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Gansey était furieux et avait un mal fou à contenir cette colère qu’il sentait gronder en lui. Il n’avait jamais été doué pour se maitriser, lui qui avait tendance à laisser sortir tout sans s’embêter à filtrer quoi que ce soit. S’il se mordait la lèvre et s’efforçait de rester calme, c’était qu’il n’avait rien à gagner à laisser éclater sa rage. C’était justement car il l’avait fait quelques jours plus tôt entre ces murs qu’il se trouvait dans un tel état de frustration. Il se reprochait encore de s’être laissé aller, mais cela avait été plus fort que lui. Il n’arrivait plus à regarder son frère sans se sentir empli d’une colère sourde. Tout chez Eddard le mettait de mauvaise humeur et ce jour-là, comme toujours quand les deux frères Gansey se retrouvaient l’un en face de l’autre, il n’avait pas pu se maitriser. Son poing était parti et s’était écrasé sur le nez de son frère comme dans un réflexe. Il ne se souvenait même plus ce que son frère avait dit, à moins qu’il ne se soit contenté de le regarder de ce regard condescendant tellement caractéristique du plus âgé de la fratrie Gansey. Toujours était-il que les deux frères s’étaient sautés dessus au sein du centre où ils avaient fait interné leur mère début 2016. Les coups étaient partis sans que qui que ce soit ne parviennent les arrêter et il avait fallu s’y mettre à plusieurs pour les séparer. Bram avait été en position de force, comme souvent. Les deux frères se battaient tous les deux bien, mais Bram avait toujours été plus vicieux dans sa manière de combattre. Il savait où frapper là où son frère se battait de façon plus irréfléchie. Quoi qu’il en soit, le second de la fratrie n’avait ressenti aucune satisfaction et encore moins maintenant qu’il payait le prix de son incapacité à ne pas régler son compte à son frère. De cet excès de colère n’était ressorti que des problèmes. Il se retrouvait privé de visites et devait engager un conflit musclé avec la bonne femme à l’accueil qui refusait obstinément de le laisser passer. « S’il vous plait, je veux juste voir ma mère, ça ne se reproduira plus, je vous le promet » argua-t'il, mais la son interlocutrice secoua la tête. C'était une petite brune rondouillarde qui le regardait avec de grands yeux sincèrement désolés. C'était le genre de regard qui énervait Gansey encore plus. Le genre de regards que les gens vous lancent quand votre père est mort d'une balle reçue en pleine tête, que votre mère a fait une tentative de suicide (tentative qui a manqué de peu d'être couronnée de succès) et que vous ne pouvez même pas compter sur votre grand-frère, trop occupé que vous êtes à le frapper de toutes vos forces. La bonne femme refusa pour la énième fois, s'excusant, comme si ses excuses pouvaient lui apporter la moindre satisfaction. Il se foutait qu'elle soit désolée. Il se sentait furieux contre le monde entier. Il s'en voulait, il en voulait à Eddard, il en voulait à son père d'être mort et à sa mère d'avoir voulu l'être elle aussi. Il en voulait à cette mère qui était sensée être là pour lui d'être coincée dans ce centre où ils avaient dut la placer pour éviter d'avoir à nouveau à la retrouver baignant dans une grosse flaque de son propre sang. Mais il ne pouvait pas éclater. Il ne pouvait pas incendier cette femme car cela aurait été tiré définitivement un trait sur les moments passés au côté de sa mère. Il devait se taire, alors il dut faire un effort monumental pour remercier la femme et se diriger vers la porte. Que pouvait-il faire d'autre ? Il reviendrait plaider sa cause un autre jour en espérant qu'il serait confronté à quelqu'un d'autre. Gansey passa la porte du centre et se retrouva devant ce dernier, à l'air libre. Le temps s'était rafraichi. Décembre était là. Les fêtes de fin d'année se profilaient à l'horizon mais il n'avait pas le coeur à la fête. Votre amour pour Noël en prend un coup lorsque vous vous réveillez pour retrouver le corps ensanglanté de votre mère au pied du sapin. Gansey resta un moment planté juste devant la porte avant de se laisser tomber sur l'une des marches de l'escalier menant au centre. Il tira de son duffle coat son paquet de clopes et en alluma une avant de la coincer entre ses lèvres. D'une autre poche, il sortit ensuite son portable pour rédiger un rapide texto à l'intention de son petit frère. Ils refusent de me laisser voir maman, vas-y quand tu peux et appelles moi dès que tu en sors. Il rangea ensuite à nouveau le téléphone avec un soupire et tira une longue taffe sur sa clope.
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