Les trois enfants séparésC’est sous une obligation que j’écris ces lignes. Mon psychiatre m’a conseillé d’évoquer mes souvenirs, les bons comme les mauvais. En soulignant que cela serait une libération pour moi, une sorte d’exorcisme. Je ne me sens pas vraiment à l’aise, même si personne ne lira jamais mes mots, cela sera un déclencheur, comme si depuis tant d’années, je m’étais fait des illusions. Caché de mes propres démons qui me hantent depuis bien trop longtemps. J’ai été adopté à l’âge de cinq ans dans un centre d’adoption situé dans la banlieue de Londres. Je connais que de vagues détails de mes parents, enfin.. De mes vrais parents. Ils ont disparu après la naissance de mon dernier frère qui a aujoud’hui 29 ans. Ils étaient tous les deux heureux, ils vivaient dans une charmante maison où chacun de nous avait la chance d’avoir sa propre chambre. Un village plutôt calme où demeuraient d’autres enfants. À vrai dire, j’ai la sensation que cette vie était à la limite de la perfection, du moins, les personnes exprimaient cela avec un sourire nostalgique, en protestant le fait que mes parents étaient des personnes honnêtes, serviables, qu’ils étaient toujours préparés au pire, et qu’à tout moment, ils tendraient leurs mains pour aider quiconque. Mais pourquoi, pourquoi je n’ai aucune image d’eux ? De leur visage, de leur voix, des instants vécus auprès de cette famille si aimante. Je n’ai pas de réponse, les seules que j’ai pu trouver, ce sont les journaux où plusieurs journalistes parlaient d’une disparition soudaine de deux parents, laissant leurs enfants dans la maison, de quoi vivre pendant quelques jours, mais sans piste, sans aucune nouvelle, comme s'ils s’étaient envolés. Évidemment, ce n’est pas le cas, il doit y avoir une raison, qu’importe laquelle. Je m’efforce de garder la tête haute, et d’espérer avoir des bouts du puzzle afin de l’assembler et d’y comprendre quelque chose. Mes frères et moi avons été placés sans autre dans un centre, plutôt catholique.. Les chambres des filles dans un coin, et celles des garçons de l’autre, malgré mon jeune âge, je devais m’occuper de quelques tâches ménagères, rien de très actif, mais suffisamment pour m’avoir laisser quelques moments ancrés dans ma tête. Nous étions inséparables, toujours collés l’un avec l’autre, dans la prière d’être adoptés par une famille attachante, et qu’elle ne nous sépare pour rien au monde. Mais cela ne fut guère le cas. D’abord Mathias, puis moi, et sans Jeesey.. Chacun dans une famille. Quelqu’un nous avait retiré nos parents, et désormais, on venait de nous éloigner l’un à l’autre, sans ménagement, sans réellement comprendre. Ma vie dans ce centre n’a pas vraiment duré, que quelques mois à vrai dire, j’ai été adopté par une jeune famille, une mère qui ne pouvait avoir d’enfant, et un mari qui faisait tout pour la rendre heureuse, mais ils ne pouvaient avoir trois enfants sous leur toit, c’était improbable, pas en habitant dans un petit appartement, et à l’époque, ils n’avaient surtout pas les moyens. Nous sommes partis de Londres, pour rejoindre l’Amérique. Et là, toute espérance avait fini par s’effondrer..
