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Fragments of us
Côme & Jupiter
Côme & Jupiter
Le pardessus épais dont je me recouvre vient se heurter à mes genoux, violenté par les humeurs bancales du vent nivéal. D'un pas véloce je me dirige en direction de l'antre de la bâtisse, là où m'attend le jeune brun aux pommettes pâles comme porcelaine, fragiles, lisses aux détails précis et nobles. Les écouteurs aux oreilles comme ancrés et part entière de mon enveloppe corporelle, je fais pleine abstraction du chant des premiers oiseaux, des susurres des feuilles qui effleurent le sol. C'est ainsi que je loupe inconscient ce spectacle qui s'offre à moi, banalisé par les méfaits de cette routine qui se résume à ces mécanismes machinaux et fades. Même le cadran de ma montre ne parvient à me perturber, jonché sous le tissu qui parcours mon bras comme un tatouage recouvre le corps de son essence, lui qui indique sans scrupule ces minutes qui s'écoulent sans moi, là où je ne suis pas, où je dois être, où je vais. Le regard baissé un instant sur la poche qui se loge à l'avant de mon pantalon, je plonge une main hésitante qui du bout des doigts caresse la matière et d'une contraction récupère le trésor, la clé de l'entrée. Lorsque mes pupilles se lient à nouveau aux spectres du soleil, une ombre me distrait, elle longe le mur, discrète, ne semble pas glisser le long des briques aux teintes terre et ocre. C'est lui, le bizut comme je l'appelle, par peur de mal prononcer le prénom indiqué sur les feuilles. Côme. Je me souviens avoir louché lorsque j'ai découvert cet assemblement de lettres, Côme. Similaire à cette rencontre dont je n'ai plus de nouvelles depuis peu, parce que sa vie fait qu'il est peut-être trop occupé pour le moment, parce que les décors évoluent, les fonds de tiroirs se remplissent, d'autres restent vides et ternissent. Il me fait penser à lui et dans le silence, je me dis que sa présence ici relève de l'impossible alors je me tais, le regard vide, neutre, je me voue silencieux. Ma paume vient se poser au creux de son dos et d'une force douce et mesurée, le pousse en direction de la porte que j'ouvre à ce même instant. « Salut le bizut ! Tu vas bien ? » L'autre paume qui rejoint sa tête vient frotter ses cheveux, laisse le tout en bataille. « Suis-moi, je vais poser ces affaires dans mon ancienne chambre. » Je débite tout en désignant d'un mouvement démesuré le sac à mon dos. Un sac à dos noir sans le moindre artifice qui comporte des affaires de sport, notamment les miennes et celle d'une personne qui a tout oublié, sans doute l'esprit noyé dans une mer de pensée hostile aux vagues tranchantes et rigides. La main levée, je lui fais signe de me suivre d'un geste de l'index et d'un pas pressé prend le premier couloir en direction de la chambre où plus tôt j'ai logé.
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