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just have to move the bats out of your head.
Mais qu’est-ce que tu fous ici, sérieusement ? Jamais tu ne te serais imaginée dans ce genre d’endroit avant ce soir, mais déjà tu regrettais d’y avoir mis les pieds. Une sorte de boîte de strip-tease des bas quartiers, où une ambiance plus que malsaine régnée. Tu n’avais qu’une seule envie, celle de prendre tes jambes à ton cou et de te tirer de cet endroit avant qu’un papazarri ou un autre connard de cette espèce ne vienne te trouver ici. Cependant, ta curiosité te chatouillait l’esprit comme jamais. Il y a quelques jours de cela, tu as reçu un mot anonyme, comme tu en reçois assez souvent. Mais celui-ci t’a particulièrement intrigué. Sur le bout de papier, seule l’adresse de cet étrange lieu y était indiquée, ainsi qu’une précision qui te rendit folle : « au sujet de votre sœur ». Tu n’avais pas plus hésité en voyant ces quelques mots. Tu savais bien évidemment de quelle sœur il s’agissait, les petites vivant toujours à New York. Il ne pouvait s’agir que de la grande. De ta Callie. Les journalistes te posaient de plus en plus de questions à son sujet, sur les rumeurs autour d’elle, te demandant ce qu’elle devenait, pourquoi avait-elle arrêté si vite sa carrière. S’il était vrai qu’elle avait été reniée du clan Scorsese. Tu n’aimais pas parler de ta sœur, ça non. C’était un peu ton sujet sensible, celui qui te mettait hors de toi. Et pourtant, ce mot t’avait fait venir ici. Dans cette boîte si sale, si loin de ton petit monde à toi. Une heure déjà que tu t’étais installée dans un coin, loin de tout regard, à épier tout autour de toi les raisons de ta venue. Le mot stipulé ta sœur, mais tu te demandais de plus en plus ce qu’elle avait à voir avec ce lieu. Tu étais tellement mal à l’aise, tu te reversas un second verre de cette bouteille de rouge que tu t’étais commandée. Il fallait bien faire passer le temps, et la boisson était devenue une précieuse amie ces derniers mois. Un peu trop, même.
Les minutes défilaient, la bouteille était finie. Sans doute était-il temps pour toi de partir. Tu n’avais rien à faire ici, tu risquais de salir ton image comme jamais si l’on te surprenait dans une boîte de strip, c’est certain. Tu terminas alors d’une traite ton verre, soupirant d’avoir perdu ta soirée pour rien avant de te lever, déterminée à partir au plus vite. Jusqu’à ce que ton regard croise une chevelure blonde ô combien familière. Ton corps tout entier se stoppa net, alors que tes yeux s’écarquillèrent peu à peu. Depuis que tu étais arrivée, tu n’avais pas osé porter ton regard aux podiums, là où ces pauvres filles se trémoussaient devant tous ces porcs. Tu ne pouvais juger ces filles, mais tu ne pouvais t’empêcher d’avoir une pointe au cœur en voyant quel genre de vie elles pouvaient avoir. Descendant alors d’un de ses podiums, c’est ta grande sœur que tu reconnus, si peu vêtue. Il ne te fallut pas bien longtemps pour faire le lien entre ce mot anonyme, et ce que tu étais en train de voir. Calliopéa, dans un clup de strip-tease, à moitié dévêtue. Tu comprenais très vite. Ton cœur ne fit qu’un saut, tu ne savais que penser à cet instant. De l’incompréhension, de la tristesse, de la colère, de la trahison, de la culpabilité. Tout te traversa d’une traite. Mais qu’est-ce qu’elle fout, sérieux ? Tu aurais très bien pu partir et oublier toute cette histoire. Elle ne t’avait certainement pas vu, et après tout c’était sa vie, ça n’était pas tes affaires. Sauf qu’il s’agit de ta sœur. Ton unique grande sœur. Et les gens, famille comme journaliste, peuvent dire ce qu’ils veulent, elle aura toujours de l’importance à tes yeux. Plus que quiconque. Te mordant l’intérieur des joues, tu t’approches alors à grands pas de l’aînée. Les poings serrés, le visage perdu. Et avant qu’elle ne rentre dans ce qu’il s’apparentait à des coulisses, tu vins te mettre face à elle. « Callio ? » Levant les yeux, elle qui était légèrement plus grande que toi, ces talons démesurés l’y aidant sans aucun doute, tu ne pus t’empêcher de poser ta main sur son épaule dévêtue. Un peu comme pour l’empêcher de te fuir, d’échapper à cette confrontation qui devait bien arriver un jour. « Calliopéa, dis-moi que c’est une mauvaise blague ? » Tu n’étais ni sévère ni froide dans tes propos. Tu étais plus inquiète, déboussolée à vrai dire. Mais pourquoi ne t’en avait-elle jamais parlé ?
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