Your body's poetry
Lou & Jupiter
« Tu sais que je suis mieux que les autres. » Savoir, qu'est-ce que je sais au fond ? Je ne sais pas, parce que tout savoir, c'est se fermer à ces infinités de choses sous-jacentes qui obombrent les vérités. Je ne sais pas Lou, je ne sais pas. Es-tu mieux, pire ou que sais-je encore. Je ne connais pas tes concurrentes, elles sont là-bas, au loin, dans les fonds de ces paysages peints. Je ne sais pas pourquoi je reste là, bras croisé, je ne sais pas si tu me suffis mais il ne me faut pas plus ni moins que toi, ta présence, tes souffles saccadés quand ta respiration s'accélère, quand tu as l'impression d'être en retard, quand ton regard assassin vient tuer le verre de ta montre. Tout ça, c'est un peu le lait que je met dans les céréales, ça n'arrive qu'après mais ça rend le tout meilleur. Cela peut sembler minime voir même insignifiant, mais je ne compte plus le nombre de fois où mon sourire s'est accordé au tiens comme une évidence, comme pour valser avec la tienne sur ces tempos endiablés qui rythment nos vies sans le moindre repos. « Peut-être. » Un sourire taquin, une envie de voir son visage se décomposer un instant, l'air de dire 'vraiment, tu oses dire ça ?', adopter avec mépris des esquisses de moue. « Partant pour le restaurant ! » Partant, plus que partant même. Manger est un premier plaisir, en sa compagnie un deuxième. Lou fait partie de ces personnes qui peuvent me parler des choses les plus ennuyantes du monde sans que je me lasse, sans qu'une envie de procrastiner me dévore lorsque je reçois ces messages tard le soir. Elle est une source d'intérêt, voir même une rivière, ou une mer, parce qu'au fond ce n'est pas différent, je ne vois plus les limites de l'intérêt que j'éprouve. Je ne sais plus où m'arrêter, où regarder, que faire, que choisir, parfois j'ai envie de m'élancer dans l'interdit, braver les panneaux stop, les 'attention danger' et les ponts cassés. Oui, Lou a cette valeur sentimentale qui n'a, si on écoute les plus sages, rien de bon, une faiblesse. Une faiblesse tant cette valeur est destructrice, dévastatrice. Je me refuse de la perdre, ce qui m'impose irrémédiablement un passage à la salle de torture mentale le jour où tout va basculer, où nos chemins vont se séparer, où les étoiles vont s'éparpiller dans des pôles opposés. « Mets-ça, cache juste le nécessaire et prends une position aussi modeste que sur tes selfies » Un brin d'ironie sur la fin de mes mots, je lui tend une sorte de long drap blanc, un style assez gracieux qui tend à rappeler ces tenues romaines aux détours du colisée. « En réalité ça va être rapide, je vais simplement te photographier et te repeindre après, donc on va vite pouvoir s'échapper en direction du restaurant. J'ai une petite idée d'où aller mais je doute que cela te plaise. » Sauf si mademoiselle a l'âme aventurière, la passion bestiale de la survie en ces jours d'ennuis.