Once upon a time
CHAPITRE I ♦ 22 juin 2013
Le sourcil parfaitement épilé se haussa et les yeux scrutent, laissant planer un silence de mauvaise augure. Les lèvres se crispèrent et les paupières se plissèrent. « Quelle est … cette … horreur ? » La jeune stagiaire -Kimberley, 24 ans, célibataire depuis deux jours et fan du film Moulin Rouge- affiche une mine déconcertée, ne comprenant pas tout à fait la situation. « Et bien c'est-.. » « C'était une question rhétorique. » l'interrompit Indigo observant toujours la robe qu'elle venait d'enfiler, faites sur mesure et simplement créé pour l’événement le plus ennuyant que la Terre n'ait jamais connu : le mariage de son oncle, le frère de sa mère. A 70 ans, ce vieux croulant avait décidé de se marier avec son infirmière à domicile … âgée de 35 printemps. L'amour, l'amour, elle n'y comprendrait définitivement jamais rien. La robe lui faisait paraître moins de poitrine qu'elle n'en avait déjà et se prdait dans un amas de tulles blanches absolument immondes, recouvrant totalement ses pieds. « Ce n'est pas moi qui vais me marier ! Du moins pas dans l'immédiat. Enlève moi ça ! » finit-elle par s'exclamer avant que Kimberley ne s'exécute, affolée par le courroux de la jeune femme. La réputation d'Indigo n'était plus à faire dans le coin. Détestée, admirée, haït, elle ne laissait personne indifférents et était aussi exécrable qu'une vieille peau ayant perdu le goût en la vie. On la disait frigide, femme fatale, salope, tyran des affaires, studieuse … Toutes les étiquettes les plus contradictoires lui avaient été collées dans le dos sans qu’elle n'y prête grande attention. Qu'y pouvait-elle si sa mère était l'une des plus grandes créatrices de mode que les années 90 avaient pu connaître et que son père répétait les scandales avec son hôtel de luxe digne de l'éclat de DSK et de sa femme de ménage. La robe lui fut enlevée et c'est en sous-vêtements qu'elle sortit de la cabine, tombant nez à nez avec l'individu le plus désagréable -après elle- de l'humanité. « Qu'est ce que tu fiches là toi ? » demanda-t-elle le ton tellement froid qu'il aurait pu faire office de climatisation pour toute la boutique. Mais son interlocuteur ne s'en formalisa ps, peu impressionnée par son manège de fille précieuse « Je suis venue admirer ma future femme dans son -presque- plus simple appareil. » précisa-t-il en détaillant le corps fin, trop fin, de la jeune femme. Indigo lâcha une injure dans un marmonnement avant de renfiler ses escarpins et de remettre sa robe tailleur. Kimberley s'enfuit, la robe serrée contre elle, espérant ne pas être témoin d'une énième dispute de couple. Couple ? Il n'en était définitivement pas un. Elle s'était retrouvée affiliée à lui pour une fucking histoire d'héritage et de reprise d’hôtel. Son père était le pire, réellement. Le chien -elle ne se décidait pas à l'appeler par son prénom- sourit, se rinçant l’œil comme il le pouvait avant de grimacer « Hm … Tu manges quoi pour être aussi maigre qu'un cadavre en phase de décomposition primaire ? » Indigo, occupée à se remaquiller dans un des miroirs immenses de la pièce, releva un sourcil -un tic chez elle- observant le reflet de son fiancé « Est-ce que ta phrase a un sens au moins ? » Un blanc plana avant qu'il ne hausse les épaules, se levant du fauteuil en cuir dans lequel il était assis « J'en sais rien et j'en ai rien à foutre. » Il se positionna derrière elle, trop près d'elle et Indigo acheva de se remettre du rouge à lèvres avant de se retourner vivement « De l'air. Tu es dans mon espace vital. » Blasée, elle s'écarta avant de reprendre son sac et de se tourner vers le … chien. « Bon. Tu as décidé de jouer ton rôle de toutou pour ton