destins liés (happy)

Sourcils froncés, on pouvait aisément dire que tu n’étais pas certain d’avoir les yeux en face des trous. Tu venais de quitter l’appartement de Sally en prévoyant d’y retourner dans la soirée, et tu marchais dans les humbles rues de Cambridge quand sans prévenir tu as aperçu Happy. Oui, tu sais ce mec qui était comme un frère pour toi. Tu étais quand  même capable en toute circonstance, non ? Qu’il est un jumeau ça t’importait peu, tu pensais pouvoir le reconnaître tout de même. Mais là il semblait se dépatouiller à déplier une poussette ! Et ce n’était pas du tout un chiot qu’il avait entre les mains. Ni un, ni quatre ! Tu t’es donc approché, pensant t’être fait avoir sur l’identité de la personne. Jetant ton gobelet à café vide à la poubelle tu as traversé avant d’aborder le jumeau d’Happy. « Besoin d’aide ? » Identiques ? Oui ils l’étaient c’était fou. « Tu dois être le jumeau d’Happy. » Oui le frère de mon frère d’une autre mère. Oh et puis non tu l'as regardé un peu plus et tu as fini par le pointer du doigts l'air de dire mais non c'est carrément toi. Ton sourire amusé parlait pour toi.

@Happy S. Gainsborough

Le désavantage à être un nouveau papa sans s’y être préparé, c’est l’apprentissage poussette. Happy n’avait eu aucun temps pour s’y faire, s’entraîner, éventuellement trouver un tuto sur le net. Rien. Voilà comment il se retrouvait au parc, sa princesse assise à terre - sur laquelle il veillait comme du lait sur le feu - alors qu’il se dépatouillait fort mal avec cet engin de malheur. Encore un énarque pour avoir pondu ça, tiens… quoi qu’il en soit, il n’attendait ni aide ni rencontre, et encore moins de tomber sur Jamie, qu’il n’avait guère eu l’occasion de mettre au courant de sa nouvelle parentalité. Ce dernier s’approcha bientôt de lui, proposant son aide, adorable comme toujours… sauf qu’au départ, il le prit pour son jumeau, Ael. La confusion ne pouvait qu’être logique, puisqu’aux yeux de son pote, Happy n’avait pas d’enfant. « Ouais cette cochonnerie est bloquée didiou ! » grogna-t-il doucement pour ne pas effrayer Marie. Leurs regards se croisèrent et sa phrase arracha un petit rire à l’américain. « Tu dis ça parce que tu penses que mon jumeau a pu avoir un gosse ou parce que tu me reconnais pas poto ? Okay, y’a beaaaaucoup de choses à dire… mais c’est bien ton vieux tonton Happy en face ! »

Oui tu finissais par douter de toi-même. Tu ne saurais pas dire quoi, mais tu reconnaissais bien là ton ami si fidèle. Tu le considérais véritablement comme un frère, alors difficile de ne pas le reconnaître. Tu avais beau douté un instant tu finissais par reconnaître d'un simple sourire que tu avais été pris au piège. Tu as pris en main la poussette pour la déplier, faut dire qu'avec les deux mains c'était plus pratique. Sécurisant l'engin en verrouillant le landau et pour le coup tu pensais rêvé. « Ahem.. » Oui tu t'es raclé la gorge un instant. Tu n'étais pas au courant de tout ça, et le surprendre ainsi ça te surprenait. Pas que tu doutais de la capacité de Happy de mettre une demoiselle enceinte mais disons que tu avais vécu la même chose il y a tellement peu de temps, faisant de lui ton premier confident sur cette nouvelle qui avait chambouler ta vie. « Te vexes pas mais techniquement je m'attends plus à te croiser avec quatre chiots sous le bras, vois-tu ?! » Tu as regardé la petite dans les bras de ton ami et pour le coup tu pensais véritablement qu'elle avait le même âge que la tienne. Elles se ressemblaient presque. « Plus sérieusement, tu m'expliques ? » Sourire aux lèvres tu étais curieux. Il venait d'anéantir l'option selon laquelle son jumeau avait une fille. Deux options, il avait adopté (oui Happy adoptait beaucoup) ou alors il faisait du baby-sitting ! Tu étais à côté de la plaque mais comment deviner aussi, ça semblait tant improbable. Happy t'aurait pas caché un truc pareil. Tu n'en doutais pas.

