JADEN KEVIN SCOTT ► Evan Peters

Je me souvenais d'un temps où on était heureux, un temps où je n'avais pas ce vide qui me suivait partout. Je regrette tout ce qu'il s'est passé depuis, je regrette de n'avoir pas pu la sauver, que ma mère soit morte alors que j'étais supposé veiller sur elle. Ce sentiment ne partira jamais, je le sais, alors il faut vivre avec, apprendre à sourire malgré cette culpabilité qui me serrait le cœur à chaque fois que mon père se tuait au boulot, dans son entreprise qu'il a monté pour rendre hommage à ma mère, cette femme qu'il a rencontré au parc, qu'il a aimé, pour qui il aurait donné sa vie, celle pour qui il fait tout pour que je reste dans le droit chemin. Pourtant ça n'a pas suffit à ce que je m'en écarte pendant deux ans. Deux années durant lesquelles il a souffert. Tout a commencé le 13 mars 1994.

« C'est un garçon monsieur Scott ». Le médecin sourit tandis qu'il accompagnait mon père à la salle d'accouchement. Etant bébé, je ne me souviens de rien alors tout ce que je peux vous raconter sera du point de vue de mon père. « Comment on l'appelle ? » demanda l'homme à sa femme, déposant un baiser sur son front avant de reporter son regard sur le petit être qui pleurait maintenant dans les bras de sa dulcinée. « Il faut un prénom originale, quelque chose d'un peu unique mais pas ridicule, quelque chose qui lui corresponde » répondit-elle après un moment de réflexion, un grand sourire sur ses lèvres tandis que son bébé se débattait dans ses bras. « Moi je veux quelque chose qui nous fasse penser à toi » rajouta mon père, prenant doucement le bébé dans ses bras. Ce n'est qu'en croisant son regard qu'il eut une illumination. « Jaden... Voilà comment il s'appellera ! Après tout c'est le prénom de ton grand père, tu en dis quoi ? » Emue jusqu'aux larmes, ma mère hocha apparemment la tête, incapable de dire quoi que ce soit d'autre. Elle avait un fils et un mari merveilleux, que demander de plus ? Après ça elle n'arrêta pas de me répéter que ce jour fut le plus beau de toute sa vie. De mon côté, j'espérais juste qu'on passe d'autres jours merveilleux.

« Ouais on a même des bijoux qui datent de mon arrière arrière grand mère, apparemment ils valent une fortune ! » expliquais-je à mon meilleur pote Timmy. Ce dernier me regardait ébahi, ne comprenant pas pourquoi on ne les vendait pas, trouvant ça idiot quand je lui répondais qu'ils avaient une valeur sentimentale. Il n'avait jamais connu la richesse, n'avait jamais eu beaucoup d'argent, un peu comme ma famille mais, de mon côté, mon père était policier et ma mère professeure donc on en gagnait quand même un peu contrairement à son père qui était au chômage, préférant boire que se démener pour trouver un boulot. Quelques heures plus tard, en plein après midi, je le quittais pour rejoindre ma famille afin de manger avec eux. Elle passait avant tout, avant même mon futur. Mais, en plein milieu du repas, mon père reçut un appel urgent du commissariat, il devait partir tout de suite, nous laissant alors ma mère et moi vivre la nuit la plus horrible qui soit. Il était aux environs de minuit, j'écoutais la musique à fond dans ma chambre tout en jouant à final fantasy quand, tout à coup, j'entendais un cri. Posant ma manette, je courais rejoindre ma mère au rez de chaussée pour la découvrir dans une mare de sang, la main sur la poitrine. Paniqué, j'appelais une ambulance tout en balançant les informations en désordre tandis que ma mère tenait ma main tout en souriant, comme pour me rassurer. Quelques heures plus tard elle était morte dans sa chambre d'hôpital, son sourire disparaissant à jamais. Ce n'était que quelques mois plus tard qu'on découvrait que le coupable n'était autre que le père de Timmy, venu pour voler les bijoux. Là commencèrent les quatre années d'enfer pendant lesquelles je buvais, me droguait, faisait n'importe quoi jusqu'à ce que je vois mon père pleurer dans sa chambre. Alors je réalisais que je n'étais pas le seul à souffrir. J'avais dix-huit ans et, ayant décroché une bourse, j'avais été pris à Harvard. Cela me prit deux ans pour arrêter la drogue, je rechutais puis allais mieux avant de replonger à nouveau.

Maintenant j'avais vingt-deux ans ne touchais plus à la drogue, préférant me défouler sur l'alcool, les fêtes tandis que mon père travaillait d'arrache pied pour que l'entreprise qui nous a rendu riche continue à fonctionner, pour que je n'ai pas besoin de bourse à nouveau. Au lieu de me prendre la tête avec les autres, je préférais rire autour d'un verre et me faire d'autres potes, d'autres conquêtes. Bref, je ne me prenais plus la tête, vivant ma vie telle que ma mère l'aurait voulu : en faisant tout pour être heureux.