cher papa et de me suivre partout ou tu es juste tellement con que tu ne comprends pas que je ne te veux pas dans ma vie, dans ma boutique, dans ma chambre, dans mon oxygène ! » Le dit chien soupira, pinçant l'arrête de son nez, les yeux fermés comme si il réfléchissait mais ça Indigo en doutait, il était trop bête pour entreprendre une telle action. « Écoute. Ces fiançailles ne me réjouissent pas non plus mais je n'y peux rien. Tu pourrais faire l'effort de- » « NON ! » cria-t-elle soudainement le faisant presque sursauté. Cette fille était totalement timbrée … « Non, je ne ferais aucun effort. Tu es un intrus qui m'empêche d'avoir une libido, de pouvoir me balader tranquillement dans la rue sans qu'un putain de paparazzi ne se dirige vers moi en me demandant si j'ai fixée une date pour notre mariage ou qu'elle sera la couleur des dragées, de prendre du plaisir à regarder la télé ou à lire des magazines people sans que je ne vois ma face placarder partout à côté de la tienne. Je ne peux pas faire d'effort parce que ton existence même les gâcheraient tous. » Elle souffla un coup, reprenant une constance et fixant le jeune homme face à elle qui faisait tous les efforts du monde pour ne pas la secouer comme un cocotier. Serrant son sac contre elle et crispant ses ongles vernis de bordeaux sur le cuir, elle reprit « Je me fiche bien de savoir si tu souffres, que ton père te met une pression monstre, que ta maman a des étoiles dans les yeux rien qu'à l'idée de nous voir ensemble et qu'elle écrit des fanfictions sur nous tellement elles nous adulent ... » « Ma mère n'écrit pas- » voulut il dire mais elle continua sans l’écouter « que ton chat porte le nom de notre futur enfant, que nous n'aurons pas soit dit en passant. Je m'en fou ! Alors laisse moi tranquille ! » Sur ce, elle tourna les talons le laissant seul face à son énième défaite.
CHAPITRE II ♦ 5 août 2014
Comment une si petite crevette pouvait exister ? Jetant un œil à l'assiette de sa mère, Indigo remarqua que la salade que l'on venait de lui servir n'en menait pas large non plus, accompagnée d'une tomate cerise atrophiée et de quelques feuilles de laitues ayant l'air d'avoir fait un régime à la Dukan. Qu'est-ce qu'elle foutait là sérieusement ? Les déjeuners du Mercredi avec sa mère étaient souvent exaspérants et se soldaient toujours par une dispute et un ventre vide pour Indigo. Espérant que tout se passerait pour le mieux, elle prit sa fourchette, plantant avec une rage assassine les pics dans la crevette maigrelette. « Et bien ? Tu n'as rien à me raconter ? » dit sa mère, Hortense Carlson, duchesse de Wittelsbach, mariée depuis 35 ans à un homme volage dirigeant de la grande chaîne hôtelière Westin Hotels & Resorts depuis une dizaine d'année de père en fils et ancienne styliste mondialement connue d'une marque de prêt à porter de luxe. Elle était à la retraite depuis 5 ans maintenant mais ne semblait pas pour autant plus fatiguée ni moins à la pointe de la mode, comme elle l'avait toujours été. Sa fille qui mâchonnait avec application son maigre repas lui jeta à peine un regard. « Je n'ai rien à raconter. » Froide comme toujours avec sa génitrice, elle préférait se concentrer sur son assiette désormais vide et prit le verre à pied contenant du rosé pour se donner une contenance. Le restaurant était abominablement bien ensoleillé en ce mois d'août et une douce fraîcheur se laissait propager dans toute la pièce aux meubles en bois vernis et en fauteuils de velours. Mais Indigo était bien trop concentrée sur l'alcool qu'elle ingurgitait à vitesse grand V en espérant être assez saoule pour oublier qu'elle avait envie de hurler à sa mère que, oui, elle avait bien des choses à