JULAGE • " Come back boy ! "

Quand j'étais pas à l'hôpital, c'est dans ma nouvelle chambre à la Mather que j'passe mon temps. J'essayais de m'occuper l'esprit avec mon emménagement, entouré de carton avec les quelques affaires que j'avais repris de chez Ana. Je me tenais debout, regardant tout autour de moi comme si Tout Ce que je faisais n'avait aucun sens sans Noah.. Comme si j'étais juste ridicule de m'encombrer de ce tas de merdier plutôt que d'être pres de lui à l'hôpital. Mais j'avais besoin de souffler, de respirer autre chose que cette puanteur de mort qui règne au fond de sa chambre, j'avais besoin de me dire qu'il était encore là, d'imaginer de temps en temps que Tout est faux et qu'il va taper à la porte. Je me gratte le front nerveusement avant de lâcher ce que j'avais en main, de jeter le cadre que j'avais dans les mains contre l'un des quatre murs de ma chambre. Il s'explose dans un bruit fracassant, la respiration haletante j'attrape mon paquet de clope pour en allumer une. Je viens m'asseoir sur le bord de mon lit, me balançant d'avant en arrière frénétiquement sous la panique qui vient de monter d'un cran et TOC TOC TOC. Je lève la tête vers la porte, fronçant les sourcils en tirant une taffe sur ma clope, le cœur battant j'avance jusqu'à elle la boule au ventre, espérant que ce soit Noah mais.. C'est sur Jules que je tombe. - Hey.. Dis-je doucement en passant ma main dans ma nuque avant de m'écarter pour lui laisser le passage. - Vas-y entre.. Fait pas attention au bordel ! Lançais-je en soupirant en refermant derrière lui. Ça m'faisait bizarre de le voir ici, on s'était perdu d'vue depuis quelques temps et ça m'faisait mal de ne plus l'avoir dans ma vie.. C'est l'une des premières personnes que j'ai connus ici et là seule qui connaît le lourd secret que je cache.

Jules se sentait seul. Ouais, c'était sûrement la première fois de sa vie depuis ses six ans qu'il ressentait ce sentiment mais pourtant... c'était réel. Tout comme le départ d'Anastasia, réel, lui aussi. Et ça le faisait chier, vraiment chier, parce qu'il n'aurait jamais que ça l'atteindrait autant, qu'il puisse autant s'attacher à cette blonde. Elle était loin désormais et même si Jules faisait comme si tout allait bien, comme si rien n'avait changé depuis plusieurs jours, c'était loin d'être le cas. Déjà qu'il n'était pas toujours facile à supporter d'ordinaire, là c'était dix fois pire parce qu'il tirait la gueule h24 et qu'il envoyait balader tout et tout le monde autour de lui, comme si plus rien ne pouvait l'intéresser désormais. Lui qui était d'un naturel si calme et impassible perdait plus rapidement patience et devenait susceptible.  Il était toujours Jules De Lacroix, mais son humeur était exécrable, plus que jamais. Il ne suivait plus sa raison et ne faisait que ce que son instinct lui dictait. Et aujourd'hui, c'était à la porte de la nouvelle vice-présidente que ses pieds l'avaient amené. Ces derniers temps, ils ne s'étaient pas tellement parlés ou même croisés et malgré le fait qu'il puisse la trouver vraiment chiante par moments, Sage lui manquait. La réprimander pour ses conneries, les piques qu'ils s'échangeaient et leurs petites discussions, ouais ça faisait vraiment longtemps et il ne savait même pas pourquoi. Alors même si ça pouvait paraître étrange, la blonde était la seule personne qu'il avait envie de voir en cet instant. "Salut..." lança-t-il calmement, en guise de bonjour, sans pour autant sourire ou montrer qu'il était content de la voir. Ça, ce n'était pas possible, il était obligé de rester de marbre, c'était devenu sa spécialité ces derniers temps, de faire la tronche. Les mains dans les poches, il s'avança silencieusement dans la chambre, observant les alentours jusqu'à ce que son regard ne se pose sur un cadre explosé en mille morceaux. "Qu'est-ce que t'as foutu ? demanda-t-il en tournant la tête vers la Lewis, comme si c'était normal que ce soit la première chose qu'il ne lui demande lors de ces petites retrouvailles.

