Game of silence + Sage

Mine pale, cernes et traits tirés étaient devenus mon quotidien depuis l’hospitalisation de Noah et comme si cet évènement m’avait vidé de mon énergie mon corps n’arrivait pas à s’en remettre. Il y avait eu l’incendie à la Eliot house qui n’avait rien arrangé et je pensais sérieusement à m’en aller, comme il y avait quelques années de ça, quand j’avais saturé. J’y arrivais plus, j’arrivais plus à me connecter à leur monde et faire comme si tout allait bien, j’arrivais plus à glisser à la surface comme eux, je me sentais couler et le pire dans tout ça, c’est que je ne voulais rien faire pour l’empêcher. J’avais pris un billet pour la Louisiane sans rien dire à personne, ma grand-mère y vivait et oui … qui aurait pu penser qu’une Ferguson vivait dans ce trou paumée près des bayous, personne et c’était justement le but, me couper de Boston, de tout le monde quelques temps. Cependant avant de partir je voulais régler certaines choses, pas pour moi mais pour Noah. Darwin m’avait envoyé un message il y avait deux semaines de ça et même si le bon sens voulait que je ne remette pas la parole d’un Eliot en doute … je ne pouvais m’empêcher de douter de lui. Noah m’avait parlé de cette Sage, il m’avait dit combien il l’avait aimé et si un type comme lui était tombé amoureux d’elle … alors elle ne devait pas être cette salope sur qui tout le monde s’acharnait. Je lui avais envoyé un message, sachant très bien que je pouvais me mettre à dos une partie des Eliots, mais peu importait. Et quelques heures plus tard, le taxi me déposa devant le café ou je devais la rencontrer. J’étais étrangement stressée, je n’avais pas peur de cette fille mais plutôt de ce qu’elle pouvait me dire, j’avais peur de la voir mentir … peur de devoir dire à Noah qu’il avait été le con de toute cette histoire, alors au fond j’espérais que mon intuition ne m’avait pas trompé. J’entrai avant de me poser sur une table non loin de la fenêtre, je ne la voyais pas encore et si je savais ce à quoi elle ressemblait je ne savais pas si elle me connaissait

Tu sortais difficilement de la Mather, avançant doucement en repoussant l'heure fatidique où elle serait devant toi. Elle. Gabrielle. Sa meilleure amie. Ton coeur bat rapidement, les mains moites et l'envie de gerber qui monte petit à petit. T'as pas peur, t'es pas stressé nan, le stress c'est pour les mensonges. Tu n'as jamais mentit, jamais à propos de Noah. C'est pas ça qui t'angoisse, c'est surtout le fait de devoir reparler de tout.. De tout ce que tu t'oblige à oublier, de tout ce qui te tue à petit feu et tu sais pas si tu seras capable de parler ouvertement de toute la souffrance qui te brûle les entrailles depuis trop longtemps. Et puis Pourquoi tu vas la voir au fond ? Pourquoi tu veux te justifier sur des actes dont tu n'devrait même pas ? Pourquoi tu t'fait tout ce mal ? Sûrement parce qu'elle te rappelle Noah, elle te fera te sentir proche de lui tout en étant si éloignés l'un de l'autre. P'têtre que tu sentiras son parfum, son odeur quand tu t'approcheras d'elle, n'importe quoi qui te ramènera à lui. Tu lèves la tête vers ce foutu café auquel vous avez rendez-vous, les gouttes de pluie t'aveugle à demi, jetant ta cigarette tu pousses la porte dans un grincement lourd. Et voilà ton coeur qui s'emballe quand tu dévisages la pièce du regard jusqu'à tombé sur son visage, bien évidemment que tu l'connait, tu te rappelle leur proximité au spring break et la jalousie que t'as pu ressentir. T'avance jusqu'à elle, poussant de tes doigts ta capuche en arrière avant de mette tes mains dans les poches. - Gabrielle j'suppose ? Que tu lances en arrivant à sa hauteur, le regard fuyant, la mâchoire serrée tu finis par t'installer avec nonchalance en face d'elle.

