ILIJANA O. VOJKOVIĆ ► Elsa Hosk

On a souvent dans notre entourage une personne qui n'a strictement rien à voir avec le reste de sa famille que ce soit physiquement ou psychologiquement. C'était mon cas. Je suis une Vojković, fille aîné d'un des hommes les plus riches de Croatie. Je devrais m'en réjouir. Je devrais oui, si mes parents et le reste de ma fratrie n'était pas qu'une bande de snob pourris gâtés. Je suis la seule qui possède de réelles valeurs dans cette famille, et je parle de valeurs humaines pas du nombre de numéros que je suis capable d'aligner sur un chèque. Pour faire un petit tour d'horizon, voilà ceux avec qui j'ai dû grandir. Mon grand frère, copié/collé de mon père, tout aussi porté sur l'argent et le bonheur d'écraser les autres. Mon petit frère, dépressif après que l'intégralité de sa famille excepté moi l'ait rejeté après avoir fait son coming-out. Mais attention, voici le bouquet final : ma petite soeur. 20 ans et l'exemple parfait de la jeune petite riche capricieuse, orgueilleuse et snob. Sharpay Evans ou Chanel Oberlin font pâle figure à côté d'elle. Puis il y a mes parents. Mon père qui comme je l'ai dit détruit quiconque se dresse sur son chemin, et ma mère qui est inexistante. Elle vit dans l'ombre de son mari, ne s'est jamais préoccupé que d'elle, j'ai l'impression qu'à chaque moment où je la vois une inconnue s'est invitée dans la baraque. Quand sur tout ce monde la seule personne que je porte dans mon cœur est mon petit frère dépressif, on se rend rapidement compte de l'environnement malsain dans lequel j'ai dû grandir. Mais je n'en ai pas souffert je dois dire. Je suis resté accrochée à qui j'étais, tout le monde dans cette famille me pensait simplement effacée et avide d'intérêt alors qu'au final je n'ai juste pas voulu qu'ils sachent qui j'étais.

Quand je suis entré à l'Université à 18 ans, j'ai déménagé sur Zagreb. C'est à partir de cet âge-là que j'ai commencé à envoyer la bourse que je recevais (Oui car mon père s'est arrangé pour que je reçoive une grosse bourse chaque mois pour qu'il n'ai pas a trop payer mes années universitaires). Sauf que j'envoyais l'intégralité de ma bourse tous les mois à l'association auquel est associé le club humanitaire de ma fac. J'étais présidente de ce club jusqu'à mon départ pour Harvard. Quand mon père voyait que ma bourse disparaissait rapidement, il s'est vite posé des questions quant à mon mode de vie, mais je lui répondais simplement que j'étais une Vojković et que j'avais besoin de mon confort. J'imitais ma petite sœur et ça fonctionnait, il ne se posait pas plus de questions que ça car après tout j'étais le cadet de ses soucis.

Quand je n'envoie pas ma bourse à notre association, j'en profite pour assouvir ma passion pour la nature sauvage et la randonnée extrême. Je suis ce qu'on pourrait appeler une aventurière. À 18 ans je me suis enfin envolé pour la première fois en Grèce pour ma première randonnée extrême. Grimper les montagnes sans emprunter de chemin prédéfinis, sauter de falaise en falaise, co-habiter avec la nature vierge de toute modification humaine, tout ça me faisait vibrer. Ce sont les moments d’exception qui me faisait vivre tout simplement. Après chaque voyage je rapportais telle plante ou tel minéral à l'Université pour enrichir les ressources biologiques de cette dernière. Tous les 2 mois je m'envolais vers une nouvelle destination et c'était un mode de vie rêvé pour moi. Après la Grèce je suis allé en Arizona, puis à l'extrême nord de la Norvège, puis finalement en Australie où j'ai compris qu'il ne fallait pas que je joue trop fort avec le feu. l'Australie est très certainement l'endroit qui m'avait le plus dépaysé. Entre cette jungle tropicale, sa faune et sa flore unique, je n'ai pas été capable de rester en place. Le sol australien est fragile et glissant, et ma glissade de plusieurs mètres d'une colline m'a valut un joli cadeau. En dévalant cette pente je me suis accroché mangé un rocher si pointu qu'on avait l'impression que quelqu'un l'avait aiguisé spécialement pour moi. Pas de fracture, mais une belle blessure ouverte derrière la cuisse. Rien de très grave, mais une belle frayeur. Depuis cet évènement je garde un peu plus mon calme en rando' extrême, et je garde surtout un beau souvenir de 6cm derrière la cuisse.

Après l'accident, je ne suis reparti en vadrouille qu'un an après. Ma blessure m'a handicapé quelques mois et m'a incité à reprendre contact avec une discipline sportive qui me servirait de rééducation. Quand je vivais à Pula et avant que je ne déménage sur la capitale, j'étais une nageuse depuis des années. J'adorais ça. J'ai fait plusieurs compétitions et parfois des compétitions de haut niveau. En reprenant la natation à 19 ans, j'ai vite repris mes marques même si cela faisait 1 an que je j'en avais plus fait. La natation m'a tellement manqué que j'ai décidé de continuer la discipline même après la fin de ma rééducation et même si je devais l'assimiler à ma passion de la rando' extrême. Premier tiers de l'année 2012, je participe aux qualifications des JO de Londres 2012. ça faisait 1 an que j'avais repris la natation et que je m'entraînais pour ces qualifications. J'avais beaucoup d'espoir même si j'étais consciente du manque de préparation par rapport aux autres participantes. Ces qualifications ce sont avérés être un échec total pour moi. J'ai naturellement ralenti sur la natation, et me suis juré de ne plus viser trop haut quand je sais pertinemment que c'est du délire.

Fin de l'année scolaire 2015-2016. On est en juin 2016, et mes années à Zagreb touchent à leur fin. J'ai obtenu mon premier diplôme en biologie, et il était temps pour moi de partir au bout du Monde réaliser un de mes plus grands rêves : étudier à Harvard. Si la bombe m'avait refroidi pour m'y inscrire dès mes 18 ans, là il n'y a plus rien pour me faire reculer. Dès la rentrée 2016, je serai à Harvard. Pour cet été cela dit, j'avais deux solutions. Soit je participais au Summer Camp proposé par l'Université, ce qui me permettrait de faire connaissance avec un certain nombre d'étudiants, soit je restais en Croatie pour retenter ma chance pour les JO. Mais un échec m'a suffit. Il est temps que je m'amuse un petit peu. Summer Camp me voilà !