You and I are the same

Il s'agit là d'une journée comme les autres à Harvard. De belles demoiselles qui se sentent mal et font un saut par l'infirmerie. Les douleurs menstruelles, les maux de tête qui vrillent les tempes, les vertiges, et j'en passe. C'est mon lot quotidien. Puis il y a les sportifs, qui se blessent toujours. Contusions, foulures, entorses, etc. Ils ne restent jamais longtemps mais ce sont toujours les mêmes au fil du temps j'ai appris à les connaître, je sais reconnaître ceux qui simulent aussi. Et pourtant lorsque cet étudiant passe la porte, je ne le reconnais pas. C'est la première fois qu'il vient. Mes talons hauts claquent sur le sol, sous ma longue blouse blanche ouverte, je porte une robe bleue pastel descendant aux genoux, légèrement décolettée. Toujours belle, ça m'aide à avoir confiance, à me sentir invulnérable face aux événements.

- Bonjour ! Je ne vous ai jamais vu ! Qu'est-ce qui vous amène, monsieur ... ?

Je demande à la fois son nom et la raison de sa venue alors que je viens lui serrer la main pour me présenter.

- Je suis Ellana Pinkerman, l'infirmière en charge aujourd'hui.

J'ai bien d'autres collègues, une infirmière pour des centaines d'étudiants, c'est impossible. Je vais jusqu'au bureau où je note l'heure, la date, le nom, le prénom du "patient". Je regarde son dossier médical très vite, pour avoir les grandes lignes.

- Aucune allergie spécial dont je devrais savoir ? Est-ce que vous vous blessez souvent ? Mon petit doigt me dit que non, mais beaucoup préfèrent l'automédication plutôt que de venir me voir ou consulter un médecin. Je vois sur votre dossier que vous avez une mineure en sports. Vous pratiquez quels sports ?

Je demande, curieuse, désireuse d'en savoir plus sur lui. L'idée est d'avoir une approche familière pour mettre en confiance les étudiants. Généralement on laisse tomber très vite le tutoiement, et c'est pour le mieux. Quand une relation de confiance est instaurée, il est plus facile de soigner les gens, j'ai déjà remarqué ça au Nigéria il y a maintenant cinq ans.

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Je sentais la colère monter en moi tandis que j'étais allongé par terre en me tenant la cheville. Mais quel connard ce mec. Il avait fait exprès de me pousser afin que je tombe à terre et maintenant une douleur me lançait au niveau de la cheville. J'entendais le coach siffler pour mettre le match en pause tandis que je jurais, fusillant du regard le concerné. Il était hors de question que je me laisse faire mais, là tout de suite, je ne pouvais même pas me lever. Au bout de quelques minutes, la douleur se calma et quelqu'un m'aida à me relever. J'avais beau assurer que ça allait, le coach insista pour que j'aille voir l'infirmière accompagné d'un membre de l'équipe qui me soutenait. Certes, je boitais un peu mais rien de grave, je pouvais encore marcher tout seul alors je repoussais le mec qui m'aidait en lui disant que ça irait, que je pouvais y aller seul et, sans lui laisser le choix, je continuais vers l'infirmerie. A ma plus grande surprise, celle qui s'occuperait de moi n'était pas une grosse femme, vieille fille avec de la barbe au menton. Non, elle était jeune, sexy dans sa robe bleue, blonde comme je les aimais. Un grand sourire aux lèvres, je m'asseyais pas loin, sentant ma colère se dissiper petit à petit. « Ilhan Eastwood mais appelle moi Ilhan, j'aime pas les formalités du coup on se vouvoie pas hein ? Ça me met mal à l'aise ! » Un clin d'oeil dans sa direction pour qu'elle comprenne que ce n'était pas seulement amical. Mais elle ne se laissa pas démonter, se présentant pour ensuite me poser quelques question concernant mes maladies, les trucs du genre. « Nan aucune, j'aime pas les médecins de base c'est vrai mais bon là j'ai pas le choix, le coach m'a envoyé. Et je fais du basket, je suis tombé, enfin quelqu'un m'a poussé et depuis j'ai mal à la cheville. » Haussement d'épaules comme si tout ça n'était pas grave. Au fond, je m'en foutais un peu, peut-être qu'elle me ferait un mot pour pas que je pratique pendant quelques semaines, comme ça je pourrais aller faire la fête à la place. « Faut que j'enlève mes vêtements je parie ? Enfin mes chaussures non ? A moins que tu préfères aussi voir autre chose ? »

Je trouve très vite le dossier du très beau Ilhan. Je le lis rapidement, surtout ce qui m'intéresse. Aucune allergie, tant mieux, c'est toujours un plus. Sans quitter l'écran des yeux, je souris lorsqu'il se propose d'enlever ses vêtements. Il n'est pas le premier étudiant à flirter avec moi. Je ne vais pas mentir, il m'est arrivée une fois ou deux de flirter en retour. La plupart des étudiants ont mon âge, ou presque. D'après son dossier, Ilhan a vingt-trois ans et j'en ai vingt-six, il est majeur et vacciné, je ne suis pas dans la criminalité si je réponds positivement à son flirt.

