ELIAS CALDEIRA ► bailey sondag

Rio de Janeiro, Brésil.
Il n’était plus là. Il était parti et ne reviendrait jamais. Ce n’était pas sa faute, ce n’était la faute de personne, juste le destin, ce foutu destin, qui donnait la vie aussi vite qu’il la reprenait. Et désormais, ils n’étaient plus qu’à deux. Sofia et Elias Caldeira, la mère et le fils. Ça n’allait pas être facile, en fait ça allait même être plus compliqué que ça ne pouvait déjà l’être mais ils allaient s’en sortir, faire de leur mieux et s’en sortir, parce qu’ils n’avaient pas d’autre choix. Le garçon était maintenant le seul représentant de la gente masculine et n’ayant plus aucune figure paternelle sur qui prendre exemple, ce serait à lui d’apprendre par lui-même. Grandir, devenir un homme, voilà ce qu’il devait faire et ce, rapidement. Prendre soin de sa génitrice et veiller sur elle lui semblait être un bon début, puisque élever un enfant seule n’avait rien d’évident, surtout sans les moyens nécessaires. Travailler ? Elias ne pouvait pas, parce qu’il n’était encore qu’un gosse. Un gosse complètement paumé et livré à lui-même. Alors oui, lorsqu’il n’était pas occupé à réviser ses mathématiques pour obtenir de bonnes notes à l’école et espérer pouvoir faire quelque chose de tout ça, c’est dehors qu’il passait tout son temps, à voler dans les poches des gens entre deux parties de foot de rue. C’était mal et ça, Elias le savait, mais s’il voulait manger le soir et aider sa mère qui se tuait déjà à la tâche pour qu’ils puissent encore dormir sous un toit, médiocre, mais un toit quand même, le Caldeira n’avait pas de meilleure solution. Et puis… il faisait toujours attention de ne s’en prendre qu’à plus riche que lui, à des personnes qui n’étaient pas dans le besoin et ne semblaient manquer de rien. Et peut-être qu’un jour, il ferait partie de cette catégorie d’individus capables de vivre correctement et qu’il serait à son tour volé par des jeunes des bas quartiers. Peut-être oui, mais en attendant, il ne pouvait que se contenter de faire ce qu’il faisait déjà tous les jours, comme tous les autres enfants de son quartier. Étudier, voler et surtout, rêver, espérer, ne pas baisser les bras.

New York, États-Unis.
Le chahut incessant mêlant le bruit des moteurs, des klaxons et celui des foules de passants qui traversaient sans même regarder où ils mettaient les pieds, oui ce chahut là, Elias y était habitué. Sauf que cette fois, tout était différent. Cette fois, c’était lui le touriste, qui débarquait dans une ville  qui lui était totalement inconnue et qu’il aimait pourtant déjà. De Rio de Janeiro, là où toutes les classes sociales se côtoyaient sans la moindre abîme, il était passé à New York, là où tout était possible, là où les rêves se réalisaient et où le moindre changement pouvait correspondre au début d’une nouvelle vie. Ça faisait peur, c’était intimidant mais c’était surtout magique. Jamais Elias ne se serait imaginé un jour fouler le sol de la grosse pomme et encore moins qu’il allait y vivre. Pourtant, c’était bien le cas et le mieux dans tout ça, c’est qu’il n’avait absolument rien fait. C’était juste arrivé, comme ça, du jour au lendemain, comme quelqu’un qui décrocherait le jackpot au loto. Un homme s’était avancé vers lui et avait interrompu sa conversation avec ses amis. Il s’agissait d’un représentant d’une agence de mannequinat, il était en déplacement et disait avoir décelé du potentiel chez l’adolescent. Bien sûr, ça l’avait fait rire, Elias, parce qu’il croyait à une blague et qu’il ne s’imaginait pas du tout une seule seconde prendre la pose pour des photos mais lorsqu’il avait compris que l’inconnu était sérieux, le brésilien s’était vite aperçu que c’était là une occasion en or. S’il devenait mannequin, il serait forcément payé, non ? Alors peu importe si c’était beaucoup ou non, ce serait déjà mieux que de se servir dans les poches des autres. Finalement, tout cela était à la hauteur de ses attentes et même plus, puisque  l'on lui avait demandé de déménager pour New-York. Lui, il n’avait imposé qu’une seule condition : que sa mère puisse le suivre. Ils avaient dit oui, alors Elias aussi.

Harvard ou la consécration ultime pour Elias. Cela faisait plusieurs années que son physique lui avait permis de sortir de la misère et maintenant qu’il avait percé dans le métier, l’argent n’était plus  un problème, en fait c’était même plutôt l’inverse. Et si au début, le jeune homme n’avait pas envisagé un seul instant suivre des études supérieures, parce que sa situation actuelle lui convenait, il avait beaucoup réfléchi depuis. Jusqu’à maintenant, il avait eu de la chance, énormément de chance et oui, se faire chouchouter et prendre en photos lui plaisait, ça fonctionnait pour lui mais… jusque quand ? Parce que le Caldeira savait très bien que ce ne serait pas éternel. Sa jeunesse, son physique, son succès, rien de tout ça n’allait durer, parce que tout avait une fin. Alors oui, même s’il  vivait un rêve éveillé, pour Elias, ce n’était pas suffisant. Il avait besoin de plus, besoin de sentir qu’il avait encore le contrôle sur sa vie et qu’il pouvait devenir ce qu’il voulait. Étudier, il aimait ça, autant dans son école des bas quartiers que dans les lycées privés qui lui ayant permis de se forger un bon dossier et de penser à un avenir. De bonnes notes, des aides financières par l’agence et son salaire, c’était déjà un bon début. Harvard, il voulait y entrer et il allait y arriver. Parce que les capacités, ils les avaient, le talent et la motivation y étaient alors c’était désormais à lui de jouer.