je veux vivre avant de mourir | Soliman

Un pied dans le plâtre, un voyage au Japon, suivit d'un autre en Allemagne. Le pied posé sur le sol américain, il n'est même pas question de se remettre du décalage horaire car le bal de fin d'année démarrait quelques heures plus tard . Un bal épuisant, aux émotions multiples, mais sans plus. Je ne me suis pas amusé, m’ennuyant, et fuyant ma table durant plus de la moitié de la soirée. Un cavalier partit bien trop tôt, une amitié rompue avec Jay … mais la vie continue. Les examens passaient, de retour à Boston, le boulot repris. Une longue discussion avec mon patron, pour finalement réussir à le convaincre de me garder, malgré mes nombreuses absences de ces dernières semaines. Mais aujourd'hui, c'est une journée libre, sans autre préoccupation que l'amusement . Cela fait déjà quelques semaines que je proposais l'idée à Soliman de m'accompagner dans ce parc d'attractions à sensations fortes de Boston: Six flags. 4 années où je suis dans cette ville, quatre années que l'envie de m'y rendre me chatouille . Chose faîte aujourd'hui . Je suis placé juste devant l'entrée, une cigarette à la main , que je porte à mes lèvres de tant à autres en attendant mon ami. Il est en retard, mais d'ordinaire c'est plutôt l'inverse . Une silhouette familière s'approcha de moi, tandis que j'écrasais ma cigarette du' mouvement de pied, avant d'adresser un sourire au beau jeune homme que j'accueillis dans mes bras. « Salut. » je m'écarte légèrement de lui, avant de laisser mon regard le détailler de la tête aux pieds. « t'as repris du poil de la bête... Tu es super ! » un sourire s'affiche sur mes lèvres tandis que je reporte mon regard bleuté sur le sien . Soliman m'a toujours plu physiquement, même si je ne l'ai jamais avoué. « tu es prêt à t'amuser ? »

Neuf mois, voilà neuf mois que je suis libéré du cancer qui m’a tellement rongé et affaibli trois années durant. Le temps passe à une allure folle et je n’ai pas eu le temps de me rendre compte des progrès que j’ai fait. Il y a de quoi être fier, j’ai repris du poil de la bête, quelques kilos de repris, des muscles progressivement de retour grâce au sport que je réapprends à pratiquer de manière intensive comme je m’étais habitué à le faire avant d’être frappé par la maladie, un moral qui n’a jamais été aussi haut et une envie oppressante de m’amuser sans me prendre la tête. Je suis au taquet et je reconsidère même le fait de retrouver les bancs de l’école pour décrocher le diplôme qu’il me manque en psychologie. Il me reste du chemin à parcourir et je suis très intéressé à l’idée de retrouver Harvard, m’investir financièrement pour sauver les Winthrop m’aura non seulement permis de me reconnecter avec des inconnus mais cela m’aura également donné envie de retrouver cette confrérie qui m’a tellement fait grandir. En attendant de prendre une décision sur mon futur je compte bien profiter du moment présent. Au programme de la journée ? Un passage par le parc d’attractions aux cotés de Mira qui m’attend depuis maintenant trop longtemps. Je suis en retard, shame on me. « Hey, toutes mes excuses pour le retard ! » Je la serre fort dans mes bras un bref instant et regagne la distance nécessaire pour pouvoir lui parler sans avoir l’impression de l’oppresser. Mes lèvres s’étirent en un sourire respirant la fierté lorsqu’elle me complimente sur ma silhouette retrouvée. « Merci, j’ai énormément travaillé, il me reste encore un peu de travail mais j’suis sur la bonne voie ! » La musculation ne masquera pas mes cicatrices, elles restent présentes pour me rappeler ce que j’ai traversé. Tant mieux, il ne faut surtout pas que j’oublie, oublier ce serait mettre en péril tout ce que je me suis promis d’accomplir pour éviter les regrets qui m’ont mis au fond du gouffre quand j’ai appris pour ma maladie. « Si j’suis prêt ? Je n’attends que cela depuis des jours ! » En parfait gentleman je devance la jeune femme pour payer nos deux tickets. « On garde les sensations pour la fin ? On commence par les attractions plus douces ? »