C'est sur la gueule de Jules que j'tombe aujourd'hui. Pourquoi lui ?! Pourquoi est-ce qu'il vient après Tout c'temps ? Et pourquoi est c'qu'il vient après le moment où j'avais eu le plus besoin de lui hein ?! Une terrible envie de lui fermer la porte au nez, de lui hurler de dégager parce que j'ai plus besoin de lui maintenant, j'vais mieux, j'vais bien.. Ou c'est c'que je me tue à me dire pour pas sombrer un peu plus, me mentant à moi-même pour améliorer mon image. "Salut.." Il me lance tout naturellement. Aucune expression sur son visage fermé, ce visage que j'connais si bien et j'dis rien moi. Je reste silencieuse, lui adressant un bref sourire en coin tout en claquant la porte derrière lui. Je le regarde s'avancer dans ma chambre, je le dévisage de haut en bas alors qu'il me tourne le dos, la cendre tombe au sol et je n'y prête pas attention. Je viens porter machinalement ma clope à mes lèvres, recrachant la fumée en faisant un pas vers lui. "Qu'est ce que t'as foutu ?" Je tourne la tête vers les éclats de verres qui jonchent le sol, mon regard se perd dessus un instant. - Qu'est ce que ça peut t'foutre ?! Que je lance en lui adressant un regard en biais alors que je passe à côté de lui, lui donnant un coup d'épaule au passage pour lui signaler ma rancœur. À genoux je ramasse les bouts de verres, les bouts de mon cœur mit en miette.

Y avait tellement de choses qu'il pouvait dire ou même lui demander après tout ce temps que Jules ne savait pas par où commencer.  C'était pas son genre de parler de lui, de ce qu'il ressentait - encore moins en ce moment en plus - et ça Sage le savait très bien. Alors il pouvait toujours lui poser des questions, pour savoir comment elle allait mais le mather était presque certain qu'elle allait l'envoyer chier. Déjà qu'elle ne voulait même pas lui répondre pour un foutu cadre éclaté alors valait mieux pas espérer quelque chose d'autre pour la suite. "J'sais pas." Lâcha-t-il, toujours immobile malgré le coup d'épaule qu'elle venait de lui donner. Et bah, elle semblait d'être d'une toute aussi bonne humeur que lui, ça promettait. "Au fait..." commença-t-il en s'écartant pour la laisser ramasser les débris de verre sur le sol. "Félicitations, madame la vice-présidente." Il avait presque oublié ce petit détail, tiens. Ça faisait bizarre, d'ailleurs, de savoir qu'elle dirigeait la mather house alors qu'il se voyait encore lui râler dessus pour ne pas qu'elle fasse de connerie. M'enfin ça, c'était du passé apparemment, comme pas mal de choses ces derniers temps. C'était dingue comme tout pouvait être si calme pendant un moment et puis, du jour au lendemain, c'était tout autour de vous qui se mettait à changer. "J'dois m'attendre à ce que t'abuses de ton pouvoir maintenant ?" Ça serait bien son genre et en même temps, s'il avait été sa place, Jules ne se serait sûrement pas gêné pour le faire, fallait pas se mentir.

Ouais Delacroix qu'est ce que ça peut t'foutre hein ? Tu lui en veux, tu lui en veux terriblement d'pas avoir été là, d'pas t'avoir donné signe de vie depuis qu'il s'était rapproché d'Ana. T'es pas conne, tu l'sais très bien, t'as toujours su d'ailleurs ! Tu comprenais pas pourquoi il avait eu l'culot de venir taper à ta porte maintenant, c'était quoi l'but en fait ? Il pense pouvoir entrer et sortir dans ta vie comme il le voulait ?! C'qu'il sait pas c'est que tout a changé dans ta vie, absolument tout et t'as plus envie de t'encombrer d'personnes comme lui ou Noah qui restent que pour quelques semaines avant de passer à l'option fantôme. Tu l'déteste Jules. Ouais tu l'déteste parce que tu l'as apprécié. Tu l'écoute malgré que tu lui montre ton désintérêt le plus total à son égard, ramassant les dégâts que t'as causé juste avant qu'il n'arrive. Joke ? Il vient pour ça ? Tu baisses la tête dans un rire sarcastique avant de te relever pour lui faire face. - T'était où quand c'est devenu le gros bordel dans ma vie ? T'était où hier ? Avant hier ? Avant avant hier et rebelote hein ? Tes traits se durcissent, ton regard devient noir et t'as qu'une envie c'est d'le cogner. - Donc tu viens pas m'voir quand je vais mal mais t'as la figure de t'pointer pour me féliciter ? Tu resserres l'étreinte de tes doigts qui entourent les bouts de verre jusqu'à sentir un fort picotement et de tout laisser tomber au sol. - Merde !! Fait chier ! Tu lâches en pinçant les lèvres, prenant ta main dans l'autre avant de voir le sang commencer à couler. - Tu fois plus t'attendre a plus rien venant d'moi Delacroix. Tu réponds sèchement en le regardant de travers en serrant les dents par la douleur.

