SETH EZEKIEL BARCKLEY ► Luke Evans

"C’est seulement quand on a tout perdu qu’on est libre de faire tout ce qu’on veut."

SETH – Chapitre 1

Il se tient au bord du balcon, bâton de tabac entre les lèvres, les bras croisés. Boston. De nuit, elle paraît encore plus belle. C'est une grande ville. Seth se souvint de sa mère, qui lui parlait sans cesse de cette ville, sa ville à elle, propre à elle même. Boston. Ca sonnait vieux, ça sonnait comme un village. Seth n'avait jamais été très fou de cette ville, il avait des préjugés alors qu'il ne la connaissait pas. Il n'y était pas né mais il avait juste de vagues souvenirs d'enfance à vrai dire. Sa mère, vendeuse dans une boulangerie avait juste assez pour remplir son compte en banque. Elle avait terminé ses heures en s'éprenant du beau Valentin Von Blake. Feu Von Blake n'était pas non plus le plus riche, ni le plus influent en Autriche, mais il se débrouillait tout juste assez avec sa femme pour remplir les assiettes de leurs enfants. Une si belle histoire d'amour, naissante, fraîche, elle y avait mit tous ses espoirs. Les années passèrent, peut être six ans, et elle tomba à nouveau enceinte. C'était lui. Seth Ezekiel Von Blake. Il était le dernier de la fratrie et sûrement le plus plus normal de la famille par la suite.
Seth soupire une bouffée de clope. Il déteste se rappeler cette époque de sa vie, ce vide et ce tumulte incessant même si elle n'est pas la pire. Madame Barckley s'en va. Seth se souviendra toujours d'avoir couru sous les jupes de sa mère, la suppliant, du haut de ses quatre petites années, de la prendre avec elle. Elle refusa catégoriquement. Seth ne comprit jamais pourquoi sa mère voulait partir, mais il comprit avec le temps que ses parents cachaient quelque chose et que jamais il n'aurait pu le découvrir. Il ne fallut pas longtemps avant que Seth voit ses parents se disputer mais finalement retomber dans les bras l'un de l'autre. C'était une réelle histoire d'amour entre eux. Ce soir-là, ils décidèrent donc d'aller au restaurant en tête à tête pour se réconcilier. Madame Barckley fit garder les enfants par une femme, étrange, austère, et peu commode. Le jeune enfant regretta toute sa vie de ne pas avoir profiter du dernier soir où il aurait pu voir ses parents. En effet, madame et monsieur Von Blake perdirent la vie le soir du 9 juillet 1990, laissant derrière eux leurs enfants, leur grande famille, tout ce qu'ils avaient construit jusqu'ici. Seth ne su jamais la raison de leur mort, on refusa jusqu'à aujourd'hui de lui en donner les raisons. Il préfère donc ne plus poser de question.

« J'ai fini par acquérir durablement le sentiment de l'éphémère. »

SETH – Chapitre 2

A à peine 6 ans, Seth fut confié à sa tante, millionnaire à souhait,elle lui assura donc une vie confortable. Elle le sépara néanmoins de ses autres frères et soeurs. Il était le plus jeune donc le moins perturbant.
Dans toute cette foule, il y avait cette petite, Allie. Une jolie petite blonde. Elle se démarquait du lot. Au fil des années il a finalement acquit le cœur de la belle Allie et a former un trio indomptable avec elle, lui-même et un compatriote qui resterait à jamais dans le cœur de chacun, Alfred. Alfred, était le double, la copie conforme de Seth. Ils se complétaient parfaitement, ils étaient inséparables. Tout le monde à Vienne connaissait Alfred Delatour, ce petit garçon bougon qui inspirait pourtant la bonté et l'innocence même. Un vrai bordel cette amitié. Ils arpentaient ensemble les couloirs du collège. Jalousés, détestés et tellement enviés par leurs confrères, Seth avait atteint son but. Il avait enfin pu approcher cette déesse, une véritable muse, sa muse à lui.
Seth balance sa cigarette par dessus le balcon, l'air hagard, pensif. Son visage fermé témoignait de la peine qu'il ressentait en se rappelant la suite de cette si belle histoire, si bien commencé, qui se terminait finalement, si mal.
Désinvolte, il s'affala sur le siège qui se trouvait devant la grande fenêtre. Une petite pacotille trouvé au marché, en bas de chez lui, mais une belle affaire dont il était particulièrement fier.

