Feldt ▲ Are you drunk?

En un seul week-end, ma vie s’effondrait à nouveau. Je ne pourrais dire que c’était les pires jours de ma vie, mais c’était mentir. J’avais vécu bien pire que ces derniers jours, et pourtant, je me retrouvais assise à cette table avec mon verre de whisky. Je ne comptais plus les verres. Un, deux, trois, quatre, impossible de me souvenir. À quoi me souvenir, si je veux oublier? Je veux oublier qu’Elios m’ait une nouvelle fois abandonné avec les jumeaux, qu’il n’arrive pas tenir ses putain de promesses. J’aurai dû mieux savoir que de faire confiance à un prince. Ils sont tous pareils ces hommes riches, ces héritiers à la con qui se croient permis de jouer avec notre vie. Puis, y a Alaska. Je lui apporte que du malheur. Depuis que je la connais, c’est sa troisième fois à l’hôpital. Je suis pas une bonne soeur. J’arrive pas à la protéger. Je suis faible. Puis y a ce mec-là, que je regarde avec ce regard meurtri qui en dit long sur mon état d’âme. C’est mon frère vous voyez, parce que comme si avoir une soeur sortie de nulle part c’était pas déjà assez cool, un frère c’est amusant aussi. J’étais passée de rien à une famille. « Je n’ai pas envie de rentrer à la maison. » Lui répondis-je sur un ton sec, glaciale, en faisant signe à la serveuse de me resservir un verre.

Ma vie était une vraie catastrophe en ce moment. Pourquoi est-ce que quand tout semblait plutôt bien fonctionner, rien ne fonctionnait? Ces dernières semaines, tout s’était à peu près bien rangé, j’arrivais à tout gérer correctement, et maintenant, tout s’écoulait encore une fois dans tous les sens. Cela commençait à devenir invivable. J’aimerai tellement avoir une vie paisible, que les gens autour de moi tiennent leurs paroles. A la place, j’étais de plus en plus malheureuse, laissée seule dans ma situation, abandonnée par le père de mes enfants. Qu’il aille brûler en enfer Elios avec toutes ses promesses non-tenus. Et Declan, il ne faisait qu’enfoncer encore plus ma mauvaise humeur. « Tu sais, sans moi, cette jeune femme ne pourrait pas payer pour l’éducation de ses enfants. » Je lui donnais toujours beaucoup de pourboire. Elle était silencieuse par rapport à ma situation, ne disait jamais, et me laissait surtout vivre en paix avec mon problème d’alcool. Que Declan s’y oppose me mettait dans un état pas possible, et si j’avais la force, je lui cracherai surement à la figure. Je grinçais des dents alors qu’il refermait son emprise autour de mon poignet. User de la force avec moi était une mauvaise idée. « Tu ferais vraiment mieux de me lâcher. » Bourrée et d’humeur massacrante n’étaient pas un bon mélange, demandez à Alex ou à Briony, ils ont déjà eu le droit à y faire après l’accouchement des jumeaux.

Spoiler:

Dans ma tête, je n’avais pas un problème, ou du moins, quand j’étais assise à ce bar avec mon verre de bourbon qui se faisait remplir et remplir, encore et encore au cours de la soirée, tout allait bien. Je n’étais pas dans un endroit plus heureux. C’était impossible, car ma vie était tout sauf parfaite. Une catastrophe ambulante, et si ce n’était pas pour mes enfants, j’aurai peut-être tirer sur la gâchette il y a des mois de cela. Je tenais debout pour eux, pour essayer de leur donner la meilleure vie. Parfois, je me demandais, si je n’étais pas entrain de les faillir aussi, si ils n’étaient pas mieux en Italie avec leur père et leurs grand-parents. Ils auraient une belle vie là-bas, auraient tout ce qu’ils voulaient, sans aucun battements de yeux. Peut-être que j’étais un peu stricte, qu’ils allaient me détester quand ils seront plus grands de ne pas avoir su tenir ma relation avec leur père, d’être l’échec d’une mère. J’oubliais mes problèmes avec l’alcool, avec ce verre qui me permet d’être quelqu’un d’autre, même juste pour l’instant de quelques heures. Je me sentais invisible en ce moment-même. Je pouvais me battre contre mon frère qui me harcelait. Je pourrais crier, mais à quoi bon, il est plus fort que moi. Dans mon état, mes cours d’autodéfense ne me servent à rien. Comment est-ce que je tiens debout? J’essaie de me débattre, en vain, puis le froid sidéral de cette nuit d’hiver me gifle le visage. Choc thermique, les températures avoisinent le négatif, ou alors ce n’est qu’une impression. Rien ne semble vraiment réel. J’ai le tournis, et chaussé de mes talons, rien ne s’arrange. Mes pieds touchent le sol à nouveau, et je reprends mes repères. Je vais le tuer. En plus, il ose s’excuser comme si tout était normal. Comme si il pouvait juste me faire ça. Je fume de l’intérieur. Sans réfléchir, je commence à le frapper dans le torse. J’ai envie de lui faire mal. Je n’y arrive pas, et après ce qui semblait être cinq bonnes minutes à l’insulter et à le frapper, je finis par fondre en larme contre lui. « J’en peux plus de cette vie… »