Putain maaaais... qu'est-ce qu'il lui avait pris de venir voir Sage sérieusement ? Elle lui avait manqué, ouais c'est vrai, bah plus maintenant. Ça faisait à peine cinq minutes qu'il avait débarqué dans sa chambre qu'elle l'agressait déjà et lui faisait des reproches. Comme au bon vieux temps, c'est ça. Enfin, sauf que là c'était pire. "Sage..." Commence pas s'il te plaît. Non, ne commence pas, pas maintenant. Plus tard, mais pas maintenant. Il était pas venu pour se prendre la tête, il avait pas envie de s'engueuler avec, il était pas d'humeur, pas du tout. En fait, il voulait juste retrouver la mather comme avant, mais fallait croire que plus rien n'était comme avant. Voilà qu'elle se mettait à lui parler de gros bordel dans sa vie, qu'elle allait mal mais le truc, c'est que Jules, il ne savait pas de quoi elle lui parlait. Parce qu'il était au courant de rien. D'accord, il n'était pas venu la voir, mais elle non plus, ne s'était pas pointée à la porte de sa chambre pour l'appeler et lui parler de ses problèmes. Mais bien sûr, c'était de sa faute, à lui et uniquement la sienne, comme toujours. Détournant le regard, il passa sa main dans ses cheveux en soupirant, déjà saoulé par la situation. "Toi aussi tu pouvais venir me voir. J't'aurais pas laissée dans la merde, tu l'sais bien." Mouais, non elle le ne le savait pas. Il avait tellement le don de se foutre de tout et de ne rien laisser paraître que tout le monde croyait qu'il ne pensait qu'à sa petite personne, ce qui était faux, bien sûr. Et Sage devrait le savoir d'ailleurs, mais apparemment ce n'était pas le cas. "Putain Sage lâche ça !" Son expression changea du tout au tout lorsqu'il reporta son attention vers la jeune femme, la main ensanglantée. Mais elle foutait quoi là, au juste ? C'était quoi son problème sérieux ? "Allez, lève toi..." lança-t-il calmement en se plaçant juste devant elle en lui tendant une de ses mains

Souvent tu t'es demandé pourquoi vous vous étiez éloignés comme ça.. Pourquoi tout est partit en couille d'un seul coup sans crier garde, Pourquoi tout avait tant changé entre vous et la putain d'époque où rien n'avait d'importance, où vous étiez encore cons et insouciants, où il prenait un malin plaisir à te faire chier tout comme toi.. Cette époque là elle t'manqué, t'y as souvent repensé, cette soirée a la plage avec tout l'monde, avec Ana, maintenant, on était tous éparpillés, certains d'la bande sont partis du jour au lendemain et ceux qu'ils restent s'adressent à peine un regard. Alors Pourquoi t'es là Jules ? Pourquoi tu viens t'pointer maintenant ? "Sage".. Ton prénom résonne dans la pièce et t'y prêtes même pas attention, trop bornée, trop butée pour t'arrêter là, pour pardonner si facilement alors que la rancœur te ronge. - J'ai perdu mon bébé Jules !! Je l'ai perdu et t'était pas là ! Tu m'as laissé.. Tu hurles sans te rendre compte des mots que tu viens de déverser, tu hurles et tes poings se resserrent sur les bouts de verres qui t'écorchent la peau. Tu sursautes quand sa voix tremble, t'était dans un putain d'troue, impossible à remonter à la surface. Perdue. Sonnée. Tu lâches finalement ce que t'as en main, ton regard se pose sur la sienne tendue vers toi. Tu l'ignore et te relève. - C'est bon, ça va. Tu souffles doucement en te dirigeant vers la salle de bain pour rincer ta main ensanglantée.