« A force de se répéter quelque chose, on finit par le croire, même si on sait que ce n'est pas vrai. »  

SETH – Chapitre 3

« Je ne suis pas un monstre. Je ne suis pas un montre. Je ne suis pas un monstre. » Il se répétait ça, comme une chanson. A 18 ans, au lieu de faire de brillantes études alors qu'il en avait les capacités, il préféra vivre son rêve américain, Seth s'engloutit dans l'armée. Son rêve américain à lui c'était de briller dans ce domaine. Il était réellement ambitieux, c'était un homme plein de rêve. Et il déteste encore une nouvelle fois, se rappeler de son passé. C'est un homme fort pourtant, ce n'est pas une petite nature. Il a l'impression que la vie s'est acharnée sur lui, tout simplement. Et il est le seul responsable.
Lorsqu'il a intégré l'United States Marine Corps, il a enrôlé à ses côtés son partenaire de toujours, Alfred. Ensemble, ils ont parcouru ce lourd chemin. Il avait mit tellement d'espoir dans ce rêve, il y croyait.  Le sang coule sur ses mains, et du chaos au fond de ses prunelles, il serre les dents et se plonge dans le profond gouffre qui lui rappelle à quel point il a pu être égoïste. Évidement, il a protégé un pays qui n'est pas le sien. Mais à chaque vies qu'il a pu prendre, il se doute que derrière le rideau rouge, il y a des femmes, des sœurs, des frères, des familles, qui pleurent la perte du mort. Et il n'arrive pas à effacer les horreurs du combat, le sang de ses frères d'armes, ce sang imprégné jusqu'à ses ongles, qui imprègne ses entrailles. Et il était là, impuissant, à les regarder agoniser. Ils le supplient d'abréger leurs souffrances. S'il en a été capable au début, il n'a plus réussi par la suite. Et comme cette fois-là. Une embuscade, un coup monté. Ils se sont fait prendre. Alfred était à court de munitions. Seth ne pouvait pas le laisser seul, en plein combat, il l'avait suivi alors. Le piège tomba très vite.

Les kamikazes arrivent, leurs teints hâlés, c'était la seule chose qu'il pouvait voir de loin. Ils se sont battus comme des hommes, le sang a tellement coulé, mais il fallait qu'ils se sortent de là. Il perdit espoir lorsqu'il se retrouva à terre, percuté par un des ennemis. Tout se passa vite, mais ce fut une scène qu'il vit et revit en boucle, chaque nuit suivant cet événement. Ce grand brun, la peau mâte mais le visage recouvert par un masque, dégaine son arme. Seth lève les mains, un geste instinctif pour calmer le jeu. Puis il tourne la tête et voit Alfred courir dans sa direction. Deux secondes plus tard il sent quelque chose tomber sur lui et une balle transpercer son bras. Une tâche, un éclat de sang sur son visage, elle coule à flot sur l'uniforme qui lui inspirait tant d'espoir autrefois. Seth se rappelle à quel point il a hurlé à ce moment-là. Au diable les kamikazes, ils pouvaient le tuer s'ils le souhaitaient. Seth avait perdu. « Alfred... » Il le tenait fermement dans ses bras, comme s'il le bordait pour un ultime et éternel sommeil. « J'ai froid Seth, tellement froid, j'comprends pas. » Son regard transperçant vint serrer la main du beau brun. « Promets moi une chose. Prends soin d'Allie. Tu as toujours su ce que je ressentais pour elle, et tu seras le meilleur pour lui faire comprendre tout ce que je pensais d'elle... Dis lui Seth. Dis lui tout. » et il lui conta pour la dernière fois à quel point sa chevelure blonde, ses lèvres rosâtres et son petit nez fin étaient la seule chose qu'il voyait à ce moment, les yeux rivés vers le ciel. Seth ne compta pas le temps où il garda Alfred dans ses bras, pleurant pour la deuxième fois de sa vie la perte d'un être cher. Un sentiment similaire au premier, la douleur d'une perte, encore une autre. Parce que Alfred c'était sa famille. La colère, le dégoût, la tristesse, la sensation de vide, la culpabilité. Tout se mélangeait.

Il alluma une nouvelle cigarette. Il ne comptait même plus, pourtant il devait arrêter. Mais c'était un tel stress de se souvenir de ce moment-là. Seth essayait chaque jour de l'effacer de sa mémoire. Ce visage ensanglanté. Ce regard si heureux, cet esprit qui se sentait enfin libéré. Le bonheur de voir celle qu'il avait toujours aimé, une dernière fois. C'était ça la dernière image d'Alfred. Et il n'avait jamais pu honorer sa parole. Comment pouvait-il ? Il ne comprenait lui même pas pourquoi il n'avait jamais pu dire à Allie qu'Alfred avait avancé ses dernières pensées vers elle. Qu'il l'avait chargé de tout lui dire, à sa place. Mais Seth en était incapable, sans savoir comment l'expliquer. Depuis toujours ils s'étaient disputés Allie. Et il se sentait coupable car il savait qu'il avait toujours été beaucoup plus proche avec elle qu'Alfred ne l'avait été. Il préféra donc disparaître après les funérailles de ce dernier et il ne reprit plus jamais contact avec Allie. Seth voulait changer de vie, il voulait reprendre un nouveau départ.

