it's not you, it's me, with moana

Bien loin d’être gênée d’être conviée par Lukà lui-même à un café de City Center, Moana en était même ravie. Il faisait beau, cela la sortait un peu de ses bouquins et puis tout était bon pour voir un pote, n’est-ce pas ? Surtout quand ce pote était le beau russe. Avec lui, tout était simple. Les mots n’étaient pas toujours nombreux ni même vraiment nécessaires, ce qui reposait grandement la bavarde italienne, d’ordinaire toujours contrainte de s’expliquer encore, encore et encore sur ses réactions x ou y. Sauf qu’elle ne s’attendait pas franchement à ce qu’il veuille parler des baisers qu’ils avaient échangés. Ils avaient eu besoin de relâcher la pression chacun de leur côté, de façon douce et agréable, aussi en parler romprait probablement le charme desdites étreintes. De son côté, jamais l’italienne ne serait revenue là-dessus de son propre chef. Elle aurait continué à être l’amie fidèle, la fofolle en chef qu’elle avait toujours été en compagnie de Lukà s’il avait décidé, également, de suivre le même chemin. Mais là-dessus la même longueur d’ondes semblait rompue et elle allait rapidement s’en apercevoir. Pour l’heure, elle le rejoint un grand sourire aux lèvres, arborant une petite robe pull achetée la veille avec sa meilleure amie, ses cheveux ondulés tombant en cascade sur ses épaules tout juste couvertes. Elle lui fit un bisou sur la joue avant de s’asseoir, ne laissant aucun doute quant à sa joie d’être là, en ce lieu nouveau. Expérimenter, c’était son péché mignon, cela l’avait toujours été et le serait toujours et ce, depuis qu’elle avait quitté Palerme à la fin de la période du lycée. « Hello chou ! T’as l’air en forme dis-moi… c’était une excellente idée le coup du café, j’avais trooop envie d’un croissant ! Tu viens souvent ici ? » fit-elle, l’expression lumineuse comme toujours, à des années lumières d’imaginer la douche froide qui l’attendait bientôt.

Disons que Moana n’était pas idiote et savait très bien que ce qui s’était passé dans leur bulle restait dans leur bulle. Aucune raison que leur petit secret en sorte. Elle ne s’imaginait pas d’ailleurs qu’il avait voulu en parler mais qu’il en parle, c’est exactement ce qu’elle lui aurait dit, peu ou prou. Après tout, les sentiments de Lukà paraissaient aussi chaotiques que ceux de l’italienne, même s’il réagissait différemment. Normal, elle était une femme et lui un homme. Voilà pourquoi le revoir l’emplissait de joie, comme toujours, et elle agissait parfaitement normalement, comme à chaque fois qu’ils se voyaient. Elle déposa un petit bisou sur sa joue, s’exclama d’une voix douce et son sourire était envié par beaucoup d’autres étudiantes, on ne lui avait déjà dit. Mais ce n’était pas le propos là, tout de suite. La demoiselle l’écouta et surtout l’observa avec la même attention que d’habitude, captant illico presto une sorte de faille qu’il n’existait pas d’ordinaire lorsqu’ils se parlaient. Lui cachait-il quelque chose ? Possible. Si cela se trouvait, Lukà l’avait effectivement fait venir ici pour un but précis et elle venait de casser sa volonté avec sa bonne humeur à revendre. « T’as tes périodes hum ? Tu m’as pas fait venir pour me dire un truc par hasard ? » Ils se connaissaient trop et s’étaient trop souvent confié de choses pour que Moana ne le connaisse pas. Elle connaissait un peu ses réflexes, ses silences, et le fait de venir dans un café justement c’était une première. Oh elle adorait justement parce que c’était une première. Mais s’il y avait une raison à cela, autant qu’il la dise afin qu’ils puissent ensuite passer un bon moment comme d’habitude. « Moi ça va, révision de partiels tu sais, ça me fait une petite pause ! » fit-elle d’un petit air mutin en regardant un peu la carte du café, pensant qu’en arrêtant de le scruter, il parviendrait peut-être à s’exprimer plus librement. « Tu sais faut pas avoir peur je mord toujours pas la preuve » plaisanta-t-elle en lui faisant une grimace où elle montrait ses belles dents blanches pour mieux rire doucement et replonger le nez vers la carte.