TIGER ST-JOHN ► alex pettyfer

Dans l'air y'a l'odeur de l'herbe qui s'empare de tes narines, sa fumée qui te brûle les iris, elle te dévore à t'en faire perdre la raison. Ton cœur explose, c'est l'extase quand tu rapproches l'incandescence à tes lèvres. Tu finis par t'affaler sur ton lit, exténué mais submergé par cette vague de bien-être. T'es même carrément emporté par la mélodie silencieuse et énivrante qui rythme cette soirée. T'fermes doucement les yeux, alors que tes pensées s'emmêlent, l'aprem a été .. bizarre. C'est en tirant une énième taffe sur ton joint que tu t'remémorres. Ses cheveux blonds qui frôlent ta joue, ses lèvres qui effleurent les tiennes et sa respiration saccadée qui vient se heurter contre toi. Caroline. Cette fille là tu l'avais définitivement dans la peau, sournoisement incrusté dans tes chairs. C'était pas la pouf qu'on voit à tous les coins de rues, c'était pas l'genre de meuf qu'avait connu plus de saucisses qu'un barbecue, nan rien d'tout ça. C'était Caroline. Et il t'aura fallu des années pour t'en rendre compte, autant d'temps pour prendre conscience de cette attirance. Plaisir coupable. Sa main se glisse sous ta nuque, provoquant une chaleur caressante.  Le souffle monte, ton cœur bat à vive allure et vos lèvres se touchent, t'allais le regretter. Et pourtant tu continues. Tu ne l'arrêtes pas.  Tu recules finalement ton visage du sien mais elle ne te laisse pas le temps d'en placer une. Tu ne la connaissais pas si sauvage, et c'est pas pour te déplaire. Tant pis, t'auras essayé. T'abandonnes. Tu es à elle. «  Tiger ? » T'ouvres brusquemment les yeux tant bien qu'mal et tu fronces les sourcils quand tu visualises ton grand frère dans l'encadrement de la porte. Cette enflure avait toujours le don de te déranger quand il fallait pas. «  'tin dégage de là, j'réfléchis. » que tu lui souffles serein, avant d'retourner sur ton petit nuage. «  Réfléchir ? Tu sais faire ça toi ? » Tu t'redresses un instant pour le fusiller du regard dans l'espoir qu'il disparaisse lui et son humour à deux balles. «  Bah qu'est-ce qu'il y a princesse ? Un chagrin d'amour ? » «  Va t'faire foutre Raf » Tu finis par lui sourire, tout en pointant ton majeur en sa direction. Et c'est avec une mine faussement outrée qu'il s'élance vers toi pour te foutre la misère, et surtout pour se fumer un joint en ta compagnie. Tu le laisseras sans doute jamais paraitre, mais ton frère est l'une des personnes qui compte le plus pour toi. C'est le seul qui arrive à te comprendre, le seul qui te fera jamais la morale. Et même s'il t'emmerde par moment il reste ton modèle, celui sur lequel tu t'es toujours appuyé et qu't'as toujours admiré. Il lui arrive de t'montrer des trucs pas nets, de te filer ses mauvaises habitudes, mais qu'il soit un mauvais exemple ou pas, tu t'en fous, c'est celui avec lequel t'as grandi et qu'tu lâcheras jamais. Tu sais qu'il sera toujours là pour toi. Comme toi tu seras toujours là pour lui.

