“T’as sérieusement dépensé 300dollars pour un maillot de bain ?” Saskia fait la grimace devant son écran lorsqu’elle reçoit ce message de son amie Caitlyn. Elle s’empresse de répondre, pianotant rapidement sur le clavier “Oui mais ça valait vraiment le coup. Quand t’es bien bronzée un maillot de bain c’est l’essentiel.” Saskia dépensait rarement des fortunes en fringue mais là elle avait carrément craqué sur ce maillot qui serait parfait à l’arrivée du Spring Break. Commander un peu d’été en plein milieu de ce rude automne était un rayon de soleil dans la brume et Saskia pensait que sa meilleure amie l’adouberait sur ce coup. Elle pensa alors à un moyen de convaincre sa meilleure amie que ce bikini d’un banc immaculé avait sa place dans son dressing. Elle hésita un instant puis se dit qu’après tout… Saskia s’envoya alors à elle même la photo en bikini qu’elle avait prise d’elle dans le miroir de la cabine d’essayage. Elle était dans une position un peu suggestive, les fesses légèrement bombées, arborant une moue sensuelle exagérée mi-sexy mi-comique. “Attends je vais t’envoyer un truc tu vas comprendre pourquoi c’était OBLIGÉ que je l’achète.”
Saskia s’empressa de faire le transfert à son amie Caitlyn et attendit un instat. Sans réponse de la part de sa copine, Saskia vérifia si le message s'était bien envoyé avant de se rendre compte que sur la fenêtre de conversation de la messagerie instantanée d’Harvard était écrit “CALEB” et non le nom de son amie. Wow wow wow ! Saskia sentit le feu lui monter aux joues instantanément et son coeur s'accélérer. A qui avait-elle envoyé cette photo d'elle en bikini ?! Saskia n'avait pas besoin de ça en ce moment elle venait de candidater pour rentrer dans la maison Dunster et un bad buzz n'était vraiment pas une bonne idée. Au bout de sa vie, elle regarda autour d’elle complètement paniquée et c’est à quelques mètres d’elle qu’elle vit sa photo se télécharger sur l’écran de l’iMac d’en face. Tout le monde pouvait la voir ! Elle se leva précipitamment, fonçant sur la souris du brun qui était en face de son écran. Elle ne pouvait pas distinguer l'expression de son visage mais il devinait qu'il devait être assez amusé, si ce n'est surpris. “Supprime !!!! Supprime !!!!! C’était pas pour toi !!!!” s’excita Sass en essayant d’arracher la souri des mains du fameux “Caleb” qui avait maintenant en sa possession une image plutôt compromettante d’elle.
T’as encore la rage. Même si c’est hier que t’as détruit ton ordinateur portable avec l’eau de ton bong, t’as encore envie de frapper dans un mur. Parce que t’es coincé dans ce local informatique à devoir faire une dissertation à la con -ouais, t’as toujours aimé ton cours, t’adore ton proche futur de vétérinaire, mais l’écriture, c’pas pour toi- avec une foule de gens qu’tu te serais passé de côtoyer aujourd’hui. T’es TDAH et pas vraiment social, donc ouais, c’est une vraie corvée pour toi d’te retrouver ici. Quand il est question des cours, tu t’y fais parce que tu sais que t’as pas le choix, mais bon, arrête de rager et concentre toi sur ton travail. Et c’est ce que t'essayes de faire mais t’es surpris par une notification qui apparaît sur la messagerie d’Harvard que t’as d’ouvert dans un autre onglet et t’y vois le nom de “Saskia Vodyanov” et tu réalises que tu connais personne de ce nom. Tu te prives pas, t’ouvres le message et en deux secondes t’as une photo osée qui s’ouvre. Tu la regardes quelques fois ayant l’impression d’avoir déjà vu ce visage quelque part et t’entends une donzelle te supplier de la supprimer, ce qui te sort la tête des nuages. T’as envie d’rire comme un connard quand tu la vois essayer d’te prendre la souris mais tu la ramasse assez rapidement, laissant la photo à la vue de tous. « Les fesses plus bombées et les traits moins exagérés et ça aurait été une photo digne d’un magazine porno. » Quel connard que t’es. « C’est déjà noël? Merci pour le cadeau, -tu regardes l’écran de l’ordinateur quelques seconde pour y voir son prénom- Saskia. » Tu dis, te levant face à elle, avec un sourire vraiment irritant.