Le besoin de s'amuser et de se vider la tête, ne respirer que le plaisir et le bonheur. On devrait tous vivre avec cette philosophie, malheureusement c'est loin d'être le cas. La vie est dure, et parfois même cruelle, mais ces derniers temps, je la trouve surtout...chère et difficile . Je me rends compte cette année, du niveau attendu par les étudiants d'Harvard, plus les années passent, plus le niveau devient élevé, nous sommes de moins en moins en cours, les notes chutent de plus en plus, mais la pression quant à elle, et bien plus forte et grande. Les examens à peine terminés, et le stresse redescendue, que c'est au boulot de me prendre la tête. Le Summer Camp qui approche mais l'argent qui manque sur le compte en banque, m'obligeant à faire des heures supplémentaires ; mais aujourd'hui, je laisse ses problèmes s'envoler en même temps que la fumée de ma cigarette, s'échappant de mes lèvres après que j'ai tiré une bouffée . L'arrivée de Soliman vient claquer la porte définitivement à ces derniers tandis que je le prends dans mes bras, cet immense sourire que je peux lire sur ces lèvres, fais apparaître le mien. « Tu es parfait comme ça tu sais... » il est inutile de ressembler à une machine de guerre, comme certains hommes qui font du bodybuilding, il n'a pas besoin de muscles superficiels selon moi « c'est bon parfois de quitter la salle de sport, pour prendre du plaisir. » dis-je en souriant avec un regard entendu tandis que je replace une mèche rebelle derrière mon oreille. Durant ce court instant, il réussit à prendre quelques secondes d'avance pour moi, arrivant à la caisse le premier et payant pour moi mon entrée. « Merci … mais tu me le payeras. » murmurai-je, tout en lui adressant un sourire en coin. Ne jamais prendre à la légère ce que je dis. Je range le ticket dans la poche arrière de mon short, avant d'attraper son bras que je passe sous le mien, tandis que nous commençons à avancer dans l'allée centrale « oui , on peut faire le carrousel pour commencer ? Ou je crois qu'il y a une descente en rivière dans des bouées de plusieurs places... » Je ne sais pas trop comment cela s 'appelle , mais selon le plan, les deux manèges ne sont pas très loin: le caroussel, aux accent romantique avec ces chevaux et calèche, se trouvant à droite; ou la rivière, qui permet une promenade tranquille et agréable, de l'autre côté. " je te laisse choisir..."

Suis-je dingue d’attendre avec impatience la rentrée scolaire pour pouvoir reprendre les cours ? Après une pause de quasiment quatre ans je meurs d’envie de retourner sur les bancs des amphithéâtres. Je ne dirais pas que j’aime aller à l’université quotidiennement, j’ai toujours été très bon à l’école et j’apprécie d’apprendre de nouvelles choses, surtout en matière de psychologie. Si je m’étais arrêté en étant diplômé je ne serais probablement jamais revenu à Harvard mais mon cancer s’est déclaré alors que j’étais en première année de doctorat, j’ai pu valider cette année, il m’en reste néanmoins deux à valider pour obtenir le sacrosaint doctorat. J’aurais très bien pu me contenter de mon master, ce dernier m’a permis de travailler dans un cabinet de psychologie depuis que je suis revenu à Boston mais il me manque quelque chose… Après avoir composé avec tous ces jeunes aux difficultés immenses et aux vies des plus dégueulasses je me sens de plus en plus intéressé par le droit. Les analyser certes, les défendre ce serait encore mieux. Il me reste un petit peu de temps pour faire le tour de mes options et prendre une décision, en attendant place à la journée qui m’attend et à Mira. Mira c’est ma copine de sensations, elle apprécie les montées d’adrénaline et je me suis promis de retrouver toutes ces sensations une fois la forme retrouvée. C’est le cas à présent, on commence sagement avec le parc d’attractions mais j’ai des tonnes d’autres idées en tête, des activités bien plus riches en sensations même si elles sont peut-être également plus risquées. J’ai le sourire jusqu’aux oreilles lorsqu’elle me compliment et acquiesce, pas besoin d’être aussi baraqué que Stallone, il me manque néanmoins trois ou quatre kilos de muscles pour pouvoir pleinement être satisfait. « C’est vrai, et on va en prendre du plaisir cet après-midi, je peux te l’assurer ! » On va s’amuser comme des petits