L’enfant grandit trop viteJe ne sais pas, si je peux exprimer cela, mais.. Mes parents ne me manquent pas, c’est plus simple pour moi d’aimer ceux qui m’ont pris sous leurs ailes. Plutôt que deux fantômes qui n’existent que par des « ils étaient ». J’ai vécu entouré d’un amour unique, d’une tendresse inexplicable, d’une présence incroyable. Je regardais souvent à travers la fenêtre, en observant les détails qui m’entouraient. Peut-être que j’allais croiser l’un de mes frères, cela faisait déjà de bonnes années, que je me retrouvais éloigné d’eux. Mais pendant neuf années, je n’ai rien eu. Qu’un silence, que quelques regards de pardon, sans signe d’aborder le sujet de mes frangins. De cinq à quatorze ans, j’ai été à une école publique, essayant de me faire des « ami(e)s » mais cela était peine perdue. Je n’arrivais pas à m’intégrer, j’étais toujours celui qui était collé au mur, attentif comme jamais aux cours, toujours disposé pour les tâches, respectueux, poli. Alors, les autres enfants prenaient un certain plaisir à se moquer, à me pointer du doigt lorsque j’arrivais vêtu de mes habits de « pauvre ». Ouais, les enfants sont cruels à cet âge, ils ne mesurent pas à quel point ce genre de propos peut traumatiser un gosse, y laissant des marques incurables. Ce n’est pas faute d’avoir essayé. J’avais souvent proposé à quelques camarades de venir à la maison, de prêter mes jouets, mais rien ne fonctionnait, j’étais toujours le non-désiré de la classe, et cela avait continué. Au bout d’un moment, vous savez, vous prenez l’habitude d’être ainsi rejeté, d’être le vilain petit canard. Ce personnage se fond en vous, vous ne faites plus qu’un, vous ne distinguez plus qui vous êtes réellement. Alors, vous jouez le jeu. Vous vous rebellez pour montrer que les autres ont raison de ne pas vous approcher, non, mais cette fois.. Vous leur donnez une raison, d’être loin de vous. J’ai appris à me battre, plutôt.. J’ai appris à cogner de toutes mes forces contre un enfant qui se moquait de moi. Je me souviens de sa tête, vous savez, c’est le genre de brute qui ricane devant vous, accompagné par d’autres enfants… Des moutons, si vous voulez tout savoir. Je n’ai pas eu de problèmes, comment un enfant maltraité, toujours seul, pouvait avoir un quelconque soucis ? Non, ils avaient appelé ça.. « de la tristesse ». Triste, ouais, j’étais surtout triste de ne pas avoir amoché davantage la face de ce môme.
Sauver des vies, plutôt que de sauver la mienne. Je vous épargne le blabla de la période d’adolescence. Fumer, boire, sortir. Baiser. C’était le quotidien que je menais en dehors des cours. À mes yeux, c’était quelque chose de plaisant, à vrai dire, à chaque bonne note, je me tapais une nana en clamant le fait que j’étais très malin et que c’était une victoire de plus. On est cons à cet âge, mais c’est plutôt cool. J’avais pas franchement d’amis, je trainais dans les bars, je me ramassais des nuits blanches, et tout cela sans que mes parents le sachent, tant ils étaient catholique, ils auraient pu m’envoyer dans un centre pour prier Dieu de pardonner mes pêchés. J’étais une jeune homme plutôt créatif. De nombreuses excuses pour pouvoir sortir. Mais jamais, jamais je ne loupais l’école. C’était tout pour moi, une chance de me venger du passé, de l’abandon de mes vrais parents. Je savais qu’en m’engageant dans un domaine plutôt complexe, j’avais la possibilité de rendre heureux ceux qui m’ont élevé, et aimer comme leur propre fils. Mon but précis était d’avoir de l’argent. Qu’ils soient fiers de moi, qu’ils ne se soucient plus des fins de mois. Que désormais c’était à moi, à moi seul, d’arranger les choses.
L’interne solitaireJ’ai eu le bac à 22 ans, ensuite je suis en plein diplôme de médecin. J’y arrive pas mal, je sais que c’est la branche qu’il me faut. J’ai toujours été quelqu’un qui aimait aider, qui trônait la vie des autres avant la sienne. Je suis interne à l’hôpital BELLEVUE HOSPITAL CENTER, depuis quasiment trois bonnes années. Je n’ai jamais redoublé, je puise dans mes forces pour réussir dans ce domaine, et rien ni personne ne pourra me foutre un bâton dans les roues. D’ailleurs, je ne comprends toujours pas cette obsession d’être en couple, d’être aimé par une personne. D’avoir de nombreux amis, comme si tout autour de moi était focalisé par un futur.. Un futur minable à mes yeux, certes. Famille, travail. Sincèrement, c’était un futur ça ? J’estimais que c’était celui des gens faibles, incapables de se maintenir à leur carrière qui prenait déjà pas mal de temps. Non, la plupart des internes sont comme des chiens, affamés par cette envie de ne plus être seul, comme si la solitude était une mauvaise chose. Foutaise. Je suis bien seul, j’ai mon appartement.. Assez petit, même très petit, je baise pour m’occuper l’esprit. Mais sinon, je n’ai jamais ressenti ce besoin d’être lié à quelqu’un pour « l’éternité » d’abord parce que je travaille dans un hôpital, et que tout me montre le contraire, que même un amour peut être le plus grand des enfoirés, mais qu’ensuite.. Je n’ai pas le temps, c’est l’excuse que j’utilise le plus de mon temps, quand je me réveille à côté d’une inconnue. « j’ai pas le temps, je dois aller bosser. Je te rappelle. » Je te rappelle jamais.
