(denys) i'm not your friend

Le jeu avait assez duré comme ça. Faire copain copain avec un dépravé de Mather, c'était pas trop ton délire et il était temps d'y mettre un terme. Il était temps de briser les illusions de ce pauvre Denys qui ne se doutait d'absolument rien. Qui ne se doutait pas de ce qui allait lui tomber dessus. Parce qu'il ne savait absolument pas qui tu étais réellement et qu'il n'allait pas tarder à le découvrir. T'avais cette mission à laquelle tu devais maintenant mettre un point final. Denys n'était pas ta cible initiale. Il y avait eu Bidy avant mais elle avait comme disparue de la surface de ce monde et t'avais du te trouver une nouvelle cible assez rapidement. T'étais tombée sur Denys, complètement par hasard et tu l'avais donc désigné comme le Mather qui subirait ton bizutage. Tu t'étais rapprochée de lui, assez pour qu'il pense que tu pouvais être là pour lui, à n'importe quel moment et t'avais joué le jeu. T'avais joué le rôle de la parfaite amie, celle qui écoute, celle qui sauve ton cul si t'as un soucis. Mais ça suffisais maintenant. T'avais joué ton rôle de parfaite amie assez longtemps comme ça et ce midi, t'allais enfin montrer ton vrai visage : celui de l'Eliot qui déteste les Mathers. T'avais appris par hasard qu'il était amoureux d'une Eliot, une certaine Gabrielle Ferguson. T'avais mené ta petite enquête et t'étais maintenant prête à jouer le dernier acte. C'est pour ça que tu l'attendais ce midi, à la sortie des cours, assise sur le capot de sa voiture. T'attendais patiemment qu'il arrive et tu te réjouissais à l'idée que les illusions de Denys allait être brisées, une à une. Putain, cette journée ne pouvait pas être plus parfaite.

J’avais trouvé l’oreille parfaite pour écouter les rebondissements de ma vie sentimentale tourmentée : si Ash était devenue l’une de mes meilleures amies sur qui je savais pouvoir compter, je savais aussi que m’entendre me morfondre pour une Eliot, ça allait la gonfler au plus haut point. James, mon meilleur pote, n’était pas non plus l’interlocuteur idéal. Angoissé chronique, et avec son mariage qui approchait à grands pas, j’avais décidé de laisser mon BF en dehors de mes tracas amoureux. Il y avait aussi Lyra, mais absorbée par ses études, je n’avais pas vraiment envie de déconcentrer la lowell… Non et puis, j’avais rencontré cette petite blonde Lisa Rose. Adorable, abordable, avec qui le feeling était étrangement tout de suite passé, au point qu’elle était même venue me secourir y’avait quelques soirs de cela, quand, après avoir un peu forcé sur la bouteille et les joints, je m’étais un peu paumé dans les rues de la ville. Bref, une vraie amie… Elle ne m’avait pas jugé, elle m’avait écouté, et pourtant dieu sait que le lendemain en déroulant le fil de nos sms, je m’étais trouvé moi même niais, chiant et relou. Lorsqu’elle m’écrivit plus tard pour me parler de Gabrielle, mon cœur s’emballa : est-ce qu’elle avait appris quelque chose ? Est-ce qu’elle voulait partageait l’une de ses idées pour que je réussisse à séduire la brune ? Est-ce qu’elle avait réussit à trouver son numéro de téléphone ? C’était plutôt plein d’espoir que j’attendais notre discussion, et c’est donc avec un grand sourire que j’avançais vers Lisa Rose lorsque je la vis installée sur le capot de ma voiture. « Hey, ça fait plaisir de te voir ! » la saluai-je en m’approchant et en lui faisant la bise avant d’ajouter : « Encore désolé pour l’autre soir et merci d’être venue me chercher. » J’avais un peu tendance à abuser des bonnes choses, et si d’ordinaire, j’étais plutôt –alcool joyeux- ces derniers temps la tendance était parfois inversée, lorsque je me perdais un peu dans mes sentiments…