fous, j’ai hâte ! Je prends les devants et offre à Mira son billet, j’ai cru comprendre qu’elle était un petit peu juste financièrement et j’ai tellement d’argent en sommeil sur mon compte que l’effort ne poussera certainement pas mon banquier à me faire la leçon. « Quoi ? ça me fait plaisir ! » Je tente de me justifier tandis qu’elle me promet de se venger. Je n’attends que ça ! Nous entrons à l’intérieur du parc bras dessus bras dessous et je propose une tactique visant une montée progressive de l’adrénaline. Commencer par les attractions les plus innocentes pour finir sur les gros manèges. « On peut attaquer avec le Carrousel, histoire de se mettre dans l’ambiance ! » Mon bras glisse de sorte à ce que je puisse lui attraper la main et l’emmener avec moi jusqu’au Carrousel, le tour s’arrête et je grimpe les marches pour pouvoir me rendre jusqu’à un groupe de chevaux. « On se met là ? »

Une journée au parc d'attractions. En me voyant aussi surexcité, on pourrait croire que je ne suis encore qu'une gosse ayant eu une forte poussée de croissance peut-être. Et pourtant j'ai bien 21 ans, et bientôt une nouvelle année viendra s'ajouter au lot . Malgré cet âge, malgré mes responsabilités, mon boulot, mes études, je garde malgré tout cette petite parcelle d'enfant en moi . Une enfant légèrement téméraire, rebelle qui souhaite découvrir toujours plus de sensations fortes. Je suis accro à ce moment où, notre coeur semble rester suspendue dans le vide tandis que le reste de notre corps dégringole 10 mètres plus bas. Cette sensation de sentir son coeur battre la chamade , de peur d'excitation et de plaisirs. C'est dans ces moments là où l'on se sent réellement vivants . Et ce plaisir que j'éprouve durant ses cours instants, je le partage avec Soliman. Je sais qu'il vient de vivre une période difficile, où le courage est de rigueur où chaque instant est précieux car on ne sait pas s'il en existera des prochains . Il n'en parle pas, souhaite garder cette période secrète, ce que je comprends et accepte, évitant d'évoquer ce sujet , même si je ne peux m'empêcher de lui dire qu'il a repris du poil de la bête, redevant aussi séduisant qu'auparavant, peut-être même plus musclé ; et son sourire rempli de fierté me fait vraiment plaisir. Quoi que le fait d'avoir pris en muscle lui donne un peu trop confiance en lui quand je vois qu'il paye mon billet, me faisait protester par la même occasion « tu prends un peu trop de plaisir à mes dépens ! » dis-je avec un léger sourire en récupérant le bout de papier. « On va mettre ça sur le compte que t'es devenu gentleman ! »dis-je en riant, même si je n'oublie pas mon idée de me venger. J 'aurai bien l'occasion de le pousser dans l'eau à un moment ou à un autre je suis sûre. Je hoche la tête à son idée d'aller faire un tour du côté du carrousel , ressentant un léger frisson lorsqu'il prend sa main dans la mienne, le suivant tranquillement, en regardant les différents décors, toujours aussi impressionnée . Un parc d'attractions, c'est comme un autre monde, tout est … parfait, du sol jusqu'au décor en passant par les plantes toujours en fleurs et parfaitement entretenue . Je regarde les enfants et leurs parents descendre du manège lorsque celui-ci s'arrête . On va avoir l'air décalé dans ce genre de manège pour enfants : c'est totalement mon délire. Je suis Soliman, l’arrêtant à un moment . « Attends je veux monter en haut moi » un carrousel à deux étages, c'est rare, je n'ai jamais essayé . Je n'ai pas besoin de beaucoup argumenté pour qu'il me cède, montant rapidement l'escalier qui mène au premier étage, le laissant cette fois-ci choisir le couple de chevaux « ça marche » un sourire aux lèvres je lâche sa main pour pouvoir monter sur le cheval en bois, passant une jambe de chaque côté, avant de placer mes pieds dans les étriers, dans une position qui se veut confortable. « il n'y a pas beaucoup d'adultes sans enfants … je me sens totalement à ma place » dis-je en riant, tournant mon regard vers lui, avant de sortir une pince de mon sac. On va ajouter un peu de difficulté au tour : essayant de s'attacher les cheveux, sur un cheval en bois, dans un manège qui tourne en rond .

