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L’froid qui m’colle les joues. L’froid qui glisse le long de ma nuque à travers c’te vieille fripe de pull. Ces vêtements aussi vieux que moi qui trainent dans mon placard. Que j’enfile bien plus souvent que ceux achetés récemment. Le confort de glisser son p’tit cul dans un jogging bien large, bien souple. Le plaisir de sentir une polaire de grand-mère, aussi douce que soie le long de sa peau. Tissus, tissé-main. Tissus trop vieux pour supporter la petite brise du soir. J’vais choper la crève en plus d’un mal de pied atroce à marcher vite. Rentrer vite. S’foutre vite sur c’maudit canapé à déguster pizza, du gras. J’ai pas la confiance d’la nuit. Ce noir aussi mystérieux qu’affreux. Les coins sombres où tu vois des lueurs verdâtres. Des lueurs d’yeux de chat qui te regardent défiler entre deux fouilles de poubelle. Les coins sombres qui font peur, j’vois rien. Je trace, l’pas rapide. Mes jambes comme rarement aussi actives. L’angoisse de rester dehors, de se laisser à la merci des gens tapis dans l’obscurité. L’prochain coin de rue j’vais m’faire attraper par un sale violeur. L’pervers des rues incapable de se tenir sage. Frissons qui parcourent ma colonne vertébrale, de toute sa longueur. Frissons presque douloureux. Douleurs de penser à ce que ces mecs peuvent faire. Te faire subir pour être juste passé sur leur chemin. Je glisse ma main dans mon sac, l’geste violent, le bras ballant. La grosse poche qui se retrouve sur l’sol, l’contenu à moitié étalé à côté. Merde ! Merde, merde. Comme ci j’avais la terrible envie d’éterniser mon passage dehors. Mon aventure dans l’froid à frôler la crève, à frôler la peur. Penchée sur le sol au-dessus de mon bordel à ramasser rapidement. C’bruit d’poubelle. Ce bruit, tu sais pas ce que c’est, t’sais que tu l’as entendu.. T’sais ce bruit qui te fait flipper, le soir, chez toi. Seule. Je redresse la tête, mes jambes tendues pour revenir loin du sol. Les ongles pointés dans le faux cuir de mon sac sali par la crasse du sol. Merde. J’veux courir, voler. Crier. Le cœur qui s’agite. Le cœur en panique. J’avance, rapidement, presque en courant. Regard fuyant, inquiet. T’sais pas où poser tes yeux. Ou regarder. La peur d’te faire chopper. De croiser, ce regard. Le mauvais. La porte, devant moi. Poussé frénétiquement pour arriver à l’ouvrir par force, sans avoir vraiment besoin. Souffle court, bruyant. Les poumons qui arrivent à cracher autant d’air que si j’lançais un marathon. La porte, claquée derrière mon passage pour rentrer dans l’appartement. C’te porte qui laisse les murs tremblés sur son arrêt brutal entre les quadrants qui la retiennent de partir dans l’autre sens. Putain. Mon dos se laisse glisser le long de l’entrée, ce bout d’bois que j’viens de pousser à se fermer. La pointe des fesses qui rejoint la dureté du sol. Crispée. Soulagée à la fois carrément terrorisé. Cette odeur qui vient à mes narines. Ce parfum, entre mille. Il fallait que j’atterrisse ici, de toutes les personnes que je connaisse, ici.mise en page par blasphemy
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