It's just a game ft. Annalynne

« Anna, c'est à toi que je parle. » J'en relève le visage, le nez plongé dans le livre de compte du club. Elle est serveuse ici, depuis quelques temps, c'est la nouvelle moi, celle qui me remplace quand je me dois de jouer le rôle de propriétaire de l'endroit. Tobias est chez les parents de Clay, je les vois trop souvent, mais avec le temps, je m'y fais. Et puis lui auquel je fais semblant de ne plus penser, pour lequel je me ronge intérieurement d'ignorer ce qu'il fait, de ne pas avoir de nouvelles, de voir qu'il me laisse couler. Que depuis que c'est arrivé, je n'ai eu de sa part que quelques textos dans lesquels il acceptait de se sentir fautif, en face en face il ne nous reste toujours que le pire. Trimballant mon impression de ne pas lui manquer. « De quoi ? » elle lève les yeux au ciel, elle m'insupporte un peu, mais je la sais pas mauvaise, juste un brin trop enfantine pour moi. Les gamines, je n'aime pas ça. « On sort ce soir ? Quand j'aurai fini ? » On est amies, je crois, on a ce genre de relation de mentor et apprentis que je ne maîtrise pas. Sortir, moi ? Pourquoi ? « Dans vingt minutes, on va se détendre quoi. » Ah.

Et sans que je ne comprenne ni le comment ni le reste, je me suis retrouvée dans ce bar, accoudée au comptoir, avec dans l'idée de me changer les idées, de ne plus me laisser être hantée par Clay. « T'es pas bavarde. » Je le sais, mais tu fais la contre balance, ne t'inquiètes pas. Puisqu'elle parle clairement plus que moi. La conversation, c'est presque un monologue, mais dans le fond, ça me va. Mais une chose me tire de ses réflexions et de mes sourires de situation. Le serveur s'approchant de moi, déposant face à mon visage, un verre, en m'indiquant, l'homme venant de me l'offrir. J'en reste une seconde dubitative … Ce n'est pas comme si on ne me draguait jamais, au club je suis habituée, mais là c'est en dehors, et j'avoue que ça fait quelques temps que ce n'était pas arrivée, faute d'une vie enchaînée à Alan, de mon histoire avec Clay. Et je me retourne pour le regarder, son sourire éclatant, sa main se relevant. Loin de ne pas être charmant … Ce n'est pas lui et c'est pour cette raison qu'à son salue je ne réponds pas. Ca me casse un brin de réaliser que je suis encore sous l'emprise de l'homme dont j'ai porté l'enfant. « Tu n'y vas pas ? » Qu'elle me demande, en gloussant. Les filles, c'est énervant. « Attends. » D'une main j'empoigne le cocktail qu'il vient de m'offrir, et descends de mon tabouret afin de m'approcher de sa table, flanquée d'une expression satisfaite, souriante. Une fois à sa hauteur, je dépose le verre tout à côté du sien. Haussant les épaules. « Mauvaise pioche, je n'aime pas la vodka. » Pour avoir été serveuse, je mets ma main a couper qu'il y en dans cette mixture la.

Sur la défensive, je sais bien que c'est ce que je suis, mais je ne peux m'en empêcher, et l'on ne peut me blâmer après ce que j'ai découvert en décembre dernier. Même s'il ne me connaît ni d'Eve ni d'Adam et qu'il devait seulement penser à la finalité de sa soirée. Moi en train de crier. « Bah... Si tu avais pris le temps de juste sentir, il n'y a pas la moindre goutte d'alcool dedans. » Sérieusement ? A son image, je jongle de son regard – perçant – au verre en me demandant si je me suis trompée à ce point, moi qui me vante de connaître chaque cocktail sur le bout des doigts. « Je t'offre un verre juste par sympathie, pas pour te rendre saoule et ne plus comprendre un traître mot de ce que tu racontes. » Par sympathie ? J'en pouffe presque de rire, il est vrai que je suis un tantinet rouillé de ce côté, mais qu'on se le dise, ce n'était pas que par sympathie, il y a toujours une volonté derrière un verre offert. « Mais... J'ai visiblement pas choisi la bonne personne... » Paupières plissées alors qu'il me sert un sourire avant de se lever, le-dit verre en main. Choquant mon expression par l'audace dont il peut faire preuve sur l'instant. Une seconde mon regard batifole jusque ma compagne attitrée de ce soir, et Sarah serre entre ses dents la paille de sa propre consommation, se payant ma tête pour dire vrai. Et comme ça possède le don de m'agacer, j'en soupire alors qu'il revient prendre place et que d'un centimètre je n'ai pas bougée. De ma hauteur ajoutée à celle de mes talons, je l'observe en passant ma langue sur mes dents, commentant ses actes d'un « Sérieusement ? » J'en secoue le visage, j'avais cru un instant avoir su lire sur le sien que dans le ventre il en avait un peu plus. « Je m'attendais à mieux. » Comme argumentation, je ne crierai pas à la déception, loin de là, mais j'en hausse les épaules avant de me retourner pour reprendre place sur mon tabouret. C'est presque trop rapide sa façon d'abandonner. Quand Sarah murmure amusée ; « Il te faut quoi ? » Elle lui lance de biais une œillade, visiblement il est à son goût. C'est en riant qu'à mon tour, je me permets – à l'image d'une gamine – de le regarder à nouveau, avant de lui répondre d'un air distrait. « Plus qu'une belle gueule. » Je veux du mordant, de l'éloquent, un homme qui me tient tête ... Un mec qui se batte pour moi, chose que de la bonne manière Clay ne fait pas, et c'est un truc qui impacte bien trop sur moi.