- Beaucoup me disent la même chose tu sais quand ils viennent ici, c'est loin d'être la phrase d'approche la plus originale que j'ai entendu.

Je plaisante, sourire aux lèvres avant de me lever et de montrer contre le mur la table d'examination où les patients s'installent pour que je puisse regarder ce qui ne va pas.

- Et à moins que tu veuilles faire un check up complet en plus, tu n'as pas à enlever tes vêtements. Installe toi sur la table d'examination.

Une fois installé je lui intime d'enlever sa chaussure et sa chaussette. Une fois fait, je prend la cheville entre mes mains, délicatement. Je masse doucement, je touche, je palpe.

- Est-ce que ça fait mal quand je manipule ? Si tu devais noter la douleur de un à dix, dix étant pour une douleur insupportable, tu donnerais quelle note ?

Je demande, sachant déjà qu'il ne s'agit pas de quelque chose de bien grave. Une légère foulure, ça sera réglé en un rien de temps.

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Tentant de ne pas montrer que j'avais mal, je m'installais sur la table d'examen, grimaçant légèrement lorsque je m'appuyais sur la cheville qui s'était tordue. Le seul truc qui me rassurait c'était que l'infirmière ne semblait pas se moquer de moi, l'homme qui jouait le gros dur et qui pourtant se plaint d'une cheville tordue. Elle n'avait pas non plus l'air étonnée que je veuille flirter avec elle, beaucoup d'autres m'aurait déjà rembarré ou envoyé chez le doyen juste pour avoir osé les tutoyer. Ces femmes là n'avaient pas le sens de l'humour. Toujours en grimaçant, j'enlevais ma chaussure et ma chaussette afin de lui montrer ma cheville qui avait commencé à enfler. Les mains de l'infirmière étaient froides, ce qui me fit un peu de bien au moment où elle les posa sur la partie qui me faisait mal. Puis elle me demanda de noter la douleur et là un dilemme s'imposa à moi : dire la vérité ou continuer à jouer aux gros durs ? « Un. Je sens à peine la douleur ». Mensonge. Je ne sentais que ça quand je marchais, ce qui était d'ailleurs la raison pour laquelle je boitais et faisais des grimaces bizarres à chaque fois que je posais le pied par terre. « Tu t'appelles comment d'ailleurs ? Parce que tu connais mon prénom donc je devrais aussi connaître le tien ». Autant faire connaissance pendant que tu me soignais non ? Je n'aimais pas les silences gênants du coup je meublais comme je le pouvais, quitte à paraître insolent. Au fond, je n'en avais pas grand chose à faire que les personnes ne m'aiment pas ou trouvent mes questions déplacées.

Un ? Bah dis donc, quel homme. Je réprime un sourire amusé devant l'étudiant qui essaye de jouer les gros durs, ça me fait rire gentiment. Je m'installe et commence à manipuler le pied, la cheville, avec extrême précaution. Je suis connue pour mes doigts de fées, pas en tant que l'infirmière bourreau qui te fait plus mal encore que lorsque tu rentres à l'infirmerie pour être soigné. Je lui souris quand il demande mon prénom, il n'a pas tort, savoir le prénom de l'un et pas de l'autre, ça devient vite bizarre et impersonnel.

- Ellana.

Je réponds simplement dans un sourire amusé. Je caresse la cheville endolorie avec le pouce, délicatement.

- C'est enflammé. Elle n'est pas cassée, c'est déjà ça. Une simple entorse begnigne que tu as là. Je vais te donner un bandage élastique que tu devras garder autour de la cheville pour empêcher tout mouvement latéral superflus, ça devrait déjà te soulager un peu.

Je lui dis en me levant, me dirigeant vers une étagère dans lesquels se trouvent ces bandage. J'en sors un d'un plastique hermétique et reviens m'installer, lui enfilant moi même le bandage comme le prince chausse Cendrillon de sa chaussure de verre.

- Bien entendu, pas de sports pendant deux semaines au moins. Evite de trop bouger, et dés que tu le peux, fais en sorte de garder ton pied en hauteur, d'accord ? Avec du repos, de la prudence, le bandage et quelques dolipranes ça devrait aller mieux.

Je le rassure avec un sourire chaleureux.

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