BAD NEIGHBOR ► Elliot

Je suis crevée ! Je me suis permise de prendre quelques jours de repos pendant l'alerte tempête de neige, qui tombe bien finalement. Mais pourtant je n'arrive pas à récupérer le sommeil que j'ai en retard. La cause ? Mon voisin du dessus. Cet abruti ne sais apparemment pas vivre en silence, ou au moins en respectant les autres habitants de l'immeuble. Entre le lit qui grince, c'est conquête totalement indiscrètes et sa stupide batterie, j'ai l'impression de ne jamais avoir de répit. Pourtant j'en aurais besoin. Les nausées du premier semestre de ma grossesse sont enfin terminée et je pourrais normalement enfin dormir tranquillement. Je n'ai envie que de ça d'ailleurs : dormir. Mais c'est sans compter sur l'autre connard. Je n'ai pas dormi de la nuit à cause de lui, et ce n'est pas la première fois cette semaine. À croire qu'il n'est jamais fatigué, contrairement à moi. Mais bon, je suis gentille, je n'ai jamais rien dit. Peut-être que si je l'avais croisé je lui aurais demandé poliment, mais ça n'a jamais été le cas. Je ne sais même pas à quoi il ressemble. Sauf que voilà, cet après-midi je commence à saturer un peu à cause du bruit. Ça fait plus d'une demi heure qu'il s'entraîne à la batterie et alors que moi j'aimerais finir de rédiger un devoir. Déjà qu'il est difficile de se concentrer lorsqu'on étudie la mise en scène d'une représentation de Romeo et Juliet datant du début du vingtième siècle, mais si en plus on ne peut pas le faire dans le silence, c'est juste impossible. Autant dire que je fulmine. Je suis vraiment énervée et je ne sais pas si c'est normal ou si c'est un mélange des hormones et de la fatigue. Mais en tout cas je finis par me lever, par sortir de mon appartement et par monter les escaliers deux par deux afin de me rendre à l'étage supérieur. Vêtue d'un short en coton et d'un sweat d'Harvard, je ne suis pas forcément bien vêtue pour rencontrer mon voisin pour la première fois, mais je m'en fiche totalement là. Je tambourine à la porte et j'attends que quelqu'un daigne venir m'ouvrir.

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Elliot n’est pas égoïste mais il ne se prive pas pour les autres. Quand il est arrivé aux Etats-Unis, il s’est promis de ne pas se priver. A lui la belle vie. Aussi, l’Anglais a pris soin de ne se fixer aucune limite. Pas même sur les heures où il joue de la batterie. Les voisins peuvent bien râler, il s’en fiche, et les flics ne se déplaceront jamais parce qu’il joue toujours avant que la règle du tapage nocturne ne se mette en place. Plus il tape fort et plus il se défoule. Quand aux autres bruits suspects, ils ne sont pas de son fait. Il n’y peut rien si les femmes exultent sous ses coups de reins comme le lit tape contre le mur alors qu’il a tout fait pour qu’il bouge le moins possible. Un vrai petit ange en apparence, Elliot ! Un vrai diable lorsqu’on s’aperçoit que tout ceci n’est qu’une façade. Il n’a aucune partition, juste des écouteurs dans les oreilles, reproduisant les bruits qu’il capte des solos des plus grands batteurs. Ca ne doit pas forcément sonner de la même manière, mais il y travaille. Le bruit sourd d’un tambour qui n’est pas de son fait vint le perturber dans son morceau. C’est de la porte d’entrée que cela provient. Qui cela peut bien être ? Il n’a invité personne, et il doute que quelqu’un ne se pointe à l’improviste. Vêtu d’un maillot des Chicago Bulls, issu de sa grande collection de maillots de basket, il se lève, posant ses baguettes et s’enquit à aller ouvrir. Son regard se pose alors sur le peu de vêtements qu’arbore la silhouette devant lui. Il se mordille la lèvre jusqu’à arpenter les traits de son visage. Tiens, s’il s’attendait à voir Tessy devant lui, et dans cette tenue par la même occasion ! « Tessy ! Ca pour une surprise, c'en est une ! » Ca faisait un moment qu’il ne l’avait pas vue, elle qui était pourtant sa compagne de beuverie, son acolyte qui partageait les vodkas. Elle n’a pas l’air très enchantée de le voir, et le jeune homme affiche une moue intriguée, lui demandant alors : « Qu’est-ce qui t’amène ? Tu veux boire un verre ? » Et il s’écarte même pour la laisser rentrer. Ils ont toujours beaucoup flirté, mais ça n’est jamais allé plus loin, ce qu’il regrette infiniment. D’autant plus lorsqu’il la toise du regard et qu’il détaille une à une les courbes galbées de son corps fin.