raconter mais que la moitié ne lui plairait pas. Hortense esquissa un sourire crispé, presque gênée de voir sa fille lui parlait comme ça. Entamant sa salade, elle reprit « Je pensais inviter Lore mais je me suis dit que tu n'apprécierais pas ... » Indigo, le verre à quelques centimètres de ses lèvres fardées de rose pâle plaqua sur sa mère un regard glacial « En effet, je n'aurais pas apprécier car je ne serais même pas venu ou … j'aurais mis le feu au restaurant en espérant qu'il crève dedans » « Indigo ! » la reprit sa mère, indignée par l'impolitesse de sa fille et la colère qu'elle avait depuis le départ envers son fiancé. Elle reposa ses couverts, croisant ses mains de façon si élégante … « Tu sais très bien que nous ne nous réjouissons pas plus que toi, ton père et moi, de cette union. Mais elle nous sera bénéfique à tous » Un soupir et la jeune femme décroisa et recroisa ses jambes sous la table, oscillant entre colère douce et haine bruyante « Hm. Vous êtes tellement triste pour moi que vous vous êtes empressés d'envoyer je ne sais combien d'invitations à la fête de mes fiançailles, fiançailles que je n'ai jamais acceptée de vive voix d'ailleurs » Cette conversation allait dégénérée, elle le sentait et n'avait aucune envie de se donner en spectacle. Hortense observa sa fille, penaude. Pourquoi ne s'entendaient-elles jamais sur rien ? Elle faisait pourtant tout pour rendre sa fille heureuse, non ? Indigo finit son verre, le posant brusquement sur la table avant de se lever. Remettant la bretelle de son sac sur son épaule, elle croisa les bras sur sa poitrine « Tu sais quoi, maman ? Il y a un temps, je pensais que tout ce que tu faisais pour moi était pour me rendre heureuse, pour que je ne me pense pas abandonnée … Mais ça, ce stupide mariage creuse un immense fossé entre nous. Je suis indépendante et je n'ai besoin d'aucun homme pour me bâtir un avenir alors si tu ne le comprends pas, tant pis, je me débrouillerais pour briser ces fiançailles à la con que ça te plaise ou non. » La mère démunie regarda son enfant se détourner la laissant seule face à sa salade rachitique et un verre à moitié vide.
CHAPITRE III ♦ 16 novembre 2015
Les yeux fixés sur son Iphone, Indigo secoua lentement la tête « Non, repose ça tout de suite. » Son ami poussa un soupir frustré lui faisant relever les yeux et hausser un sourcil, ses doigts se figeant sur sa partie de Candy Crush « Quoi ? Je ne suis pas là pour te lécher les bottes et te dire que ces chaussures sont magnifiques ni que cette chemise ne te fait pas ressembler à un Babar en chemise de nuit. » Le blond nommé Dorian, 23 ans, petit con à ses heures perdues et mannequin à temps plein, afficha une mine déconfite, observant son amie avec un mépris exagéré. Indigo leva les yeux au ciel, blasé « Dépêche toi au lieu de me regarder comme si j'étais la plus belle des femme que la Terre n'ait jamais portée. » Dorian détourna le regard un instant, indécis « Euh, c'est pas trop ce que je me disais mais ... » « Oui et je me fiche de ce que tu pensais, habille toi avant que je te plante le talon de mon escarpin dans l’œil » ordonna la jeune femme, replongeant ses yeux sur son écran. Un soupir puis elle l'entrevit s'habiller. Au bout de quelques minutes, voyant qu'elle n'avait plus de vie pour jouer, elle verrouilla l'écran et revint à la réalité. Se relevant sur ses Stiletto noirs vernis, elle détailla le garçon avant d'esquisser un de ses rares sourires satisfaits « Bien, ce n'est pas parfait mais ça fera l'affaire. Dégage de chez moi maintenant et va à ton rendez-vous. » Le mannequin se releva, insolent, l'observant de haut en bas avant de glisser une main sur la hanche d'Indigo « Mais je pourris très