A. SOANE KING-MOORE ► india westbrooks

family is a gift that lasts forever ••• being a family means you are part of something very wonderful ; it means you will love and be loved for the rest of your life, no matter what.

Maman s’en est bien tirée. Papa aussi, d’ailleurs. Sans elle, je doute qu’il en serait là aujourd’hui. Ma mère est un véritable joyau, l’une de ces femmes que l’on ne connait plus aujourd’hui. Elle a connu mon père, Kenneth Moore, à l’adolescence, alors qu’il vivait encore dans sa banlieue. Maman, Elizabeth King, avait grandi dans une famille aux apparences bien trompeuses. Ils ne connaissaient aucune richesse, tant matérielle que spirituelle. Et pourtant, aujourd’hui, papa est un homme influent, et maman une femme heureuse.


FROM 1992 TO 2004, almost perfect childhood ••• J’ai montré mon nez en deuxième. Parce que, oui, nous étions deux – et le sommes toujours. Shana est ma sœur jumelle, plus âgée de quelques minutes seulement. Il paraît qu’on en a bien fait baver maman ; plus en tout cas que notre sœur Stacy, de cinq ans notre aînée. Mais qu’est-ce donc que la douleur pour une mère en échange de son enfant ? Ou plutôt, ses deux enfants pour le coup. Elle ne nous a pas épargnées de son amour, nous chouchoutant toutes trois comme si nous valions tout l’or du monde. Pourtant, son souhait, après trois enfants, ne s’était toujours pas réalisé : avoir un fils. Mon père, malgré qu’il vienne de loin, souhaitait un successeur à son nom. Alors, deux ans environ après notre venue au monde, est né Yoni, le cadet de la famille King-Moore. D’ailleurs, vous devez vous demander pourquoi nous portons tous les noms de nos deux parents… Mais la raison, en réalité, n’est pas bien compliquée. La famille de maman, purement américaine, tant elle était encrée dans les traditions, refusait tout bonnement l’union avec l’afro-américain qu’est papa. Face à ce racisme – et oui –, Kenneth et Elizabeth ne se sont mariés que bien plus tard, après nos naissances respectives, à mon frère, mes sœurs et moi-même, et nous ont donc offert à chacun leurs noms respectifs, tout simplement. Au final, on porte fièrement nos noms et nos couleurs issus de la mixité.

Malgré tout ce qui nous a été inculqué de positif, et malgré le fait que nous avons eu une très belle jeunesse puisque papa faisait fortune dans le pétrole, un vide s’était créé dans la demeure familiale. En tout cas, je le ressentais. L’absence paternelle devenait de plus en plus importante au fil des années, étant donné qu’il était bien trop pris alors par son emploi. Et même si maman faisait tout pour que nous ne manquions de rien, en nous offrant chaque jour sa présence – puisqu’elle avait décidé de ne pas travailler pour pouvoir nous élever tous les quatre –, ça ne suffisait clairement pas à nous offrir l’amour de ce père trop absent. Et ce manque se fit bien vite ressentir au début de l’adolescence…


FROM 2005 TO 2010, dumb and dumber ••• L’adolescence, ou autrement dit, le début des conneries. Maman avait eu la chance d’avoir une fille plus âgée que nous autres de quelques années, puisque lorsque nous commencions tous ensemble – ou pratiquement – nos crises de jeunesse, Stacy en sortait lentement. Elle a eu bien du mal à nous canaliser, Shana, Yoni et moi. La bêtise envahissait clairement la villa que papa nous avait fait construire quelques années plus tôt, grâce à l’empire qu’il avait construit. Heureusement pour maman, la plus âgée de nous tous avait fini par se prendre en main et nous mettre, à tour de rôle, des coups de pieds au cul. Enfin, vous me direz, ça ne suffit pas à calmer un adolescent en crise, alors trois à la fois… Je vénère maman aujourd’hui pour toute la patience dont elle a fait preuve pour nous supporter tant ce n’était pas réellement possible de le faire. Elle avait su ne pas répondre au moindre de nos caprices, qui disparaissaient pourtant dès que papa rentrait. Parce que lui, on le craignait plus malgré toute la gentillesse dont il faisait preuve. On n’a jamais trop su ce qui se tramait dans sa tête et je préfère ne même pas savoir. Bien que génial, il avait de ces sautes d’humeur qui font claquer n’importe quelles jambes. Sans doute bien lunatique sur les bords, mais pas trop atteint psychiatriquement parlant. Quoiqu’il en soit, après toutes ces années à se démener pour nous offrir une vie rêvée – de l’argent et de l’amour à profusion, ou presque –, il allait de soi que nous ne pouvions pas les décevoir sur le plan scolaire. Nos parents mettaient tout en œuvre pour une brillante réussite de notre part à tous, rêvant des plus hautes études possibles pour nous hisser au sommet et ne jamais avoir à galérer. Nous avons eu droit à de grandes écoles, des professeurs particuliers, et tout ce qu’ils pouvaient nous offrir pour réussir. Pour ma part, malgré que j’aie été plutôt difficile à domestiquer – oui, oui, domestiquer ! – en raison d’un caractère bien trop gros pour un si petit corps à l’époque, j’ai travaillé. Mais je savais d’ores et déjà que je n’aspirais ni à une vie de médecin, ni à une vie d’avocate.


SINCE 2010, harvardian life ••• Avec tous les moyens que mes parents avaient déployé, il était inconcevable que je ne décroche pas mon diplôme de fin d’étude avec mention. Mais forcément, ça ne pouvait pas se finir ainsi. Eux souhaitaient réellement que je poursuive sur l’un de ces cursus qu’ils trouvaient plus ‘logiques’ que ce qui m’inspirait vraiment, à savoir le sport. Alors, après une longue et rude discussion en famille, ils avaient fini par accepter, à condition que je poursuive ce cursus à Harvard. Je ne m’en suis bien évidemment jamais plainte, et cela fera d’ailleurs six ans que j’étudie ici. Après avoir redoublé ma quatrième année, je passerai finalement en cinquième dès septembre. Fort heureusement pour moi, je ne suis pas seule, puisque Shana, ma sœur jumelle, et Yoni, notre petit frère, sont aussi présents à Harvard ! Outre tout ça, il semblerait que je ne passe pas trop inaperçu et que j’ai même une certaine tendance à faire parler de moi…