Du plaisir, je ne veux rien d’autre, je le provoque en improvisant une journée aux côtés de Mira au parc d’attraction. Là-bas je trouverais ce que je suis venu chercher, j’en aurais pour mon argent et je ressortirais de très bonne humeur. Dans ces moments-là je retrouve une certaine jeunesse, une partie très gamine de ma personnalité qui a été réduite à néant lorsque le cancer m’a infligé son premier coup. Vous sacrifiez une partie de vous lorsque vous vous battez contre une maladie qui vous ronge de l’intérieur, votre innocence en prend un coup quand les médecins redoublent d’hypocrisie pour ne pas admettre l’évidence à haute voix : tu es condamné ! Ils auraient mieux fait d’en arriver à une telle conclusion, j’ai toujours été du genre à me battre pour des causes perdues d’avance, je m’en serais peut-être sorti plus rapidement, peut-être… Non, je ne préfère pas y penser, ça n’a jamais été mon truc de me demander ce qui serait arrivé dans tel ou tel cas, si plutôt que de prendre une décision X je m’étais tourné vers la décision Y. On ne sait pas ce qui serait arrivé, on ne peut pas deviner ou anticiper, la vie est cruellement construite et ne permet pas d’avoir le recul nécessaire au moment présent, elle ne permet pas d’affronter l’avenir avec sérénité puisqu’on ne sait jamais de quoi demain sera fait. Que les médecins aient été francs ou non, le résultat est le même : j’ai pris des coups dans la gueule, j’ai plusieurs fois frôlé la catastrophe et la mort sans pour autant lâcher prise totalement. Je me suis accroché jusqu’au bout, j’ai vaillamment combattu et je m’en suis sorti. Pour combien de temps ? Je ne sais pas, personne ne me préviendra avant qu’il ne soit trop tard alors autant ne pas se poser la question et simplement profiter. Profiter tant que je le peux. « Devenu ? » Je m’indigne, l’air faussement choqué. « J’ai toujours été un parfait gentleman mademoiselle ! » Elle n’a juste jamais fait attention, je ne vois pas d’autres explications. Mon sourire me trahi bien avant que j’ai pu offrir la performance de l’année, mon acting est encore à travailler. L’heure n’est plus à la plaisanterie mais au retour en enfance, quoi de mieux qu’un carrousel pour cela ? Je m’élance aux côtés de la petite blonde, main dans la main, et ne m’arrête que lorsqu’elle me demande de monter à l’étage. « Je te suis, princesse ! » Quoi ? Au milieu de chevaux en bois, de carrosses et autres reproductions en tout genre on se croirait dans un Disney, elle se fond à la perfection dans le décor. Je nous dégotte deux chevaux et je chevaux le second après avoir regardé, muet, Mira s’installer. « De grands enfants comme nous sont à leur place… Et puis qui sait… On va peut-être influencer d’autres adultes à nous rejoindre ! » Ceux qui ont besoin d’un leader pour se lancer.