Le médecin « faussement » exemplaireFin d’année de médecine. Bordel de merde, je me souviendrais toujours de ce moment. J’ai eu mon diplôme haut la main, j’ai tout donné, j’ai eu des félicitations à chaque fois. J’ai vécu mes années d’interne comme les pires de ma vie. Je comprends maintenant pourquoi on disait que les internes étaient des bouche-trous. Qu’ils étaient là pour faire le reste de la merde des médecins. Que les horaires, la plupart du temps, rendaient barge. Putain, j’ai dû m’accrocher comme jamais. J’ai quelques fois douté de moi, en disant que je pouvais faire des études plus faciles, que c’était impossible pour moi de côtoyer des gens aussi détestable. Mais j’ai réussi putain, j’ai réussi à tirer ce diplôme qui va m’ouvrir des portes, j’en suis persuadé.
Cinq ans après. Après une certaine hésitation sur la spécialisation.. Entre hématologie ainsi que la neurologie, j’ai décidé d’attaquer le domaine d’hématologie. C’est un domaine très peu convoité, peu de personnes connaissent ce secteur. Cependant, c’est d’autant plus important. La maladie du sang, tout ce qui se retouche à cela. Je suis heureux d’avoir concrétisé mon rêve, de devenir médecin, et de m’assurer les fins de mois. Je ne vais pas vous mentir, mais qu’importe le secteur où tu te places, la médecine est un travail dont tu récoltes un salaire plutôt impressionnant. Je vous passe le fait que ma réputation n’a pas changé depuis des années, que je reste le type seul, dans un coin, mais qui fait un formidable boulot, mais qui à l’extérieur ressemble plus à zombie vagabondant dans les rues à la recherche d’une proie des plus faciles. Mais je m’en tape, ils savent pas à quel point je suis satisfait de la vie que je mène, aucune maladie, un appartement. Je mène la vie, que j’ai toujours mérité d’avoir. Je me surprends plus à me réveiller durant la nuit, encombré de mes cauchemars grotesques. De mes peurs, de vouloir chercher la vérité concernant mes vrais parents. Non, tout cela est derrière.. Enfin, j’ai pensé que tout cela l’était.
Une pratique, un accident.. Du recul. J’ai été allongé dans un lit hôpital durant plus de six mois. Les médecins m’ont expliqué que mon accident avait été grave.. J’étais sur ma moto, j’allais.. Ouais, j’allais tourner à droite, jusqu’au moment où je vois une voiture face à moi, la femme n’a pas du me voir, il me semble qu’elle était au téléphone, j’en sais rien, j’ai quasiment un trou noir quand j’essaie de me souvenir de cet instant. Tout est allé vite. Elle est morte sous le coup, c’est ce qu’ils disent, peut-être pour me rassurer, j’en sais rien. J’ai une boule au ventre, j’ai envie de chialer, de me briser de l’intérieur tant la douleur est insupportable. Durant des années, j’ai souhaité que le bonheur des autres, j’ai étudié jusqu’à réussir, je n’avais pas une vie à plaindre. Alors je ne comprends pas, je ne comprends pas pourquoi j’ai été ainsi. Et vous savez, c’est là, que j’ai commencé à me sentir seul. De ne pas avoir de visites, ou très peu. J’ai commencé à voir du noir, j’ai commencé à me sentir réellement triste. Délaissé par cette société qui ne vous remercie aucunement. Peut-être que j’ai tué cette femme. Pourtant, je ne la connaissais pas, mais au fond de moi, je me déteste. Mes démons reviennent m’envelopper. Ils savent que je ne suis pas en paix avec moi-même. Et ils en profitent, ils se plaisent à m’humilier. Je suis perdu, je ne me reconnais plus.
En arrêt jusqu’à permission, jusqu’à passer des tests, si oui, je suis apte à reprendre le travail, exercer dans quoi je suis le plus fait. C’est dérangeant, de devoir parler devant un inconnu, de prendre quelques médicaments pour ne pas avoir des douleurs au niveau des jambes. Je suis persuadé d’être un survivant, un miraculé. Je commence à croire à Dieu, ou peut-être que ce sont les médicaments qui parlent. Je baise plus, du moins, je n’arrive pas à succomber à aucune des femmes qui se présente à moi.
