(denasey) spaces between us keep getting deeper

Il fait bon aujourd'hui, il n'y a personne à l'épicerie alors le gérant m'a proposé de partir plus tôt et que, de toute façon, il me paiera mes heures. Depuis que j'ai déménagé avec Isaiha, il ne peut plus m'appeler quand il veut et me demander de le remplacer à tout va. Du coup, je crois qu'il me chouchoute un peu et je dois avouer que j'en profite grandement. Il me reste une heure à tuer avant d'aller en cours alors je me dirige vers le campus et vers les confréries. Je ne sais pas encore ce que je vais faire, qui je vais aller voir mais bon... Ça fait longtemps que je n'ai pas vu Lewis alors je me dirige tranquillement vers la Mather House. J'ai l'impression que les gens me regardent de travers à cause de la manière dont je suis habillée. Et bien quoi mon short à fleur ne leur plait pas ? Ou c'est ma chemise ? J'ai une tâche dessus ? Je le regarde et manque de rentrer en collision avec quelqu'un. " Regarde devant toi au lieu de mater tes seins ! " Je m'arrête et le fixe quelques secondes. " Je suis désolée " Soufflais-je en le voyant filer plus vite que la musique. C'est bien ça qu'on dit non ? Je reprends ma marche et sens quelqu'un se rapprocher de moi. Ce genre de choses ça se sent. Et il m'adresse la parole. Mon sang se glace et je reste au milieu de l'allée. " J'ai pas le temps, je vais à la mather ! " Lâchais-je sans me tourner pour reprendre mon chemin. Je vais courir s'il le faut !

La rentrée, mon déménagement, l’inté à la MH, tout allait très vite depuis la fin du SC et si au début j’avais appréhendé un peu ce retour à Cambridge post vacances, j’étais désormais happé dans une spirale de sur activité qui ne me laissait pas beaucoup de temps pour moi. Le garage, les permanences à la soupe populaire, les cours, je jonglais avec tout ça en tâchant aussi d’accorder un peu de temps à mes amis. J’étais en chemin pour ma confrérie, après une visite à un ami lorsque sur le chemin, mon regard se perdit à admirer la jolie blonde qui avançait devant moi… Et plus particulièrement une partie de son anatomie, joliment mise en valeur dans un petit short fleuri… La demoiselle me faisant dos, c’est donc sur sa cascade de cheveux blonds, son joli petit derrière et ses longues gambettes que j’avais simplement vue, incapable de reconnaître ma collègue de l’asso, celle qui d’ailleurs avait changé sa journée de bénévolat pour ne plus avoir à m’y croiser, changement révélateur de la très bonne première impression qu’elle avait eu de moi. J’avançais un peu plus vite pour suivre son pas, m’approchant d’elle, sourire charmeur, sauf que je n’eus même pas le temps de l’interpeller que sa voix retentit pour me congédier, soufflant qu’elle était pressée qu’elle allait à la mather. « Ca tombe bien, j’y vais aussi, tu veux que je t’accom… » commençai-je à proposer gentiment en me plaçant alors devant celle que je prenais encore pour une inconnue, me figeant finalement avec des yeux ahuris en me trouvant nez à nez avec… « Casey ??? »  

