CARTER L. MASON ► Ian Harding.

« Tiens toi droit ! » Il soupira, ce qui lui donna le droit à un regard noir de mon père. Ainsi, il n'avait plus le droit de respirer non plus ? Et puis, qu’est-ce que Carter en avait à faire de cette réception débile ? Tout ça parce que son père voulait montrer qu’ils étaient une famille unie.. Tu parles ! Ils formaient une famille quand ça l’arrangeait, entre une réunion et un voyage d’affaire. On a pas idée de trainer son gosse de 13 ans à une conférence de ce genre ! Il regarda autour de lui. Il n’y avait personne qui était susceptible d’avoir son âge. La personne la plus jeune devait avoir quoi.. 20 ans ? Les enfants de tous ces adultes avaient de la chance.. Lui, il avait été trainé jusqu’ici, sous prétexte que c’était important. C’est alors qu’un couple de quadragénaires arriva jusque eux. La femme semblait plutôt gentille, elle regardait l'adolescent avec un grand sourire. Ils parlèrent avec son père, de tout et de rien. Ils en vinrent à parler d’une des filles du couple, la plus jeune. Elle avait 13 ans également et elle venait de sauter deux classes. « Vraiment ? Moi, mon fils n’en a sauté qu’une seule.. Si seulement il faisait plus d’efforts ! » Il leva les yeux au ciel. De toute façon, ce n’était jamais suffisant pour lui, il en voulait toujours plus. Il avait toujours le droit à ce genre de remarque. Il sous entendait que Carter ne travaillait pas assez, ou pire alors, qu'il était un incapable. Il passait pourtant tout son temps à travailler, voulant le rendre fier de lui. Sauf que c’était jamais assez alors.. Il essayait de ne pas faire attention, mais il n’y arrivait pas. Alors, durant toute la soirée, il se contenta de sourire et de répondre poliment aux rares questions qu’on lui posait, restant silencieux le reste du temps.

« Je savais que le journalisme ne t’apporterait rien de bon.. » Oui, évidemment. Il savait tout mieux que tout le monde lui. Sauf qu’il n’était pas capable de comprendre que le journalisme était la véritable passion de Carter. C’était ce qu’il voulait faire et lui, il avait échoué dans ses études. Il ne savait pas comment cela avait pu arriver. Il n’avait pas arrêté de bosser, encore et encore ! Peut-être que c’était justement ça le problème.. Peut-être qu’il avait trop bossé. En même temps, en plus de ses études de journalisme, ses parents l’avaient forcé à suivre des cours de droit par correspondance. Pour s’assurer un avenir, disaient-ils. En attendant, c’est pas eux qui ont foiré la seule carrière qui les intéressait. Certes, Carter s’en était très bien tiré en droit. Mais à la base, ce n’était pas ce qu’il voulait. « Heureusement que ta mère et moi avons eu cette idée de cours par correspondance. » Carter ne prit même pas la peine de répondre. A quoi bon ? Ca allait encore terminer en engueulade. Et il n’en avait pas la force. Son échec avait fait partir toute sa détermination et sa force de caractère. Il ne restait plus rien, plus rien à part une profonde déception envers lui-même. Lui qui avait tant désiré montrer à son père qu’il en était capable.. Peut-être qu’au final, ils auraient du écouter ses parents depuis le début au lieu de suivre ces études. Il aurait de plus larges connaissances en droit et serait devenu un puissant avocat. Bref, pour l’instant, il ignorait encore ce qu’il allait faire. Il était trop perdu pour y réfléchir réellement.

« Comment s’est passé cette première année ? » « Très bien. Je mène plutôt bien les cours, mes élèves ont d’excellent résultats. » Pour la première fois depuis des années, je vis un sourire satisfait sur les lèvres de mon père. « Bien.. » Ainsi, il n’avait aucune remarque à lui faire sur sa carrière ? Sur le fait qu’être professeur est nettement moins prodigieux qu’être avocat ? Décidément.. Tout était possible. Enfin, c’était lui qui avait suggéré à Carter cette reconversion alors il devait être ravi d’avoir contrôler sa vie de cette façon. Puis, enseigner à Harvard n’était pas rien, au contraire. Il fallait avouer que ce métier ne déplaisait pas à Carter. Au début, il s’était montré réticent mais au final, cette année avait été géniale. Certes, il avait encore de nombreux progrès à faire avec ses élèves. Il était sans doute trop sec avec eux.. Mais c’était sa façon de les encourager. Il n’avait connu que ça durant toute sa vie, avec ses parents, alors il faisait les mêmes erreurs qu’eux. Il apprenait encore. Puis, il ne voulait pas qu’une trop grande proximité s’installe entre ses élèves et lui. Bref, il venait de finir une année et allait en attaquer une autre qui s’annonçait pleine de promesse pour le jeune professeur.