bien annulée et ... » La main de la jeune femme repoussa la sienne avant qu'elle n'éclate d'un rire cassant qui le fit se figer « Qu-Quoi ? » Posant les yeux sur lui, elle prit une expression presque méprisante « Toi et moi ce ne sera jamais possible. Je me tape pas des inexpérimentés et je n'ai pas la tronche d'une pédophile … Compris ? Allez oust ! » acheva la jeune femme en le chassant d'un geste de la main, comme si il n'était qu'une mouche. Le jeune homme soupira, une énième fois marmonnant un « Tu ne changeras jamais ... » avant de claquer la porte de son appartement. Se dirigeant calmement vers la grande baie vitrée de son appartement, bras croisés sur ce corps trop frêle, elle fixa l'horizon, répondant un temps après « En effet, je ne changerais pas. »
CHAPITRE IV ♦ 1er janvier 2016
« Voici ta chambre … En espérant qu'elle te plaira. » déclara la jeune blonde qui la scruta pour la énième fois en observant les 5 valises qu'elle se faisait traîner par un mec trouvait au hasard dans la rue. Incertaine, la gérante reprit « Tu es sûre d'avoir besoin d'autant d'affaires ? » Son rire fut nerveux, un peu intimidée par la face glaciale qu'affichait Indigo. Celle-ci scrutant la chambre depuis le pas de la porte, ses yeux dissimulés par des lunettes de soleil tourna brièvement la tête vers elle avant de répondre « Et bien … Oui. Je compte rester ici assez longtemps, sûrement jusqu'à obtenir mon diplôme alors … Oui, j'en ai cruellement besoin. » acheva finalement la jeune femme avec un sourire qui suinta d'hypocrisie. La gérante hocha la tête, contrariée par le mépris et l'arrogance dont débordaient l'étudiante face à elle. « Et bien … Bienvenue … Si tu as besoin de quoi que ce soit adresses toi à ta Présidente … » Sans répondre Indigo hocha la tête et avança finalement dans la chambre, disant au mec lambda de laisser ses affaires dans l'entrée. Foulant le sol de ses escarpins, elle observa les lieux, le lit aux draps blancs et immaculés, les murs nus de tous tableaux et finit par retirer ses lunettes qu'elle jeta sur le lit avant de lâcher un soupir. Elle n'avait fait que fuir ses responsabilités, un mariage inutile pour finir dans une chambre qui n'égalerait jamais la taille de celle qu'elle avait à Los Angeles. Était-elle idiote ou simplement aveugle ? Elle sortit son portable de la poche arrière de son pantalon, découvrant deux textos de sa mère, un appel de son père et encore deux appels manqués de sa mère. Serrant les dents, elle jeta son portable près de ses lunettes et commença donc à déballer ses affaires, se murmurant qu'elle avait peut-être laissé un Enfer pour en découvrir un autre ...
DEPUIS DÉBUT JANVIER ...
Depuis son arrivée à Harvard, Indigo étudie donc la politique et la sociologie. A la demande de ses parents tout d'abord mais c'est aussi une voie qu'elle avait toujours voulu emprunter. Indigo est une femme faite pour le pouvoir, selon ses dires et faites pour leurrer les foules, les soulever, les diviser ou les rallier lorsque ça lui semble nécessaire. Ca ne lui semble pas être des matières compliquées ni difficiles à assimiler. La pratique est sûrement pièce maîtresse de la réussite dans ce cas-là.
Habituée à s'intégrer assez vite au centre d'un groupe d'amis, elle a su vite se rallier à quelques membres de sa confrérie qui partage ses points de vus sur le monde, son envie de réussir et qui ont, eux aussi, le poids d'un héritage sur le dos, lourd et collant. Peu lui importe pour l'instant ses fiançailles, sachant très bien que le dit fiancé est actuellement dans son université, elle préfère, pour le moment, se concentrer sur ses études et sur la notoriété qu'elle pourra se donner jusqu'à la réception de son diplôme.