The language of friendship is not words but meanings • Lyra

 La rentrée tenait quasiment toutes ses promesses. Quasiment car un détail de table manquait au parfait tableau. Veïa n'était pas à ses côtés. C'était un coup rude que la jeune femme préfère les Cabots aux Violets, mais elle ne pouvait pas lui reprocher de prioriser sa liberté et son bien-être. Ce qui lui importait c'était que sa meilleure amie soit heureuse, et si pour cela, elle devait rejoindre les Roses et bien soit. C'était un choix que la Blonde ne comprenait pas vraiment, elle n'appréciait pas spécialement la compagnie féminine et sur ce point, leurs opinions divergeaient apparemment. Mais elle faisait confiance à sa Belle italienne, elle savait qu'elle ne la laisserait pas tomber malgré la séparation et d'ailleurs celle-ci n'avait pas tardé à la convier pour une petite virée shopping. Pour la première fois de sa relation avec son ancienne correspondante, Lyra se sentait tendue. Étrangement, sans trop savoir pourquoi, ou bien si, en admettant la distance qui s'était tacitement déployée entre elles deux ces dernières semaines. Pas grand chose mais suffisamment pour qu'elle se sente un brin mal à l'aise et comme sa meilleure amie ne pouvait rien lui cacher, c'est comme si elle sentait que quelque chose ne tournait pas rond. Pourtant lorsqu'elle la voit c'est avec un sourire sincère qu'elle l'accueille et avec un plaisir non feint qu'elle se repose quelques instants entre ses bras. « Je suis contente de te voir. » lui avoue-t-elle sincèrement, s'en voulant de se montrer si faible, mais c'est Elle après tout et si avec elle, elle n'ôte pas sa carapace, alors avec qui ? « Tu as l'air préoccupée, il y a quelque chose qui ne va pas ? » Peut-être avec son frère ? Leur relation est chaotique, elle le sait, à moins que ce ne soit autre chose...

 Elle sentait le malaise de Veïa à tel point qu'il était presque contagieux. Ses épaules se haussent quand elle avoue sa peur vis à vis d'elle. « Je peux pas t'en vouloir bien longtemps tu sais bien. » Bien sûr qu'elle avait pas trop compris que sa meilleure amie change de confrérie pile quand elle débarque sur le campus, mais elle n'est pas égoïste et si c'est ce qu'elle désire alors elle s'incline. Mais elle sent que ce n'est pas la seule chose qui la préoccupe, elle s'apprête d'ailleurs à lui demander de cracher le morceau quand elle lui donne finalement une piste. « Denys ? Ses yeux s'écarquillent, à sa connaissance, ils se connaissent pas, mais il semble qu'on l'ait éloigné du cercle en fait. « Depuis quand tu connais Denys ? » lui demande-t-elle un peu plus sèchement qu'elle ne l'aurait voulu, mais voilà, elle sent que ça râpe quelque part là au fond.

 Lyra était rassurée de savoir que quelque part Veïa ne la laissait pas tomber, elle n'était plus à la Lowell mais elle comptait bien y passer un certain temps. Les choses auraient pu s'arrêter là et les filles auraient pu revenir sur une conversation plus douce et légère si le sujet Denys n'avait pas été évoqué. Les mots s'étaient frayés un passage avec plus d'amertume qu'elle ne l'aurait souhaité, mais voilà, elle n'était pas fille à contrôler ses réactions. Sa raison pourtant lui intimait que la jalousie soudaine qu'elle ressentait était parfaitement stupide, mais cela réactivait cette sensation de rejet tenace avec laquelle elle avait grandit. « Vous êtes ensemble ? » demande-t-elle abruptement. Ses prunelles bleutées se font acier, la brûlure en elle se ravive et le sarcasme redevient son meilleur allié. « Vous comptez m'inviter au mariage, ou je l'apprendrai par hasard ça aussi ? » Sans blague, ses deux meilleurs amis, d'autres se réjouiraient, ne cacheraient pas leur bonheur, mais la vérité c'est qu'elle ne comprenait pas pourquoi elle était mise à l'écart par les deux personnes qui comptaient le plus pour elle, pourquoi une nouvelle fois, elle était abandonnée à la Noirceur solitaire quand deux faisaient le choix d'avancer à deux.

 Sa réaction était puérile elle le savait, mais elle ne pouvait s'empêcher de se sentir rejetée à voir ses deux plus proches amis roucouler. Ils feraient ainsi leur petite vie, seraient heureux et elle quoi ? Bah elle resterait sur le côté comme d'habitude. D'ailleurs ça avait déjà été un peu le cas cet été, mais voilà, il fallait faire bonne figure, elle voulait leur bonheur après tout. Et elle s'attendait à ce qu'un jour ils trouvent chacun quelqu'un c'était comme ça. Elle observe Veïa se décomposer, tenter de se justifier, s'excuser, elle est en colère, mais elle se sent mal de lui infliger ça. « J'ai juste besoin de temps, ok ? » Une façon polie de dire qu'elle ne voulait pas la blesser davantage mais qu'elle n'était toujours pas à l'aise avec cette nouvelle. « M'en parler si tard n'était franchement pas le meilleur choix, que ce soit de ta part ou celle de Denys, j'ai l'impression d'avoir été prise pour une conne. » Autant dire les choses honnêtement, et Lyra n'est pas le genre de fille à y aller par quatre chemins. Elle s'allume une cigarette comme pour se donner une contenance et inspire le précieux poison à plein poumons avant de reprendre suite à une énième excuse de sa meilleure amie. « Vous vous mariez pas tout de suite ok ? Faut déjà que je m'en remette. » Un petit sourire apparaît sur son visage, furtif, mais c'est déjà un début. Elle a mal mais elle se doit de préserver les deux personnes les plus chères à ses yeux.