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Je suis de nature plutôt calme et pacifiste, je n'aime pas le conflit. Je ne suis pas une Quincy pour rien. Mais bon, quand quelqu'un dépasse les bornes, je en me fais pas prier pour le lui signaler. Ce voisin n'allait pas échapper à la règle, non mais ! Il va voir de quel bois je me chauffe s'il n'arrête pas tout de suite son brouhaha. Ne pas contrarier une Tessy enceinte et fatiguée, c'est la règle. Du coup je suis montée frapper à sa porte. Je ne compte pas l'agresser, mais juste lui demander calmement d'arrêter un peu de faire du bruit. Mais bon, si le ton monte je me défendrai, soyez en sûrs. Je ne sais pas trop sur quel genre d'individu je m'étais imaginée tomber, mais pas sur le jeune homme qui se trouve devant moi, ça c'est certain. Elliot ! Ça pour une surprise ! Ça fait des mois que je ne l'ai pas vu, et il vit juste au dessus de chez moi. Le voisin que j'ai rêvé d'étrangler n'est nul autre que mon ex compagnon de beuverie avec qui je me suis bien marrée cet été, avant de tout arrêter pour redevenir la Tessy sage. Il est aussi surpris que moi apparemment. Ça nous apprendra à ne pas essayer de connaître nos voisins. C'est une blague ? Tu vis ici ? Peut-être qu'il est juste de passage chez un pote, on ne sait jamais. Après tout ce temps sans se voir, j'aurais pu être plus chaleureuse, mais je suis de mauvaise humeur. Ce n'est pas parce que c'est Elliot que je vais oublier le pourquoi de ma présence ici. J'habite à l'étage d'en dessous, et je suis juste venue te demander d'arrêter de faire du bruit. J'aurais pu me contenter de ça et tourner les talons afin de retourner à mon travail. Mais je pénètre dans son appartement après qu'il m'y ait invité. Ça fait longtemps qu'on ne sait pas vu après tout ! Et le temps que je suis ici, il ne jouera pas de la batterie. Non merci, je ne bois plus. À moins que tu ais du soda ou du jus de fruit. Parfois c'est chiant d'être enceinte, mais bon c'est comme ça. Je sens son regard sur mes jambes nues, sur mes cuisses et je ne sais pas trop si ça me gêne ou pas. Je suis contente d'avoir mis un sweat qui camoufle les formes du haut de mon corps. Arrête de mater, Grimes.

