It was only a punch • Bambi

Une nouvelle journée aux urgences et comme toujours, Bambi ne s'étonnait pas que les infirmières appellent cela "Bagdad". Non seulement les vraies urgences pouvaient vite tourner à la boucherie mais en prime, cela défilait toute la journée, sans discontinuer. Il valait mieux ne pas être une petite nature qui tournait de l’œil à la moindre goutte de sang. Par une chance incroyable, ce n'était pas le cas de l'italienne, ne rechignant pas à la tache et étant toujours reprise par le même hôpital à chacun de ses stages... c'était bien parce qu'elle était douée, quelque part. Certains patients revenaient même la remercier, les enfants ramenaient des cadeaux, mais celui qu'elle s'apprêtait à soigner pour la deuxième fois espérait sûrement qu'elle ne l'ait pas reconnu au contraire. A sa façon d'agir, la brunette en aurait presque mis sa main à couper. Suivez-moi... énonça-t-elle d'une voix douce, accompagnée d'un sourire, avant de le faire entrer dans une salle d'auscultation où la demoiselle eut la primeur de constater de l'état de son arcade. Pas joli joli tout ça. Bambi aurait pu en grimacer, mais elle en avait déjà vu d'autres pendant ses divers stages. Vous voulez quelque chose pour la douleur avant que je ne vous soigne ? Il va vous falloir au moins six ou sept points au bas mot... si vous ne pensez pas que vous supporterez, n'hésitez pas à me le dire proposa-t-elle avant de jeter un coup d’œil au dossier pour voir le nom et la raison de sa visite. On s'est encore pris à vous Monsieur Graham ?

Le refus du jeune homme ne la surprit pas réellement. Sans savoir pourquoi, Bambi ne se sentait pas en présence de quelqu'un capable de hurler face à quelques points de sutures. Simple intuition, bien entendu, car à ce moment précis, l'italienne n'avait pas encore parcourut le dossier de son patient. Si elle avait su qu'il était militaire et souffrant de stress post-traumatique, son intuition serait devenu certitude. Pour le moment, elle rendit son sourire à son interlocuteur, le laissant seul juge et maître de la douleur qu'il souhaitait ressentir ou pas. Je n'en doute pas... vous êtes seul juge répondit-elle d'une voix douce, sans moquerie, trouvant au contraire courageux de refuser des antidouleurs. Une blessure à l'arcade sourcilière saignait toujours énormément mais faisant également très mal. Certes, Bambi ne se l'était jamais ouverte mais c'était le bruit de couloir qui circulait dans chaque service d'urgences dans lequel elle avait été en stage. En tout cas, une fois qu'elle fut en mesure de poser son regard sur le dossier de Timothy, son intuition devint effectivement certitude, et elle comprit mieux pourquoi il venait de refuser tout antidouleur. Difficile également de ne pas voir l'historique récent, composé d'une visite qu'elle avait notée elle-même puisque le compte-rendu était signé de sa main : Bambi Corleonesi. La réponse que lui fit son patient la surprit légèrement, son impulsivité, elle avait du mal à y croire très curieusement. Vous avez d'autres blessures à part votre arcade ? demanda-t-elle, très professionnelle, notant quelques détails sur le dossier avant de se laver consciencieusement les mains et enfiler des gants. C'est moi qui vous ai vu la dernière fois... je me souvenais bien de vous.

Le savoir atteint de stress post-traumatique changeait pas mal de choses et notamment la vision qu'avait Bambi de sa façon d'être, de parler, de bouger. Rien que sa voix tremblante fut un indice sur son premier mensonge. Non pas que l'italienne soit particulièrement experte en la matière, mais il lui semblait louche que les marques rouges aperçues très brièvement un peu plus tôt ne soient pas d'autres blessures à regarder de plus près également. Hélas, tant que Tim ne lui en donnerait pas la permission, il n'était rien que la brunette ne puisse faire. Hors de question que de le sangler au lit pour mieux lui enlever son pull de force... ce serait ridicule et hors de propos. Non. Elle se contenta tout d'abord de se laver consciencieusement les mains, tentant la méthode douce en tâtant le terrain, mine de rien, avant de lui dire qu'elle savait. La dernière fois, c'était déjà elle qui l'avait soigné, et manque de bol pour lui, Bambi avait très bonne mémoire... surtout pour les patients l'ayant marquée d'une quelconque manière, ce qui était le cas de Tim. Elle se rapprocha donc, ses gants mis en place, alors qu'il avouait que la fois dernière, ce n'était pas pour la même chose, avant de lui offrir son sourire le plus gêné au monde. Respirer un grand coup, je ne suis pas votre ennemie vous savez fit-elle valoir dans un petit sourire sincère, alors qu'elle commençait à désinfecter son arcade, ce qui devait améliorer déjà sa vue. Vous n'êtes pas obligé de me parler à moi car apparemment je ne vous inspire pas confiance, mais essayer de le faire avec quelqu'un... n'importe qui. Ne restez pas seul.

Tim sembla l'écouter puisqu'elle l'entendit respirer profondément. Certes, il toussota légèrement sur la fin mais Bambi ne s'en préoccupa guère car ce n'était pas ce qui l'inquiétait le plus pour le moment. Non. Cette capacité qu'il avait à cacher la vérité sans forcément être doué pour mentir l'inquiétait bien davantage. Je pense que vous savez de quoi je parle fit-elle d'une voix douce alors qu'elle continuait son ouvrage auprès de son arcade endommagée. Apparemment, l'envie de parler ne semblait pas du tout présente, et l'esprit de son patient se perdait dans les méandres de ce stress dont il ne se sortirait pas seul, c'était une certitude certaine. Peut-être l'approche de Bambi n'était-elle pas la bonne. Elle se mit donc à en chercher une autre, mine de rien, avant de reprendre la parole, parlant d'un sujet qu'elle connaissait mieux : elle-même. Vous êtes le premier patient dont je m'occupe personnellement, vous savez ? C'est limite un honneur ! Non pas limite d'ailleurs... j'espère devenir pédiatre un jour. Mais comme je ne suis encore qu'étudiante, je suis souvent affectée aux urgences. Ça aide à s'endurcir vous savez...

Bambi avait tenté de le faire parler de son propre cas, et l'échec étant cuisant, autant changer son fusil d'épaule. Inutile de s'acharner à vouloir le faire s'exprimer sur un sujet qui semblait l'angoisser bien au delà des mots. Quoi de mieux à partir de là que de prendre pour sujet de conversation sa petite personne ? L'italienne la maîtrisait au moins, surtout sa passion pour les enfants, gérant aussi bien sa vie professionnelle présente que future. A l'heure actuelle, elle officiait en tant que clown dans un centre pour enfants malades mais prévoyait, dans un futur proche, de devenir pédiatre. On peut dire ça comme ça oui ! Je m'entends bien avec eux... le feeling passe bien en général renchérit-elle à son interrogation, accompagnant même ses propos d'un sourire, ravie qu'il se mêle à la conversation puisqu'elle ne le concernait pas directement. Sûrement était-ce plus facile. La brunette allait d'ailleurs partager une anecdote, comme il commença à le lui demander avant de faire preuve de plus de maladresse encore que Bambi elle-même, ayant pourtant un niveau assez fort en la matière. Vous excusez pas ! Ça va aller ? Vous savez, en dehors de mon boulot de futur médecin, je suis super maladroite et gaffeuse...