Durant cette année, je me suis obligé à me redresser, les premiers mois n’ont pas été simple, j’ai souvent été gobé par la tristesse et cette culpabilité. Les tatouages étaient un moyen de liberté. Marquer mon corps des séquelles de la vie pourrait peut-être m’aider à aller mieux. Je suis retombé dans ce cercle infernal. Des bagarres de rue, dans laquelle je pariais pour gagner, c’était un jeu, un jeu pour m’évader, pour ne plus penser à l’accident et à la mort d’une femme.. Je combats durant la nuit, je me tatoue.. Je reprends petit à petit possession de mon corps, qui se réveille pour des envies. Mais cette fois, je suis davantage gourmand. Hommes, et femmes. Tout passe sous mes doigts habiles.
Toi ? Lui ? Moi ? Nous.J’ai un trouble de la personnalité. Voilà le diagnostic. Ce n’est pas mauvais, cela ne peut pas entraver mon parcours, et encore moins faire des dégâts dans ma profession. Mais j’ai un putain de trouble de la personnalité. Faible, en soi. Je n’arrive pas à m’adapter à cette société, je n’arrive pas à être sociable. Et je n’aime pa, qu’on me touche de trop près. Je suis arrivé au stade où je suis traité. Où désormais, je peux reprendre mon travail à 100%100 sous l’attestation du psychiatre qui me suit depuis quelques temps. Je dois faire des efforts concernant cette maladie. Sortir, être moins distant. C’est plus facile à dire qu’à faire.. N’est-ce pas ? Mais ce n’est qu’une question de volonté. Rester positif. Je le suis depuis que j’ai cinq ans.
Jeu du chat et la souris. Il y a un type depuis peu qui me nargue. Nous avons couché ensemble, mais ce n’était rien de sérieux à mes yeux, juste un coup comme ça, histoire de profiter. Il a une tête de gosse. Je sais pas quel âge il a. Mais il était là, à me regarder dans les yeux, à me dire des trucs pour me chauffer. Je le faisais passer pour mon petit frère pour pas qu’on me surprenne à sauter un gars bien plus jeune que moi. Mais j’aime ça, je sais pas pourquoi. Je saurai même pas l’expliquer. Mais j’aime cet affrontement. J’aime savoir qu’il est dans les soirées où je vais, contre le mur, dans les toilettes. On s’en tape, tout y passe. Il est si bon, c’est si étrange que je deviens parano. Que je le cherche moi-même du regard.. Je sens qu’il cherche un truc, et il va le trouver.
J’ai passé six mois à jouer avec ce garçon. Pour finalement.. Arriver à quelque chose de plus inattendu. Je suis toujours autant seul, je veux dire, malgré mes efforts surnaturels. Je n’arrive pas à dépasser ce stade. Mais c’est différent.. Très différent quand je suis avec Harley. Il est là, sa présence me fait du bien, je me sens à l’aise, je n’ai pas peur d’être moi. C’est définitif. Je veux qu’il soit dans ma vie.
Nous nous sommes avoués nos sentiments le vingt-huit février, alors que je me tenais dans une ruelle avec un type, en train de fracasser son crâne contre le trottoir le plus proche. Nous sommes ensemble. Je crois qu’en écrivant ces mots, j’arrive toujours pas à le réaliser. Je vais pas tout expliquer, je vais encore moins passer tous les détails de ma vie, j’explique, globalement comment ça s’est produit, où j’en étais à cet époque. Alors, j’étais avec Harley, nous sommes allé voyager au spring break. Nous avions même un projet fou d’emménager ensemble, mais cette fois, pas dans un appartement, mais dans une maison que nous prendrions le temps de choisir. La « bulle » c’est comme ça, qu’il surnomme notre maison. C’est plutôt joli non ? Ouais, je croyais que ça l’était.