Jamie semblait avoir fait ça toute sa vie. Pour sûr, il possédait un poil plus d’expérience qu’Happy en matière de manipulation de poussette, car il lui dépatouilla son problème en deux temps trois mouvements. Un vrai chef ! Ce dernier se racla bientôt la gorge, sûrement en pleine incompréhension sur ce qu’il était en train de voir… après tout, l’américain installait confortablement sa petite princesse dans la poussette désormais sécurisée, la couvant littéralement du regard. « Ouais c’est vrai qu’en théorie je suis plus souvent en compagnie d’animaux que d’êtres humains là tu marques un point ! » admit-il en se raclant à son tour la gorge, ne sachant pas par où commencer. « Je n’ai pas eu l’occasion de t’expliquer tout ce qui m’arrive parce que ça date de quelques jours à peine et ça m’est tombé sur le coin de la tête sans crier gare » débuta-t-il en regardant Jamie dans les yeux, sans le fuir. Il n’en n’avait pas l’intention, après tout, ils étaient comme frères. « J’ai eu une histoire avec une toxico l’année dernière. Je ne savais pas qu’elle se camait au début… puis quand c’est devenu sérieux, que l’on s’est fréquenté davantage, je m’en suis rendu compte. J’ai essayé de l’aider au départ, elle m’avait promis de se soigner mais quand j’ai vu que ses promesses étaient toutes fondées sur du vent, j’ai fini par rompre. Sauf que je ne savais pas que mademoiselle était enceinte… et il y a quelques jours, elle a abandonné notre fille de six mois, près d’un carrousel, en me laissant un mot. Il aurait pu lui arriver malheur tu vois ? Et ça me rend malade rien que d’y penser ! Pardon de pas te l'avoir dit plus tôt mais je voulais qu'elle voit un pédiatre, faire des examens pour être certain qu'elle soit en bonne santé, avec sa toxico de mère ! Enfin voilà… j’te présente Marie, ma merveille inattendue mais ma merveille quand même… elle est pas trognonne ? »

Tu as rit amusé du côté fairplay d'Happy qui se reconnaissait bien plus susceptible de se balader avec des animaux en bas âge qu'avec des humains mais pour le coup tu avais surtout hâte qu'il t'en dise un peu plus. Tu regardais ce beau bébé dans sa poussette, qui instantanément te faisait pensé à Zoé. Etre père avait changé ta vie et tu semblais apprendre à cet instant précis qu'Happy était dans la même situation, et pour le coup tu trouvais son histoire bien glauque. Tu t'étais plaint de Sally qui avait presque provoqué la grossesse mais à côté de ça l'ex d'Happy avait explosé tous les mauvais scénarios possibles. « Arrête c'est ridicule, t'as pas à t'excuser pour un truc pareil ! » Oui pour le coup tu voulais désamorcer toute cette ambiance autour de ça, sans compter que ce qu'il venait de t'annoncer était bien plus grave et bien plus préoccupant. « Je crois que je peux le dire ? Tonton Jamie est ravi et flatté. » Flatté de rencontrer Marie, de pouvoir ajouter tonton devant ton prénom comme vous l'aviez fait avec Happy pour Zoé. « Mais c'est complètement dingue cette histoire. T'as eu les bons réflexes c'est certain mais tu sais où la mère ? » Jamais tu n'avais entendu une telle histoire. C'était juste affreux, et pour le coup tu doutais aucunement d'Happy qui était assez stable et équilibré dans sa tête pour gérer une telle situation de la meilleure des manières. Autant dire que tous les hommes n'en aurait pas été capable. « C'est marrant, elle a le même âge que Zoé finalement. » Ton contact aux enfants et surtout aux bébés étaient tellement facilité maintenant qu'il fallait l'avouer ta main s'est glissé à celle de Marie pour la laisser prendre ton doigts.

« Bah si je m’excuse, tu t’es tourné direct vers moi toi ! » Happy aurait dû faire pareil et il s’en voulait car ce n’était pas du tout un manque de confiance envers Jamie, bien au contraire. Il était juste préoccupé par tellement de choses lui tombant sur le coin du nez en même temps qu’il s’était un peu perdu en route. Mais fort heureusement, son pote l’avait retrouvé en chemin. « Je suis certain que Marie va adorer son Tonton Jamie ! » reprit-il dans un grand sourire, alors que la petite princesse gazouillait joyeusement dans la poussette que son ami avait sécurisée comme un chef. « J’ai cherché où elle était dans tous les centres de la région, rien… j’ai aucun moyen de la joindre, aucun numéro ! Je te jure, abandonner sa fille, je sais que je vais jamais le faire mais j’ai envie de la tuer quoi ! » murmura-t-il seulement à l’attention de Jamie pour que Marie n’entende pas, la colère d’Happy étant à son maximum concernant cette nénette qu’il avait pourtant aimée comme un fou. Heureusement la vision de son pote approchant un peu sa fille à sa façon le radoucit aussitôt. « Tu veux la prendre un peu ? »

