i refuse to sink (andrenix)

Je me balade près du port, veste remontée jusque sur le nez, capuche en place. J'ai l'air d'un esquimau, c'est presque drôle à voir. Je traine des pieds et réfléchis de longues secondes à l'idée qui me passe par la tête. Foutre les pieds dans l'eau. Mais je risque de mourir congelé tellement il fait froid ce soir et tellement le vent est gelé. J'ai déjà froid avec mes Uggs alors je n'imagine pas pieds nus, les pieds dans l'eau. Je regarde au loin, au large et me demande ce que ça ferait d'être un pirate et de me barrer avec mon trésor d'oxycodone. Oui parce que j'ai clairement pas de trésors de pièces d'or moi... Je soupire, croise mes bras sur ma poitrine et me vois m'en aller bien loin. Peut être que revenir à Harvard n'était pas l'idée du siècle. Je sais pas trop... Ils auraient jamais réussi à me sauver de cette grossesse extra-utérine en Afghanistan. Je serais surement morte sur la table d'opération. Et ils auraient cherché quel militaire m'aurait mis enceinte. Je secoue légèrement la tête et tourne les talons, quittant l'eau pour aller me réchauffer dans un bar. Le Drink. Un nom bien simpliste pour un bar quand même. Lui donner le nom d'un verbe, franchement, viva l'inventivité. En plus d'être mal, je suis ronchon. Je pose ma veste à l'entrée comme il en est coutume ici et demande un cocktail maison à base de rhum. Pirate jusqu'au bout de la nuit. Je prends mon verre et cherche une table vide. Mais mon regard croire celui de Phoenix. J'ai veillé sur lui pendant son coma parce que ça me tenait à coeur... Je ne voulais pas le voir aller mal, ça avait le don de me briser le coeur. " Je peux me joindre à toi ? " Peut-être qu'il attend quelqu'un, je sais pas... " Ca va depuis ta sortie ? " Il avait quitter l'hôpital et j'y avais passé une longue semaine juste terrière. On s'était manquée de peu dans les occupations des chambres aseptisées de l'hosto.

Quand t'es plongé dans le coma pendant deux mois et que tu en sors, t'as l'impression de découvrir la vie, tu peux dire adieu à la respiration artificielle, tu respires enfin l'air pure. C'est une légende. Moi à mon réveil, j'ai hurlé, j'ai pleuré, parce que j'ai appris la mort de mon fils. J'ai tué mon fils. Mon psy me répète que c'est un accident que je ne l'ai pas tué, qu'il se taise.. Je sais la scène, j'ai tout vu. Et sans cesse le même rêve me hante, enfin c'est plutôt un cauchemar. Je me réveille en pleine nuit, couvert de sueur, mes yeux sont remplis de larmes, et je me rendors recroquevillé sur moi-même comme un chien battu. Parfois je me dis que ma vie serait plus simple si moi aussi j'avais péris dans ce foutu accident, j'aimerais tellement un jour m'endormir et ne plus jamais me réveiller. Aujourd'hui journée normale, j'ai fait un tour aux entreprises et un tour à la mafia, compteur de mort : 0. C'est mal, et il faut que je tue. Quand je ne tue pas, je me drogue, ou bois et là ce soir j'ai décidé de faire les deux. Après avoir promené Apocalypse, je suis directement reparti à pied. J'ai enfin enlevé mon atèle, ça me fait un mal de chien de marcher, mais la douleur ne m'effraie pas. J'entre dans le Drink, mon bar de prédilection en ce moment. Je m'assois à ma table habituelle, celle du fond et le serveur m'apporte mon verre habituel : whisky. Je suis rapidement servis et fais tourner les glaçons dans mon verre, pensif. Je lève les yeux un instant après avoir pris une gorgée puis croise le regard d'Andrea. Elle vient vers moi, et visiblement elle a besoin de parler, ou pense que c'est le cas pour moi. « Ouais si tu veux. » Mais qu'est-ce que tu es aimable Cartwith. Visiblement, mes doutes se confirment elle pense que je veux parler. « Ouais, ils m'ont enlevé mon atèle hier. » Je ne suis pas très bavard.

J'ai du mal à m'habituer au calme plat de ma vie ici, à Cambridge. Pourtant, j'ai vécu pas mal de trucs quand on y pense. Nouvel appartement, nouvelle vie, grossesse extra utérine, salpingectomie. Bref, du grand Andrea quoi ! Mais tout ça me semble fade et sans saveur à côté de ce que j'ai vécu pendant quatre mois à l'étranger. C'est sur que tous ces événements n'ont rien à voir avec le fait de soigner des militaires et de faire des jeux à la con jusqu'à pas d'heure pour se détendre. Ici, je dois affronter tout le monde et faire face à mes erreurs. Cool. J'adore ça. Alors un petit verre ne me fera pas de mal. Même si je ne bois plus depuis septembre et ma crise sur les toits de l'université. Faire tomber le fond de ma bouteille de rhum et la voir éclater quelques mètres plus bas m'avait fait sourire à l'époque, imaginant que c'était mon corps au lieu de cette bouteille. M'approchant de Phoenix, je repense au soir où on s'est rencontré après ma garde à l'hôpital. Il était tellement souriant - à sa manière - à l'époque et là, il n'est plus que l'ombre de sa vie. Je le comprends. Il a vraiment traversé des sales trucs. " Si tu préfères jouer avec tes glaçons toute la soirée, tu peux le dire aussi " Lançais-je d'une manière des plus sarcastiques. Je ne suis pas bien et lui broie du noir. C'est vraiment con tout ce qui nous arrive et moi, ça me casse les burnes. J'ai envie d'être heureuse. Mais faut croire que je ne suis vraiment pas faite pour ça. Je bois une gorgée de ma boisson. À vrai dire, je trempe à peine mes lèvres. Je n'ai pas envie d'être enivrée tout de suite. Je veux profiter. " Bah c'est cool. T'es plus robocop comme ça " Soufflais-je en haussant les sourcils. Ouai, il peut remarcher normalement. Et c'est moi qui dit ça alors que j'ai une prothèse quand même.. Je le regarde et pose mes deux coudes sur la table, pose mon visage dans mes mains. " Si ça te fait mal, hésites pas à demander à ton médecin de te prescrire quelque chose de plus fort " Soufflais-je, captée par ses yeux... Ou alors il pouvait augmenter les doses tout seul, comme je le faisais. C'est une bonne alternative. Sauf quand on est à court de dose. Ou que ça ne nous fait plus rien.