Avec du "bordel dans sa vie" autant vous dire que Jules s'attendait un peu à tout, mais certainement pas à ce que la mather ne lui annonce qu'elle avait perdu un bébé. Ouais il était choqué et pas qu'un peu là, son visage parlait pour lui. Parce que déjà, il n'était absolument pas au courant que son amie ait pu être enceinte à un quelconque moment et elle ne lui avait rien dit non plus. Alors Sage pouvait bien lui reprocher de ne pas avoir été là, il était loin d'être le seul fautif de l'histoire. "Quoi ? T'étais enceinte ? Et tu comptais me le dire un jour ?" Non mais c'était une blague là ou bien ? Sage enceinte ? C'était aussi incroyable que lui en couple, ça défiait toutes les règles et même plus encore.  "Parce que j'étais pas au courant si c'est ce que tu crois." Comment aurait-t-il pu ? Par Ana peut-être, s'ils n'avaient pas passé leur temps à s'ignorer à la fin de l'année m'enfin, elle n'était plus là maintenant de toute manière, comme tous les autres en fait... Il ne restait plus qu'eux et malgré cela, on ne pouvait plus vraiment parler "d'eux". Et le pire dans tout ça, c'est qu'il n'y avait aucune raison à cet éloignement si soudain... Alors ouais, peut-être que Jules n'avait pas été là, peut-être qu'il avait foiré, comme toujours, mais il était là pour ramasser les morceaux, comme promis. "Non ça va pas. Ça t'arrive souvent de t'entailler la main avec un morceau de verre ?" Et de trouver ça normal après, parce que pas lui. Donc elle pouvait l'envoyer chier si elle le voulait mais il n'avait pas l'intention de bouger de là, il n'avait nul part où aller de toute façon. "Laisse moi voir." dit-il en attrapant sa main sans même le lui demander. Peut-être qu'il faisait pas médecine, mais soigner une plaie, il savait le faire.

Tu t'effondre, t'as un genou à terre et t'es pathétique. Tremblotant nerveusement, le bout de verre entre tes doigts, tu pinces les lèvres en fermant fort les yeux. Eh merde ! T'avais lâché la bombe et tu t'en rends compte en entendant Jules te parler du bébé. Tu déglutis, t'as mal et tu sais pas si t'as encore envie qu'il resté planté là ou juste qu'il dégage une bonne fois pour toute. De ta chambre, de ta vie. Tu lui en veux d'pas avoir été présent dans c'genre de moment où t'en avais le plus besoin, tu lui en veux de s'être éloigné sans aucune raison logique. [color=#9F81F7][b]- À quel moment ? Quand t'était avec Ana ? Ou le jour où tu m'as envoyé un message ? Tu ris avec ironie. [b]- Ah mais que suis-je conne ! Y'a pas eu de message. Jamais. Et ton visage reprend cette froideur, cette douleur inscrite à ton propre sang. Tu pars sèchement dans ta salle de bain, l'eau coule sur l'entaille et l'ombre de sa silhouette attire ton attention. T'as pas l'temps de parler, de dire quoi que ce soit que ta main est déjà dans la sienne. T'es pétrifié, tu sais pas quoi faire alors tu le laisse regarder. Son touché t'avais manqué que tu te dis une fraction de seconde. Il t'avais manqué. [b]- C'est rien.. Tu souffles doucement en refermant légèrement la main.

Putain, c'était la merde, encore et toujours. A croire que ce n'était pas possible d'avoir la paix pendant cinq minutes, que c'était trop demandé. Fallait toujours que quelqu'un ne lui prenne la tête ou qu'on lui reproche quelque chose. Et là, c'était carrément totale avec Sage qui lui annonçait en prime des trucs pareils. Jules se sentait con mais surtout, perdu. Il ne savait pas quoi faire ni quoi dire puisque de toute manière, la jeune femme en reviendrait toujours au même point. Et bon, à force lui il ne savait plus quoi dire pour sa défense. Puis maintenant qu'il était au courant du "bordel" dont elle parlait, ça le faisait chier de se dire qu'il n'avait rien fait, qu'à l'époque, il était bien loin de tout ça, de tous ses problèmes, trop occupés à gérer les siens. Soupirant sans retenue, il resta silencieux, son regard divaguant vers la seule fenêtre de la chambre, avant de lancer : "J'étais pas toujours avec elle, on se parlait plus à un moment et... peu importe, elle n'est plus là de toute façon." Son ton était calme mais on pouvait sentir une certaine irritation dans sa voix ou plutôt, de la rancœur. Le mather ne savait même pas pourquoi il venait de lui dire ça et regrettait déjà, parce que s'il y avait bien une chose dont il ne voulait pas parler, c'était bien de ça. Il continua de fixer le paysage au loin, évitant le regard que Sage pouvait lui porter, jusqu'à ce qu'elle ne parte dans la salle de bain. Il s'empressa de la suivre malgré tout, parce qu'elle le saoulait à faire des conneries et qu'il voulait s'assurer qu'elle ne laisse pas sa main dans cet état. "Tu fais chier... T'as une trousse à pharmacie ou un truc du genre au moins ?" demanda-t-il avant de regarder de lâcher sa main pour regarder lui-même dans l'armoire et en sortir de quoi nettoyer la plaie. C'était pas en passant un coup à l'eau froide que ça allait faire l'affaire. "J'te préviens ça va piquer alors me pète pas encore un câble." lança-t-il en la regardant dans les yeux avant de s'emparer d'un coton et de l'appliquer sur la blessure.