Tu as fait un léger non de la tête l'air de garder ton avis malgré l'argumentation d'Happy. Ce n'était pas comparable à tes yeux. Zoé avait sa mère, et tu as eu le temps de digérer la nouvelle au milieu de tous les questionnements que tu avais à ce moment-là. Happy lui avait trouvé sa fille sur un trottoir, à un moment où il ignorait même son existence. « Je vois pas les choses autrement ! » As-tu dit amusé. Oui, bon tu ne réalisais pas trop là, mais vous aviez entamé des nouveaux chapitres de vos vies quasi en même temps, et c'était plaisant d'avoir un ami si proche encore dans ta vie aujourd'hui au milieu de tout ça. Marie allait t'adorer, tu l'espérais, tout comme tu comptais bien élever ta fille en lui livrant une véritable estime et affection pour son tonton Happy. Les personnes sur qui tu pouvaient compter aveuglément au point de les lier à ta fille, il y en avait peu. Happy en faisait partie. « Tu n'as pas eu de nouvelles depuis votre rupture alors ? » Oui tu étais un peu perdu, mais tu finissais par te dire que tout aurait été différent si elle avait parlé de sa grossesse à Happy. Découvrir qu'on est père des mois après c'était assez compliqué, et dans le cas d'Happy c'était même assez brutal. Une chance que ton ami soit le genre équilibré. « Oui, je peux pas te refuser ça. J'ai plus d'excuses maintenant que je sais y faire. » Et surtout tu en avais envie, tonton Jamie. Ca sonnait pas mal, non ? Tu laissais Happy te la tendre et tu la prise dans tes bras. Impossible de ne pas penser à Zoé forcément.

@Happy S. Gainsborough

« De toute façon elle va tellement souvent te voir que crois-moi elle va t’adorer » sourit-il doucement, d’un air tellement attendri qu’on aurait presque pu le qualifier de gaga. Oui, gaga, le terme n’était pas trop fort. Happy avait d’ailleurs du mal à la poser dans son berceau, ou dans la poussette. Cela ne l’avait pas empêché d’acheter tout le matériel en quatrième vitesse, aidé et surveillé de près par sa sœur de cœur pour être certain qu’il n’achèterait pas n’importe quoi ni dans n’importe quel magasin… « Non, je ne savais même pas qu’elle était enceinte. Je ne sais pas comment j’aurais réagi, vu l’ampleur de son addiction… tu imagines ma tête quand j’ai eu le message, je n’ai pas songé une minute qu’elle allait me confier notre fille ! Et encore, j’ai peur chaque jour qu’elle veuille la reprendre. La nuit, ça me réveille en sursaut » lui confia-t-il, un brin plus calme que précédemment, avant d’approcher de son pote pour lui confier le petit ange qui gazouillait joyeusement. Bien éveillé pour son âge ! « Tu vas voir qu’elle va s’endormir dans tes bras tiens… en tout cas, ça te vas toujours bien ! »

Forcément tu osais espérer que cette petite t'adorerait comme tu espérais que la tienne continuerait à adorer Happy. Mais au fond tu ne voyais pas les choses autrement, et puis tu te réjouissais presque de vos parcours liés. Tu voyais déjà vos petites s'adorer, et non pour le coup tu ne t'emballais pas du tout. Après tout Happy était comme un frère pourtant, c'était plus qu'évident que Marie et Zoé seraient liées d'une manière ou d'une autre. « Oui je comprends, t'es pas à l'abri qu'elle revienne sur sa décision, mais si elle était toxico ; se libérer de ses responsabilités c'était peut-être aussi son seul moyen de sombrer à son aise.. j'imagine que gérer un gosse dans son état ça peut vite être un enfer. » Oui ce n'était même pas du tout compatible. C'était même fort probable que sa fille n'était qu'un frein pour elle, mais tu osais te dire que son état pouvait aussi être plus critique et plus névrosé. Ne pas se sentir à la hauteur serait tellement normal dans ces cas-là. A l'inverse elle pouvait également avoir eu le déclic de vouloir se traiter pour mieux mériter sa fille. Tu comprenais pleinement Happy sur ce coup-là. D'ailleurs Sally aussi n'était plus très stable. Prenant la petite dans tes bras, tu as fait quelques pas en compagnie de beau duo. « On y prend vite goût, faut le reconnaître. » As-tu avoué en dorlotant la petite Marie. C'est fou ce que tu pensais à Zoé, et votre avenir un peu incertain ces derniers temps, ce qui te rendait fou. « Tu ressens toujours quelque pour elle ? » As-tu demandé en parlant de la mère. Tu savais que si tu avais été amoureux Sally tout aurait été plus simple.

@Happy S. Gainsborough