Autant ça t'amuses terriblement de détruire les gens, autant copiner avec Denys s'était avéré être un vrai supplice. T'avais jamais vu plus niais et naïf que lui. Limite, ça avait été un jeu d'enfant de t'en rapprocher, de lui faire croire que t'étais le genre de fille à qui on pouvait tout dire, tout raconter, tout confier. Et il s'était pas gêné pour te raconter ses pathétiques problèmes de coeur, pour venir pleurnicher par sms à ton chevet. Ce que tu t'en foutais putain. T'écoutais, tu prenais note et tu jouais ton rôle de parfaite amie. Lisa-Rose la fausse amie. Lisa-Rose qui va bientôt briser un de ces jouets. Il te lasse un peu là, avec ses pleurnicheries et t'as envie de le secouer. De montrer ton vrai visage pour mieux l'enfoncer par la suite. T'attends patiemment qu'il veuille bien se rendre à cette voiture qui lui appartient. Tu penses au fait que ce soir, tu vas t'envoler avec Hadès et t'as hâte de lui raconter le cas Denys. T'as hâte de trouver d'autres idées pour lui pourrir la vie, avec le prince. Denys finit enfin par arriver avec ce sourire que t'as juste envie de voir disparaître. Tu le laisses t'approcher et toi, tu restes de marbre. Y'a plus ce faux sourire sur tes lèvres. Tu parais loin et franchement distante, terriblement froide. Tu le laisses te faire la bise avant de te lever du capot et de te mettre face à lui, le regardant de tes yeux bleus. Plus aussi amicale que ce que tu lui a laissé croire ces derniers jours. C'est bien la première et dernière fois que ça arrivera, j'ai autre chose à faire que de courir après les déchets dans ton genre. Première pique, tu le laisses même pas le temps d'encaisser, que tu l'enchaînes sans reprendre ton souffle. T'es tellement pathétique Denys... Est-ce que t'arrives à le voir quand tu te regardes dans un miroir ? Il était d'un pathétisme à te faire gerber, ouais. Pleins de sentiments. Trop naïf, trop pleins d'illusions. Et t'en avais pas fini avec lui. Oh non, ce n'était que le début.

 Je m’approchai d’elle, la saluai d’une bise et remarquai aussitôt un changement dans l’expression de son visage. Pas de trace de sourire. Perdu ce petit air solaire et amical. Alors oui, je réitérais de nouvelles excuses, par rapport à notre dernière rencontre, celle où elle était venue me chercher dans les rues de Boston, en pleine nuit, quand mes quatre grammes dans chaque bras m’avaient empêché de retrouver ma route. Elle se planta alors devant moi, et mes mots ne semblèrent pas avoir d’effet sur elle. Toujours aussi fermée, s’exprimant sur un ton glacé, elle reprit sèchement la parole, insultante, me traitant ainsi de –déchet-. Ok, j’avais conscience que j’avais eu être un boulet de première l’autre soir mais quand même, ça me surprenait… Je déglutis difficilement, mon sourire s’estompa même si je tentais d’abord un : « Attends, tu me fais marcher là Lisa ou… » accompagné d’un petit rire nerveux. Mais lorsqu’elle poursuivit, ne me laissant pas le temps de réagir davantage, je compris qu’elle l’était. « Lisa, qu’est-ce qui se passe ? J’ai vomi dans ta voiture ou sur ta robe ou un truc du genre ? » demandai-je à mon tour, en essayant mentalement de raviver les souvenirs flous que j’avais du sauvetage de la blondinette. Je tenais plutôt bien la route habituellement, mais le mélange joints/alcool m’avait peut être joué des tours, et entamé comme j’étais, ce n’était pas impossible que j’aies été malade. « Si c’est ça, donne moi la note. Je règlerais le pressing, le nettoyage de ta caisse, tout ça… » proposai-je, tout penaud et tout plein de bonne volonté pour rattraper les potentielles bourdes commises qui auraient pu entraîner son changement brutal de comportement à mon égard.

Tu détestes les gens comme Denys : toujours trop gentil, toujours trop naïf. T'es là à l'attendre et tu te rends compte que ça a été vraiment facile de l'approcher. En quelques jours, t'avais endossé ce rôle de nouvelle amie et t'avais été suffisant bonne pour le laisser croire qu'il pouvait compter sur toi, n'importe quand. T'avais installé les illusions d'une amitié que t'allais briser dès le moment où il voudrait bien se montrer. Il ne tarde pas à arriver et tu l'accueilles, à ta façon. Tu le laisses même te faire la bise et te balancer des excuses. Et t'attaques. Une fois. Deux fois. Tu parles sur un ton plutôt posé, assez distant. Mais tellement méchant. Et tu le laisses pas te répondre, t'enchaîne les deux piques sans lui laisser le temps d'encaisser. Tu vois le petit sourire qui s'était esquissé sur ses lèvres disparaître, t'entends ce rire nerveux sortir de sa bouche. Il comprends pas. Bien sûr qu'il comprends pas. Toi t'éclates de rire. Le genre de rire froid, à te glacer dans le dos. Si naïf le petit Denys... que tu souffles en te pinçant les lèvres et secouant doucement la tête. Et tu l'écoutes s'excuser. Encore et toujours. Tu fais signes de la main que tu t'en fous, un air dédaigneux figés sur tes traits. Qu'est ce que t'en as à faire de tout ça. C'est futile. Tu claques des doigts et c'est changé. T'as fini deux secondes avec tes gentilles petites excuses de mec toujours trop gentil ? Parce que c'est ce qu'il est, le mec gentil, qu'on malmène avant de jeter et tu vas bien lui faire comprendre. Tu m'ennuies. Tes histoires m'ennuient. T'es vraiment d'un pathétisme... Tu souffles, avant de cracher : Tu m'étonnes que cette fille est pas voulu de toi. Les méchantes filles, ça aiment pas les gentils garçons... Oh ça les amusent quelques temps mais elle se lassent bien vite. Et se trouvent un nouveau jouet.