Sur le coup Saskia aurait pu se dire que ça aurait pu être pire après tout, ça aurait pu être un professeur (l’horreur) ou encore un membre du staff de Harvard (pas mieux non plus…) mais ça aurait aussi pu être une nana parfaitement normale qui aurait rigolé de cette boulette et qui l’aurait effacé en lui disant de faire plus attention à ce qu’elle envoyait et surtout à qui, sauf qu’évidemment le destin avait décidé d’être cruel avec la jeune étudiante. Celui qui avait réceptionné la photo compromettante avait l’air d’être un vrai connard et semblait très amusé par la situation ! AH NON. Saskia refusait d’être traitée de la sorte, c’était particulièrement embarrassant et elle aurait aimé se réveiller, que tout ça soit un mauvais rêve. Elle savait de mémoire que toutes les photos envoyées sur la messagerie instantanée de Harvard restait stocker sur un drive jusqu’à suppression définitive au bout de trois mois. En temps normal cela était très pratique pour les travaux de groupe ou les étudiants qui n’avaient pas pour habitude de se balader avec un disque dur externe. Mais là en l’occurence il s’agissait de son corps en maillot de bain. La situation était dramatique. “Je sais pas ce qui m’empêche de te foutre une grosse baffe !” vociféra t-elle, sauf qu’elle savait très bien ce qui l’en empêchait. Elle n’avait pas envie de se faire remarquer plus que ce qu’elle ne l’avait déjà fait et préférait s’en tenir à la limitation des dégâts pour l’instant.
“Est-ce que tu pourrais faire preuve d’un peu d’humanité s’il te plait, supprimer cette photo et très vite l’oublier ? Est-ce que tu peux faire ça ? Et oublier mon nom aussi ?” Elle remarqua alors qu’il n’avait même pas réduit la fenêtre, laissant tout le loisir à quiconque passer devant l’écran de se rincer l’oeil. “Mais bon sang ferme au moins la fenêtre !” s’exclama t-elle en essayant de récupérer à nouveau la sonnerie. “C’était pour ma pote, juste pour lui montrer mon nouveau maillot de bain, ai pitié s’il te plait !” Au vu du regard malicieux de son interlocuteur, lui faire oublier cette photo risquait d’être une sacrée paire de manche.
