JASON COLEMAN ► Paul Wesley

Emmène moi ou laisse moi mourir. Spirit. Ce cheval qui avait tout perdu, enfermé dans un wagon à se demander si un jour il pourra être heureux à nouveau. Quand j’étais petit je le trouvais courageux, m’imaginais à sa place, aussi fort et valeureux. Aujourd’hui je me rends compte que nous sommes totalement différents. Il s’était battu, j’avais abandonné. Assis dans le lit d’hôpital, je regardais les toits enneigés qui donnaient cet air de paradis à un monde bien cruel. C’était la veille de Noël et la vie avait décidé de m’offrir comme cadeau un incendie. Elle trouvait peut-être qu’il faisait trop froid chez moi. Sacré sens de l’humour. Baissant le regard sur mes bras croisés, je remarquais que mon vêtement était mouillé. Mes larmes coulaient à flots et pourtant je n’avais rien senti, trop anesthésié par la douleur, par ces centaines de questions qui se bousculaient dans ma tête. Mes parents étaient-ils vivants ? Ma petite sœur s’en était-elle sortie indemne ? Il fallait que je sache, que quelqu’un taise cette angoisse qui montait en moi. Seize ans et peut-être orphelin. « Putain ». La tête dans mes mains, les souvenirs qui affluaient en masse. Taisez vous, tous. Ne me dites pas de qui est la faute, je ne veux pas le savoir. Laissez nous juste vivre tranquillement, tous ensemble. Mon père qui allume la cheminée, qui rajoute quelques buches. Ma mère qui rigole avec ma petite sœur dans la pièce à côté. Puis comme un con je vais dehors chercher une boule de neige pour la balancer sur ma famille. Avant que je revienne, des flammes dévorent les fenêtres, l’alarme sonne sans s’arrêter. Et je cours mais mon père sort en trombe, m’empêche de rentrer. Les pompiers arrivent et je m’évanouis, assommé par l’émotion. S’il-vous-plaît, que quelqu’un m’éclaire. Comme si ma prière avait été entendue, quelqu’un entre. Il est temps pour moi de décider si je veux me battre ou abandonner totalement.

Rien n’est plus vivant qu’un souvenir. Harvard. L’université où s’étaient rencontrés mes parents. Maintenant c’est moi qui y étudie et, même si je n’ai toujours pas rencontré quelqu’un qui me plaît, je ne peux m’empêcher de vouloir y rester. Simplement pour pouvoir les imaginer dans les salles de classes, se balader ensemble dans les couloirs. Ils me manquaient. Ma petite sœur me manquait. Mais je n’y pouvais rien, il fallait que je continue à vivre ma vie. Après l’incendie, mon père s’en était sorti mais la culpabilité l’avait rongé, ajoutant l’alcool à ses démons et faisant des pilules son seul remède contre le malheur. Il était finalement décédé deux ans plus tard, lorsque j’avais dix neuf ans, me laissant une somme d’argent assez conséquente. Oui, il était milliardaire, possédait sa propre compagnie que j’avais revendu à quelqu’un d’autre. Il m’arrivait souvent de penser à eux