Une magnifique journée à l'horizon. Le soleil était même au rendez-vous, de quoi bien nous faire profiter des attractions aquatiques lorsque le soleil sera à son zénith et la température à son maximum. C'est l'occasion idéale pour passer un moment avec Soliman, pour profiter de la vie. Un parc d'attractions, des sensations fortes, des sourires sur tous les visages, quelques pleurs des enfants face à un de leurs caprices dont les parents ne veulent céder, le visage crispé de peur des adolescents qui montent dans un manège à sensation pour la première fois... Ce sont toutes ses choses qui font des parcs d'attractions des endroits magiques, où l'on ne sait jamais vraiment ce qui va se passer : si ce n'est des souvenirs magnifiques. Et je ne me fais pas de soucis quand on fait que je vais passer un bon moment avec Soliman ; avec qui je ne tarde pas à dépasser les portiques d'entrée, pour profiter pleinement du parc dès son ouverture. D'ailleurs je ne me gêne pas pour taquiner ce dernier, lui adressant un joli sourire, lorsqu'il semble choqué. «  Dans ce cas, c'est parce que l'on ne se voit pas assez souvent... » dis-je en poussant un petit soupir théâtralement exagéré tout en secouant la tête. «  tu devrais m'inviter au restaurant alors » dis-je en riant... hum un bon repas gastronomique gratuit… cela serait intéressant… enfin je plaisante, bien Spur, je ne suis pas du genre à profiter de l'argent des autres… c'est même plutôt le contraire. Je ne peux m'empêcher de rougir légèrement lorsqu'il me surnomme princesse, même si ça ne signifie rien pour lui. Je lui adresse un sourire tandis que je monte quatre à quatre l'escalier. «  tu as une drôle de vision des princesses alors… ou alors Princesse moderne, sans les longues robes de diamant et les pantoufles de verres ! » dis-je en riant. Non aujourd'hui, c'est plutôt short et un petit haut simple . «  SI je suis une princesse, il me faut un prince... » dis-je avec un sourire qui se forme sur mes lèvres, tandis que je le laisse nous choisir de bonne place pour profiter du tour. Je regarde une famille s'installer à quelques chevaux de nous, tandis que je m'assois confortablement, tout en m'attachant les cheveux. Une sonnerie retentie nous annonçant le départ du tour . «  ouais peut-être des amoureux, c'est plutôt romantique moi je trouve... » dis-je en regardant, le paysage, les bâtiments construient pour le décor du parc d'attractions... J'ai toujours trouvé ça… Merveilleux, le temps que cela doit prendre de tout créer, d'entretenir les jardins, les allées. C'est vraiment un boulot à plein temps. On ne les voit jamais surtout... Le tour est assez calme, de quoi commencer tranquillement notre journée, tandis que je regarde une petite fille, devant moi qui ris aux éclats, me faisant sourire. «  c'est vraiment le paradis des enfants cet endroit. »

Je n’ai pas trouvé le temps nécessaire depuis un bon moment pour profiter d’un parc d’attractions comme je compte bien le faire aujourd’hui aux côtés de Mira. La faute au travail, la faute à un cancer qui m’a privé de trois années de vie pourtant très précieuses, la faute à un besoin vital de m’acclimater à une société qui me paraissait étrangère après avoir passé autant d’années à simplement la survoler, bien trop occupé à combattre la maladie. J’ai eu un énorme travail à enclencher sur moi-même pour parvenir à surmonter tout cela et à me retrouver. Peu importe le temps que ça a pris, le principal c’est qu’aujourd’hui je suis là, plus vivant que jamais et prêt à en profiter comme il se doit. Je ne laisserai plus rien ni quiconque se mettre en travers de mon chemin. Après une dizaine de minutes à attendre que la foule se dissipe à l’entrée du parc, nous arrivons finalement au guichet et j’en profite pour nous prendre nos deux places, impossible que je laisse Mira payer, il n’est pas question d’être gentleman, juste d’avoir des valeurs. Je nous offre néanmoins du matériel pour laisser place aux taquineries et le moins que l’on puisse dire c’est que ma camarade est très en forme puisqu’elle s’élance avec entrain pour gentiment me piquer là où elle sait que je m’empresserai de surenchérir. « Tu as tout à fait raison, on ne se voit pas assez souvent, la faute à qui ? » Je tente de m’emporter en puisant dans un acting que j’utilise toujours à mon avantage. Il n’y a pas que du faux là-dedans, nous ne passons pas assez de temps, c’est un fait. La faute à qui ? A nous deux pour ne pas dégager le temps nécessaire. « Tu ne m’en crois pas capable ? » Je la provoque lorsqu’elle suggère une invitation au restaurant, elle devrait savoir que je suis toujours partant pour un bon petit défi, d’autant plus quand ce dernier est aussi léger et atteignable. Je lui laisse l’honneur de choisir le premier manège, ce qu’elle ne tarde pas à faire en optant pour un bon petit Carousel qui nous fera retomber en enfance à coup sûr, je lui emboite le pas et grimpe à l’étage. Une princesse 2.0 ? Peut-être. « Les princesses des contes de fées sont démodées, elles n’ont pas les valeurs que devraient posséder les jeunes filles en 2016. » Elles attendent désespérément un mec pour les sortir de la merde, elles ne travaillent pas… Quitte à faire, je respecte déjà davantage des personnages comme Rebelle pour incarner la différence même si un énorme travail féministe est encore à réaliser. Elle a besoin d’un prince, hein ? Un sourire étire mes lèvres tandis que je cambre, prêt à poser le genou à terre. « Accepterais-tu de me prendre pour… Prince ? » Des amoureux, des enfants, des adultes, des personnes âgées… Le Carousel est un endroit pour tous, chacun y trouve son compte et ce qui le faisait rêver étant plus jeune. Je lui attrape la main, le tour débute et nos chevaux de bois commencent légèrement à onduler le long de la barre qui les maintient.

