BRYNN W-GLUCKSBOURG ► Erin Heatherton

« Oh ta gueule Jon. Ne me regarde pas comme si c’était moi qui t’avais obligé ou j’sais pas quoi. C’était pas mon idée j’te signale, les miennes ne sont jamais aussi pourries. »
Tu t’exclames. Tu cries. Tu gueules. Toi, ton rôle c'était de te tourner les pouces. D'emporter un minimum de vêtements et autres affaires, rien d'autre. Faire la belle, la diva quoi. C’était le rôle de monsieur de prévoir vos soirées, les transports et toute la crotte qui va avec. Il te lança un regard noir, que tu ignoras complètement. Cela faisait deux heures que vous marchiez sur le long de cette route, complètement déserte. T’avais les pieds en feux, les cheveux en batailles pire que la choucroute des one directions, et tu puais le vomi, qui n’était même pas le tien mais celui de ce gros blaireau de Jon. Sérieusement tu ne vendais pas du rêve.  Soirée du siècle, soirée du siècle ton cul ouai. Des souvenirs te revenaient petit à petit, souvenirs que tu aurais d’ailleurs préféré oublier à jamais. Toi roulant des pèles à Jon à la manière des ado prébuères en rut. Purée ça te donnait envie de gerber, dire que tes lèvres ont touchées celles de ce gros poux. Ou encore toi ayant une conversation animée avec un mur, puis tu te voyais encore lui foutre un coup de poing parce qu’il t’avait insulté. Plus aucun respect de nos jours. Toi, bougeant ton popotin avec la grâce de Beyonce, même si le tien n'était malheureusement pas aussi célèbre que celui de Pippa, nouveau membre de la famille Windsor.  Tu soupires, espérant que personne n'avait pris de photo compromettante. T'avais une réputation à tenir, un avenir à assurer, tu ne voulais pas finir strip teaseuse quoi, ouai t'avais besoin de classe et de romantisme dans ta vie. T'étais une princesse merde.
« Purée t'es vraiment saoulant ! Dire que j'suis obligé de faire du stop à trois heures du matin à cause toi. Je te déteste le plouc. »
Tu étais trop fatigué pour exprimer toute cette rage qui bouillonnait en toi. Le pauvre Jon ressemblait à un bébé otarie en détresse sur sa banquise, à la recherche de sa môman. Il faut dire qu'il en prenait pour son grade depuis que vous vous étiez retrouvé dans cette situation. C'était un mec gentil, timide, collant, mais tu l'aimais bien, il était utile, puis il te supportait quand t'étais en colère. Tu pètes un de tes talons, tu grimaces ayant une furieuse envie de jeter ce dernier dans la figure de ton meilleur ami, qui n'allait pas le rester très longtemps d'ailleurs. Tu es perdue, au milieu de nulle part. Vous étiez à des kilomètres de Cambridge, genre même l'Afrique semblait plus proche. Puis merde t'allais être super méga en retard pour les cours, tu ne pouvais pas te le permettre. T'avais des examens à réussir, un avenir à garantir. Tu avais passé beaucoup trop de temps à étudier pour tout gâcher en un claquement de doigt. Dire que t'étais là, le pouce levé, le mascara coulant, les escarpins dans une main, transpirante, claudiquant comme une mémé. La Brynn de la société semblait avoir complètement disparue.Frustrée, froide, et en colère tu jetas un coup de pied dans le caillou le plus proche. Ce qui te fit un mal de chien, parce que t'étais pied nue, t'étais vraiment débile parfois comme fille. C'était malheureusement tout l'alcool que tu avais ingurgité qui était responsable du triste état dans lequel tu te trouvais. Fallait vraiment que tu apprennes à dire stop à la bouteille de vodka.
 « Ni-Ni, j’crois que j’capte du réseau.. enfin non….enfin oui…non…oui. »Tu te retournes vers Jon qui avait entamé une danse des plus folklorique dans l'espoir infime d'avoir du réseau. T'avais envie de lui cracher à la figure parce que tu ne supportais pas ce surnom, t'étais pas un chien bordel, ayant envie de lui dire qu'il était autiste parce que vous étiez en pleine cambrousse au milieu de nulle part, et qu'au milieu des chèvres et des cochons il n'y avait pas de réseau. C'était comme un plus un est égal deux, logique.
« C'est bon j'en ai marre, j'me casse. Reviens vers moi quand t'auras trouvé des neurones, ou quand t'auras enfin vu une paire de nichons. »
Sur ces belles paroles, tu partis dans la direction opposée de monsieur, qui te regardait éberlué. Même si tu avais secrètement peur de tomber sur des pervers une fois seule, t'en avais vraiment eu marre de l'entendre se plaindre.Merde c'était lui le mec, c'était à lui de trouver des solutions. Toi t’étais la princesse. Tu les emmerdais tous et surtout ce puceau de Jon, dire qu'on voulait te marier de force avec lui, alors qu'il serait incapable de survivre une journée. Qu'ils arrêtent de te filer des époux minables et tu te montreras peut être bien plus polie. Les petites manières, les convenances: tout cela ne t'a jamais vraiment impressionné. T'en voulais même pas de ce trône, tu voulais juste vivre ta vie.

LE APRES HARVARD
Devoir grandir c'était bien moche. Tu t'étais suffisamment voilée la face comme cela, il fallait se rendre compte de l'évidence tu n'avais plus rien à faire ici. Toutes les bonnes choses ont une fin n'est ce pas? Ta petite voix intérieure te disait qu'il était grand temps d'avancer. Tu n'allais tout de même pas rester toute ta vie à l'école? Ecole qui ne te réussissait plus si bien que ça. Tu avais perdu ce petit éclat, ce désir qui t'animait, il fallait que tu passes à autre chose que tu prennes l'air. La vie n'a rien de facile ou d'agréable. Sans doute les meilleurs moments prennent ils le pas sur les mauvais, mais dans le fond, est-ce possible d'oublier les douleurs que nous inflige la terrible réalité?  Oui parce que toi tout ce que tu voyais dans cette glace c'était un corps de vieille, de la cellulite, et bientôt la ménopause. Tu n'étais même pas fichu de garder un homme, c'était limite si tu ne les faisais pas fuir. Tu avais quitté la ch, tes racines, de ton pleins grés, et maintenant il fallait que tu finisses ce que tu avais entrepris. Salomée et Gilmore étaient toutes les deux retournées au Danemark, et même si ça te faisait beaucoup de peine de laisser Haytam tout seul ici comme un grand, tu sentais que tu devais les rejoindre.  Si tu continuais à rester ici tu allais péter un cable, tu ne pouvais plus essuyer un nouvel échec. C'est donc avec un grand sourire aux lèvres et les larmes aux yeux que tu avais fait tes adieux à cette seconde famille. Ce n'était pas définitif tu le savais tout au fond de toi, tu devais simplement prendre du recul. Tu voyais ça comme une pause, pour te recentrer sur ce qui était important. Tu décidas donc de faire le tour du monde, dans des hotels cinq étoiles -faut pas déconner- , te lançant dans l'humanitaire et t'ouvrir au monde. Au bout de trois mois tu compris que ça ne servait plus à rien de vagabonder sans but, et puis faire le tour du monde toute seule ce n'est pas très folichon. Tes amies te manquaient. Alors voilà tu repris un avion direction cambridge, cette fois ci pas dans le rôle d'une étudiante, mais d'une adulte aguerrie. Ton projet étant d'ouvrir une dentisterie ou de travailler pour de vrai, et gagner ton propre argent pour vraiment voir ce que ça donne.