J'ai un peu de temps à tuer et je me dis que je dois aller voir Lewis pour lui dire que j'ai embrassé Priam mais aussi pour lui dire que c'est officiel, je suis étudiante à Harvard ! Je n'arrive toujours pas à y croire même si ça fait une bonne semaine que j'ai appris la nouvelle et presque autant de temps que les cours ont commencé. C'est bizarre, vraiment bizarre. J'ai cru que je n'y arriverais jamais, qu'on ne m'accepterait pas dans cette prestigieuse université et puis... Voilà quoi. Je suis tellement heureuse ! Je me dirige vers la mather après être entrée en collision avec un jeune homme et je me dépêche parce que je me sens suivie. Je déteste ça. Mon estomac se tourne et se retourne dans les sens. Je le congédie avant même qu'il puisse faire quoi que ce soit, absolument pas confiante. Mais il ne lâche pas l'affaire et se retrouve rapidement en face de moi. « Ca tombe bien, j’y vais aussi, tu veux que je t’accom… » Il se glisse devant moi et je m'arrête, faisant rapidement un pas en arrière comme pour mettre de la distance entre lui et moi. Denys. Ugh. Je le regarde droit dans les yeux, surtout quand il me questionne sur mon prénom. " C'est bien, tu te souviens de moi " Ronchonnais-je. Et moi aussi, je me souviens de lui, de la manière dont il m'a traité avant le SC et ce dont Priam m'avait dit sur lui pendant un dîner. " Déçu de me voir sur le campus ? " Demandais-je simplement, un peu en colère.

Même de dos, elles me séduisaient… J’en avais marre d’être si faible face à la gente féminine, mais la demoiselle au mini short devant moi m’avait tapé dans l’œil. Trop du moins, pour que je l’ignore et que je ne l’interpelle pas. Sauf que je n’eus pas le temps de finir ma phrase que je me stoppai lorsque j’aperçus son visage. Casey. C’était Casey. Ma sdf de la soupe populaire. Enfin celle que j’avais pris pour telle. Que de changement donc. Je compris d’un coup pourquoi Priam n’avait pas compris les problèmes de look dont j’avais parlé lorsqu’il m’avait avoué son attirance pour elle. Son regard était sombre, et le fait qu’elle le plante dans le mien ne m’aidait pas à me sentir à l’aise. Y’avait plus de trace de sourire charmeur ou quoi. Après la mauvaise première impression que je lui avais fait, une tentative de drague ne pouvait que constituer la pire deuxième impression… Chouette. « Pas déçu arrête… » répliquai-je en levant les yeux au ciel avant d’expliquer : « Je suis surpris c’est tout. Je ne t’avais pas reconnue. Tu es… » Plus craquante ? Plus élégante ? Plus sexy ? Plus bandante ? Ta gueule Denys… « Tu es changée. » Ouais, changée, c’est pas mal ça. « T’es officiellement étudiante alors ? » Et me rappelant ce qu’elle avait dit pour m’envoyer bouler avant que l’on se reconnaisse mutuellement, qu’elle allait à la mather, j’eus soudain un doute : « T’es chez les verts aussi ? » 

Je ne pouvais pas expliquer pourquoi mais je ne pouvais pas supporter Denys. C'était surement la première mauvaise impression avec le grec qui me rebutait face à tout ce qui le concernait. J'avais perdu mon sourire, mon regard heureux et tout ce qui va avec. C'est comme si je venais de me transformer en tueuse à gage et je l'attendais au quart de tour. " Je suis plus à ton goût maintenant, je ressemble moins à une SDF c'est ça ? " Demandais-je en le fusillant du regard. Il n'y avait que Denys pour me mettre dans un état pareil. J'étais plutôt du genre à éviter les conflits mais avec lui c'était différent et je ne savais expliquer pourquoi ni comment. En tout cas, on ne se connaissait toujours absolument pas. Je n'avais pas de relations réelle avec lui et j'avais juste appris qu'il était le meilleur ami de Priam au détour d'une conversation avec le dunster. En tout cas, quand il me demandait si j'étais chez les verts moi aussi, je fronce les sourcils. " Ce choix te va très bien, étonnement " Lâchais-je en soufflant fortement. " Jamais de la vie je ne serai Mather. J'aime bien trop les règles pour ça " Et puis, on avait quand même essayé de me violer lors d'une soirée ... Alors aller crécher là haut, plutôt mourir quoi ! Je le regarde et attends une réaction, quelque chose. " Je suis pas assez belle pour toi c'est ça ? Pourquoi tu dragues tout le monde sauf moi ! Parce que Priam m'a dit que tu draguais tout ce qui bouge ! " Enfin, pas dans ces mots là. Le Dunster m'avait surtout dit que son meilleur ami était un charmeur quoi... Et là, je comprenais pas pourquoi il était sur la retenue. Il m'aime pas, je suis mort ? Je ressemble à un monstre ? Bonne question.

