L'arrêt de bus. / Sonny

L'arrêt de bus
— Nienny

Le froid court sur ses joues et balaie les trottoirs des feuilles mortes qui les envahissent. Elle marche le long du campus à la recherche de l'arrêt de bus dont lui a parlé une fille qui est en sociologie avec elle. Elle ne prend pas souvent le bus voir jamais mais aujourd'hui elle a envie de grimper à l'intérieur. N'allez pas lui demander pourquoi. Nienke a souvent des envies comme celles ci qui semblent n'avoir aucun sens mais pour elle c'est tout l'inverse. Alors elle marche en direction du grand boulevard qu'on lui a indiqué et en profite pour photographier la statue qu'elle croise tous les matins. Et puis elle repart d'un air léger se serrant un peu plus sous son manteau fourré. Il fait froid et la neige fondue rend le sol glissant alors elle prend soin de ne pas tomber même si ça ne serait pas une affaire d'état. Elle aperçoit enfin le petit abris transparent qui abrite un jeune homme, il attend sûrement le même bus que le sien ou peut être un autre. Elle se glisse à ses côtés et sort son paquet de cigarettes pour en sortir une. Elle cherche son briquet dans ses poches mais ne le trouve pas, elle grimace avant de se tourner vers le jeune homme. Dis moi, tu aurais du feu, s'il te plait ? Elle lui sourit et lève ses yeux pour les plonger dans les siens.

L'arrêt de bus
— Nienny

Tu ne savais plus vraiment où tu avais rendez-vous, tu avais oublié. T’avais beau essayer par tous les moyens de t’en souvenir, ça ne te revenait vraiment pas. Tu savais juste qu’il fallait que tu prennes ce bus là, tu te souvenais même plus du nom de l’arrêt d’arrivé. En fait, ça ne t’inquiétait même pas. C’était l’occasion de faire une petite balade et de faire encore d’avantage travailler ta mémoire. Toi tu voyais toujours le bon coté de choses de tout façon, tu te disais que si tu avais oublié c’est que ce ne devait vraiment pas être important. N’empêche, t’étais quand même un drôle d’étudiant en médecine, si tête en l’air que tu serais sans doute capable d’oublier un scalpel dans le ventre d’un patient. De toute façon, tu t’en fichais bien. Ça faisait bien vingt minutes que t’attendais à cet arrêt, et tu te demandas une seconde si l’on était pas dimanche… Non. Non nous n’étions pas dimanche. Alors tu attendais, tirant sur ton joint à moitié fumé, c’était peut-être ça qui t’avais fait oublié en fait. Mais la jeune fille qui vient s’asseoir à coté de toi t’adresses alors la parole et te fait sortir de tes rêveries. Elle te demande si tu as du feux et tu hoches la tête avant de lui adresser un petit sourire. « Bien sûr ! » Tu t’empresses de répondre en fouillant dans la poche de ton sweat, lui tendant ton briquet en posant ta main libre sur tes genoux, soufflant ta fumée vers le ciel. « Tu attends le 18, aussi ? J’ai l’impression qu’il est retard. » Toi et tes impressions, ton regard sans cesse ailleurs. Tu ne prends d’ailleurs même pas la peine de la vouvoyer, tu t’en foutais bien de tout ça, elle était faite comme toi et en plus elle avait l’air sympa.

L'arrêt de bus
— Nienny

Elle pose ses fesses sur ce banc à côté de ce jeune homme et ne remarque qu'après lui avoir demandé du feu qu'il fume un joint. Ça la fait sourire. Elle le détaille un peu alors qu'il cherche son briquet dans la poche de son pull enfin son sweat, peu importe. D'un premier abord, elle le trouve simple et il dégage de bonne ondes. Nienke ne pense jamais pouvoir tomber sur un con, pour elle les cons la fuit. Elle est humaine Nienke, elle aime le contact avec les gens et ne peut s'empêcher d'apprécier le contact humain. Elle le regarde une nouvelle fois alors qu'il lui offre son feu, elle lui sourit et allume sa cigarette. Merci, c'est gentil. Elle tire une longue latte avant qu'il ne demande si elle va prendre le 18. Elle le regarde l'air pensive et sourit une nouvelle fois. J'en ai aucune idée, je ne prends jamais le bus. J'avais juste envie d'essayer. Elle soulève ses épaules et tire une nouvelle fois sur sa clope. Elle a toujours envie d'essayer, de se faire ses idées par elle même. Ce n'est pas exceptionnel de prendre le bus nous sommes d'accord mais pour Nienke ça peut offrir des supers plan de vue pour ses photos. Enfait j'sais même pas où j'ai envie d'aller. Et toi ?

