait que je fasse la fête, que je profite, et les apéros pris avec mon ami avant de partir avait surement aidé parce que je me sentais déjà mieux, accoudé au comptoir, attendant mon verre lorsqu’une demoiselle me tomba littéralement dessus. Bousculé ainsi, je me tournais pour la découvrir, jolie blonde maladroite mais souriante, qui s’excusait déjà d’ailleurs en blâmant ses talons, l’occasion pour moi d’ironiser sur ma propre adresse avec ce genre de chaussures. Quand elle souligna, en riant, que ça m’irait bien, me proposant les siens, je refusais en me marrant : « Pas vraiment envie de finir la nuit aux urgences. » Parce que c’était chute assurée, entre l’alcool et ce genre d’escarpins qui s’apparentaient davantage à des échasses plus qu’autre chose. Je m’inquiétais d’ailleurs de son état à elle, de ses chevilles, et elle me rassura sur son état, soulignant sa solidité en gonflant ses biceps imaginaires, attitude qui m’arracha un nouveau rire : « C’est le moment où tu vas me proposer un bras de fer c’est ça, madame muscle ? » Je la détaillais alors qu’elle déclinait son identité. « Enchanté Léo. » C’était un endroit souvent fréquenté par les étudiants du coin, je m’étonnais donc de ne jamais l’avoir croisée et elle s’amusa à interpréter ma question. « Parce que plus tôt dans la soirée tu étais moins saoule et tu tenais mieux sur des pieds ? » interprétai-je à mon tour, sourire au coin des lèvres, lueur taquine dans les yeux. Elle reprit plus sérieusement en m’expliquant qu’elle venait d’arriver. « Je suis revenu en juin dernier. J’suis étudiant à Harvard. Et j’avais déjà passé deux ans ici par le passé. » Le barman ramena des shoot de tequila et la jeune femme en fit malicieusement glisser un devant moi, en me défiant de la suivre : « Je te suis et je te bats. » annonçai-je, regard défiant à son attention, saisissant le premier shooter pour me l’enfiler cul sec.

C'est la première rencontre que tu fais depuis que t'es là.. La première qui ne te fait pas rappeler ton passé comme Len' ou encore Ash. T'as peur de côtoyer ce petit monde, t'as peur de danser avec tes démons d'avant et pourtant au fond d'toi, ils te manque. T'as honte de le penser mais ils te manque et tu l'sais. Mais c'est dans ses yeux bleus azur que tu te perd ce soir, que tu te laisser envoûter pour tout oublier. Pour t'oublier toi, et puis un peu lui aussi.. Un peu tout en fait. T'as juste envie de laisser respirer ton cerveau, d'abandonner toutes ses réflexions qui te tournent en boucle dans la tête depuis que t'es là, et cette peur de rester ici. T'éloigner de l'idée de t'enfuir encore une fois, c'est c'que tu fais toujours. - J'suis sûre que tu te sous estime ! Tu lui lance un clin d'œil complice, laissant derrière tes pensées noires. Ton regard se baisse vers ton corps de crevette à peine crédible, ouais, faut pas se leurrer.. Même en te battant avec une mouche t'es pas certaine de gagner ! Puis tes yeux se baladent sur son corps à lui, ce Denys un court instant avant d'hausser les épaules. - Non, t'es pas à la hauteur, j'ai pas le temps pour les amateurs. Petit lancé de cheveux en arrière exagéré et un air suffisant collé au visage. Tu ris à sa remarque, moins saoule ? T'sais pas trop. Tenir sur tes talons, ouais surement un peu mieux que ça déjà. - Huuum... Pas sur tout ça ! Que tu dis en tordant la bouche sur le côté. Puis vient le moment où on se parle vaguement de nos vies, surtout de la sienne parce que la tienne t'as juste envie de l'enterrer. - Pourquoi t'es revenu au final ? Tu demandes intrigué. Les verres que t'as commandé arrivent finalement, et vous coupe dans votre conversation. Il relève le défi et il se la joue en plus prétentieux monsieur. Tu relèves les sourcils surprise, avant de rapidement enfiler ton verre à la suite. - Ne soit pas si sure de toi.. T'as la gueule d'un mec qui dégueule au bout de deux tournées. Que tu lances en te rapprochant à peine de son oreille, le dévisageant de haut en bas.