C’est pas un film, tout est réel.Harley a été hospitalisé.. À cause des coups qu’il a reçu. Il s’est bagarré, ou plutôt il s’est laissé cogner. Un type, une embrouille, j’en sais pas plus que ça, je sais juste que je l’ai retrouvé durant une garde, allongé sur un lit d’hôpital. Tout est revenu d’un coup. J’ai pensé partir, fuir. Pour ne pas affronter mes vieux démons, de ne pas me retrouver seul encore une fois. Cette image de lui, ainsi.. M’a tellement fait du mal. Je n’ai pas pu continuer avec lui. Je faisais des crises, et il a voulu se séparer. Voilà, j’ai l’impression que ma vie se détruit petit à petit.. Je ne sais pas si j’aurai les forces nécessaire pour aller de l’avant. Je ne sais pas comment je faisais pour aller travailler, pour m’occuper des gens alors que je n’allais pas bien. J’ai même réussi à mentir à mon psy. En lui disant que Nevada avait pris quelques jours de congés, et que nous nous étions éloignés le temps qu’il revienne. Mais au fil des jours. J’ai commencé à réaliser qu’il ne reviendrait plus jamais. Que je lui faisais peur. Que mes crises étaient bien trop conséquentes. Et pourtant, deux semaines plus tard, nous avions convenu un rendez-vous médical. Car oui, depuis que nous nous sommes unis. J’avais pris l’initiative d’être son médecin concernant sa maladie.
La première semaine a été dure. Je n’arrivais rien à avaler, j’étais cloué au lit, quand je n’étais pas à l’hôpital. La maison que nous venions d’acheter est remplie de souvenirs, et cela en devient même des cauchemars. Je me surprends à repenser à cette femme, à l’accident, aux gens que j’ai blessé, à mes parents.. Pour qui je n’accorde même plus une seul attention. Suis-je redevenu le monstre seul ?
À ma deuxième semaine, j’étais plutôt heureux. Ouais, j’étais excité à l’idée de revoir Harley, même si je me doutais que cela n’était que professionnel, qu’il irait même à demander à autre médecin pour ne plus m’avoir dans sa vie. C’est peut-être le trouble de la personnalité, mais je me sens bien.
Et si.. C’était à refaire ? Il était là, devant moi. Je ne voyais que sa bouche bouger, je ne voyais que sa maigreur qui m’a traumatisé. L’homme que j’ai connu n’était pas en face moi. Il a perdu du poids, il est mal, tout aussi mal que moi.. Et peut-être que par égoïsme, j’aime ça. Je veux qu’il soit triste, qu’il regrette ses actes, qu’il se souvienne des bons moments, de l’amour que j’éprouvais à son égard. Je veux qu’il comprenne que ce n’est pas notre vie. Que non, on ne peut pas continuer à être sans l’autre. Je maudis son frère, qui ne me laisse le voir, qui raccroche mes coups de téléphone, je le maudis jusqu’à ne plus pouvoir.
Nous avons longuement discuté des pours et des contres. Et nous avons décidé de nous redonner une petite chance, et d’en profiter pour aller visiter les parents de Harley à Paris. C’est bon Paris, c’est une ville splendide. Même si effectivement je ne donne pas une bonne impression, et que le regard du père de mon partenaire est loin d’être rassurant. J’ai rejoins Harley durant une soirée. Il était avec ses amis, et je me disais que cela serait une bonne idée de le rejoindre et d’entamer une petite amitié avec ceux qui partagent la vie de mon homme. Peine perdue, cela ne s’est absolument pas bien déroulé. Les événements ont fait que je me suis retrouvé sur un type, à le massacrer de mes mains, j’étais prêt à le tuer. J’en revenais pas à quel point la rage et la haine s’était imprégnées de mon corps. J’ai repoussé Harley lorsque nous nous sommes défilés dans les rues de Paris pour retrouver la demeure de ses parents. Des disputes, des hurlements. J’en viens à être marqué. Des cicatrices qui logent mon torse, ainsi que mon dos marqué par mes tatouages.
En revenant en Amérique, je me suis.. Vengé, je crois que c’est le bon mot, puisque Nevada l’a pris de la sorte. J’ai vendu la « bulle » sans éprouver de regret. J’étais sur le canapé quand j’ai retrouvé Harley qui revenait tout juste de cours. Je savais ce que j’allais faire, c’était évident. Il m’en a voulu, et il m’en veut certainement encore aujourd’hui. Mais durant ce moment, j’ai posé mon genou à terre, et je lui ai demandé sa main. Ouais, vous avez bien lu. Le type solitaire, à trouble de la personnalité, a demandé en mariage l’homme qui vit avec lui depuis 7 mois.
Le présent.
J’ai mal aux doigts, à force d’écrire le passé. Je vais me focaliser sur le présent désormais. Nous habitons dans un grand appartement, je suis toujours médecin, je me bagarre toujours, et j’aime tout particulièrement prendre des risques. Que cela soit avec l’argent, ou mettre ma vie en danger, en reprenant la route en moto.
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