T’faut pas beaucoup de temps avant qu’tu te retrouves debout face à elle avec un sourire de connard d’étampé sur la gueule. Pour tout dire, t’as une réputation à conserver et c’est pourquoi t’agis ainsi. T’as toujours été Caleb l’intouchable, le connard sans coeur -y’a des gens d’exception qu’tu traites bien, hein-, et avec l’humeur de merde que t’as, c’est pas aujourd’hui qu’tu vas t’adoucir. T’as la gueule d’un gagnant quand elle te fait comprendre que y’a que les gens autour qui l’empêche de te frapper ; logique, elle veut pas attirer l’attention, certes c’la chose que t’es en train de faire en lui parlant face à face. T’es prêt à une vraie confrontation et t’éclates de rire quand tu la vois te supplier à nouveau. Elle menace d’te frapper et là, elle veut qu’tu supprimes sa photo. Nan, mais dans quel monde elle vie? Menacer d'une baffe pour demander un service quelques secondes après. Logique. Elle te demande d'oublier son nom et tu répliques automatiquement. « Saskia. Saskiaaaaaaa. S-A-S-K-I-A. » Tu dis, avec un sourire qu’on voudrait vraiment t’arracher d’la face. « Dommage, j’crois pas pouvoir l’oublier maintenant. » Tu dis, avant de renchérir. « Et la photo? Comment l’oublier? J’crois que comme tous ces gens dans cette pièce, c’est gravé à tout jamais, right? » Tu renchéris, en te tournant vers le mec qui occupe l’ordinateur à tes côtés, sourire presque machiavélique aux lèvres. Tu le vois lever la main comme pour te faire un high five et tu le grondes des yeux, comprenant qu’tu pousses un peu la note et qu’une gang de féministes va surement venir te taper bientôt. Tu te recules à nouveau quand elle essaie de te piquer la souris et tu comprends qu’t’agis comme un enfant. Mais ahhhh, c’est tellement divertissant. « Ta pote s’appelle Caleb? Pas besoin d’me la présenter. » Tu dis, entendant plusieurs rires derrière toi. Ah, mais ferme ta gueule, tu veux? T’auras bientôt les transexuels qui vont vouloir te foutre une baffe aussi. Et puis la personne qui écrit right now t’en foutrais une aussi. Tu comprends qu’c’est probablement une erreur d’inattention, mais c’pas grave, tu continues sur la même lancée. « Tu veux mon avis? » Tu dis, pointant la photo à l’écran. Tu sais qu’elle le veut pas, mais tu finiras bien par le dire quand même.
Ce qui était un accident se transforme en esclandre au beau milieu de la salle informatique de Harvard. Les autres étudiants ne prêtent pas vraiment attention au duo qui s’adonne à un échange mouvementé mais cela ne saurait tarder si Saskia ne se dépêche pas de régler cette fâcheuse situation. Son cerveau bouillonnait de rage, on pouvait clairement lire la colère sur son visage d’ordinaire angélique. Le regard ténébreux de son adversaire avait de quoi la déboussoler en temps normal mais Sass n’avait pas le temps de jouer les petites filles timides aujourd’hui et elle était prête à en découvre avec ce connard qui s’acharnait sur son cas. Sans doute qu’il y avait de quoi rire. “Je suppose que c’est pas tous les jours que tu reçois ce genre de nudes vu ta réaction ! Je te remercie pour l’intérêt que tu portes à mon choix de bikini mais s’il te plait je t’en prie supprime là au moins du Drive.” Le drive, le drive, le drive. La Vodyanov ne pensait qu’à ça et aux dégâts que pouvait causer la diffusion d’une telle photo pour sa famille qui déjà avait du essuyer quelques unes de ses frasques ces dernières années.
Quand son interlocuteur continua à enfoncer le clou en disant que personne dans cette pièce n’oublierait cette fameuse photo, Saskia se figea. Bon ok elle avait déjà mis des photos d’elle sur Instagram en bikini mais jamais dans une position aussi suggestive conne et surjouée. C’était surtout ça qui la dérangeait, elle n’avait pas envie que les gens pensent qu’elle s’amusait à envoyer ce genre de photos aux gens alors qu’elle n’était pas du tout de ce genre-là. “Bon ok qu’est-ce que tu veux ? Qu’est-ce que je dois faire pour que tu me laisses tranquille ? Pour que tu supprimes la photo du Drive surtout ?” Elle n’en revenait pas, être dans une telle position de faiblesse à cause d’une mauvaise manip’. Le fameux Caleb avait l’air ravi de la situation et une petite voix lui disait qu’elle allait regretter de s’être applatie comme ça devant un inconnu qui avait des faux airs à Machiavel. Saskia se demandait quel genre de supplice il allait lui infliger et attendait sa sentence bras croisés tapant nerveusement du pieds. “Bon allez dépêche je vais pas y passer la nuit.” vociféra la jeune femme en ignorant qu’il était quand même sacrément beau.