Le boulot, les études, les révisions, tout cela prend énormément de temps malgré nous. Essayer d'en prendre pour s'amuser, fait presque partie d'un autre vocabulaire durant l'année scolaire. Harvard reste l'université la plus prestigieuse au monde, le niveau y est donc élevé, peut-être parfois même un peu trop. La plupart des étudiants ont eu une éducation scolaire assez stricte, des professeurs privés, même particuliers lorsqu'ils l'avaient pas le niveau, ou alors il s'agit de petit génie, venu étudier ici grâce à des bourses, qui ne doivent pas vraiment avoir des problèmes pour réussir à décrocher leurs années. Je ne fais ni partie de la première catégorie, ni de la seconde. Je n'ai jamais été une tête, une première de classe, réussissant toujours à trouver un juste milieu entre les matières ont je réussissais et celle où je n'arrivais vraiment pas à décrocher la moyenne. Et je ne suis pas une fille de riches, une héritière de je ne sais quel enseigne ou marque, juste une pauvre fille, dont la mère a épousé un chirurgien renommé, et qui veut se faire pardonner ses nombreuses années d'absence. Alors que ce soit, pour payer l’université, ou pour réussir à décrocher mon année, c'est loin d'être une évidence. Mais aujourd'hui, tout ça est derrière moi pour le moment, je préfère consacrée toute mon intention à Soliman, à qui j'adresse un beau sourire « on va mettre la balle au centre et dire que c'est la faute à Boston ! » dis-je avec un clin d'oeil avant de passer les portiques d'entrée, grimaçant légèrement lorsqu'il paye mon entrée. «je te payerais une barbe-à-papa pour la peine » dis-je en riant légèrement. Pas sûr que ça fait plaisir à ses tablettes de chocolat mais, au moins, je pourrai taper dedans. « bien sur que si que je sais que tu en est capable mais … justement c'est trop facile, alors tu ne te rabaisseras pas à le faire. »Du moins je l'espère, je n'ai pas envie qu'il me paye le restaurant. Non pas que je ne veux pas dîner en tête à tête avec lui, au contraire. Mais je ne tiens pas à devenir une petite princesse capricieuse qui se fait payer tout ce qu'elle souhaite, je ne suis pas comme ça . Je nous dirige vers le carrousel, choisi pour être notre première attraction, simple, sans sensation, une petite promenade à dos de chevaux de bois , beaucoup moins effrayant que des vrais, différents des contes de fées. Je tourne mon regard vers lui, rejetant en arrière ma chevelure blonde en me tournant pour le regarder alors qu'il grimpe les quelques escaliers pour monter à l'étage ; un sourire aux lèvres. « Et quelles valeurs devraient posséder les princesses de 2016 ? » demandai-je amusé mais tout en étant curieuse de savoir ce qu'attendait Soliman d'une jeune femme . Je m'installe sur l'un des chevaux mis à notre disposition, passant mes jambes de chaque côté, mon regard se perdant parmi les visiteurs présents sur le manège . Je frisonne légèrement lorsque je sens le contact de sa main contre la mienne, surprise. Le voyant ainsi positionner, je ne peux que me mettre à rougir avec un sourire tendre aux lèvres. « Bien sûr que j'accepte … Qui refuserait un tel prince charmant... » je garde sa main dans la mienne durant le tour. On a bien le droit de jouer aux amoureux l'espace de quelques instants, c'est loin d'être désagréable, au contraire. La peau de sa main est chaude contre la mienne, nos doigts entrelacés ont quelques choses de poétique, de beau lorsque je pose mon regard dessus. « prince d'un jour, ou prince toujours. ? » dis-je tournant finalement mon regard vers lui, mes lèvres s'étirant en un sourire. « je veux pas me retrouver comme cendrillon dans un caniveau en junkie. »