« My sweet hell. »  

SETH – Chapitre 4, Jamie & my daughter.

Il changea de vile, devint un fantôme. Il était une coquille vide, impossible à consoler. Il cachait sa peine sous un grand sourire et il avait prit un petit boulot dans un bar, il en profitait souvent pour se bourrer la gueule à chaque fin de service. Il était devenu comme ça, ce genre de personne à qui on avait même pas envie d'adresser la parole parce qu'on savait qu'il était torturé et très peu agréable. Pourtant, en se re-faisant une nouvelle vie, il fit la rencontre de Jamie. Il n'aurait jamais cru un jour tomber sous le charme d'une autre femme, autre qu'Allie. Mais cette femme-là, elle avait tout pour elle. Elle était douce, enjouée, pleine de vie et en gros, tout ce que Seth aimait. Son chagrin se noya petit à petit, en très peu de temps, il forma un petit cocon d'amour avec elle, il en oublia presque Alfred, Allie, et la guerre. Jamie savait qu'il avait été marines, mais il ne lui avait jamais parlé d'Allie, que d'Alfred. Puis les choses se passèrent très vite pour le couple, très tôt mit ensemble, très tôt fiancés, ils finirent par avoir un enfant. Seth n'avait que 25 ans, il trouvait ne pas avoir une situation stable mais il savait qu'il était assez mature pour assumer cet enfant. Son bébé, sa famille, avec une femme qu'il appréciait beaucoup. Il n'avait jamais considéré la question avec Jamie, il n'aurait jamais pensé ni voulu pour le moment fonder tout cela avec elle, mais il l'aimait, c'était sûr. Sauf qu'il n'était pas lâche et pour une fois, il croyait enfin pouvoir goûter au bonheur, sa rédemption était proche. Il se trouva quelques boulots par ci par là, pour combler les comptes qui permettraient de financer la naissance de son enfant. Et elle arriva. Une petite fille, une adorable et magnifique fille. Seth était comblée, son coeur battait à tout rompre lorsqu'elle vint au monde, rien n'était plus beau que ce qu'il avait vécu à ce moment là et les deux années qui suivirent. " Andrea regarde papa ma chérie !" Il craquait tous le temps en la voyant, elle était son rayon de soleil, si craquante. Il y cru, à sa rédemption. Mais tout bascula. Un jour.

Les clopes ne lui suffisaient plus, il avait besoin d'un scotch, il avait besoin de comprendre maintenant pourquoi il en était arrivé là, aussi minable, aussi bas que terre, incapable de rendre Jamie et son entourage fier de lui, heureux. Il savait parfaitement.

Flashback
Je me souviens ce jour-là, l'eau était bonne, le soleil était chaud, la brise était tempérée, un temps parfait pour faire un tour en famille à la plage. J'embrassais Jamie et pris ma fille dans mes bras. " Allez mon trésor, je vais te montrer comment on nage. T'as peut-être que 2 ans, mais il faut se former jeune hein. " Elle me serra dans ses bras, c'était si chaleureux. Je ne pouvais m'empêcher de me retourner vers Jamie et lui confier Andrea quelques instants. " Je vais acheter des glaces, je reviens." J'embrassais ma fille et si j'aurais su que c'était la dernière fois que je touchais son visage et que je la voyais sourire, je ne l'aurais jamais lâchée.
Je payais le vendeur, tout sourire de pouvoir ramener des douceurs aux deux femmes de ma vie. Elles étaient allées dans l'eau je ne m'en faisais donc pas puisque Jamie surveillait Andrea. Cependant, au loin, je voyais Jamie, seule, cherchant autour d'elle. La panique la submergeait, je la connaissais parfaitement, alors je savais que quelque chose se passait. Les glaces se retrouvèrent étouffées dans le sable tandis que je courrais aussi vite que possible jusqu'à Jamie. Je cherchais, je plongeais et re-plongeais, j'hurlais son prénom. La panique commença à réellement me submerger, jusqu'à ce une chevelure revint à la surface, un corps flottant, inerte dans l'eau. Jamie fut la première à attraper le corps d'Andrea, totalement sous le choc, elle secouait activement la petite qui ne donnait aucun signe de vie. Non ça ne pouvait pas être possible ! J'arrachais Andrea des bras de Jamie et la ramenais sur le sable pour lui faire un massage cardiaque, du bouche à bouche, tout ce que je connaissais sur la ré-animation. Mais rien. Plus aucun signe. Juste le doux visage, fermé, et innocent de ma petite fille. Ma fille... Mon coeur était brisé en trente milles morceaux, pire que la perte de mes parents. Plus douloureux que la mort d'Alfred. L'histoire se répétait, une seconde mort dans mes bras, sous mes yeux. Je serrais Andrea contre moi, pleurant à chaude larmes, jamais ô grand jamais je n'avais pleuré ainsi. Il n'y a rien de plus dur que la perte d'un enfant. Et ma Andrea, si petite, si fragile.. avait perdu la vie. J'étais anéantis, je voulais mourir à mon tour, j'hurlais, j'hurlais le prénom de ma fille comme si je voulais qu'on me la rende, qu'un miracle se produise et que le tout petit corps d'Andrea, si frêle, se réveille. Que je puisse revoir son sourire et que sa petite main caresse ma joue. Que je puisse lui chanter sa berceuse du soir, et que je la borde sur son lit jusqu'à m'endormir également. Qu'elle puisse vivre longtemps et qu'elle profite de la vie. tout sauf ça, tout sauf me voler la vie de ma fille ! Mais la vie s'acharnait sur moi, elle m'arrachait finalement tous les êtres que j'aimais plus que tout...