La vie c’est pas toujours facile. Je le sais, ça fait bientôt 25 ans que je me bats pour avoir une vie normale. Ce n’est clairement pas facile d’essayer de se retrouver quand on est aussi perdu que moi. Dès qu’il y a quelque chose de bien dans ma vie, quelque chose vient m’arracher ce petit moment. À croire que je devais avoir une malédiction ou quelque chose dans le genre. J’aimerai tellement pouvoir être heureuse, de trouver quelqu’un qui n’arrêtait pas de m’abandonner quand il le chantait, puis revenait pour tout détruire. Je voudrais simplement être moi, être heureuse. Est-ce que c’était trop demander? On ne pouvait pas juste attendre que cela arrive. Je savais que je devais faire quelque chose. Je n’avais plus la force, pour le courage pour essayer d’aller bien, de trouver cette personne qui me portera sur ses bras. Je laissais tout aller, toutes la pression qui s’était accumulée en moi durant ses dernières mois, depuis qu’Elios était revenu. Si j’essayais sans cesse d’être parfaite pour lui, aujourd’hui, je n’arrivais plus à être sans faille. Je pleurais, laissant les larmes s’échapper de mes yeux, venant couler le long de mes joues pour y laisser apparaître une longue trace rouge. Je déteste Declan de m’avoir rendu faible, et pourtant, dans ses bras, je suis bizarrement bien. « Je ne veux pas te déranger. » Il devait avoir eu une longue journée au travail, et le cas social que j’étais, il n’avait pas besoin de s’en occuper.

J’avais besoin de crier au monde qu’il était injuste avec moi, qu’il me volait tout ce dont j’avais envie. J’avais voulu une famille, je l’avais eu, et puis le père de mes enfants me laissaient tomber sans cesse, m’abandonnant dans la processus. Qui faisait cela? Je pouvais comprendre qu’Elios avait des responsabilités par rapport à son père, son pays, mais il en avait également envers moi, et celles-là, il ne les respectait jamais. Comment je devrais lui faire confiance maintenant? Si un jour, il décidait encore une fois de revenir sans rien dire aux préalables. Comment c’était possible d’être comme cela? Je pensais parfois à lui retirer ses droits, qu’il ne me donne plus que l’argent et voilà, mais cela voudrait dire une longue et fatigante bataille devant la justice que je ne pouvais endurer. J’avais tout laissé sortir sur Declan. Il m’avait poussé à bout quand je voulais avoir la paix, à me morfondre sur la vie de merde que ma famille avait. J’essayais de rire un peu alors que mon frère me parlait de sa vie sociable proche du néant. J’avais du mal à imaginer qu’il n’en est pas. Malgré que nous ne soyons pas reliés par les sang, il était là pour moi, alors qu’il ne le devait pas. Je reniais notre « père », et pourtant, il m’acceptait tout de même. « Je veux qu’on regarde Gotham alors, y a ce monsieur qui te ressemble comme deux gouttes d’eau. Ou alors Making a Murder et tu me raconteras toutes tes théories. » Peut-être que cela me ferait du bien de passer la nuit chez lui, de sortir un peu de mes quatre murs qui se refermaient doucement autour de moi, m’oppressant certains soirs.