Je n’avais aucune envie de faire preuve de courage à ce moment-là, j’avais juste envie de me barrer sans avoir de réponses, en disant qu’au final tout ça était une mauvaise idée. Les choses auraient été beaucoup plus faciles si j’avais fait comme tout le monde, si je m’étais acharnée sur elle sans me poser plus de questions. J’étais vraiment crevée et je savais qu’après avoir eu une discussion avec elle … j’en aurais surement une peu plaisante avec Noah, peu importe ce qu’elle me dira. Et si d’apparence toute cette histoire ne me concernait pas, pour moi, tout ce qui touchait à mon alter ego de près ou de loin me touchait et si ce gamin qu’elle avait perdu était le sien alors ça me concernait. Une voix me fit lever la tête et à ses mots, je me contentais d’un simple « hmhm », ou était passé l’imposante et assurée Gabrielle ? Elle avait la trouille, si bien que pendant quelques secondes qui passèrent comme des heures, un silence gênant s’installa. Je me raclai légèrement la gorge avant de commander un thé … histoire de meubler le silence, alors que j’avais horreur du thé et que j’avais la gorge trop serrée pour avaler quoique ce soit. J’hésitai un peu, puis un peu encore avant de me lancer « J’aimerais que cette discussion ne dérape pas totalement … et ne se termine pas  en dispute ou …  » ou que sais-je. Je n’en avais pas la force, de me disputer avec cette fille et je n’en avais pas envie. Mon ton était froid, plutôt calme « Noah ne sait pas que je t’ai contacté … alors évidemment, je ne viens t’interroger pour son compte … » et pourtant c’était bien pour lui que je faisais tout ça. « D’ailleurs je ne viens pas t’interroger tout court ». Ce n’était pas un interrogatoire, je voulais juste qu’elle parle, qu’elle me donne sa version et j’espérais que cette version serait sincère. « Tu peux juste, me raconter l’histoire qu’il y a derrière cette rumeur … ».

Tu savais pas si c'était la bonne décision que d'aller rejoindre cette meuf que tu n'connait même pas, d'aller lui parler d'toi, d'lui montrer ouvertement ta plus grande faiblesse du moment alors que c'est tout ce que t'essaye tant bien que mal de refouler. Et t'as cette boule au ventre qui grandit à chaque fois que tes pieds foulent le sol, à chaque centimètre que tu manges pour t'approcher d'elle. Ton regard est fuyant, perturbé, t'es mal à l'aise vis à vis de ce rendez-vous improvisé auquel tu ne t'attendait pas. Pourtant, pourtant t'as ce sentiment qui gronde au fond d'toi.. Une sorte de soulagement qui vient effleurer ton âme. Elle est la seule de son entourage à prendre l'temps d'connaitre cette putain de vérité, une vérité qui n'aurait même pas du être ébranlé. Tu t'installes, elle répond positivement à ta question, normal, tu savais pertinemment que c'était bien elle. Un court silence glacial s'installe, une tension pesante entre vous qui vous ronges. Tu le lit sur son visage, tu peux voir qu'elle est aussi perturbé que toi par la situation et le bruit sourd du silence se brise, tu lèves la tête vers le serveur et commande un café à ton tour. Tu oses finalement la regarder, elle lui est semblable dans ses manières, sa façon de se tenir, sa façon de parler et d'te dire qu'elle a veut entendre la vérité sans chaos, sans bataille. Hochant la tête à sa proposition, ta langue glisse sur tes lèvres anxieusement. - Elle est fausse.. Tu lâches juste après qu'elle ne termine sa dernière phrase. T'es traits se durcissent, ton regard se fait directement plus froid rien qu'en repensant à ces conneries. - La rumeur.. Elle est fausse.. Tu souffles sur un ton plus calme, te replaçant correctement sur ta chaise avant que le serveur ne ramène vos tasses chaudes. - N.. Noah.. C'est.. J'ai même pas les mots pour l'expliquer, j'sais même pas comment j'peux qualifier l'amour que j'avais.. Et ton rythme cardiaque s'accélère encore, tes mains s'enroulent autour de ton café, tes yeux s'y plongent à l'intérieur. - Que j'ai pour lui. Il est tout ce que j'avais, je l'aime d'un amour surhumain, trop dangereux et quand j'ai appris pour Meline.. Tu resserres l'étreinte autour de ta tasse, les larmes te menacent à chaque mot de couler à la seconde. - J'voulais lui dire que j'étais enceinte.. Mais j'étais tellement déçue.. Déçue et encore colère putain ! Que j'suis partie m'bourrer et.. Tu souffres, t'as putain de mal à l'intérieur de toi, c'est tellement douloureux de se rappeler, de faire un bond en arrière. - J'ai perdu le bébé ce soir là. Le soir du viol, le soir où on t'as salit, où il a dévoré tes entrailles n'y laissant aucune miette. - Avant d'atterrir en présidence, j'connaissais même pas Alexander, j'savais Pas qui c'était et quand bien même, si on s'connaissait j'aurais jamais pu coucher avec lui.. Comme j'ai jamais pu coucher avec un autre que Noah, j'désirais que lui, j'voyais que par lui, comment j'aurais pu lui faire ça ? Tu grinces des dents, ton regard se plonge dans le sien et sans pouvoir le retenir, les perles salées viennent inonder tes yeux. Et tu t'empresses de les balayer de la paume de ta main. - Pourquoi t'es là ? Pourquoi ça te tient tant à Coeur d'savoir tout ça ?