L'arrêt de bus
— Nienny

T’arborais cet air complètement ailleurs habituel qui faisait de tes yeux comme deux grands ciels ouverts sur le monde. Tu les posas sur cette jeune femme qui t’avait adressé la parole avec un sourire bienveillant sur les lèvres, ravi comme toujours de pouvoir aider quelqu’un. Tu lui tendis alors ton briquet - que tu devais certainement avoir récupéré de quelqu’un auparavant - et la regardais s’allumer sa cigarette en tirant sur ton propre joint. Ce n’était pas légal ? Et alors, elle allait te dénoncer ? T’étais réellement au dessus de tout ça, et à son petit sourire tu devinais qu’elle aussi. « Gentil c’est mon deuxième prénom. » Tu fis avec un clin d’oeil entendu et adorable avant qu’elle ne te surprenne lors de sa réponse à ta propre question. Elle non plus ne savait pas vraiment où elle allait ? Ainsi elle te plaisait de plus en plus. Tu mordillas ta lèvre gercée par la fumée. « Je ne sais pas non plus. Tu fis dans une petite moue boudeuse en regardant autour de toi avec une mine à la fois perdue et toute à fait consciente de sa situation. Je crois que j’ai oublié. » Tu fis en te pinçant les lèvres d’un air embêté, avant de lui sourire tout de même - parce qu’elle te souriait et que tu aimais qu’on te souris. Tu tires à nouveau sur ton joint avant d’écarquiller les yeux, comme si tu atteignais l’illumination. « Oh viens, on a qu’à aller nulle part ensemble ! » Tu fais avec un grand sourire satisfait, hochant la tête comme si ce que tu venais de dire avait le moindre sens.

L'arrêt de bus
— Nienny

Ce jeune me paraissait être dans la lune, dans sa petite bulle comme moi j'étais dans la mienne. Je le remercie pour sa gentillesse et ce qu'il me dit me faire rire. Je tente un regard vers lui, on se sourit et il a l'air surpris par ma réponse. Bah oui, je ne sais pas où je vais. J'avais juste envie d'essayer, je ne suis pas une habituée des transports en commun plus de la marche à pied et du taxis. C'est vrai ? Je le regarde d'un air illuminé, il pourrait faire peur vu d'une autre personne mais moi il me plait. Il a oublié et moi je ne sais pas où je vais. On était une belle équipe de vainqueurs, il ne fallait pas que quelqu'un nous demande un renseignement sur les lignes de bus. J'allais te le proposer ! Je lui rend son beau sourire et sort mon appareil photo de mon sac et le braque sur lui. J'appuie sur le "clic" et la photo est prise. Désolée c'est quand on ne s'y attend pas que les photos sont les meilleures. Je pince mes lèvres pour dissimuler un sourire mais je ne peux pas me retenir plus longtemps, je lui montre l'écran pour qu'il voit la photo.

L'arrêt de bus
— Nienny

Vous avez l’air bien vous deux, très équilibrés, avec l’une qui ne sait pas où elle va et l’autre qui a oublié où il allait. Dans la catégorie gros paumés un peu bizarres, vous méritiez un césar. Mais apparement cela ne semblait en aucun cas vous déranger, et toi t’étais le premier à adorer rencontrer des gens un peu différents, des marginaux qui te rappelaient cette délicieuse diversité terrestre en laquelle tu croyais vraiment. T’avais de tout comme amis sur le campus, mis ceux avec lesquels tu t’entendais le plus avaient tous une certaine case en moins sans doute. « Oui c’est vrai. » Tu acquiesces avec ta sincérité habituelle, hochant vivement la tête en hoquetant légèrement sous les effets de ton joint, avant de lui sourire pour de bon. C’est alors que vous avez une idée, la plus merveilleuse idée du siècle : celle de faire la route ensemble vers un trajet inconnu. Tes yeux s’illuminent à cette pensée et tu lui adresses ton plus beau sourire lorsqu’elle acquiesces. « Génial alors on fait ça ! » mais tout à coup tu écarquilles d’avantage les deux perles saphir que tu as à la place des yeux lorsqu’elle pointe son objectif vers toi et prend une photo. Tu penches la tête sur le coté avant de rire. « Oooooh je vois ! Tu as sans aucun doute raison. » Et tu regardes la photo qu’elle te montre avec un sourire complice. « Prenons-en une ensemble ! » Tu fais en venant te mettre à coté d’elle, la prenant dans tes bras pour la photo comme si vous vous connaissiez depuis toujours.

