Noëlina Q. Almirante ► Lindsey Morgan

Je suis née au Portugal il y a maintenant 25 ans, et je vais essayer de vous raconter mon histoire.
Je vais commencer gaiement. Mes parents sont décédés lorsque j’avais seulement 3 ans. Ils ont eu un accident de voiture alors qu’il venait me chercher chez Mamy, je les attends encore…
Je ne m’en souviens pas évidemment, mais j’ai toujours ressenti un manque, même encore aujourd’hui. Je ne saurais pas vous l’expliquer, c’est au plus profond de moi.
Ma Mamy m’a alors élevée jusqu’à mes 19 ans, j’ai eue une enfance heureuse auprès d’elle où j’ai pu avoir tout ce que je voulais. Je n’ai manqué de rien, je pense surtout qu’elle a compensé elle aussi, son manque. Ce ne doit pas être évident d’enterrer sa fille…
Malheureusement elle aussi est décédée, des suites d’un cancer des poumons. Alors qu’elle ne fumait pas, ce n’est à rien n’y comprendre.
Après ça j’ai dû vivre dans la rue. Je n’avais plus d’autre membre de ma famille. Je suis fille unique, mes parents n’ont pas eu le temps de me donner un petit frère ou une petite sœur. Ce n’est pas pour ça que je suis égoïste, loin de là. Je suis une personne généreuse, qui pourrait donner sa vie pour les autres. Ce qui m’a fait défaut à plusieurs reprises !
Comme je disais donc, j’ai vécu ce qui n’a pas été la meilleure expérience de ma vie mais je sais dorénavant relativiser. J’ai survécu grâce à ma passion, ma vie : la danse ! J’en fais depuis que je suis toute petite grâce à ma Mamy qui me payait les cours. Je pense avoir un très bon niveau et je donne parfois des cours à des enfants qui commencent. Elle m’a permit de m’en sortir et cela a été mon gagne pain pendant quelques mois lorsque je vivais dehors. Les personnes appréciaient mon style et me donnait facilement de l’argent, surtout étant une femme. Je n’ai jamais eue de soucis d’ailleurs, je ne suis jamais fait attaquer, ou voler. Toutes les personnes que j’ai rencontrées étaient très compréhensives envers moi.
Je devais parfois aussi voler, ça c’est le mauvais côté. Je n’avais pas vraiment le choix et j’en suis loin d’être fière, je vous rassure. Mais quand l’hiver arrive et que vos pieds commencent à devenir bleus vous pensez qu’à une seule chose : manger ! Je ne pouvais pas me permettre de perdre mes pieds, autant perdre la vie !
Et puis au bout de quelques mois, j’ai fait une rencontre. LA rencontre qui a changé ma vie. Il s’appelle Gidéon. Il était mon tout, ma vie. Remplaçant même la danse. Un jour que je volais de la nourriture dans un supermarché, il était policier et c’est lui qui m’a interrogé. Dès que j’ai croisé son regard, je savais. Je savais que c’était lui et personne d’autre ! Il m’a gardé pendant 48h, j’étais ravie car j’avais un toit, j’étais au chaud et j’avais le plus bel homme devant mes yeux. Que demander de plus ?
Cet homme a tout fait pour moi, il s’est démené pour me trouver un toit, il était là pour moi chaque jour. J’ai pu remonter la pente grâce à lui. Je suis devenue une personne meilleure de jour en jour.
Pour tout avouer, je n’avais jamais été amoureuse avant lui. Je n’avais eue que de courtes relations, rien de sérieux. Rien qui puisse me faire changer. Il a tout de même mit un certain temps avant de m’avouer qu’il partageait les mêmes sentiments que moi. Ce jour là était le plus beau jour de ma vie et je m’en souviendrais toujours. Je revois encore ses yeux remplis d’espoir et son sourire. Ce sourire...
Nous sommes restés quasiment 1 an ensemble, 11 mois pour être plus précise. Je me sentais tellement bien à ses cotés mais ma jalousie me bouffait de l’intérieur. Je voyais le mal partout, mais le mal c’est moi qui lui procurais. J’étais exécrable avec lui chaque jour. Au début il arrivait à me calmer, à trouver les mots. Et puis il s’est épuisé à la tâche. Ce que je comprends parfaitement, maintenant…
A vrai dire, ce n’était pas de la jalousie, c’était de la colère, de la haine. J’avais des excès de rage où je cassais tout sur mon passage. Inexplicable. Maintenant que j’y repense, je me rends compte que j’étais complètement cinglée ! J’ai tellement changé depuis.
J’ai recommencé à faire des conneries après m'avoir quitté. Et puis… j’ai appris que j’étais enceinte. Enceinte de lui évidemment… Mais j’avais tellement peur, peur de sa réaction qu’il me rejette ou que je le dégoûte. J’avais tellement mal, que j’ai décidé d’avorter. Je n’ai pas dormi pendant des nuits. Aujourd’hui encore il m’arrive de faire des cauchemars.
Je suis bien décidé à lui dire la vérité. La vérité sur tout. Tout ça me ronge, j’espère être libérée après lui avoir tout révélé. J’espère qu’il ne me rejettera pas. J’espère…


Par rapport à mes études (parce qu'il y a pas que l'amour dans la vie), je suis rentrée à Harvard grâce à lui, en fait les choses positives de ma vie sont arrivées grâce à lui. Mais vous le savez déjà. Il m'a aidé à mettre de côté en faisant en sorte que j'ai peu de frais à payer (loyer, alimentation...). Même si je volais quand j'étais dans la rue, j'avais quand même de l'argent sur un compte que Mamy m'avait laissé, je ne voulais pas y toucher pour manger, je voulais en faire quelque chose de grand. Je ne pouvais pas salir le peu qu'elle m'ai laissé. C'est pour cela qu'au bout d'un an d'énormes efforts, d'insomnies, de nuits blanches (j’enchaînais 2 jobs + la danse), j'ai pu me payer les frais d'inscription d'Harvard. Ça n'a pas été simple, il a fallu que je leur prouve par divers tests que j'avais le niveau. Et je l'ai, ce n'est pas parce que j'ai vécue dans la rue que je suis conne à bouffer du foin, si ? Il m'arrive d'être vulgaire, je ne suis pas parfaite je vous rappelle ! Pourtant c'est ce qu'il croyait au début, quand j'ai dû justifier le creux de quelques mois. Et puis je leur ai prouvé que je valais mieux que ce qu'ils pensaient. Que j'avais le niveau, et même plus ! Je suis fière de ce que je suis devenue, et de ce que j'ai pu accomplir. Et je ne remercierais jamais assez Mamy pour tout ce qu'elle a fait pour moi. Sans elle, je n'aurais pas cette passion qui m'anime chaque jour, chaque heure, chaque seconde de ma vie. A chaque pas que je fais, je pense à elle. Et à mes parents. Tout ça c'est pour eux. Et j'espère vraiment qu'ils sont fières de moi où qu'ils soient.