Je n’avais  jamais pensé à me retrouver face à cette fille et certainement pas maintenant, alors qu’elle et  Noah ne partageaient en apparence plus rien. Dans d’autres circonstances, nous nous serions probablement ignorées, elle ne m’aurait pas intéressée ou pire, elle m’aurait insupporté. Je pense que je ne l’aurais pas apprécié, même si Noah me l’avait présenté pendant leur relation, j’étais à peu près certaine que je ne l’aurais pas apprécié. Cependant je n’aurais pas pu la détester, parce qu’il l’aimait. Pourtant j’étais là, à m’intéresser à sa petite personne parce que je savais qu’elle avait été lié à lui, que la rumeur qui courait et que le blessait probablement était liée à elle. Je n’avais pas envie de l’insulter, j’espérais juste qu’elle me confirme que Darwin était un petit con qui ne mesurait pas les conséquences de ses actes. Comme pour me donner du courage j’avais commandé un thé et alors que le serveur nous apportait nos boissons, j’écoutais attentivement et silencieusement sa version de l’histoire. Même dans ces moments où je pouvais littéralement m’écrouler de fatigue, j’avais cette posture qui trahissait ma condition sociale. Cette manie que j’avais de me tenir droite, de rester calme et impassible, comme si chacun de mes gestes étaient calculés pour refléter le fait que j’avais un nom à défendre. Cela pouvait presque passer pour de l’insensibilité, alors qu’en fait  ça me demandait toute l’énergie de monde de me comporter ainsi maintenant. Et si moi je me contenais, faisant mon possible pour ne rien laisser paraitre, elle y arrivait beaucoup moins bien et ses yeux se remplirent d’eau. Elle m’expliqua que la rumeur était fausse et qu’elle aimait Noah, qu’elle aimait encore et elle semblait crever d’amour et de peine. Je comprenais maintenant, pourquoi ils en étaient arrivés là, l’amour n’est pas censé faire mal et eux  s’étaient blessés jusqu’à l’âme pour être sur de laisser une trace indélébile dans celle de l’autre. Je poussai un léger soupire et bu une gorgée de thé avant de grimacer légèrement, j’avais vraiment horreur de ce truc. « Je sais pour Méline …» ou quel qu’était son nom. Je savais aussi qu’elle n’avait aucune importance aux yeux de Noah et qu’elle l’avait abandonné, alors qu’il vivait l’un des pires moments de sa vie « Tu l’as laissé et il en a souffert à en crever». Peu m’importait au fond si Noah était en tort à ce moment-là, elle l’avait abandonné et j’avais dû le tirer vers la surface. Cela devrait être interdit de voir quelqu’un qu’on aime souffrir autant. Cependant je n’allais pas m’amuser à l’accabler, bien qu’il aurait aisé de le faire, elle faisait presque pitié. « Comment as-tu perdu l’enfant ? » question peut être indiscrète et indélicate, mais je voulais tout savoir parce que c’était en ayant toutes les pièces que j’allais pouvoir décider de la croire ou non.  Et sa question me fit légèrement sourire, la réponse était pourtant évidente «Parce que je l’aime et que je ne laisserais pas un mensonge le ronger … peu importe ce qu’il m’en coute ». Qu'importe si le mensonge venait d'elle ou de Darwin, je me devais savoir.

Tu devais faire pitié.. Nan, tu faisais pitié à être assise là en face d'elle, criant au désespoir, a la tristesse, laissant couler la douleur le long de tes joues sans pouvoir la retenir, la contenir. Tu sens ton estomac faire des noeuds, la gorge serrée, les dents qui grincent et tu te cache dans une gorgée de café qui vient brûler ta langue. Comme si t'était à la recherche d'une douleur physique pour oublier celle psychologique, comme si t'essayé de faire a l'intérieur de cette tasse ridicule. Tu la regardes trempée ses lèvres dans sa boisson à son tour, profitant de ses quelques secondes d'inattention pour la dévisager avant de fuir son regard. Tu déglutis en entendant de nouveau le prénom de Méline, ta mâchoire se serre à nouveau et tu te laisse tomber contre le dossier de ta chaise. Et la suite te fait lâcher un mince rire ironique dans un soupire. - Tu penses qu'il était le seul à souffrir Gabrielle ? Il t'avait toi lui au moins.. J'avais qui moi à part lui ? Hein ? Personne. T'était jalouse, ouais, jalouse de son entourage, de ses proches, de sa famille, de son père, même si c'était un sacré connard, lui au moins il avait encore un père. Et sa prochaine question te pétrifie sur place, tu te glace, tremblante, tu tournes nerveusement ta tasse de café sur elle-même. - C'est vraiment nécessaire d'en parler ? Que tu demandes froidement. Noah l'savait, il l'avait même retrouvé et battu presque à mort. Alors elle devait sûrement savoir elle aussi, il avait sûrement dû lui dire. Bizarrement son explication te rassure, malgré ta haine, tu n'supporte pas l'idée de le savoir mal. Tu ne l'as jamais supporté malgré ce que tu laisses paraître. - Alors si tu l'aime, croit moi. Qje tu affirmes avec conviction en te rapprochant.