« Et boum. Comme ça. Du jour au lendemain, c'est l'vide, tu disparais, t'existes plus. Mais la vie continue, la Terre ne s'arrête pas de tourner. C'est dingue hein ? » Elle te regardait complètement fascinée et tu te laissais absorber par ses pensées. « Tu sais c'comme mourir, tu pars sans prévenir, sauf que t'oublies tout et tu recommences. » Y'avait qu'avec Caroline que tu pouvais te barrer aussi loin comme ça, sans prévenir personne. Vous savez, tout ça c'était des conneries adolescentes, vous fonciez tête baissée, parce que vous étiez trop stone pour vous préoccuper des soucis du monde adulte. Et ca vous plaisait comme ça, vous vous fichiez un peu des conséquences qui vous rattrapaient pourtant déjà à vitesse grand v. Au lieu d'vous raisonner, vous accélérez, parce que ça faisait du bien de s'éloigner, de s'échapper de l'emprise de votre vite quotidienne. Vous aviez besoin d'renouveau, de quelque chose d'inconnu. Pourtant Caroline et toi, vous veniez pas du même milieu. Caroline, elle est née avec une cuillère en or dans la bouche, elle a toujours eu tout ce qu'elle voulait quand elle voulait, sauf peut-être un peu de liberté. Jésus était pas encore né qu'sa vie était d'jà toute tracée, m'voyez un peu le malaise ? Tout était déjà prévu, jusqu'aux prénoms d'ses futures progénitures. Alors quand elle est venue avec toi, c'tait la première fois qu'elle savait pas où elle allait, et toi non plus tu savais pas trop où tu l'emmenais. A vrai dire, c'est toujours ce que t'as connu, à force t'as pris l'habitude de fuir un peu tout ce qui t'entourait, c'comme une pulsion, un truc au fond de toi qui fait que de te répéter des vas y profite, profite avant qu'ce soit trop tard comme si ta date de péremption allait bientôt arriver, alors toi comme un con tu sais, tu profites, tu profites un peu à ta sauce même si ça t'donne pas d'avenir. Mais vous savez, c'est maintenant qu'il faut vivre, c'est pas demain, ni après-demain. Pourtant, on vit tous dans l'attente de la mort, on vit pour le futur, on vit pour l'point final. Mais la vie, elle te laisse pas l'temps de réaliser, elle va pas te dire de profiter, c'est quand tu t'y attends le moins qu'il y a une couille qui t'arrive. Alors tu voulais profiter ce qu'il y avait à profiter, t'as pris la voiture à ton frère et t'voulais t'évader jusqu'au bout du monde avec Caroline, l'emmener respirer la liberté, la faire danser sous les étoiles. Mais à chaque fois c'est pareil, t'prends l'max d'élan, tu t'envoles loin puis tu te fracasses le crâne à l'atterrissage. Et c'jour là c'tait un virage à 360°, un vol plané du 40ème étage sans ailes pour amortir le choc à l'arrivé. T'oublieras jamais cet appel et encore moins ces quatre mots qu'on t'a soufflé à travers le combiné : « ton frère est mort » La nouvelle fait l'effet d'une bombe, mais s'infiltre doucement comme un poison dans tes veines. Tu restes stoïque quelques secondes et c'est quand tu réalises l'ampleur de la situation qu'elle te brûle et te dévore sournoisement de l'intérieur. Elle te tord les boyaux et te retourne les entrailles avec une telle force qu'elle t'achève au sol. Tu baisses soudainement les armes et tu restes longtemps par terre, toi et tes joues rouges écorchées par les larmes.

C'est la gorge crispée et la mâchoire serrée qu't'observes, amer, l'épitaphe érigée au nom de ton frère. Cette vision te lacère le cœur. A chaque fois que tu viens, t'as le sentiment d'avoir tout perdu. La peine et la douleur s'amplifient toujours un peu plus chaque jour, le temps n'arrange absolument rien, le deuil n'est qu'un leurre. Tu l'feras jamais ton deuil, tu comprends même pas comment on peut s'faire à la mort de quelqu'un qu'on aime. Mais la Terre ne s'arrête pas de tourner, c'est ce qu'elle te disait Caroline, hein ? Pourtant tu ne t'imagines pas une seule seconde accepter ce qu'il lui est arrivé, sachant que tu n'sais même pas ce qu'il s'est réellement passé. C'est ton frère qui s'trouvait au mauvais endroit au mauvais moment ou l'oeuvre planifiée d'une personne malsaine ? T'as des tas de questions qui te taraudent l'esprit, elles s'engouffrent dans tes pensées toutes les nuits et ça te rend dingue de ne pas pouvoir y répondre. Et il y en a une en particulier qui t'obsède plus que les autres, quelle est l'ordure qui a osé faire ça ? Il n'y a pas une seule journée sans que tu y penses, sans que tu tentes d'imaginer le visage d'ce monstre qui lui a arraché la vie sans aucun scrupule. Et c'est avec l'expression d'un effroi malsain et d'une rage profonde que tu te vois le brûler vivant sans la moindre culpabilité. Tu sais au fond de toi que tu seras jamais capable de tuer quelqu'un, mais tu voulais retrouver cette personne, t'acceptais pas qu'ton frère soit une vulgaire affaire classée sans suite, il méritait qu'vengeance soit faite. Et qu'cette personne pieute à côté de chez toi ou qu'elle s'trouve à l'autre bout du monde, tu la retrouveras quitte à y passer toute la vie. T'étais tellement déterminé que t'en devenais parano. Et c'est pour cette raison que Caroline t'a lâché comme une merde, tu me fais peur qu'elle t'répétait. Arrête tout ça Tig' ça te bouffe la vie , ou encore j'te reconnais plus Tiger et toi, tu t'contentais d'hausser les épaules parce que tu t'en fichais de ce qu'elle pensait, tu t'énervais parfois mais elle est partie avant que ça ne dégénère. Ca t'a pesé sur l'moral pendant longtemps, tu voulais pas que ça se finisse mal comme ça mais jamais tu laisserais passer quiconque devant ton frère. Tu t'voues corps et âme dans cette recherche, tu passes même ton temps à étudier, à tel point que tu deviens suffisamment doué pour te faire accepter à Harvard. Terminé l'université de Toronto, te voilà à Cambridge depuis janvier 2016. Tu te consacres pleinement à tes études, et à c't'affaire qui date maintenant de 5 ans, mais qui risque de prendre un réel tournant dans les semaines à venir.