J'aime la solitude et me retrouver avec moi-même. Je n'ai même pas l'envie de draguer, les femmes qui arrivent je les envoie sur les roses malgré le fait qu'elles soient magnifiques, alors les regards fusent surtout celui du barman que je ne connais que trop bien. Pourtant lorsque la belle Andrea arrive je ne l'envoie pas sur les roses, en même temps elle s'installe face à moi sans me laisser dire quoique ce soit. La manière dont je parle laisse supposer qu'elle m’insupporte déjà. Tout le monde m'a connu dans mes beaux jours, mais dorénavant je broie du noir. Elle me fait une remarque concernant les glaçons que je fais tourner dans mon verre, je fais claquer mon verre sur la table et lui lance « Contente ? » Un sourire se dessine sur mes lèvres, il sonne faux mais je m'en contre fiche je n'ai pas de compte à rendre surtout pas à Andrea. Je ne peux m'empêcher de rire lorsqu'elle me dit que je ne suis pas robocop. C'est tout à fait le genre de blague que je peux faire. Elle et moi sommes pas si éloignés que ça, et c'est pour cette raison que je peux la considérer comme une amie, même si elle est partie du genre au lendemain et que ma première intention était d'embêter Maxime en me rapprochant d'elle. Faut croire que parfois nous sommes surpris des gens. Elle me suggère de demander à mon médecin de plus fortes doses, j'arque un sourcil. Je n'ai pas besoin de conseils moi. « J'ai d'autres doses qui me suffisent, si tu vois ce que je veux dire. » Je suis certain qu'elle voit absolument où je veux en venir. Dans ma poche je sais que j'ai des joints, au moins cinq. Et chez moi des seringues pour m'injecter de l'héroïne. Si elle savait tout ce qui se trame chez moi, elle serait bien surprise.. « Mais dis moi ! Quel bon vent t’amène ici ? » En d'autres termes : pourquoi tu viens me voir alors que je veux rester seul ? Je bois une autre gorgée de mon verre, j'aime tellement cette saveur.

Phoenix, cher Phoenix... T'es pas sensé renaître de tes cendres ? Quand je le vois comme ça, morose, triste comme une pierre, j'ai des envies de meurtre. Où est passé le magnifique homme qui me charmait il n'y a pas six mois de ça ? C'est le fait que je ne suis plus avec ce cher Maxime qui lui fait arrêter d'avoir envie de moi ? Dommage, j'ai peut être un peu envie de lui. Je luttais contre mes sentiments les précédentes fois mais là, je suis libre comme l'air. Oh que oui. Et je le pousse à bout, j'essaye, pour le faire réagir, tenter de le faire réagir du moins... Je suis défoncée, comme souvent en ce moment alors je n'ai peur de rien, même pas de me prendre des coups de sa part. Il peut être violent, je le sais. Mais ça ne me fait pas peur, tellement pas peur. " Heureuse " Souriais-je après avoir sursauté face au bruit qu'il a fait en claquant son verre sur la table. Il m'a foutu les chocottes, je ne m'y attendais pas mais je préfère qu'il me regarde, qu'il se souvienne à quoi je ressemble et ce que je peux lui faire ressentir, s'il le veut. Pas que de la peine, non non... Je l'écoute et arque un sourcil. " Vraiment ? " Oui, je parais tout de suite beaucoup plus intéressé par ce qu'il pourrait avoir à me dire. L'oxycodone commence à ne plus faire trop d'effets sur moi et ça m'ennuiiiiie. Tellement longtemps que je prends des médicaments pour la douleur que là... C'est du gâteau quoi. " Et t'as quoi d'intéressant ? " Demandais-je à voix basse en m'approchant dangereusement de lui. C'est limite si ma poitrine ne va pas faire tomber son verre quoi. Je me redresse rapidement quand il me demande ce qui m'amène ici. " Besoin de sortir, de me balader, de boire un peu " De me défoncer, de m'éclater, d'oublier que ma vie est un sale champ de bataille. Tout ça quoi ! " Et toi ? T'as abandonné le délire de l'homme casanier, un peu homme de cromagnon ? " Cromagnon ou tromignon ? Bonne question. Je souris légèrement. " J'ai abandonné le champagne pour quelque chose de plus... costaud " J'ai abandonné les petites bulles de ce cher Max pour me trouver un homme avec un peu plus de contenance, de force. Et pourquoi pas toi, Phoenix ?