Qu’est-ce que j’avais pas fait en abordant la demoiselle ? Elle s’énervait quand je la vexais en la prenant pour une sans abri, elle s’énervait quand je la flattais en tentant une approche, elle s’énervait tout le temps en fait la petite Casey. Une vraie boule de nerf. Je levai les mains en l’air, tâchant maladroitement de me défendre. « C’est pas ça… C’est que… » Si c’était ça Denys. Le mini short et la chemise blanche, ça marchait tellement mieux que le gros gilet informe et le pantalon trop large… « J’aime bien les fleurs sur ton short, c’est chouette… Ca te donne un côté hippie. » Voilà qu’on parlait mode, tout et n’importe quoi pour dissiper le malaise et le rappel de ma bourde de la dernière fois oui. Je la questionnais sur la mather house, constatant qu’elle était désormais étudiante, je la supposais mather aussi, puisqu’elle s’y rendait. Mais elle objecta : elle aimait trop les règles pour s’épanouir dans une telle confrérie. « C’est vrai que là bas c’est parfois l’anarchie. Mais c’est un joyeux bordel, on s’y éclate bien tu sais… » J’y trouvais ma place moi, petit à petit. Et là, Casey boule de nerf fit son retour, soulignant le fait que je ne la draguais plus depuis que je l’avais reconnue, me demandant si c’était parce qu’elle n’était pas assez belle. « Non, mais non… Mais arrête Casey, c’est pas ç… » Mais je ne finis pas ma phrase, parce que dans sa tirade contre moi, mon interlocutrice évoqua Priam, et lâcha quelque chose qu’il aurait dit sur moi : « Arrête il a pas dit ça ? Je ne drague pas tout le monde, n’importe quoi. » J’avais quelque peu collectionné les conquêtes, j’en avais fait d’ailleurs une petite liste à mon meilleur ami… Ouais en fait si, c’était carrément possible qu’il ait dit ça à la jeune femme ha ha. « Je ne te drague pas, parce qu’on drague pas les crushs de ses potes. » Oops, j’en avais peut être trop dit là pour le coup 