 « Et moi je suis sûr que ça sera plus prudent que tu finisses la soirée pieds nus… » commentai-je amusé, en lançant un nouveau regard vers ses échasses puis sur les verres que le serveur posait devant nous. Oui, après tout ça, même en tong c’était mission impossible de marcher droit. Elle était drôle en tout cas, cette blondinette. Et puis elle avait le luxe de tomber à pique, pile poil quand je perdais Marin des yeux et que je me retrouvais seul. Elle mettait un peu de pimpant dans ma soirée et m’évitait clairement de broyer du noir tout seul devant mon verre, parce que dès ce premier échange amusé sur ses chaussures, y’avait cette complicité taquine qui s’installait entre nous. Complicité qui perdura quand miss biceps gonfla ses bras et que je rigolai en imaginant le bras de fer à venir. Mon rire redoubla en entendant sa réponse et sa fausse modestie. On parla plus sérieusement, quelques secondes, j’appris qu’elle venait d’arriver, je confiais pour ma part être revenu en juin dernier. « Les études. J’imagine que t’es étudiante aussi non ? » Elle avait l’air jeune et puis naturellement comme c’était la fac la plus célèbre du coin, j’ajoutai : « Harvard ? » Le sérieux ne dura pas bien longtemps, cédant sa place au jeu, au challenge. Regard et ton défiant, j’enfilai mon cul sec en annonçant la couleur : j’allais la battre. Pas convaincu, elle enquilla un nouveau shooter avant de me charrier. J’enchainai donc, mon deuxième cul sec avant de me tourner vers elle, prenant un air faussement écoeuré : « Ils sont où les toilettes ? » Main devant la bouche comme si j’allais vomir, comme elle m’avait accusé d’être le genre de gars qui flanchait en deux verres. Je pouffais ensuite, attrapai un troisième verre et le bus d’une traite : « Tadam ! » Tout fier, je reposai le shooter vide sur le comptoir. « Toi par contre, t’as la tête d’une fille qui dégueule au bout de trois verres. » répliquai-je histoire de la pousser à continuer le jeu.  

 Je m’avançai un peu, maintenant qu’elle n’était plus perchée sur ses talons, elle était tout de suite moins grande, ça m’amusait donc de le lui faire remarquer : «Le bras de fer t’es toujours aussi assurée de l’emporter petite ? » la taquinai-je avant d’ajouter, quand même : « Enfin, tout ce qui est petit est mignon, donc prends ça comme un surnom affectueux hein… » Elle me plaisait bien cette petite demoiselle, arrivée comme une furie en me tombant littéralement dessus. Peut être que je devrais les bénir ses escarpins en fait, ça nous avait ainsi permis de discuter. Et j’avoue que depuis ce moment, mes pensées étaient accaparées par la blondinette et je ne songeais plus à mes autres préoccupations du moment. J’appris donc qu’elle était à Harvard, étudiante aussi ici, venue rejoindre quelqu’un. C’est l’utilisation du mot vague, -quelqu’un-, qui m’intrigua et qui me poussa à faire mon curieux : « Ton petit ami ? » Oui, parce que moi, c’était tellement le genre de chose que je pouvais faire quand j’étais mordu : quitter l’endroit où je vivais, m’en aller à l’autre bout du monde, tout ça pour suivre ma bien aimée… Enfin, j’imaginais très bien être capable de faire ce genre de truc, parce que dans les faits, j’avais jamais eu l’occas’ d’éprouver cette théorie vu que toutes les filles auxquelles je m’attachais avaient la fâcheuse tendance à me repousser… Je confirmais mon statut d’Harvadien : « C’est ça. Psycho en majeur. Sport en mineur. Et je dis pas ça pour te décourager du bras de fer hein… » ajoutai-je avec un clin d’œil alors qu’une autre compet se profilait entre nous, avec les verres étalés sur le comptoir. On se défiait, on se charriait et mimant un instant une remontée, la demoiselle me jeta un regard écoeuré avant de me narguer de plus belle en se moquant de mes culs secs enchaînés. Et elle mettait la barre encore plus hait avec 5 shooters. « Ok. Ok. J’avoue. Je suis bluffé. Tu devrais t’inscrire en confrérie, et t’es déjà prête et opérationnelle pour les soirées mather. » annonçai-je alors avant d’expliquer : « La mather house, c’est ma confrérie. T’es faite pour ça visiblement. »