RAGE ☛ I'll tell you all about it when I see you again

We've come a long way from where we began
— Starring le Razmoket

Le psychologue. Les boîtes de nuit. Les gueules de bois. Voilà à quoi se résumait ma vie depuis quelques mois. La rentrée approchait sur le campus et j'en étais restée le plus loin possible cet été. Depuis la prise d'otages, je vivais un choc post-traumatique qui avait ravivé les souvenirs de celui que j'avais vécu lors de l'assassinat de ma sœur. Les mêmes gestes, une arme meurtrière qui se pressait contre ma peau. Bref. La joie. J'me bourrais la gueule tous les soirs pour oublier ça. Je ne rentrais plus au milieu de la nuit. J'attendais les premières lueurs du jour pour rentrer en sécurité chez moi. Enfin. Encore une soirée de plus. Demain, c'était la rentrée et pourtant, j'étais quand même fidèle au poste, un verre à la main et les fesses vissées sur un tabouret. Je me tournai face à la foule pour regarder les gens danser, pas la moindre expression sur mon visage. Je me contentai de descendre mon verre avant d'en réclamer un nouveau.

Ta première soirée ici. Ton nouveau commencement que tu fêtes dans cette boite, peu importe où tu vas, t'as l'impression que le monde de la nuit reste toujours le même. Toujours cette odeur malsaine que tu connais que TROP bien qui plane dans les airs. T'as du mal à imaginer que plus jamais sûrement tu reverras l'Italie, plus jamais tu n'y mettra les pieds.. T'as laissé derrière toi les corps calcinés de la chaire de ta chaire, lamentablement. T'as pris la fuite, t'as tourné le dos lâchement et t'essaye en vain d'oublier ce geste impardonnable dans ce verre de vodka sec. Tu bois d'une traite, serrant les dents par le goût brûlant du liquide. C'est d'un signe de main que t'en commande un autre, le barman s'exécute et en attendant tu tournes la tête brièvement. Ton regard s'arrête net sur cette chevelure, sur ce nez fin, cette mince bouche et ses yeux.. Ses yeux tu pourrais facilement les reconnaître. Elle. Le souvenir d'une enfance malmenée que tu détestes plus que tout. Tu clignes plusieurs fois des yeux, tu t'dis que c'est sûrement l'alcool qui te joue des tours mais elle est toujours là. Son image ne disparaît pas. T'enfile l'énième verre qui glisse jusqu'à toi et descend de ton tabouret pour te rapprocher d'elle. - L'Italie ça nous réussi pas apparement.. Que tu dis à son oreille avec une touche d'ironie.

We've come a long way from where we began
— Starring le Razmoket

Pour quelqu'un qui était passionnée par l'étude des comportements, j'en adoptais un carrément chelou depuis plusieurs mois. Heureusement que je ne devais pas m'auto-analyser. Je me posais pas de questions, j'étais dans cette boîte de nuit, je ne savais même plus laquelle pour être honnête, et je buvais à en perdre la raison. C'était tout ce que j'avais trouvé pour continuer de vivre à peu près normalement, puisque les séances chez le psy étaient passées à contempler le plafond. Je n'arrivais pas à décrocher un mot, j'étais bloquée et quand j'essayais de parler, je m'énervais automatiquement et je quittais les lieux. J'étais perdue dans mes pensées quand quelqu'un vint glisser quelques mots à mon oreille. Par réflexe, je me reculai en fronçant les sourcils, tournant un visage énervé vers celle qui venait me déranger. Mais je me trouvais bouche bée immédiatement. Je connaissais ces traits. Pas sous cette forme de femme, pourtant. J'eus un moment de réflexion intense, mais cet éclat dans ces yeux, je le connaissais tellement bien. J'ouvris de grands yeux quand le souvenir me frappa. « Sage... ?! » J'avais besoin de la confirmation avant de me jeter dans ses bras, pour ne pas passer pour une débile profonde. Putain, si j'avais raison, c'était juste démentiel de la retrouver ici.

t'était partit pour passer une soirée pépère, l'genre de soirée dont t'as l'habitude de te gaver cruellement ces temps-ci, prenant l'alcool comme pansements à tes bobos émotionnel. t'as mal, pourtant tu souris, pourtant tu sors, tu fais comme si de rien n'était, un comportement que t'as du mal à comprendre, sûrement que c'est l'seul moyen que t'as trouvé pour vivre en paix. ça marche pas des masses, dommage pour toi, try again. le visage sanguinaire de ton père vient te hanter la nuit, t'arrive pas à fermer l'œil et tu carbures à la coke. la redescente, c'est l'seul moment où t'arrive à dormir. mais ce soir, ça sera différent, tu te retrouve dans ce visage fermé, aussi assombrit que le tient probablement. celui de Rylie. tu l'sais, t'es sûre que c'est elle, pratiquement sûre et c'est pour ça que t'ose t'avancer, que tu fais le premier pas en lui murmurant un sarcasme à l'oreille. elle se tourne vers toi, les sourcils froncés et tu lis la surprise dans son regard. tu hoches avec ironie fièrement la tête, un petit sourire en coin. - En chaire et en os ! tu fais mine de te vanter, alors qu'en réalité, tout c'que tu souhaites c'est d'être quelqu'un d'autre, de changer de corps, de vie, de passé. et sur ses mots tu la prend dans tes bras, t'es comme apaisé par sa présence sans savoir trop pourquoi.. déjà petites, vous étiez similaires, toi, t'es de ceux qui pensent que la nature de chacun ne change pas. - Putain c'un truc de fou de te voir ici ! Tu m'raconte quoi ?! bordel, c'qu'elle avait pu changer, c'était plus la gamine que t'as connu, c'était plus le nain de jardin qui renifle sa morvelle à tout va.

We've come a long way from where we began
— Starring le Razmoket

A Harvard, il m'était rarement arrivé de croiser quelqu'un que je connaissais déjà d'avant. Déjà parce que je n'étais pas super sociable de base, donc j'oubliais assez rapidement les gens que je rencontrais, sauf ceux qui prenaient une réelle importance dans ma vie. Et justement là, j'avais l'impression d'avoir quelqu'un qui avait compté, sous mes yeux. Et ce qui était fou, c'était que cette personne, je ne l'avais pas connue à San Francisco, non, mais en Italie, quand j'y habitais encore. Et la surprise se lit probablement sur mon visage quand je me tourne pour lui faire face, parce que mon visage tout entier s'éclaire quand je crois la reconnaître. Mais j'attends toujours sa confirmation, parce que ça me paraît trop irréel. Et quand celle-ci vient enfin, je ne tarde pas à répondre à son étreinte. C'est une bouchée d'air frais, alors j'en profite un peu en la serrant contre moi un peu plus longtemps que la normale. C'est dingue, de me dire que je tiens dans mes bras celle à qui j'ai dû apprendre à lacer ses chaussures quand elle piquait des crises parce qu'elle n'acceptait que les scratch. La seule sur qui je pouvais vraiment compter, enfant. « Mon dieu, ça m'fait tellement plaisir... » Je la relâche et je retiens mes émotions comme je peux parce que je déteste les montrer. Mais ça me fait un truc. « Bah écoute, je sais même pas par où commencer, ça fait tellement longtemps !  » C'est vrai, les idées s'embrouillent dans ma tête et je me frotte le visage pour me remettre les idées en place. « T'étudies ici ? A Harvard ? » C'est fou, mais depuis combien de temps ? Pourquoi je ne l'avais jamais croisée ?