Je le regarde et fronce les sourcils. Un côté hippie, ça veut dire quoi ça ? Que j'ai l'air d'une shooté de base avec des lunettes rondes aux verres tintés ? Non mais oh ! En plus, les hippies c'étaient pas "peace and love" leur slogan ? J'suis loin d'être en peace et de savoir ce que c'est le love. Je suis sûre qu'il se moque de moi sur toute la longueur et je n'aime pas trop ça mais alors pas du tout. Seulement, lui sauter à la gorge encore une fois n'est surement pas l'idée du siècle. Et puis Denys n'avait vraiment pas les mots qu'il faut. Si je devais attribuer les prix de "mister les pieds dans le plat", il serait le numéro un sans soucis aucun ! " Un joyeux bordel ?! " J'étais choquée, outrée, pour le coup. " Vous couchez tous ensemble ? " Soufflais-je en le dévisageant. Oui, pour moi un 'joyeux bordel' c'est partouse et touche kiki à qui en a envie. Ils sont fous ces mathers quand même.. Et quand je voyais que Lewis en faisait parti. Pourquoi mais pourquoi ?! Et puis, le comportement distant de Denys m'énervait un peu plus chaque minute. Pourquoi est-ce qu'ils réagissaient tous comme ça ? Je ne suis pas une petite chose, je suis un grand méchant loup. Bon, peut être pas mais je veux vivre, je veux faire plein de choses, je veux qu'on me désire et il faut croire que je ne savais vraiment pas y faire, au final. " Bien sûr que si t'es un gros dragueur de base ! Mais moi j'suis trop moche pour toi c'est ça ? " Je ne voulais même pas qu'il me drague au final, je ne ressentais rien pour lui. C'est juste que... après le beau petit râteau de Priam il y a quelques jours... Enfin, ce n'était pas vraiment un râteau c'est juste qu'il ne sait pas où il est et que voilà, je dois faire avec. Les mots de Denys arrivent à mon oreille et je le fusille du regard. " C'est ça ! Arrête de t'inventer des excuses bidon ! " Soufflais-je en retenant les larmes de couler. Bien Denys, bien, appuye là où ça fait mal, fout toi de ma gueule alors que je sais très bien comment est ton meilleur pote. C'pas moi qu'il aime, sur qui il crush. Il crush sur une nana qui l'a quitté et qui n'est même plus là. " Tu mens ! Il crush pas sur moi, il veut juste qu'on soit amis ! " Criais-je, tremblant un peu. " Je lui ai dis qu'il me plaisait et je l'ai même embrassé tu vois ! " Casey la nana sure d'elle à douze mille pourcent, la grande blague. C'était des jolis petits bisous mais j'aurais voulu tellement plus. " Mais c'est pas réciproque, alors arrête de te chercher des excuses à la con tu veux " Ronchonnais-je en tournant les talons, tremblant de la tête aux pieds. " T'approches pas de mes copines sinon tu vas voiiiiiir !!! " Une vraie furie, comme à mon habitude. Je ne lui laissais pas le temps de répondre, à ce crétin de la forêt. Rien à part une salve de connerie et de colère. Et je tournais à gauche, quittant mon chemin pour la Mather House... Direction la Lowell avec mon frère pour me détendre.

Tout ce que vous direz pourra être utilisé contre vous… C’était exactement ça, c’était ce sentiment que j’avais. Marcher sur des œufs… La moindre parole était prise de travers. Et pourtant, dieu sait que j’essayais de faire des efforts, surtout depuis que je savais que la miss était la potentielle future copine de Pri. Si on pouvait enterrer la hache de guerre, histoire que la nana de mon meilleur pote ne me déteste pas… Mais fallait croire que j’étais pas très doué en compliment, qu’après l’avoir prise pour une sdf, la comparer à une hippie ne sonnait pas comme la plus flatteuse des comparaisons vu le regard assassin qu’elle me lança. Et la suite de mes mots, qui se voulaient rassurant sur le bazar ambiant de ma confrérie, ce joyeux bordel qui y régnait et qui lui donnait des airs d’auberge de jeunesse, tout le monde allant et venant et vaquant à ses petits affaires, elle le prit de nouveau de travers. Je grimaçais, essayant de rectifier le tir : « Mais non, c’est pas ça… Pas bordel dans ce sens là… » Pas d’histoire de sexe… Mais fallait croire que dans l’esprit de la jeune fille, mon procès était déjà fait. Et apparemment, Priam avait un peu fait un tableau de moi peu élogieux. J’essayais de me défaire de ce portrait de coureur qu’il lui avait dressé, mais trop tard.  Et puis, puisque Priam avait balancé sur ma pomme, je lançais moi aussi quelques infos, à savoir que le dunster avait un béguin pour elle et que c’était pour cette raison là que je ne me risquerais pas à la draguer. Flirter avec les filles qui plaisaient à mes amis, ce n’était franchement pas mon genre. Mais même cette affirmation fut remise en question par mon interlocutrice, qui ne me laissa rien répliquer, tournant les talons pour détaler, me laissant là, comme un con, les bras ballants, soufflé par cette nouvelle discussion houleuse, à croire qu’on était plus doués pour s’engueuler que pour s’entendre elle et moi, moi qui fuyait pourtant les conflits à toutes jambes en temps normal. Je secouai la tête, laissant échapper un petit soupir avant de reprendre ma marche en direction de ma confrérie…