L'arrêt de bus
— Nienny

Je ne me doutais pas que nous pouvions faire de telle rencontre sous un arrêt de bus. Mais quand j'y réfléchis, je me dis qu'on peut rencontrer des gens n'importe où il suffit juste de s'intéresser un peu aux personnes qui nous entourent. Nous sommes la génération 2.0, celle qui à ses yeux fixés la moitié du temps sur son téléphone portable. Super. Nous ne savions pas tous les deux où nous allions mais le sol truc que je trouvais à sortir était ce mot. Et je trouvais vraiment ça super, il est rare de trouver des gens comme moi qui sont heureux pour rien et dans leur bulle. On se regardait avec de grands yeux comme des enfants, comme si on découvrait le monde et la pureté qui se cache en nous. On décide d'aller nul part ensembles et je trouve que c'est la meilleure chose qui m'est arrivé dans la journée. On se sourit et je sors mon appareil photo pour le prendre par surprise; Quand je regarde le cliché qui se trouve dans ma boite magique je me dis qu'il est vraiment parfait. Oui, je crois que j'ai raison. Tu es parfait ! Je ne m'attendais pas à ce qu'il vienne se coller à moi pour qu'on prenne un "selfie" mais je trouve que c'est une adorable idée. Ohhh oui ! Je pose ma tête sur son épaule et retourne mon appareil pour que l'on puisse se prendre. Je souris légèrement et appuie sur le bouton qui fait "Clic". Je ramène ma boite vers moi et nous regardons notre photo. On est plutôt pas mal. Je ris un peu tout en nous regardant. Tu as de quoi en rouler un autre ? Je lui montre le cul du joint qui gît sur le sol, ce n'est pas dans mes habitudes de demander ni même de fumer mais là j'en ai envie.

L'arrêt de bus
— Nienny

T’étais content de chaque nouvelle rencontre. T’avais aucun portable sur lequel reposer les yeux à vrai dire, parce que tu le perdais tout le temps ou que t’oubliais de mettre une sonnerie. T’étais le parfait rêveur que ses amis avaient du mal à joindre, mais ils finissaient toujours par te le pardonner, parce que t’avais le don de faire sourire. Toi t’aimais les visages heureux, curieux, chaleureux. T’avais du mal à rester en place lorsque t’entendais quelqu’un pleurer, même au milieu d’une rue, t’étais du genre à rester avec elle jusqu’à ce qu’elle se calme. T’étais un trop plein d’amour, t’en avais toujours trop à donner. Et là t’étais juste content d’avoir pu trouver quelqu’un d’aussi paumé et perdu que toi, tu lâchas un rire. Ce n’était pas tous les jours qu’on tombait sur des gens qui lâchaient prise, qui pouvais te comprendre. Elle confirme d’ailleurs cette idée lorsqu’elle prend soudainement une photo de toi, sans te donner ton avis et que tes grands yeux bleus s’écarquillent avant que ton visage lui offre un sourire. Tu rougis un peu lorsqu’elle te dit que tu es parfait. « Moi, parfait ? Non, je n’aime pas les pizzas. » Tu lâches seulement comme si cela était la plus grosse tare du monde. Ben oui, tout le monde aime les pizzas, tous les américains aiment les pizzas, Jordan adore les pizzas et toi tu détestes ça. C’est un défaut énorme. Tu finis par rire. Puis finalement tu lui proposes sans aucune hésitation alors une photo à deux et tu viens te coller à elle pour une photo rapprochée, adressant un grand sourire à l’objectif lorsqu’elle le tourne vers vous. Tu te penches alors pour voir le résultat. « Woh, tu as un si joli visage. Ce qu’il manque c’est des couronnes de fleurs, il faudra que l’on en fasse. » Difficile en plein hiver mais t’avais de ses idées que la raison ignorait absolument. Puis tu souris en coin en entendant sa question. « Bien sûr, j’ai toujours de quoi. » Tu fais alors en fouillant dans ton sac, lui tendant une feuille et ton petit sachet de marijuana que tu lui mets entre les mains. Tu croises les jambes, si elle s’y mettait, tu ne tarderais pas à t’en allumer un autre. Le bus pouvait prendre son temps, t’étais en bonne compagnie.