  Quand j’avais reçu son sms comme quoi elle voulait me parler, je ne m’étais jamais attendu à ça. Alors j’étais d’abord soufflé, estomaqué et cherchant une raison à ce revirement total d’attitude, je m’imaginais peut être avoir été désagréable et relou, l’alcool aidant, lors de notre dernière rencontre, ce fameux soir où elle était venue à la rescousse. C’est donc tout naturellement, sincèrement désolé, que je me confondais en excuse pour essayer de rattraper le coup… Sauf qu’elle éclata de rire. Pas un rire qui voudrait dire –ha ha, je t’ai bien eu, je te fais marcher- non pas du tout, j’aurais préféré. Là il s’agissait d’un rire froid, moqueur, dédaigneux… Un peu le genre de rire qu’avait eu Gabrielle après ma déclaration de cet été. Une douche froide sonore. Une lueur d’incompréhension s’alluma dans mon regard alors qu’elle reprenait, soulignant ma naïveté, me demandant ensuite si j’en avais fini avec mes excuses. « Qu’est-ce qui t’arrive Lisa je comprends pas… » soufflai-je, incrédule, complètement dérouté. Elle enchaina alors en me confiant son ennui, avouant qu’elle me trouvait pathétique. « Tu te sens bien t’es sûre ? » fis-je ensuite, des nuances inquiètes dans la voix. Je voulais encore croire que peut être, il y avait un quiproquo, qu’elle n’était pas bien aujourd’hui ou je sais quoi… Je lui cherchais encore mentalement des excuses pour les propos blessants qu’elle venait de tenir. Mais lorsque finalement elle évoqua Gabrielle, le sujet qui fâche, ma corde sensible, cela finit par me faire perdre mon air désolé et mon ton empli d’excuses. « Ca suffit. » fis-je plus sèchement, en me braquant un peu. « A quoi tu joues là ? T’essaies de faire quoi ? Te faire passer pour une garce ? » Parce que même là je comprenais pas encore que j’avais face à moi la VRAIE Lisa. Que la fille sympa et serviable qu’elle avait été jusqu’ici en ma compagnie n’était qu’un leurre.

La fausse sympathie ça suffit comme ça. Jouer les gentilles filles, c'est pas tellement ton truc. Jouer les filles sociables encore moins. T'en as marre de Denys, de ses pleurs et de ses conneries. Venir le chercher en pleine nuit, paumé dans Boston... Putain ce qu'il fallait pas faire pour un bizutage. Il t'emmerdait le petit Denys et tu te décidais finalement à lui montrer ton vrai visage. Tu mettais un terme à cette comédie au moment où le Mather pointait enfin le bout de son nez. Attitude froide, voix détachée, rire moqueur. C'est la vraie Lisa-Rose qu'il a face à lui et il semble pas comprendre ce qu'il t'arrive. Il comprends pas pourquoi tu te mets à agir comme ça. Tu vois bien son air perdu et ses yeux qui cherchent toute trace de la Lisa que t'as bien voulu lui montrer. Elle existe pas cette LR. Ou du moins, elle existe pas pour les Mathers. Et tu l'attaques. Il comprends tellement pas qu'il en vient à te demander si tu vas bien. Denys est complètement tombé dans le panneau. Maintenant que j'ai plus à jouer l'amie de drogués dans ton genre, ça ira beaucoup mieux merci. Tes traits restent les mêmes, froids et durs. Tu montres aucun signe de sympathie. Tu te débarrasse juste de lui. T'en as marre de ton jouet. Tu veux l'échanger contre un autre, celui là il a rien de distrayant. Tu finis par toucher un point sensible et Denys finit par comprendre. La voix de Denys se durcit et toi ça t'arrache un sourire en coin. Tu sais que t'as pointé le doigt sur quelque chose. Gabrielle. Cette jolie brune qui lui faisait perdre les pédales. Tu comprenais pas ce qu'elle foutait à s'emmerder avec un type pareil. Ah, je vois que tu te réveilles un peu. J'ai touché un point sensible peut-être ? que tu lui demandes, de ta voix moqueuse et pas apeurée pour un sous. Franchement, t'essayais de voir ce que Gabrielle peut bien lui trouver mais non, ça te saute pas aux yeux. Tu soupires à ses propos, ce qu'il est chiant ce mec. Oh arrêtes, me dis pas que t'as vraiment cru que je pouvais être ton amie Denys ? Tu ris une nouvelle fois, poursuivant. C'était tellement plus facile que je ne l'aurai jamais cru. Ta naïveté te perdra mon petit Denys. S'il continuait à faire confiance à n'importe qui et de voir juste ce qu'il voulait... Il allait lui arriver des bricoles.

