COLE WILDINGHAM ► ED WESTWICK

Songeur, j’étais perdu dans mes pensées. On était censés aller faire une partie en double avec Mr Alderson et son fils aujourd’hui normalement. C’était ce genre de moment que j’aimais avec mon père. Son regard fier lorsqu’il me présentait à ses associés, l’éloquence qu’il mettait ensuite pour raconter nos exploits de tennismen amateurs à ma mère et ma sœur, ou encore nos têtes à têtes complices dans son salon privé, mon premier cigare, mon premier cognac, toutes ces découvertes avec lui, son rire quand j’avais grimacé en repoussant mon verre, et sa réplique alors en observant le liquide ambré qu’il contenait –tu verras un jour ça ne te brûlera plus, tu sentiras enfin toute les saveurs, les parfums, les subtilités de cette boisson… Tu seras un homme ce jour là mon fils-  La porte de son bureau s’ouvrit d’ailleurs à la volée, m’arrachant à ma méditation. C’était Victoria qui arrivait dans sa robe noire, la mine grave. Elle me cherchait, il fallait qu’on y aille, le notaire allait attendre. J’attrapai le verre que je venais de me servir et le portai à mes lèvres pour le boire d’une traite. Ca ne piquait pas. Ca ne piquait plus. J’étais un homme. Un homme de 18 ans qui venait de perdre son père.

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Un autre fils ? Je ne pensais même pas à ma mère, au chagrin que la révélation de cet ancien adultère pouvait provoquer en elle. Je ne pensais pas au scandale qui risquait de nous éclabousser si jamais l’affaire venait à être révélée au grand jour.  Je ne pensais même pas à Victoria, qui assise à côté de moi, venait de voir réduire à sa part d’héritage au strict minimum et qui malgré cela, glissait fraternellement sa main dans la mienne pour me soutenir devant ma mine défaite. Sur le coup, je ne pensais qu’à moi, comme toujours, et je déglutis difficilement sans réussir à prononcer un seul mot. Mon père, ce modèle que j’avais toujours connu, idolâtré et adoré, m’avait caché toute une partie de sa vie, et il avait cet autre gosse quelque part, ce gars qui venait de me raflait une part de son argent, une part de son amour ?  

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La vie avait suivi son cours. Les mois passèrent. Les années. J’avais surement été davantage ébranlé que Victoria par cette disparition soudaine de notre paternel, peut être parce que j’avais toujours été plus proche de lui. J’avais suivi la voie qu’il avait toute tracé pour mois. Oxford. Des études d’économie. Participer à la gestion de la société et épauler ma mère. Et y’avait ces soirs, où je finissais à moitié saouls dans des bordels. Comme si peloter de parfaites inconnues me donnait un peu plus l’impression d’exister, de le comprendre, puisque sous ses airs de grand homme parfait et propre sur lui, il avait sauté la première pauv' fille qui passait et lui avait fait un mioche… Alors c’est en adoptant parfois cette attitude que j'allais mieux le comprendre non ? Et à côté de ça, je continuais de travailler mon image en société, ce besoin de vouloir lui prouver que je pouvais réussir malgré tout, même sans lui. Et j’avais toujours, au fond de moi, cette colère, cette jalousie, tout ça qui boulonnait contre ce bâtard. Et pourquoi diable mon père s’était-il senti obligé de lui léguer une partie de sa fortune ? Pourquoi ?

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C’est un peu d’un très mauvais œil donc, que je vis Victoria partir pour Cambridge. Il était censé être là bas lui aussi. Et si elle le rencontrait ? Et si elle venait à l’apprécier ? A l’aimer plus qu’elle ne m’aimait moi ? Un peu comme mon père avait semblé aimé ce gosse, qu’il n’avait pourtant jamais connu ou élevé, au point qu’il le mentionne dans son testament. Je crois que je n’attendais qu’un signe, qu’un déclic pour la rejoindre et ce ne fut pourtant qu’en janvier que cela se produisit. Il y avait eu ces étranges mouvements d’argent l’an passé déjà, et dès que j’abordais le sujet avec la jeune femme semblait soudain avoir quelque chose de très urgent à faire et devait raccrocher. Elle fuyait mes questions je n’étais pas dupe. Et lorsque donc, le doyen d’Harvard annonça qu’il voulait fermer les confréries, menaçant ainsi celle que ma sœur présidait, ce fut finalement le moment pour moi d’envoyer ma demande de transfert pour Harvard, accompagné d’un gros chèque. Tout n’est que piston, et étant un grand habitué des pots de vin je savais comment forcer la voie d’accès afin de rejoindre pour le second semestre la plus grande faculté du monde. Même si mon dossier scolaire restait assez exemplaire en soit, il valait mieux assurer mes arrières. Mes valises bouclées, ma sœur prévenue de mon arrivée, les américaines n’avaient plus qu’à bien se tenir… Et ce Wade Forbes avait tout intérêt à ne pas se mettre sur mon chemin.