D'ordinaire, Alex prenait ses médocs avec une longue rasade de vodka. C'était mieux au niveau du goût, m'voyez ? C'est ce qu'elle racontait à sa psy, qui levait les yeux au ciel à s'en fracturer l'orbite. Elle était réticence à l'idée d'avaler les pilules avec de l'eau, mais l'urgence était de traiter la crise. Elle renifla un instant, secoua à nouveau sa tête en tentant de maîtriser ses tremblements. Les ombres menaçaient.
Elle leva un instant les yeux sur la jeune femme qui était penchée sur elle et... Et prenait soin d'elle. Une parfaite inconnue, rencontrée par hasard. Elle était là, à ses côtés. C'était une sensation qui lui était étrangère, qu'elle n'avait connu qu'il y a quelques années. Une éternité pour l'ancien soldat. Et dans le regard de Moana, il y avait quelque chose, quelque chose de vulnérable, qui eu l'effet d'un électrochoc pour Alex. Non, elle ne voulait plus voir cette lueur dans le regard de personne. Elle aurait voulu la rassurer, l'effacer, repousser cet instant étrange qui avait brisé la fête.
Mais à ce stade, Alex ne pouvait produire que d'étranges borborygmes. Elle s'éclaircit la gorge et rassembla ses forces. Soudain, des mains se posèrent sur ses tempes. Elle eut un moment de recul. Elle n'était pas habituée à ce qu'on la touche. Mais elle se laissa faire. A cet instant, hors de son contrôle, Alex en était réduite à des réflexes primitifs, animaux.
Etrangement, ce léger massage fit effet. Alex ferma un instant les yeux et sa respiration se calma progressivement. Elle posa sa tête contre la poitrine de Moana, soulagée. Ce n'était pas vraiment volontaire, mais cela marquait comme une reconnaissance pour la jeune femme. Une façon de la remercier. Après un instant, Alex se redressa. La main plus sûre, elle saisit la plaquette de médicaments, en plaça deux dans sa bouche et attrapa la bouteille d'eau pour avaler ses médicaments. La pression retomba. Elle rendit la bouteille à Moana.
Elle la regarda un instant, avec ses prunelles de fauve. Se demandant si c'était une bonne idée de se confier. D'avouer. Mais elle était en droit de savoir. Rien que parce qu'elle l'avait ramassée.
- Je... Je suis désolée.Cette fois, elle s'adressait bien à la jeune femme.
- Je suis... Je suis un vétéran d'Irak. J'ai vécu des choses dont je ne suis pas fière. Et du coup... J'ai encore un peu du mal en société.Elle tenta un sourire qui creusa une légère fossette dans ses joues.
- Mais je te promets, j'essaie de me soigner. Enfin de changer. J'suis goalkeeper. Enfin. Je suis étudiante, mais je suis dans l'équipe de la fac. Elle parlait un peu vite et se retrouva à rougir, après avoir bafouillé.
@Moana B. Corleonesi