C'est aussi pour ça que je me résignais avec le temps, à ne pas quitter Jamie. Nos relations se dégradèrent avec le temps, je n'avais plus envie de parler. j'avais cru que ma vie avec elle annonçait le début d'une vie heureuse. Elle avait été de courte durée mais elle avait été finalement la pire. La perte d'Andrea avait été le plus dur moment de ma vie. Après cela, elle et moi ne parlions plus d'elle, plus jamais son nom ne fut prononcé ni les vidéos que j'avais d'elle revus. Nous décidions Jamie et moi de partir pour Cambridge, à Harvard, pour qu'elle puisse y faire ses études et y laisser - encore une fois- les fantômes du passé derrière nous. Retrouver notre complicité, notre amour, nous reconstruire ensemble après la perte de notre fille. Si Jamie avait encore des rêves, je n'en avais plus aucun pour ma part. Je subissais la vie et je n'avais plus d'espoir pour un quelconque projet. Je soutenais Jamie dans tout ce qu'elle faisait, mais je ne l'aimais plus de la même façon, je lui en voulais pour la mort de notre fille et je la lui reprochais sans cesse. Il était temps pour nous de passer au delà de tout ça, au final.
Fin du flashback.

« Parfois je me demande quelle est la raison de ma solitude.
Rapidement je me rappelle que moi non plus, je ne voudrais pas de moi. »  

SETH – Chapitre 5, Jamie.

Si Seth est aujourd'hui une coquille vide, il essaye avec beaucoup de mal à se reconstruire à Boston, où il a arrêté la profession de marines et s'est reconvertit en tant que policier, il est même devenu capitaine d'une brigade. Mais la perte de sa fille, son couple vacillant et tout ce qu'il avait pu voir à la guerre, il n'en voulait plus de cette vie là. Il avait besoin de se ressourcer. Il y pensait chaque jour, ses plus belles années avait été avec sa fille et la perte de son enfant avait été bien trop douloureuse. Sa vie était devenue monotone, noire et obscure. S'il y avait bien quelques amis qui redoraient son petit cocon, Seth est aujourd'hui un homme à reconquérir, qui doit se reconstruire sur de bonne bases. S'il paraît froid et complètement perdu, il est pourtant un homme bienveillant et très aimable qui se fera toujours un plaisir de vous aider lorsque vous en demanderez la nécessité. Il aime se sentir utile. Un homme généreux, agréable. Il sait parler et absorber la foule quand il le faut, c’est un bel orateur.  Il n’est ni méchant, ni odieux, ni trop complaisant. Il s’adapte juste à la personne qui est en face de lui. Ce n’est pas le genre à venir ramper aux pieds de quelqu’un pour qu’ils finissent par s’entendre. Pour lui, la première impression est toujours la bonne, il ne s’est jamais trompé jusque là.  Attentionné, attentif, courtois et honnête, c’est un homme sur qui on peut compter si le besoin est urgent, un ami bienveillant. Cependant il a un véritable mal-être à montrer ce qu'il ressent. Soit, il préfère donc tout garder pour lui, soit il vous le fera savoir de manière très farouche et maladroite. C'est un véritable bout d'amour, une crème, et il se refuse à faire du mal à quelqu'un qui lui est cher. Seth est un homme passionnant, il ne s'ouvre pas à tout le monde, mais à qui veut le connaître. S'il a un passé dont il n'est pas particulièrement fier, il espère apprendre de ses erreurs et se construire un futur stable et plein de richesses. « On dit souvent que le temps guérit toutes les blessures. Je ne suis pas d'accord. Les blessures demeures intacts. Avec le temps notre esprit afin de mieux se protéger, recouvre ses blessures de bandages, et la douleur diminue, mais elle ne disparaît jamais. »