  Elle déraillait, y’avait quelque chose qui n’allait pas ? Est-ce qu’elle venait d’apprendre une mauvaise nouvelle et j’avais dit quelque chose ou fait quelque chose qui avait pu la blesser ? « Drogué dans mon genre ? » répétai-je, sourcils froncés. « C’est parce que j’avais un peu trop fumé l’autre soir que tu me fais cette scène ? ».  Je cherchais mentalement une raison à ce revirement de situation, je scrutais ses prunelles pour essayer d’y retrouver la lueur amicale que j’avais cru apercevoir jusqu’ici dans ses yeux. Mais rien. Rien du tout. De la glace. Du dédain. Du mépris. C’était inconcevable pour moi, qu’elle ait pu être manipulatrice au point de feindre sa sympathie, mais fallait se rendre à l’évidence, c’était ce qui s’était passé. Se rapprocher de moi pour mieux m’écraser. Et qu’elle m’ait récupérer complètement raide n’était pas la cause, ce n’était qu’un élément de plus pour justifier son dégoût de ma petite personne. Si d’abord, je me sentais déboussolé, touché aussi, blessé, je me raidis bien vite, quand le sujet « sensible » fut évoqué. Elle s’amusa de ma réaction, narquoise ce qui accentua un peu plus mon agacement. « Tu sais très bien ce que je ressens pour elle, ne joue pas les étonnées. » Oui parce qu’en confiance avec la blonde, je m’étais laissé aller, me confiant sur mes sentiments pour Gabrielle. Une arme dans les mains de Lisa Rose, qui allait très vite s’en servir contre moi, ce que j’ignorais encore. « Laisse moi tranquille alors. Si tu ne veux pas être mon amie, si t’en as rien à battre de moi, qu’est-ce qu’on fiche ici ? » Pourquoi elle voulait me parler ? Pour me jouer ce sketch ? Pour m’asséner ce coup ? Pour m’avertir d’être moins naïf comme elle venait de le faire. « T’en fais pas pour moi, j’ai compris la leçon : je me tiendrais loin de toi Lisa… » répliquai-je d’une voix dure, mais blessée. 

Denys cherche à te trouver des excuses et tu soupires sans t'en cacher alors qu'il cherche encore à savoir pourquoi t'agis comme ça. Pourquoi la blonde sympathique fait maintenant preuve d'autant de froideur et de méchanceté. Il comprends clairement pas ton changement de comportement et se met à penser que c'est le coup de la dernière fois qui te fait péter les plombs. J'm'en fous de ce que tu fais de ton temps libre, si tu veux t'enfumer avec tes petits copains, grand bien te fasse. Tu comprends pas leur délire à fumer. T'as essayé une fois et ça t'as suffit pour toute une vie. Tu comprends pas qu'on puisse vouloir se mettre dans un état pareil. Mais bref, c'était pas le propos là. Tu détestais les Mathers et ça te saoulait de devoir t'encombrer de Denys. T'en avais assez et tu mettais le doigt sur un sujet qui fâche, tu te mettais à parler de Gabrielle sans vraiment la nommer. Mais il comprends de suite et se met automatiquement sur la défensive. T'haussais les épaules, complètement insensible à ses petits sentiments. Oui, oui... On a compris Denys. T'es raide dingue d'une fille qui se fout de ta gueule. que tu souffles. Tu dis des mensonges, tu t'en fous. Tant que ça le blesse. Le brun te demande ce que tu fais ici et franchement, toi même tu te demandes pourquoi ça s'éternise. Je remets juste les choses dans leur contexte. Je ne suis pas ton amie. Je ne serai jamais ton amie. que tu finis par cracher. Non, c'était juste de la comédie. C'était plutôt clair. Tu laisses un sourire en coin s'esquisser sur tes lèvres à ses derniers mots. Oui, c'était quelque chose dans cette idée là. Fais donc ça oui. Tu t'élançais finalement, prête à partir mais tu te retournais finalement vers lui : En fait, tu devrais toutes nous éviter, les filles dans mon genre. Pas juste moi. Tu lui jetais un dernier regard avant de te le laisser seul, à méditer sur tes derniers mots. Denys ne se doutait pas mais t'en avais pas fini avec lui. Et les choses allaient se faire de la façon la plus étonnante possible. Même toi tu t'y attendais pas.