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Elliot n’est pas du genre à chercher la paix avec le voisinage, ni même à chercher à les emmerder volontairement. En réalité, il s’en fiche. Ca fait bien longtemps qu’il a compris qu’on ne peut pas être aimé par tout le monde. On peut toujours lui faire des réflexions, le jeune homme passe au dessus de tout ça. Mais même s’il est persuadé que Tessy s’apprête à lui faire une réflexion au regard de son expression, il ne peut s’empêcher de paraitre jovial au possible. Souriant presque amusé de la situation un peu caustique qui les met en scène dans des retrouvailles hasardeuses, il acquiesce pour répondre à la question de son amie. « Oui, depuis que je suis arrivé sur Cambridge en fait ! Tu crois quoi ? Que je squatte chez des gens ?! J’suis pas un clodo ! » Dit-il en ricanant. Elle n’a pas l’air très accueillante, et il finit par saisir pourquoi. Elle lui reproche de faire trop de bruit, et le regard d’Elliot change du tout au tout, marquant une certaine incompréhension : « Attends, attends, Tess ! Pour quel motif ? Je veux dire, on est en pleine journée, je vais pas m’arrêter de vivre non plus ! J’y peux rien moi si c’est mal insonorisé ! » Il possède une batterie, c’est bien pour y jouer. Il s’étonne qu’une fille comme elle lui fasse ce genre de remarque. Elle était bien plus agréable en soirée. La laissant entrer et lui proposant de boire bien poliment, là encore, la jeune femme le prend à contre-pied. Elle ne boit plus. Il ne peut s’empêcher de rire, presque persuadé qu’elle le fait marcher : « Tu déconnes ? Comment ça tu bois plus ? Si c’est une blague, elle est vraiment drôle ! » Et puis un nouveau reproche émane des lèvres de la jeune femme qui commence vraiment à être ennuyeuse. Où est passée la Tessy drôle et charmante qu’il connait ? Ecarquillant les yeux, il ne peut s’empêcher une nouvelle fois, de presque se moquer, dans son attitude je-m’en-foutiste par excellence : « J’ai des yeux c’est pour m’en servir non ? Sois belle et tais-toi ! » s’amuse-t-il alors en donnant un petit coupa sur le nez de la jeune fille à l’aide de son doigt. Mais il possède effectivement du soda et des jus de fruits, parce qu’il ne boit pas de la vodka à tous les repas. Marchant jusqu’à la cuisine, il ouvre le frigo et lui lance : « Alors j’ai : jus de banane, jus multifruits, jus de pomme, jus d’orange, coca, ice tea, limonade, j’imagine qu’au moins un te conviendra ? T’es sûre que tu ne veux pas de bière ? » Lui se sortit une bouteille qu’il décapsula bien vite.

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Donc si je comprends bien Elliot habitait ici avant même que j'emménage. C'est vraiment étrange que nous ne nous sommes jamais croisés au par avant. On se croirait presque dans un vieux feuilleton humoristique. En ce moment on entendrait les rires de ce stupide faux public. Je n'ai jamais pensé une seconde que tu es un clodo. Mais je suis juste un peu étonnée d'apprendre que tu vis ici aussi. À vrai dire je ne m'attendais même pas à le revoir un jour. Alors apprendre qu'il vit au-dessus de chez moi, c'est bizarre. Sans parler du fait que le mec avec qui j'ai passé des nuits à m'amuser, à boire et parfois même à danser, n'est nul autre que le voisin que j'ai envie d'assassiner depuis plusieurs mois. Le monde est petit, en voici une nouvelle preuve. Bon, après cette surprise, je fais ce que je suis venue faire ici. Je lui demande d'arrêter de faire du bruit. Mais apparemment Monsieur n'en a pas envie, et ne compte pas faire ce que je lui demande pourtant gentiment. Il se fiche de moi là. Pour quel motif ? Déjà que toi et ton coup d'un soir m'avez empêché de dormir cette nuit, alors maintenant j'aimerais pouvoir bosser en silence. J'ai un devoir à rendre cette semaine et j'aimerais beaucoup pouvoir me concentrer. Ça y est, je suis de nouveau de mauvaise humeur. Il est agaçant à ne rien prendre au sérieux. Je ne m'en était jamais rendu compte avant, sûrement parce que j'étais saoule à chaque fois qu'on a passé du temps ensemble. La bonne époque. Ou pas. Parfois ça me manque de ne plus boire, de ne plus m'amuser comme avant. Mais il a fallut que je fasse un choix, pour ma santé. Ouais, j'étais alcoolique, et j'ai dû me soigner. Et maintenant, j'ai un bébé dans le ventre qui m'empêche de boire aussi. Je t'assure que ce n'est pas une blague. Je ne bois plus. Disons que je n'ai plus trop le choix... Je me mords la lèvre. La ferme Tess ! Je fais une autre remarque à mon voisin, à croire que je ne suis bonne qu'à ça aujourd'hui. D'un autre côté il le cherche. Il est vraiment pénible ! Nous ne sommes plus au dix-neuvième siècle, très cher. J'ai le droit de dire ce que je veux. Et j'ai le droit de te demander d'arrêter de me reluquer. Non mais ! "Sois belle et tais-toi", il se croit à quelle époque là ? Espèce de macho ! Je le suis jusqu'à la cuisine, où il ouvre le réfrigérateur et me propose tout un tas de boisson non-alcoolisées. Sûre et certaine ! Je vais me contenter d'un coca. Merci.

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